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15/12/2022 | FRANCE | N°20/02634

France | France, Cour d'appel de Pau, Chambre sociale, 15 décembre 2022, 20/02634


PS/SB



Numéro 22/4511





COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale







ARRÊT DU 15/12/2022









Dossier : N° RG 20/02634 - N° Portalis DBVV-V-B7E-HVXC





Nature affaire :



Contestation du motif non économique de la rupture du contrat de travail















Affaire :



[J] [M]



C/



S.A. CONFORAMA FRANCE















Grosse délivrée le

à :













RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R Ê T



Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 15 Décembre 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa d...

PS/SB

Numéro 22/4511

COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 15/12/2022

Dossier : N° RG 20/02634 - N° Portalis DBVV-V-B7E-HVXC

Nature affaire :

Contestation du motif non économique de la rupture du contrat de travail

Affaire :

[J] [M]

C/

S.A. CONFORAMA FRANCE

Grosse délivrée le

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 15 Décembre 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 21 Septembre 2022, devant :

Madame CAUTRES-LACHAUD, Président

Madame SORONDO, Conseiller

Madame PACTEAU, Conseiller

assistées de Madame LAUBIE, Greffière.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

Madame [J] [M]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Maître GALLARDO, avocat au barreau de PAU et Maître GOGUYER-LALANDE de la SCP GOGUYER-LALANDE DEGIOANNI PONTACQ, avocat au barreau de FOIX

INTIMEE :

S.A. CONFORAMA FRANCE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Maître CREPIN de la SELARL LEXAVOUE PAU-TOULOUSE, avocat au barreau de PAU, et Maître D'ALEMAN de la SELAS BRL AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

sur appel de la décision

en date du 20 OCTOBRE 2020

rendue par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE TARBES

RG numéro : 19/00077

EXPOSÉ DU LITIGE

Mme [J] [M] a été embauchée le 4 août 1990 par la société Conforama France suivant contrat à durée indéterminée régi par la convention collective nationale du négoce de l'ameublement.

Elle a occupé en dernier lieu un poste de vendeuse très qualifiée, groupe 4, niveau  1.

Après un avis d'aptitude à la reprise du travail en temps partiel thérapeutique émis par le médecin du travail le 22 avril 2016, deux avenants des 22 avril 2016 et 22 mai 2016 ont organisé une reprise d'activité à temps partiel (17 h 30 par semaine), chacun pour une durée d'un mois.

Du 14 juin 2016 au 30 avril 2018, elle a été placée en arrêt de travail.

Le 10 avril 2018, le médecin du travail l'a déclarée inapte à son poste en ces termes': «'inapte à son poste, apte à un poste à mi-temps sans effort physique, sans position debout prolongée, apte à un poste de type administratif. Elle peut suivre des formations en rapport'».

Le 15 octobre 2018, la société Conforama France lui a proposé 4 postes «'d'hôtesse de caisse et/ou service'» à temps partiel à [Localité 7], [Localité 5] et [Localité 6].

Mme [J] [M] a refusé ces propositions.

Le 12 novembre 2018, la société Conforama France lui a notifié l'impossibilité de la reclasser.

Le 4 décembre 2018, elle a été convoquée à un entretien préalable fixé le 17 décembre suivant.

Le 8 janvier 2019, elle a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Le 17 mai 2019, elle a saisi la juridiction prud'homale.

Par jugement du 20 octobre 2020, le conseil de prud'hommes de Tarbes a :

- dit que le licenciement de Mme [M] repose sur une cause réelle et sérieuse,

- débouté Mme [M] de ses demandes de dommages et intérêts, de préavis, de remboursement de la retenue des salaires versés à tort, et de défaut de versement de cotisation retraite,

- condamné la société Conforama France au paiement de :

. 1 300 € pour délivrance tardive des documents de fin de contrat,

. 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Conforama France aux dépens.

Le 12 novembre 2020, Mme [M] a interjeté appel de ce jugement dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas contestées.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par voie électronique le 6 mai 2021, auxquelles il y a lieu de se référer pour l'exposé des faits et des moyens, Mme [J] [M] demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Conforama France à lui payer la somme de 1.300 € pour délivrance tardive des documents de fin de contrat, la somme de 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

- le réformer pour le surplus,

- statuant à nouveau,

- condamner la société Conforama France à lui payer la somme de 13.000 € à titre de dommages et intérêts pour défaut d'information relative à l'absence de prise en charge de l'arrêt maladie ayant débuté en juillet 2016,

- dire et juger le licenciement dont elle a fait 1'objet dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- en conséquence,

- condamner la société Conforama France à lui payer les sommes suivantes :

. 37.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 3.703,02 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

. 370,30 € au titre des congés payés sur préavis,

- condamner la société Conforama France à lui payer la somme de 9.642 € à titre de dommages et intérêts pour défaut de cotisation retraite sur une partie de l'année 2017,

- condamner la société Conforama France à délivrer les documents de fin de contrat conforme à la décision à intervenir (attestation Pôle Emploi, solde de tout compte et certificat de travail) sous astreinte de 300 € par jour de retard,

- condamner la société Conforama France à lui payer la somme de 3.000 € sur 1e fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par voie électronique le 19 février 2021, auxquelles il y a lieu de se référer pour l'exposé des faits et des moyens, la société Conforama France demande à la cour de':

- constater le sérieux de ses recherches de postes de reclassement,

- constater l'impossibilité de reclassement Mme [J] [M],

- constater la cause réelle et sérieuse du licenciement de Mme [M],

- constater qu'elle a adressé par courrier du 6 février 2019 puis 17 juillet 2019 les documents de fin de contrat de Mme [M] mais qu'ils étaient préalablement mis à sa disposition dans l'entreprise,

- constater que Mme [M] ne justifie pas d'un préjudice en lien avec une remise tardive de documents de fin de contrat,

- constater qu'elle n'est pas responsable de l'absence de versement des indemnités journalières de sécurité sociale et n'avait aucune obligation de prévenir Mme [M] qui a dû être informée directement par la CPAM,

- constater que durant l'arrêt maladie, il n'y a pas de versement de cotisations de retraite mais que les trimestres sont validés sous réserve d'être pris en charge par la sécurité sociale,

- en conséquence,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [M] des demandes suivantes :

. 12.970,32 € au titre du maintien de salaire par erreur et de son retrait sur le solde de tout compte,

. 37.000 € pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 3.703,02 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

. 370,30 € à titre de congés payés sur préavis,

. 9.642 € au titre de dommages intérêts pour défaut de cotisation retraite sur une partie de l'année 2017,

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à verser à Mme [J] [M]':

. 1.300 € pour délivrance tardive des documents de fin de contrat,

. 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [J] [M] à lui verser 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 22 août 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le licenciement

Mme [M] soutient que l'employeur a manqué à son obligation de reclassement en ne lui proposant que des postes éloignés de sa résidence alors que des postes étaient disponibles à [Localité 8]. La société Conforama France le conteste.

L'article L.1226-2 du code du travail énonce «'Lorsque le salarié victime d'une maladie ou d'un accident non professionnel est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l'article L.4624-4, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L.233-1, aux I et II de l'article L.233-3 et à l'article L.233-16 du code de commerce.

Cette proposition prend en compte, après avis du comité social et économique lorsqu'il existe, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur la capacité du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté.

L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.'»

Suivant l'article L.1226-2-1 du code du travail, «'lorsqu'il est impossible à l'employeur de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent à son reclassement.

L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L.1226-2, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.

L'obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l'employeur a proposé un emploi, dans les conditions prévues à l'article L. 1226-2, en prenant en compte l'avis et les indications du médecin du travail.

S'il prononce le licenciement, l'employeur respecte la procédure applicable au licenciement pour motif personnel prévue au chapitre II du titre III du présent livre.'»

En l'espèce, la SA Conforama France justifie que suite à l'avis d'inaptitude du 10 avril 2018':

- Mme [M] a été reçue à un entretien de reclassement le 3 juillet 2018 au cours duquel elle a remis une fiche de mobilité sur laquelle elle a indiqué «'Je ne souhaite pas de mobilité à quelques mois de l'âge de ma retraite'»';

- par courrier du 15 juin 2018, elle a interrogé le médecin du travail relativement à ses recommandations ou contre-indications quant à l'exercice de certaines tâches par Mme [M] ou ses préconisations quant aux mesures individuelles d'adaptation du poste de travail ou d'aménagement du temps de travail';

- en réponse, le médecin du travail a indiqué par courrier du 22 juin 2018 «'Mme [M] est inapte au poste de vendeuse meubles, mais apte à un poste à mi-temps, sans effort physique, sans position debout prolongée. Elle peut travailler à mi-temps sur un poste de type administratif ou accueil, travail assis ou alternance position debout/assis sans effort physique, c'est à dire sans manutention ou charge à porter ou à transférer et sans contact direct ou proche avec la clientèle (risques infectieux)'»';

- par courrier du 15 octobre 2018, elle a proposé à Mme [M] 4 postes d'hôtesse de caisse et/ou services au sein des magasins de [Localité 7], [Localité 5] et [Localité 6], dont 2 de 7 h par semaine, 1 de 8 h 30 par semaine et 1 de 28 h par semaine, et a interrogé le médecin du travail relativement à la compatibilité de ces postes à l'état de santé de Mme [M]';

- par courrier du 18 octobre 2018, le médecin du travail a indiqué que Mme [M] était apte à un poste à mi-temps de type administratif, que le poste de 28 h par semaine était contre-indiqué et qu'elle pouvait médicalement travailler sur les autres postes.

- par courrier du 20 octobre 2018, Mme [M] a refusé ces postes au motif de leur trop grand éloignement de son domicile.

Il résulte des pièces 13 (bourse de l'emploi à septembre 2018) de la SA Conforama France et 19 de Mme [M] (bourse de l'emploi au 16 janvier 2019) que les recherches de reclassement n'ont été menées que jusqu'en septembre 2018, et que le 11 décembre 2018, donc antérieurement au licenciement, trois postes étaient disponibles au sein du magasin de [Localité 8], à savoir deux postes d'hôtesse SAV de 7 h par semaine et un poste d'hôtesse de caisse et/ou de services de 24 h par semaine. Au vu du courrier du médecin du travail du 18 octobre 2018, à tout le moins le poste d'hôtesse de caisse et/ou services pouvait être rendu compatible, sous réserve de la mise en 'uvre de mesures d'aménagement du temps de travail, avec l'état de santé de Mme [M]. Ainsi, la société Conforama France n'a pas satisfait à l'obligation de reclassement et le licenciement est sans cause réelle et sérieuse. Le jugement sera infirmé sur ce point.

Sur les conséquences du licenciement

L'indemnité de préavis est due au salarié déclaré inapte à son poste dont le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison du manquement de l'employeur à son obligation de reclassement. La durée du préavis étant de deux mois en application de l'article L.1234-1 du code de travail, Mme [M] a droit, pour un salaire de 1.851,51 € d'après l'attestation Pôle Emploi, à une indemnité compensatrice de préavis de 3.703,02 €, outre 370,30 au titre des congés payés afférents.

Mme [M] avait 28 ans d'ancienneté dans une entreprise employant habituellement plus de 10 salariés. En application de l'article L.1235-3 du code du travail, en l'absence de réintégration, son licenciement sans cause réelle et sérieuse ouvre droit à une indemnité dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés dans le tableau ci-dessous':

Ancienneté du salarié dans l'entreprise

(en années complètes)

Indemnité minimale

(en mois de salaire brut)

Indemnité maximale

(en mois de salaire brut)

28

3

19,5

Mme [M] justifie que postérieurement à la perte de son emploi, elle a été en situation de chômage indemnisé jusqu'en mars 2021 et, au regard de son âge (64 ans) et de son ancienneté, il est raisonnable d'indemniser celle-ci à hauteur de 12 mois de salaire, soit 22.200 €.

Il sera ordonné à la société Conforama France de remettre à Mme [M] des documents de fin de contrat rectifiés conformément au présent arrêt. Il n'est pas nécessaire de prononcer une astreinte.

En application de l'article L.1235-4 du code du travail, il doit être ordonné le remboursement par l'employeur aux organismes intéressés des indemnités de chômage versées à la salarié licenciée, du jour de son licenciement au jour du présent arrêt, dans la limite de deux mois d'indemnités.

Sur la demande d'indemnisation pour remise tardive des documents de fin de contrat

A l'issue du contrat de travail, l'employeur est tenu de remettre au salarié un certificat de travail, un reçu pour solde de tout compte et une attestation lui permettant d'exercer ses droits à un revenu de remplacement auprès de son Pôle Emploi. Ces documents sont quérables et non portables. La non remise ou la remise tardive de ces documents ouvre droit à indemnisation lorsqu'elle occasionne un préjudice.

En l'espèce, l'employeur ne caractérise pas la délivrance de ces documents antérieurement au 13 juillet 2019. En effet, le courrier qu'il invoque en date du 6 février 2019 est relatif à la retenue pratiquée sur l'indemnité de licenciement et ne mentionne l'envoi d'aucun document en annexe, et le certificat de travail annexé au courrier du 13 juillet 2019 est en date du 16 juillet 2019. De même, la télétransmission de l'attestation d'assurance chômage aux organismes gestionnaires de l'assurance chômage ne dispense pas l'employeur de la délivrance d'un exemplaire au salarié. Par ailleurs, Mme [M] établit que, du fait de la remise tardive de l'attestation Pôle Emploi, son droit à indemnisation chômage à compter du 23 avril 2019 n'a été effectivement ouvert que le 6 août 2019, soit avec plus de trois mois de retard, période pendant laquelle elle est demeurée sans revenu. Elle a donc effectivement subi un préjudice que le premier juge a raisonnablement évalué à la somme de 1.300 €. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur la demande d'indemnisation pour défaut de cotisation retraite sur une partie de l'année 2017

Il résulte de l'attestation de paiement des indemnités journalières par la sécurité sociale en date du 18 décembre 2018 produite en pièce 28 par Mme [M] que le droit à indemnités journalières maladie a cessé à compter du 13 juin 2016, étant observé qu'en application des articles L.323-1 et R.323-1 du code de la sécurité sociale, hors le cas d'une affection de longue durée, le nombre maximal d'indemnités journalières que peut recevoir l'assuré pour une quelconque période de trois ans est de 360. Suivant l'article 36 de la convention collective nationale du négoce de l'ameublement, l'indemnisation complémentaire de l'employeur est soumise à une condition de prise en charge de l'arrêt maladie par la sécurité sociale. Ainsi, Mme [M] n'avait droit durant la période concernée ni à des indemnités journalières de la sécurité sociale, ni à des indemnités complémentaires de l'employeur susceptibles de donner lieu à des cotisations retraite. Dès lors, elle est mal fondée à invoquer un manquement de l'employeur à son obligation de cotiser. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur la demande d'indemnisation pour défaut d'information relativement à l'absence de prise en charge de l'arrêt maladie

Il ressort de la pièce 21 produite par la SA Conforama':

- qu'elle a trop versé à Mme [M] entre le 13 juin 2016 et le 9 avril 2018, au total 30.139,23 €, dont':

. 16.043,40 € d'indemnités journalières de sécurité sociale,

. 4.584,01 € d'indemnités complémentaires au titre du maintien de salaire,

. 9.511,82 € d'indemnités journalières prévoyance,

- qu'elle a retenu sur le solde de tout compte une somme de 16.821,07 € en paiement partiel de la somme ci-dessus,

- qu'elle souhaite récupérer le solde dû.

Mme [M] soutient que l'employeur a commis une faute en continuant à lui verser «'son salaire'» alors qu'il ne percevait pas d'indemnités journalières de la sécurité sociale, la laissant dans la croyance que ses arrêts maladie étaient toujours indemnisés alors que tel n'était pas le cas. Elle n'a pas non plus reçu aucune information de la CPAM et, recevant son salaire tous les mois, elle n'a jamais cru utile de télécharger les bordereaux d'indemnités journalières sur le site Amelie.fr. Si elle avait su que les arrêts maladie n'étaient plus indemnisés, elle aurait été en mesure de solliciter dès alors une visite de reprise. Il en ressort qu'elle fonde sa demande d'indemnisation sur le caractère fautif du paiement indu et l'erreur provoquée relativement à la croyance d'un droit à indemnisation maladie par la sécurité sociale.

La SA Conforama France fait valoir que l'information dont s'agit incombait à la sécurité sociale et non à elle.

En application de l'article 1302-1 du code civil, celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû doit le restituer à celui de qui il l'a indûment reçu. En matière de paiement indu, la faute de celui qui paye engage la responsabilité de son auteur envers celui qui reçoit lorsqu'elle a causé à celui-ci un préjudice. le remboursement mis à la charge de celui qui reçoit doit alors être diminué du montant de ce préjudice.

En l'espèce, la SA Conforama France a commis une faute en payant pendant près de deux ans à Mme [M] des indemnités journalières de sécurité sociale et des indemnités complémentaires, alors qu'elle n'a reçu strictement aucun paiement de la sécurité sociale. Dans son courrier du 6 février 2019 (pièce 21), elle invoque la subrogation prévue par l'article R.323-11 du code de la sécurité sociale alors que celle-ci est au plus d'une durée équivalente à celle du maintien de salaire qui est au plus, d'après l'article 36 de la convention collective nationale du négoce de l'ameublement, pour un salarié de 5 à 27 ans d'ancienneté telle Mme [M] lors des paiements par l'employeur, de 165 jours seulement. Dans ce même courrier, elle allègue ensuite que la journée du 31 juillet 2016 n'a pas été couverte par un arrêt de travail de sorte que le système de paie a déclenché de nouveaux maintiens de salaire, alors qu'il lui incombe de se doter d'outils efficients et que l'un des avis de prolongation d'arrêt de travail qu'elle produit en pièce 4, en date du 28 juin 2016, démontre que Mme [M] a été en arrêt maladie du 28 juin 2016 au 28 août 2016 et donc le 31 juillet 2016. Il est ainsi caractérisé que la SA Conforma France a commis une faute dans les paiements réalisés à compter du 13 juin 2016. Cette faute cause un préjudice à Mme [M], qui est tenue de rembourser une somme particulièrement importante et a été induite en erreur sur son droit à indemnisation maladie par la sécurité sociale, de sorte qu'elle n'a pas sollicité dès la fin de celui-ci une visite de reprise. Elle a pour autant elle-même fait preuve de négligence en ne s'inquiétant pas, également pendant plus de deux ans, de ne plus être destinataire d'attestations de paiement d'indemnités journalières de la sécurité sociale. Son préjudice sera évalué à hauteur du tiers de l'indu, soit 10.046,31 €, somme que l'employeur sera condamnée à lui payer.

Sur les autres demandes

La SA Conforama France, qui succombe, sera condamnée aux dépens exposés en appel, ainsi qu'à payer à Mme [M] une somme de 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et déboutée de sa demande de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Infirme le jugement du conseil de prud'hommes de Tarbes du 20 octobre 2020 hormis sur les demandes d'indemnisation pour délivrance tardive des documents de fin de contrat et pour défaut de cotisation retraite, et sur les dépens de première instance,

Statuant de nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,

Dit que le licenciement de Mme [J] [M] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne la SA Conforama France à payer à Mme [J] [M] les sommes de':

- 3.703,02 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 370,30 au titre des congés payés afférents,

- 22.200 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 10.046,31 € en réparation du préjudice résultant du caractère fautif du paiement indu à compter du 13 juin 2016 d'indemnités journalières de sécurité sociale, d'indemnités complémentaires au titre du maintien de salaire et d'indemnités journalières prévoyance,

Ordonne à la société Conforama France de remettre à Mme [J] [M] des documents de fin de contrat rectifiés conformément au présent arrêt,

Ordonne le remboursement par la SA Conforama France aux organismes intéressés des indemnités de chômage versées à Mme [J] [M], du jour de son licenciement au jour du présent arrêt, dans la limite de deux mois d'indemnités,

Condamne la SA Conforama France aux dépens exposés en appel,

Condamne la SA Conforama France à payer à Mme [J] [M] une somme de 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et la déboute de sa demande de ce chef.

Arrêt signé par Madame CAUTRES-LACHAUD, Présidente, et par Madame LAUBIE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/02634
Date de la décision : 15/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-15;20.02634 ?
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