SF/CD
Numéro 22/04191
COUR D'APPEL DE PAU
1ère Chambre
ARRÊT DU 29/11/2022
Dossier : N° RG 22/02659 - N° Portalis DBVV-V-B7G-IKSQ
Nature affaire :
Demande en réparation des dommages causés par des véhicules terrestres à moteur
Affaire :
SNC LABENNE ROUGIER
C/
[M] [H],
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE PAU-PYRENEES,
FONDS DE GARANTIE DES ASSURANCES OBLIGATOIRES DE DOMMAGES,
Mutuelle OCIANE
Grosse délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 29 Novembre 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 03 Octobre 2022, devant :
Madame de FRAMOND, magistrate chargée du rapport,
assistée de Madame DEBON, faisant fonction de greffière présente à l'appel des causes,
Madame de FRAMOND, en application des articles 805 et 907 du code de procédure civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :
Madame DUCHAC, Présidente
Madame ROSA-SCHALL, Conseillère
Madame de FRAMOND, Conseillère
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANTE :
SNC LABENNE ROUGIER
[Adresse 10]
[Localité 3]
Représentée par Maître CREPIN de la SELARL LEXAVOUE, avocat au barreau de PAU
Assistée de Maître BEAUMONT de la SELARL Cabinet Brigitte BEAUMONT, avocat au barreau de PARIS
INTIMEES :
Madame [M] [H]
[Adresse 9]
[Localité 6]
Représentée par Maître MERRIEN, avocat au barreau de PAU
Assistée de Maître GUILLERMOU de la SELARL PROXIMA, avocat au barreau de TOULON
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE PAU-PYRENEES
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée et assistée de Maître BARNABA, avocat au barreau de PAU
FONDS DE GARANTIE DES ASSURANCES OBLIGATOIRES DE DOMMAGES prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 4]
[Localité 8]
Assigné
Mutuelle OCIANE
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 7]
[Localité 2]
Assignée
sur appel de la décision
en date du 27 AVRIL 2021
rendue par le TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MONT DE MARSAN
RG numéro : 19/00991
EXPOSE DU LITIGE
En 1974, Mme [M] [H], alors âgée de 18 ans, a été victime d'un accident de la circulation, alors qu'elle était transportée dans un véhicule heurté par un camion appartenant à la société LABENNE ROUGIER.
Elle a été indemnisée par un jugement sur intérêts civils du tribunal correctionnel de Mont-de-Marsan du 12 octobre 1977.
Dans le cadre d'une procédure en aggravation, elle était de nouveau indemnisée par jugement du 17 décembre 1992 du Tribunal de Grande Instance de Mont-de-Marsan qui imputait la séropositivité à l'hépatite C à une transfusion sanguine pratiquée dans le cadre des soins médicaux liés à l'accident.
Le tiers responsable, tant pour la procédure initiale que pour l'aggravation, était garanti par son assureur : le Groupement Français d'Assurances, condamné in solidum à l'indemnisation de la victime aux côtés de son assurée.
Le 12 juillet 2012, Madame [H] saisissait de nouveau le juge des référés près le tribunal de grande instance de Mont-de-Marsan, dans le cadre d'une nouvelle procédure en aggravation.
Le Fonds de Garantie des Assurances Obligatoires (FGAO) intervenait à l'instance en lieu et place de l'assureur mis en cause initialement qui avait vu son agrément lui être retiré après la liquidation judiciaire puis la dissolution de la société qui l'avait rachetée.
Par décision du 11 octobre 2012, le juge des référés ordonnait une expertise médicale. Le Dr [R] expert désigné, déposait son rapport le 3 mars 2013.
Sur la base de ce rapport, Mme [M] [H] obtenait une indemnisation de son préjudice par jugement du 8 juillet 2016 qui condamnait la SNC LABENNE ROUGIER à lui payer la somme de 90 466,42 € et à payer à la CPAM la somme de 48 603,41 €, le FGAO étant chargé par le tribunal de régler les indemnités dues à Mme [M] [H] et à sa famille à l'exception des sommes dues à la CPAM.
Suite à une nouvelle évolution de ses pathologies constituée par un dysfonctionnement temporo-mandibulaire bilatéral avec une arthrose de l'articulation et un dysfonctionnement temporo-madibulaire gauche par luxation méniscale, une expertise amiable était organisée et le Dr [G] mandaté par le FGAO, en présence du Dr [O] assistant Mme [H] et avec le concours du Dr [P], sapiteur stomatologue, dont le rapport établi le 15 juin 2018 date le début de l'aggravation au 17 décembre 2014. Une provision de 5 000 € a alors été versée par le FGAO à Mme [M] [H].
Le FGAO se fondant ultérieurement sur l'avis rendu le 2 janvier 2019 par un autre médecin, le Dr [L], refusait de donner suite à une indemnisation amiable, contestant l'imputation de cette pathologie du 17 décembre 2014 à l'accident initial.
Par actes des 10 et 11 septembre 2019, Mme [M] [H] a assigné la SNC LABENNE ROUGIER, la CPAM et la MUTUELLE OCIANE devant le tribunal de grande instance de Mont-de-Marsan aux fins d'indemnisation des conséquences de l'aggravation de son préjudice.
Par conclusions du 4 novembre 2019, le FGAO est intervenu volontairement à l'instance.
Par jugement du 27 avril 2021, le tribunal judiciaire, a notamment :
Condamné la SNC LABENNE ROUGIER à payer à Mme [M] [H] les sommes suivantes en réparation de ses différents préjudices :
- 74,20 € au titre des dépenses de santé actuelles ;
- 8 171,76 € au titre des frais divers passés ;
- 74 358,79 € au titre des frais divers futurs ;
- 7 200 € au titre du déficit fonctionnel temporaire ;
- 17 160 € au titre du déficit fonctionnel permanent ;
- 3 000 € au titre des souffrances endurées ;
- 2 000 € au titre du préjudice d'agrément ;
- 400 € au titre des dépenses de santé futures ;
Dit que ces sommes emporteront intérêts au double du taux légal à compter du 6 février 2019 en application des articles 1343-2 du code civil et L 211-13 du code des assurances ;
Dit qu'il y aura lieu à déduire du total des sommes énumérées ci-dessus la provision déjà versée pour un montant de 5 000 € ;
Condamné la SNC LABENNE ROUGIER à payer à la CPAM de Pau la somme de 25 570,10 € au titre de sa créance calculée au regard du relevé de débours définitif ;
Condamné la SNC LABENNE ROUGIER à payer à la CPAM de Pau la somme de 1 080 € au titre de l'indemnité forfaitaire ;
Débouté la SNC LABENNE ROUGIER de l'ensemble de ses demandes ;
Débouté le FONDS DE GARANTIE DES ASSURANCES OBLIGATOIRES DE DOMMAGES de l'ensemble de ses demandes ;
Condamné la SNC LABENNE ROUGIER à payer à Madame [M] [H] la somme de 2 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamné la SNC LABENNE ROUGIER à payer à la CPAM de Pau la somme de 1 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamné la SNC LABENNE ROUGIER aux entiers frais et dépens dont distraction au profit de Maître DULHOSTE ;
Dit que ladite décision est opposable au FONDS DE GARANTIE DES ASSURANCES OBLIGATOIRES DE DOMMAGES, à la CPAM de [Localité 5] et à la Mutuelle OCIANE appelés en déclaration de jugement commun ;
Pour rendre cette décision, le 1er juge a rejeté la demande de mise hors de cause de la SNC LABENNE ROUGIER dès lors qu'elle est responsable de l'accident et doit être mise en cause avec le FGAO sur le fondement des articles R 421-13 et R 421-15 du code des assurances, et a retenu notamment sur l'imputabilité de l'aggravation que la procédure d'expertise amiable réalisée en 2018 et les règles jurisprudentielles édictées en la matière, permettaient de déclarer les conclusions du rapport du docteur [G] opposables au FGAO, le médecin désigné par ce Fonds de Garantie ayant été associé à toutes les étapes d'élaboration du rapport déposé (sapiteur, réunion d'expertise), alors qu'au contraire, le docteur [L] avait émis des conclusions non-contradictoires sans avoir rencontré Mme [H], et son avis ne pouvait donc être sérieusement retenu en terme probatoire.
La SNC LABENNE ROUGIER a relevé appel par déclaration du 10 juin 2021, critiquant le jugement et demandant sa réformation en ce qu'il a condamné la SNC LABENNE ROUGIER à payer à Mme [H] l'indemnisation de son préjudice corporel subi en aggravation de son état de santé, augmentée des intérêts au double du taux légal à compter du 6 février 2019 ainsi que 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'il l'a également condamnée à payer à la CPAM de [Localité 5] le montant de sa créance, l'indemnité forfaitaire et la somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions notifiées le 10 septembre 2021, la SNC LABENNE ROUGIER demande à la Cour de réformer le jugement du 27 avril 2021en ce qu'il a condamné la société LABENNE ROUGIER à réparer l'intégralité des préjudices subis par Mme [H] et :
Et statuant à nouveau, de :
- condamner le FONDS DE GARANTIE DES ASSURANCES OBLIGATOIRES DE DOMMAGES à supporter seul, directement et intégralement toutes les conséquences dommageables liées à l'accident de la circulation dont a été victime Mme [H] le 17 octobre 1974 et à l'aggravation de son état de santé consécutif à cet accident ;
- ordonner que l'indemnisation allouée à Mme [H] et à la CPAM de [Localité 5] leur sera versée par le FONDS DE GARANTIE DES ASSURANCES OBLIGATOIRES DE DOMMAGES ;
- débouter Mme [H] et la CPAM de [Localité 5]-Pyrénées de l'ensemble de leurs demandes dirigées à l'encontre de la SNC LABENNE ROUGIER ;
- ordonner la mise hors de cause de la SNC LABENNE ROUGIER ;
- condamner le FONDS DE GARANTIE DES ASSURANCES OBLIGATOIRES DE DOMMAGES à payer à la SNC LABENNE ROUGIER la somme de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les entiers dépens de 1ère instance et d'appel.
La SNC LABENNE ROUGIER fait valoir, se fondant sur les articles L421-9 du code des Assurances qu'en l'absence de l'assureur défaillant de l'appelante, l'indemnisation aurait dû être mise à la charge du FONDS DE GARANTIE DES ASSURANCES OBLIGATOIRES DE DOMMAGES (FGAO) substitué à ce dernier. Le FGAO n'est pas intervenu en l'espèce sur le fondement des articles R421-13 et R421-15 du code des assurances comme l'a retenu le 1er juge, à titre subsidiaire, en raison du défaut d'assurance du responsable mais il est intervenu, à titre principal, en sa qualité de substitué à l'assureur disparu, ce que le FGAO a admis et en prenant par courrier du 20 juillet 2017 l'engagement d'indemniser l'intégralité des conséquences de l'accident et des aggravations futures.
Le montant de l'indemnisation allouée à Madame [H] n'est pas discuté devant la Cour, de même que le montant de celle allouée à la CPAM de [Localité 5].
Par ordonnance du 15 novembre 2021 enregistrée sous le numéro 21/01932, la déclaration d'appel de la SNC LABENNE ROUGIER a été déclarée caduque à l'égard de la MUTUELLE OCIANE et du FGAO.
Par ordonnance du 22 mars 2022, cette décision a été réformée au vu des pièces produites.
Dans ses dernières conclusions notifiées le 24 août 2022, Mme [M] [H], intimée, demande à la Cour de :
- rejeter l'intégralité des demandes fins et conclusions des appelants ;
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement du 27 avril 2021.
Et en tout état de cause :
- condamner la SNC LABENNE ROUGIER à verser à Mme [H] la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner le tiers responsable et sa compagnie d'assurances aux entiers dépens y compris de l'appel dont distraction sera faite au profit de Maître Marie MERRIEN pour ceux dont elle a fait l'avance.
Au soutien de ses demandes, Mme [M] [H] fait valoir, comme le 1er juge l'a retenu, que l'accident du 17 octobre 1974 a été causé par un camion appartenant à la SNC LABENNE ROUGIER et que cette société est donc responsable. Mme [H] n'aurait pas pu assigner directement le FGAO (articles R421-13 à R421-15 du code des assurances). La mise en cause de la société LABENNE ROUGIER était donc obligatoire et indispensable.
Elle soutient que le rapport d'expertise médicale amiable est bien opposable à cette société, la jurisprudence a régulièrement précisé qu'un rapport d'expertise judiciaire est opposable à un tiers à l'instance au cours de laquelle il a été produit si, d'une part, il est régulièrement versé aux débats et soumis à la discussion contradictoire des parties et si, d'autre part, il est corroboré par d'autres éléments de preuve comme en l'espèce. Par ailleurs, il est également opposable au FGAO qui y a participé et les conclusions sur l'imputabilité de l'aggravation qu'elle invoque lui sont d'autant plus opposables qu'en vertu des règles de l'Estoppel, il ne peut se prévaloir au détriment de Mme [H] d'une position contraire à celle qu'il a prise antérieurement à son égard en lui versant une provision. Elle demande la confirmation de l'évaluation de tous ses préjudices.
Dans ses dernières conclusions notifiées le 8 octobre 2021, la CPAM Pau- Pyrénées, intimée, demande à la cour de :
- rejeter l'intégralité des demandes, fins et conclusions de l'appelante ;
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement en date du 27 avril 2021.
Y ajoutant,
- condamner la SNC LABENNE ROUGIER au paiement d'une somme supplémentaire de 300 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- condamner la SNC LABENNE ROUGIER aux dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Maître BARNABA en vertu de l'article 699 du code de procédure civile.
La CPAM reprend à son compte l'argumentation de Madame [H] mais fait valoir que postérieurement à sa constitution, la CPAM de [Localité 5]-Pyrénées a reçu du FGAO le 30 août 2021 les fonds alloués par le jugement précité, à savoir, en principal la somme de 25 570,10 €, celle de 1 080 € au titre de l'indemnité forfaitaire et 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
L'affaire initialement enrôlée sous le numéro 21/01932 a fait l'objet d'une réinscription sous le numéro 22/02659 et la clôture des débats a été prononcée le jour des plaidoiries le 3 octobre 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Le débat entre les parties ne porte que sur le principe de la condamnation prononcée contre la SNC LABENNE ROUGIER à indemniser le préjudice de Mme [H] et de verser à la CPAM le remboursement de ses frais exposés pour elle à l'occasion de l'accident de la circulation dont elle a été victime le 17 octobre 1974.
En vertu de l'article L211-1 du code des assurances reprenant l'article 1er du décret 58-208 du 27 février 1958 instituant une obligation d'assurance en matière de circulation terrestre à moteur, toute personne physique ou toute personne morale autre que l'État, dont la responsabilité civile peut être engagée en raison de dommages subis par des tiers résultant d'atteintes aux personnes ou aux biens dans la réalisation desquels un véhicule est impliqué, doit, pour faire circuler celui-ci, être couverte par une assurance garantissant cette responsabilité, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'État.
Selon l'article L421-9 I du même code, le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages institué par l'article L. 421-1 est chargé de protéger les personnes assurées, souscriptrices, adhérentes ou bénéficiaires de prestations de contrats d'assurance dont la souscription est rendue obligatoire par les articles L. 211-1 [...], contre les conséquences du retrait d'agrément d'une entreprise d'assurance couvrant sur le territoire de la République française les risques de responsabilité civile résultant de l'emploi de véhicules terrestres à moteur et de leurs remorques et semi-remorques [...]
Selon l'article L421-9-4 lorsque le fonds de garantie prend en charge, pour le compte de l'entreprise en liquidation, le règlement des dommages mentionnés aux articles et L 242-1, le premier alinéa du III de l'article L. 211-1 est applicable (les indemnités doivent résulter soit d'une décision juridictionnelle exécutoire, soit d'une transaction ayant reçu l'assentiment du fonds de garantie).
Selon l'article R421-50 du code des assurances, lorsque, à la suite du retrait d'agrément d'une entreprise d'assurance, le fonds de garantie prend en charge l'indemnisation des dommages résultant d'atteintes à la personne et des dommages aux biens assurés au titre des garanties d'assurance dont la souscription est rendue obligatoire par les articles L. 211-1 ou L. 242-1, cette prise en charge s'effectue dans les conditions et limites de garantie prévues par les contrats d'assurance souscrits auprès de cette entreprise. [...]
Le fonds de garantie est substitué à l'assureur pour les obligations et droits mentionnés à l'article R. 211-13.
Il s'agit donc de dispositions spéciales prévoyant une intervention du FGAO au lieu et place de l'assureur radié.
En l'espèce, la SNC LABENNE ROUGIER était assurée pour ses véhicules auprès du GROUPEMENT FRANÇAIS D'ASSURANCE, repris par la société INDEPENDANT INSURANCE SA mais qui a fait l'objet d'une dissolution de plein droit par décision de la Commission de contrôle des assurances avec retrait de tous ses agréments le 2 juillet 2001 en application des articles L326-1 et suivant du code des assurances. La SNC LABENNE ROUGIER ne disposait donc plus d'une assurance pour couvrir sa responsabilité dans l'accident de 1974 et notamment les aggravations postérieures de l'état de santé de Mme [H].
Il résulte d'un courrier du 20 juillet 2017 adressé par le FGAO au Conseil de la SNC LABENNE ROUGIER, que le FGAO reconnaît que le tribunal dans son jugement de 2016, l'avait à tort écarté des remboursements dus à la CPAM, dès lors qu'il intervenait dans le cadre des dispositions de l'article L421-9 du code des assurances, qu'il devait donc rembourser ses débours à la CPAM.
Il n'est pas contesté, et cela ressort des pièces du dossier et encore des dernières conclusions de la CPAM, que celle-ci a été payée le 30 août 2021 directement par le FGAO des sommes lui revenant en vertu du jugement déféré rendu le 27 avril 2021, et donc que le FGAO n'a jamais contesté devoir indemniser le préjudice de Mme [H], même si devant le premier juge, il a contesté l'imputation de la dernière aggravation à l'accident initial et le montant des sommes réclamées.
Pour autant, même si le FGAO intervient au lieu et place de l'assureur qui a vu son agrément retiré, cette intervention n'interdit en rien à la victime de solliciter aussi la condamnation de l'auteur de son dommage à l'indemniser de son préjudice, comme elle peut le faire en présence d'un assureur couvrant l'assuré responsable du dommage.
Or, la SNC LABENNE ROUGIER a été déclarée civilement responsable de son préposé M. [I] auteur de l'accident dont a été victime Mme [H] par jugement du tribunal correctionnel du 1er octobre 1975.
Cette responsabilité civile justifie pleinement la mise en cause de la SNC LABENNE ROUGIER par Mme [H] et sa condamnation à réparer le préjudice résultant de l'aggravation de son état, indépendamment de l'intervention du FGAO qui se substitue à son assureur radié.
Ainsi comme le prévoit l'article R421-15 du code des assurances, qui ne distingue pas la cause de l'intervention de FGAO, le fonds de garantie peut intervenir même devant les juridictions répressives et même pour la première fois en cause d'appel, en vue, notamment, de contester le principe ou le montant de l'indemnité réclamée, dans toutes les instances engagées entre les victimes d'accidents corporels ou leurs ayants droit, d'une part, les responsables ou leurs assureurs, d'autre part. Il intervient alors à titre principal et peut user de toutes les voies de recours ouvertes par la loi. En aucun cas, cette intervention ne peut motiver une condamnation conjointe ou solidaire du fonds de garantie et du responsable.
La jurisprudence constante interdit de condamner le FGAO à payer les sommes indemnitaires à la victime.
Si le FGAO se substitue de plein droit à l'assureur radié pour indemniser la victime, cette substitution prévue par l'article L421-9 n'exclut en rien le principe de la condamnation du responsable de l'accident à indemniser la victime de son préjudice.
En conséquence, le jugement déféré doit être infirmé uniquement en ce qu'il a dit que la décision était opposable au FGAO, alors que celui-ci était partie à l'instance et représenté et doit être confirmé en toutes ses autres dispositions y compris sur les dispositions au titre de l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens.
La cour ajoute par contre que le FGAO doit prendre en charge le versement des sommes allouées par le tribunal à Mme [H] et à la CPAM.
En outre, la Cour condamne la SNC LABENNE ROUGIER à payer pour les frais d'appel, une somme de 300 € à la CPAM de [Localité 5]-Pyrénées et une somme de 1 000 € à Mme [H] et condamne la SNC LABENNE ROUGIER aux dépens de la procédure d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire,
Confirme le jugement rendu le 27 avril 2021 en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a déclaré le jugement opposable au Fonds de Garantie des Assurances Obligatoires de Dommages ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit que le Fonds de Garantie des Assurances prendra en charge l'indemnisation de Mme [M] [H] au titre de ses préjudices résultant de l'aggravation de son état et fixée par le jugement du 27 avril 2021 et versera à la CPAM de [Localité 5]-Pyrénées le montant des sommes allouées par ledit jugement';
Condamne la SNC LABENNE ROUGIER à payer à la CPAM de [Localité 5]-Pyrénées la somme de 300 € et à Mme [M] [H] la somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SNC LABENNE ROUGIER aux dépens d'appel dont distraction au profit de Maître Marie MERRIEN et de Maître BARNABA en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Mme DUCHAC, Présidente, et par Mme DEBON, faisant fonction de Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,
Carole DEBON Caroline DUCHAC