La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/11/2022 | FRANCE | N°21/00131

France | France, Cour d'appel de Pau, 2ème ch - section 1, 29 novembre 2022, 21/00131


JG/ND



Numéro 22/4215





COUR D'APPEL DE PAU

2ème CH - Section 1







ARRET DU 29/11/2022







Dossier : N° RG 21/00131 - N° Portalis DBVV-V-B7F-HXVL





Nature affaire :



Demande du locataire tendant à la diminution du loyer ou des charges, et/ou à la résiliation du bail, et/ou à des dommages-intérêts, en raison de troubles de jouissance















Affaire :



[S] [L]





C/



[V] [G]

[B] [H] épouse [G]





















Grosse délivrée le :

à :











RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R E T



Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 29...

JG/ND

Numéro 22/4215

COUR D'APPEL DE PAU

2ème CH - Section 1

ARRET DU 29/11/2022

Dossier : N° RG 21/00131 - N° Portalis DBVV-V-B7F-HXVL

Nature affaire :

Demande du locataire tendant à la diminution du loyer ou des charges, et/ou à la résiliation du bail, et/ou à des dommages-intérêts, en raison de troubles de jouissance

Affaire :

[S] [L]

C/

[V] [G]

[B] [H] épouse [G]

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 29 novembre 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 04 Octobre 2022, devant :

Madame Joëlle GUIROY, magistrat chargé du rapport,

assisté de Madame SAYOUS, Greffière présente à l'appel des causes,

Joëlle GUIROY, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries, en présence de Jeanne PELLEFIGUES et en a rendu compte à la Cour composée de :

Madame Jeanne PELLEFIGUES, Présidente

Madame Joëlle GUIROY, Conseillère

Monsieur Marc MAGNON, Conseiller

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANT :

Monsieur [S] [L]

né le 30 Janvier 1985 à [Localité 3]

de nationalité française

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Marina CORBINEAU de la SELARL GARDACH & ASSOCIÉS, avocat au barreau de BAYONNE

INTIMES :

Monsieur [V] [G]

né le 29 Mars 1978 à [Localité 5]

de nationalité française

[Adresse 4]

[Localité 5]

Madame [B] [H] épouse [G]

née le 10 Juillet 1983 à [Localité 3]

de nationalité française

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représentés par Me Olivier HAMTAT de la SELARL DALEAS-HAMTAT-GABET, avocat au barreau de PAU

Assistés de Me Antoine MOUTON (SCP GARMENDIA-MOUTON), avocat au barreau de BAYONNE

sur appel de la décision

en date du 15 DECEMBRE 2020

rendue par le JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DE BAYONNE

FAITS - PROCÉDURE - PRÉTENTIONS et MOYENS DES PARTIES

Par acte sous seing privé du 9 novembre 2017, Monsieur [V] [G] et Madame [B] [H] épouse [G] ont donné en location à Monsieur [S] [L] un appartement sis au rez-de-chaussée d'une maison à [Localité 5] moyennant un loyer de 620 euros avec effet au 1er décembre 2017.

Monsieur [S] [L] a quitté les lieux le 23 août 2018.

Par acte d'huissier du 13 juin 2019, Monsieur [S] [L], reprochant l'état d'humidité du logement loué, a assigné Monsieur et Madame [G] devant le juge des contentieux de la protection de Bayonne aux fins de l'entendre :

- condamner Monsieur et Madame [V] [G] au paiement de la somme de 9.300 euros au titre de son préjudice matériel,

- les condamner au paiement de la somme de 3.410 euros au titre de son préjudice de jouissance,

- les condamner au paiement de la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens,

- ordonner l'exécution provisoire.

En défense, Monsieur [V] [G] et Madame [B] [H] épouse [G] ont demandé au juge des contentieux de la protection, à titre principal, de débouter Monsieur [S] [L] de ses prétentions et à titre subsidiaire de réduire le montant des indemnisations sollicitées ainsi qu'en tout état de cause de le condamner au paiement de la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens et enfin de dire n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire.

Par jugement en date du 15 décembre 2020 auquel il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des faits et des prétentions et moyens initiaux des parties, le juge des contentieux de la protection de Bayonne a :

- condamné Monsieur et Madame [V] [G] à payer à Monsieur [S] [L] la somme de 3.300 euros avec intérêts au taux légal à compter de ce jour,

- condamné Monsieur et Madame [V] [G] au paiement de la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Par déclaration au greffe du 14 janvier 2021, [S] [L] a fait appel du jugement.

SUR CE :

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 23 juillet 2021, auxquelles ils convient de se référer pour l'exposé développé des faits et de ses moyens, Monsieur [S] [L] demande à la cour de :

Vu les dispositions des articles 1231-1 et 1719 et suivants du Code civil,

Vu l'article 6 de la loi du 6 juillet 1989,

Vu les dispositions de l'article 515 du Code de procédure civile,

Vu les pièces versées aux débats,

- dire et juger Monsieur [L] recevable et bien fondé en ses demandes ;

- infirmer le jugement en ce qu'il a retenu un partage par moitié des responsabilités et en ce qu'il a limité à la somme de 3.300 € l'indemnisation due par les consorts [G] à Monsieur [L] ;

Statuant à nouveau,

- condamner Monsieur et Madame [G] à lui payer la somme de 9.300€ au titre des pertes matérielles subies ;

- les condamner à lui payer la somme de 3.410 € au titre du préjudice de jouissance subi ;

- les condamner à lui payer la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- les condamner aux entiers dépens de la procédure d'appel.

Monsieur [L] conteste la décision du premier juge en ce qu'il a retenu un partage de responsabilité par moitié comme étant à l'origine des désordres dus à l'humidité persistante dans l'appartement qu'il avait pris à bail auprès des époux [G] et en ce qu'il a, de ce fait, limité ses droits à indemnisation et indemnités.

Il soutient que dès son entrée dans les lieux, le 1er décembre 2017, il a constaté que le logement souffrait d'une humidité se traduisant par des odeurs puis des traces de moisissures, ce qui l'a conduit, en juin 2018, à faire dresser un constat amiable de dégâts des eaux tandis que son assureur, la MAIF, mandatait le cabinet Alteo afin de procéder à la recherche de fuite puis la société Protechabitat Aquitaine, un huissier de justice et enfin le cabinet d'expertise Exatis aux fins de réalisation d'une expertise amiable contradictoire.

Il expose qu'à la suite de ces mesures, les professionnels ont mis en évidence un défaut de ventilation du logement au regard des remontées d'eau qui l'affectaient et qu'aucun n'a mis en cause une absence d'aération de l'appartement qui lui serait reprochable.

Il affirme qu'une telle situation n'est pas plus établie par les époux [G] au regard des attestations qu'ils produisent.

Il conclut que les bailleurs ne se sont donc pas conformés à leurs obligations légales quant à la remise au locataire d'un logement décent et demande leur condamnation au paiement de ses entiers préjudices.

*

Par conclusions remises et notifiées le 23 août 2021, auxquelles il convient aussi de se référer pour l'exposé développé des faits et de leurs moyens, les époux [G] concluent, au visa de l'article 56 du Code de procédure civile et de l'article 7 de la Loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, à la réformation du jugement rendu le 15 décembre 2020 par le juge des contentieux de la protection de Bayonne.

Ils demandent à la cour :

- à tire principal de :

- dire et juger qu'il n'est pas démontré que l'humidité du local ne proviendrait pas du seul mode de vie de Monsieur [S] [L] ;

- dire et juger que les problèmes d'humidité n'existaient pas avant son entrée dans les lieux et se sont arrêtés après son départ ;

- dire et juger que les conditions de mise en jeu de la responsabilité des bailleurs ne sont pas réunies ;

- débouter Monsieur [L] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

- à titre subsidiaire :

- dire et juger que les demandes de Monsieur [L] au titre de son prétendu préjudice matériel ne sont pas démontrées et l'en débouter ;

- dire et juger que le préjudice immatériel n'est pas plus démontré ;

- rappeler que le local a été habité uniquement pendant 8 mois ;

- à défaut, réduire le quantum de ce préjudice à de plus justes proportions, qui ne pourraient excéder qu'un pourcentage des deux derniers mois de loyers de juillet et août 2018 ;

- en tout état de cause, condamner Monsieur [L] à verser à Madame [H] et Monsieur [G] la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance.

Monsieur et Madame [G] contestent également la décision du premier juge et affirment que Monsieur [L] n'apporte pas la preuve qu'en qualité de bailleurs il leur est reprochable un manquement dans leurs obligations alors que les désordres qu'il évoque n'ont été portés à leur connaissance que le 5 juillet 2018, qu'il était informé dès la prise à bail des remontées capillaires présentes en façade qui ne se sont cependant pas ensuite aggravées, que les locataires installés à l'étage supérieur du sien ont écrit n'avoir connu aucun souciet que l'appartement qu'il a occupé ne connaissait, avant son arrivée, et ne connaît depuis son départ, aucun désordre lié à l'humidité ou à toute autre cause.

Ils soulignent que la mauvaise ventilation du logement soupçonnée par le Cabinet Alteo peut également provenir du mode de vie du preneur alors que des systèmes de ventilation existaient dans les salles d'eau et que la cuisine était pourvue d'une fenêtre et est attenante au séjour qui est lui même correctement ventilé.

Ils ajoutent qu'il ne peut leur être reproché un défaut de diligence dans la prise en compte des demandes de Monsieur [L], dont les premiers signalements sont intervenus en juillet 2018, et qu'ils ont accepté de réduire la durée de préavis de départ lorsqu'il a souhaité résilier le bail.

Puis, dès septembre 2018, ils ont mis fin aux problèmes par la réalisation de travaux conformes aux préconisations qui leur ont été faites.

Ils font donc valoir leur bonne foi.

Ils précisent par ailleurs que les demandes financières de Monsieur [L] relatives à ses préjudices matériels et de jouissance ne sont pas fondées faute pour lui de démontrer qu'ils existaient depuis son entrée dans les lieux et de produire à leur soutien des justificatifs utiles.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 mars 2022.

MOTIVATION :

A titre liminaire, la cour relève que le dispositif des écritures des parties comporte des demandes de « dire et juger ».

Il sera rappelé que l'article 954 du code de procédure civile précise notamment que la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Il est constant que les demandes de « dire et juger que... », ne sont pas des prétentions, au sens des articles 4, 5, 31 et 954 du code de procédure civile, mais des moyens ou arguments au soutien des prétentions qu'il appartient à la partie concernée de formuler explicitement dans le dispositif de ses écritures.

En conséquence, la cour ne répondra pas à de telles « demandes » sauf à ce qu'elles correspondent à des prétentions énoncées expressément au dispositif des conclusions.

Sur le fond :

En droit, selon l'article 1719 du code civil :

« Le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière :

1° De délivrer au preneur la chose louée et, s'il s'agit de son habitation principale, un logement décent. Lorsque des locaux loués à usage d'habitation sont impropres à cet usage, le bailleur ne peut se prévaloir de la nullité du bail ou de sa résiliation pour demander l'expulsion de l'occupant.

2° D'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée.

3° D'en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail

[.. .]

En application de l'article 6 de la loi du 6 juillet 1989, le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé et doté des éléments le rendant conforme à l'usage d'habitation.

Il est obligé également de délivrer au locataire le logement en bon état d'usage et de réparation, et d'assurer au locataire la jouissance paisible du logement et, sans préjudice des dispositions de l'article 1721 du code civil, de le garantir des vices ou défauts de nature à y faire obstacle ('), d'entretenir les locaux en état de servir à l'usage prévu par le contrat et d'y faire toutes les réparations, autres que locatives, nécessaires au maintien en état et à l'entretien normal des locaux loués.

En outre, l'article 2 du décret du 30 janvier 2002 prévoit notamment, dans sa version applicable à la période du contrat de location, que le logement doit satisfaire, au regard de la sécurité physique et de la santé des locataires, aux conditions suivantes :

1. Il assure le clos et le couvert. Le gros 'uvre du logement et de ses accès est en bon état d'entretien et de solidité et protège les locaux contre les eaux de ruissellement et les remontées d'eau. Les menuiseries extérieures et la couverture avec ses raccords et accessoires assurent la protection contre les infiltrations d'eau dans l'habitation.

...

5. Les dispositifs d'ouverture et de ventilation des logements permettent un renouvellement de l'air adapté aux besoins d'une occupation normale du logement et au fonctionnement des équipements.

L'article 7 de la loi du 6 juillet 1989 fixe quant à lui les obligations du locataire qui au-delà du paiement du loyer et charges, doit user paisiblement des locaux loués et répondre des dégradations et pertes qui surviennent pendant la durée du contrat dans les locaux dont il a la jouissance exclusive, à moins qu'il ne prouve qu'elles ont eu lieu par cas de force majeure, par la faute du bailleur ou par le fait d'un tiers qu'il n'a pas introduit dans le logement. Il est également astreint à la prise en charge de l'entretien courant du logement et de ses équipements ainsi que des menues réparations et des réparations locatives définies par décret en Conseil d'État, sauf si elles sont occasionnées par vétusté, malfaçon, vice de construction, cas fortuit ou force majeure.

En l'espèce, il résulte du constat d'état des lieux entrant établi le 30 novembre 2017 qu'à la date d'entrée dans les lieux de Monsieur [L] le logement était dans un bon état, les murs intérieurs et plafonds du logement ayant été remis à neuf.

Il est précisé que le logement comporte une VMC en fonctionnement dans la salle de bain, une extraction sous étagère dans le cellier, deux aérations bas mur dans la chambre parentale et une ventilation de marque Atlantic dans la salle d'eau de la chambre parentale.

Il fait aussi état de la présence de fenêtres ou portes-fenêtres en double vitrage et que celles qui sont présentes dans la pièce à vivre, la chambre parentale et la chambre 2 sont équipées de réglettes d'aération.

Il est par ailleurs mentionné que les propriétaires laissent à disposition des occupants un déshumidificateur de marque ZIBRO.

Cependant, les photographies alors annexées à l'état des lieux, prises sur la terrasse de la façade de la maison, montrent des murs extérieurs présentant des traces d'humidité.

Dans son rapport à destination de l'assureur de Monsieur [L] et faisant suite à son intervention dans ledit logement le 23 juillet 2018, le cabinet Altéo a conclu «  aucune fuite n'a été décelée ni sur l'alimentation ni sur les évacuations.

A l'opposé de l'entrée, la salle d'eau n'a pas de fenêtre bien qu'elle soit en liaison avec la chambre, le cellier est contigu avec un sèche linge et un lave linge. Cette dernière pièce est énormément chaude avec une atmosphère humide. Il n'y a pas de VMC ni d'aération sur ces deux pièces. Sur la chambre contiguë à cette salle de bain, il y a des grilles de ventilation sur le haut de la fenêtre. La VMC n'est que sur la deuxième salle de bain et le WC, rien au niveau de la cuisine. Je suspecte une mauvaise ventilation de la maison ».

En parallèle, le compte rendu de diagnostic réalisé par la société ProtecHabitat (non daté) relevait plusieurs points de moisissure (sur les murs, les portes intérieures de placard, sur des vêtements ...) ainsi qu'une très forte odeur d'humidité dans certaines pièces. Par ailleurs, il était noté sur au moins deux murs extérieurs les stigmates d'un problème d'humidité ascensionnelle dans les murs.

Selon le professionnel mandaté, ces remontées capillaires ainsi qu'une ventilation mal adaptée semblaient être la cause de la présence d'humidité constante dans la maison.

Il préconisait de ce fait la pose, dans la maison, d'une ventilation mécanique par insufflation, un détalonnage des portes, la pose de réglettes de ventilation et l'injection dans les murs d'un produit favorisant le blocage des venues d'eau.

A la suite de ces deux rapports, le 2 août 2018, il a été établi un constat amiable sur "dégâts des eaux" signé par les deux parties qui relate qu'une recherche de fuite dans le bien loué a été effectuée par Alteo et ProtecHabitat et que l'origine du dégât des eaux réside dans des infiltrations par la façade et un défaut d'aération.

En sus, le 9 août 2018, suite à la demande d'[S] [L], a été établi un constat d'huissier relatant les constatations relatives à la présence de traces d'humidité sur le canapé d'angle et les meubles du salon, sur le réfrigérateur installé dans la cuisine, le sommier et les divers meubles de la chambre parentale ainsi que sur des ceintures et une sacoche en cuir, une couette et une sélection de chaussures qui lui ont été présentées.

Enfin, le rapport d'expertise technique contradictoire amiable ' désordre lié à l'humidité ambiante daté du 30 août 2018 et rédigé par le cabinet Exatis, après réunion des parties le 21 août 2018, indiquait que les principales causes de la forte concentration d'humidité ambiante dans ce logement résidaient dans :

- la ventilation non conforme due à l'absence d'extraction dans la cuisine et un manque de détalonnage des portes,

- défaut de drainage et d'évacuation des eaux de pluie en périphérie de la construction provoquant des remontées capillaires.

Il relevait aussi que le doublage des chambres coté Nord/Est avait été réalisé avec des grilles de ventilation dans les plaques de parement. Selon lui, ces éléments sont contraires à la réglementation thermique des bâtiments rénovés, par conséquent ces désordres étaient connus avant la rénovation.

Il ajoutait : « En l'état, l'appartement est impropre à sa destination pour deux raisons, à savoir : la santé des occupants et la détérioration du mobilier ».

Alors, en l'absence de factures, le cabinet Exatis a procédé à une évaluation forfaitaire des préjudices matériels des locataires à hauteur de 9.300 euros.

Il ressort de ces pièces et données que les professionnels appelés sur les lieux ont tous confirmé l'existence d'un logement connaissant des désordres liés à une humidité excessive d'origine structurelle et qu'ils ont posé des préconisations relatives aux travaux à effectuer dont la charge revient uniquement au bailleur.

D'ailleurs, Monsieur et Madame [G] indiquent avoir commandé ces travaux et avoir fait réaliser l'installation d'un système de climatisation déshumidificateur pour résoudre l'ensemble des problèmes en septembre 2018, ce qui résulte notamment de la correspondance de leur assureur à celui de l'assureur de Monsieur [L].

A l'inverse et contrairement aux dires des bailleurs, aucun rapport, constat ou attestation n'affirme un lien entre l'humidité excessive du logement déplorée et un défaut d'aération imputable au locataire.

En effet, les attestations produites par Monsieur et Madame [G] provenant des occupants du logement sis au-dessus de celui donné à bail comme celles des locataires antérieurs et postérieurs à Monsieur [L] ne suffisent pas à établir un défaut d'aération de sa part alors que l'appartement avait fait l'objet d'une rénovation avant son entrée dans les lieux et qu'à sa sortie des travaux ont été entamés pour remédier aux désordres liés à l'humidité constatée.

Les attestants ne se sont donc pas trouvés dans la situation qui a été celle de Monsieur [L] et il sera retenu qu'aucun manquement à ses obligations de preneur n'est prouvé à l'encontre de ce dernier.

Monsieur [L] prétend à la condamnation de Monsieur et Madame [G] au paiement d'une indemnité au titre des pertes matérielles qu'il dit avoir subies et à un trouble de jouissance.

S'agissant du préjudice matériel, il fonde sa demande sur l'évaluation faite par la société Exatis, cabinet d'expertise immobilière et construction, le dit cabinet précisant que le chiffrage à hauteur de 9.300 euros des désordres concernant les biens mobiliers des preneurs auquel il a procédé a été fait à partir des informations données par Monsieur [L] et le procès-verbal d'huissier dressé le 9 août 2018.

Il a ainsi attribué une somme forfaitaire sur la base de vêtements adultes, foulards de marques, écharpes, un blouson homme en cuir, chaussures, parc bébé, peluches, mobilier et vêtements, linge maison, ensemble literie, canapé convertible, table et chaises, meuble tibétain et appareils ménagers et accessoires divers dont il est dit qu'ils doivent faire l'objet de nettoyage, dégraissage, traitement, décontamination ou remplacement sans plus de précision.

Au soutien de sa demande sur ce fondement, Monsieur [L] ne fournit aucun justificatif de frais en lien avec l'une ou l'autre de ces opérations étant indiqué qu'il n'a pas plus transmis de facture ou justificatif de propriété de ces biens alors qu'il n'occupait pas seul le logement loué.

En conséquence, la réalité même d'un préjudice matériel subi par Monsieur [L] n'est pas établie et il sera débouté de sa demande sur ce fondement.

S'agissant du préjudice de jouissance, celui-ci ne peut être fixé qu'en rapport à une période d'occupation troublée par les désordres objets du litige.

Au cas d'espèce, à l'entrée dans les lieux du locataire, le 1er décembre 2017, aucune moisissure ou trace n'était relevée à l'intérieur du logement.

Ensuite, la première démarche de Monsieur [L] en lien avec les désordres d'humidité telle qu'établie par les pièces qu'il a produites a été adressée à son assureur et date, selon le constat remis, du 1er juin 2018, l'apparition des troubles étant nécessairement antérieure.

Et il a quitté les lieux le 23 août 2018 avec l'accord de Monsieur et Madame [G] qui précisent n'avoir été informés des désordres que le 5 juillet 2018 et avoir accepté un délai de préavis réduit puisqu'il a délivré son congé le 6 août 2018.

A l'appui de sa demande au titre du préjudice de jouissance, Monsieur [L] rappelle les conclusions du rapport du cabinet Exatis daté du 30 août 2018 après réunion des parties du 21 août 2018, soit deux jours avant son départ des lieux, qui a estimé que l'appartement était impropre à sa destination pour deux raisons, à savoir : la santé des occupants et la détérioration du mobilier.

Il invoque en outre que son jeune fils présentait un état respiratoire dégradé mais ne justifie ni de celui-ci ni de ses causes et de sa date d'apparition.

Il en découle que les bailleurs n'ayant pas satisfait à leurs obligations, Monsieur [L] est fondé à arguer d'un préjudice de jouissance mais uniquement pour la période de mai à août 2018, les désordres étant nécessairement antérieurs à leur signalement à son assureur, et son départ ayant mis fin à leurs conséquences ce préjudice devant être évalué compte tenu du montant du loyer, de l'ampleur des troubles mais également de l'absence de signalement aux propriétaires des problèmes rencontrés afin de les mettre en mesure de déférer à leurs obligations avant juillet 2018, à la somme totale de 1.200 euros.

S'agissant des demandes accessoires des parties, les dispositions du jugement sur les frais irrépétibles et les dépens sont confirmées au vu de l'origine et de la nature du litige.

En revanche, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile en appel dans la mesure où chaque partie a formulé, en cause d'appel, des prétentions dont une partie au moins n'a pas été accueillie.

Pour cette même raison, les dépens resteront à la charge de chacune des parties qui les a exposés.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a :

- condamné Monsieur [V] [G] et Madame [B] [H] épouse [G] à payer à Monsieur [S] [L] la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile :

- condamné Monsieur [V] [G] et Madame [B] [H] épouse [G] à supporter les dépens de première instance

L'INFIRME pour le surplus et statuant à nouveau,

CONDAMNE Monsieur [V] [G] et Madame [B] [H] épouse [G] à payer à Monsieur [S] [L] la somme de 1.200 euros au titre du préjudice de jouissance subi ;

DEBOUTE Monsieur [S] [L] de sa demande au titre des pertes matérielles subies ;

DEBOUTE les parties de leur demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Le présent arrêt a été signé par Madame Jeanne PELLEFIGUES, Présidente, et par Madame SAYOUS, greffière suivant les dispositions de l'article 456 du Code de Procédure Civile.

La Greffière, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : 2ème ch - section 1
Numéro d'arrêt : 21/00131
Date de la décision : 29/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-29;21.00131 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award