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17/11/2022 | FRANCE | N°20/01503

France | France, Cour d'appel de Pau, 2ème ch - section 1, 17 novembre 2022, 20/01503


PhD/ND



Numéro 22/4065





COUR D'APPEL DE PAU

2ème CH - Section 1







ARRET DU 17/11/2022







Dossier : N° RG 20/01503 - N° Portalis DBVV-V-B7E-HSWC





Nature affaire :



Autres demandes relatives au prêt















Affaire :



S.A. CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE AQUITAINE POITOU CHARENTES





C/



[J] [Y]

[S] [O] épouse [Y]






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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R E T



Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 17 novembre 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les condit...

PhD/ND

Numéro 22/4065

COUR D'APPEL DE PAU

2ème CH - Section 1

ARRET DU 17/11/2022

Dossier : N° RG 20/01503 - N° Portalis DBVV-V-B7E-HSWC

Nature affaire :

Autres demandes relatives au prêt

Affaire :

S.A. CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE AQUITAINE POITOU CHARENTES

C/

[J] [Y]

[S] [O] épouse [Y]

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 17 novembre 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 26 Septembre 2022, devant :

Monsieur Philippe DARRACQ, magistrat chargé du rapport,

assisté de Madame Nathalène DENIS, Greffière présente à l'appel des causes,

Philippe DARRACQ, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries, en présence de Marc MAGNON et en a rendu compte à la Cour composée de :

Monsieur Marc MAGNON, Conseiller faisant fonction de Président

Monsieur Philippe DARRACQ, Conseiller

Madame Joëlle GUIROY, Conseillère

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

S.A. CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE AQUITAINE POITOU- CHARENTES

banque coopérative régie par les articles L. 512-85 et suivants du Code Monétaire et Financier, société anonyme à Directoire et Conseil d'Orientation et de Surveillance, siège social [Adresse 2] - immatriculée au RCS de Bordeaux sous le n° 333 821 028 - Intermédiaire d'assurance, immatriculée à l'ORIAS sous le n° 07 004 055 - Titulaire de la carte professionnelle 'Transactions sur immeubles et fonds de commerce ' n° CPI 3301 2018 000 035 592 délivrée par la CCI Bordeaux-Gironde, garantie par la CEGI [Adresse 3], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège

Représentée par Me Valérie DABAN, avocat au barreau de PAU

Assistée de Me Benjamin HADJADJ (SCP AHBL Avocats), avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMES :

Monsieur [J] [Y]

né le [Date naissance 1] 1961 à [Localité 7] (64)

de nationalité française

[Adresse 5]

[Localité 6]

Madame [S] [O] épouse [Y]

née le [Date naissance 4] 1963 à [Localité 6] (64)

de nationalité française

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représentés par Me Emmanuelle LAGARDE, avocat au barreau de PAU

Assistés de Me Alexandre BARBELANE (Selarl BFB Avocats), avocat au barreau de PARIS

sur appel de la décision

en date du 24 JUIN 2020

rendue par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE DAX

FAITS - PROCEDURE - PRETENTIONS et MOYENS DES PARTIES

M. [J] [Y] et Mme [S] [O] (les époux [Y]) ont souscrit deux prêts immobiliers auprès de la société Caisse d'épargne et de prévoyance des Pays de l'Adour :

- le premier, suivant offre préalable acceptée le 12 novembre 1997 d'un montant de [35.063,27 euros], d'une durée de 120 mois, au taux annuel de 5,90 % et un taux effectif global (TEG) de 6,69 %

-le second, suivant offre préalable acceptée le 16 juillet 2006 d'un montant de 152.000 euros, d'une durée de 180 mois, au taux annuel de 3,60 % et un TEG de 4,33%.

Le second prêt a fait l'objet d'une offre d'avenant acceptée le 28 avril 2013 ramenant le taux annuel du prêt à 3,21 % et le TEG à 3,942 %, pour la durée restante du prêt de 127 mois.

Sur la base d'une étude financière du 27 février 2017 réalisée à leur demande, les époux [Y] se sont plaints, en vain, d'irrégularités affectant le calcul du TEG des prêts et de l'avenant.

Suivant exploit du 6 octobre 2017, les époux [Y] ont fait assigner la société Caisse d'épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes (la Caisse d'épargne) par devant le tribunal de grande instance de Dax en nullité de la stipulation des intérêts conventionnels des prêts et substitution du taux légal à ceux-ci et en restitution des intérêts trop versés, sur le fondement des articles L. 313-1 et R. 313-1 du code de la consommation et de l'article 1907 du code civil.

Par jugement contradictoire du 24 juin 2020, auquel il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des faits et des prétentions et moyens initiaux des parties, le tribunal a :

- condamné la société Caisse d'épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou Charentes à verser aux époux [Y] :

- la somme de 5.227,53 euros correspondant au montant des intérêts indûment versés au titre du prêt de 1997

- la somme de 13.248,33 euros correspondant au montant des intérêts indûment versés au titre du prêt de 2006

- la somme de 6.788,17 euros correspondant au montant des intérêts indûment versés au titre de l'avenant de 2013

- débouté les époux [Y] du surplus de leurs demandes

- débouté la société Caisse d'épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou Charentes de ses demandes

-condamné la société Caisse d'épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou Charentes aux dépens et au paiement d'une indemnité de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration faite au greffe de la cour le 15 juillet 2020, la société Caisse d'épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou Charentes a relevé appel de ce jugement.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 10 novembre 2021.

Les parties ont été avisées par message RPVA que la décision sera rendue par anticipation le 17 novembre 2022.

Vu les conclusions notifiées le 25 août 2020 par la société Caisse d'épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes qui a demandé à la cour, au visa des articles L. 313-1 du code de la consommation, L. 312-4 à L. 312-8 du code de la consommation, R. 313-1 et L. 312-33 du code de la consommation, de réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions prononcées contre elle et, statuant à nouveau, de :

A titre principal :

- constater que l'action engagée par les époux [Y] est irrecevable comme prescrite

- débouter les époux [Y] de leurs demandes.

A titre subsidiaire :

- dire que la seule sanction de la déchéance facultative du droit aux intérêts dans une proportion fixée par le juge est applicable en cas de TEG erroné

- constater que les époux [Y] ne rapportent pas la preuve du caractère erroné du TEG au-delà de la décimale à leur détriment

- en conséquence, débouter les époux [Y] de leurs demandes.

En toutes hypothèses, condamner les époux [Y] au paiement d'une indemnité de 4.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

*

Vu les conclusions notifiées le 23 novembre 2020 par les époux [Y] qui ont demandé à la cour, au visa des articles L. 313-1 et suivants, R. 313-1 et suivants du code de la consommation en vigueur à la date des prêts, de l'article 1907 du code civil alors en vigueur et 1343-1 du code civil en vigueur au 1er octobre 2016, de :

Au titre des prêts de 1997 et 2006 :

A titre principal :

- confirmer le jugement entrepris à l'exception de sa disposition les ayant déboutés de leur demande de production de nouveaux tableaux d'amortissement

- infirmer, sur appel incident, le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté leur demande de production d'un tableau d'amortissement et enjoindre à la société Caisse d'épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou Charentes de produire :

- sous astreinte de 200 euros par jour de retard, un tableau d'amortissement prenant en considération cette substitution du taux d'intérêt légal au titre du prêt de 1997 (sic)

- à chaque publication du taux d'intérêt légal, un nouveau tableau d'amortissement prenant en compte la substitution du taux d'intérêt conventionnel au taux d'intérêt légal applicable.

A titre subsidiaire :

- prononcer la déchéance des intérêts conventionnels du prêt et de l'acte notarié litigieux (sic) à hauteur du taux d'intérêt légal applicable année par année

-condamner la société Caisse d'épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou Charentes à leur verser la somme de 5.227,53 euros correspondant aux intérêts indûment versés au titre du prêt de 1997 depuis sa conclusion jusqu'au jour de la présente, sauf à parfaire

- condamner la société Caisse d'épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou Charentes à leur payer la somme de 13.248,33 euros correspondant aux intérêts indûment versés au titre du prêt de 2006 depuis sa conclusion jusqu'au jour de la présente, sauf à parfaire

- enjoindre à la société Caisse d'épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou Charentes de produire :

- sous astreinte de 200 euros par jour de retard, un tableau d'amortissement prenant en considération cette déchéance du droit aux intérêts

- à chaque publication du taux d'intérêt légal, un nouveau tableau d'amortissement prenant en compte la déchéance du droit aux intérêts à hauteur du taux d'intérêt légal applicable.

Au titre de l'avenant :

A titre principal :

- confirmer le jugement entrepris à l'exception de sa disposition ayant rejeté leur demande de production d'un nouveau tableau d'amortissement

- infirmer le jugement entrepris de ce chef

- enjoindre à la société Caisse d'épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou Charentes de produire :

- sous astreinte de 200 euros par jour de retard, un tableau d'amortissement prenant en considération cette substitution du taux d'intérêt légal au titre de l'avenant

- à chaque publication du taux d'intérêt légal, un nouveau tableau d'amortissement prenant en compte la substitution du taux d'intérêt conventionnel au taux d'intérêt légal applicable.

A titre subsidiaire :

- déclarer abusive et par conséquent réputées non écrite les clauses figurant dans l'avenant prévoyant le calcul des intérêts sur la base d'une année bancaire de 360 jours

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Caisse d'épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou Charentes à leur payer la somme de 6.788,17 euros correspondant aux intérêts indûment versés au titre de l'avenant depuis sa conclusion jusqu'au jour des présentes, sauf à parfaire

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il les a déboutés de leur demande de production d'un nouveau tableau d'amortissement

- enjoindre à la société Caisse d'épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou Charentes de produire :

- sous astreinte de 200 euros par jour de retard, un tableau d'amortissement prenant en considération cette substitution du taux d'intérêt légal au titre de l'avenant

- à chaque publication du taux d'intérêt légal, un nouveau tableau d'amortissement prenant en compte la substitution du taux d'intérêt conventionnel au taux d'intérêt légal applicable.

A titre infiniment subsidiaire :

- prononcer la déchéance des intérêts conventionnels de l'avenant à hauteur du taux légal applicable année par année

- condamner la société Caisse d'épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou Charentes à leur payer la somme de 6.788,17 euros correspondant aux intérêts indûment versés au titre de l'avenant depuis sa conclusion jusqu'au jour des présentes, sauf à parfaire

- enjoindre à la société Caisse d'épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou Charentes de produire :

- sous astreinte de 200 euros par jour de retard, un tableau d'amortissement prenant en considération cette déchéance du droit aux intérêts

- à chaque publication du taux d'intérêt légal, un nouveau tableau d'amortissement prenant en compte la substitution du taux d'intérêt conventionnel au taux d'intérêt légal applicable.

En tout état de cause, condamner la société Caisse d'épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou Charentes à leur payer une indemnité de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

sur la demande de nullité de la stipulation des intérêts conventionnels

En droit, contrairement à ce que soutiennent les intimés, il résulte des articles L. 312-8 et L. 312-33 du code de la consommation, dans leur rédaction en vigueur à la date des prêts et de l'avenant, que l'inexactitude du TEG mentionné dans une offre de prêt immobilier soumise au code de la consommation, y compris lorsqu'elle résulte du calcul des intérêts conventionnels sur une autre année qu'une année civile de 365 jours, est sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts du prêteur, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.

C'est donc à bon droit que l'appelante fait grief au jugement d'avoir prononcé la nullité des clauses d'intérêts conventionnels mentionnées dans les offres de prêt immobilier et d'avenant acceptées par les époux [Y].

Infirmant le jugement de ce chef, les époux [Y] seront déboutés de leur demande de nullité desdites clauses et de substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel.

Il y a donc lieu de statuer sur la demande subsidiaire de déchéance du droit aux intérêts conventionnels pour inexactitude du TEG mentionné dans les offres litigieuses.

sur la prescription de l'action en déchéance du droit aux intérêts conventionnels

L'appelante fait grief au jugement d'avoir rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en déchéance des intérêts, après avoir décidé que le point de départ devait être fixé à la date de l'étude financière ayant révélé l'inexactitude du TEG mentionné dans les offres alors que la lecture des offres permettait de déceler l'erreur alléguée et que le principe de sécurité juridique interdit de faire dépendre le point de départ du délai de prescription d'un événement, à caractère potestatif, maîtrisé par l'emprunteur, sans limite temporelle.

Les époux [Y] objectent que, ne disposant d'aucune compétence juridique et financière, ils ne pouvaient déceler l'irrégularité des offres sans les soumettre à une analyse financière qui leur a révélé l'inexactitude du TEG.

En droit, il résulte des articles L. 110-4 du code de commerce et 2224 du code civil, que l'action en déchéance du droit aux intérêts conventionnels tirée de l'inexactitude du TEG mentionnée dans une offre de prêt acceptée par un non-professionnel ou un consommateur se prescrit par cinq ans à compter du jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître l'erreur affectant le taux effectif global.

Il s'ensuit que lorsque la simple lecture de l'offre de prêt permet à l'emprunteur de déceler son irrégularité, le point de départ du délai de prescription de l'action en déchéance du droit aux intérêts se situe au jour de l'acceptation de l'offre, sans report possible tiré de la révélation postérieure d'autres irrégularités.

En l'espèce, il faut d'abord constater que, à la date de l'assignation délivrée le 6 octobre 2017, l'action en déchéance du droit aux intérêts n'était pas prescrite concernant l'offre d'avenant acceptée en 2013, de sorte que la fin de non-recevoir sera rejetée concernant cet acte.

Ensuite, s'agissant des offres de prêt, les époux [Y] font valoir que le TEG est nécessairement erroné aux motifs que :

- dans l'offre de prêt de 1997 : le coût des intérêts intercalaires et les primes de raccordement n'ont pas été inclus dans le calcul du TEG et que les intérêts conventionnels ont été calculés sur une année bancaire prohibée de 360 jours et non une année civile de 365 jours

- dans l'offre de 2006 : les intérêts intercalaires, les primes de raccordement n'ont pas été inclus dans le calcul du TEG et que les intérêts conventionnels ont été calculés sur une année bancaire prohibée de 360 jours et non une année civile de 365 jours

Mais, l'appelante objecte à juste titre que la simple lecture des offres leur permettait de constater que :

- dans l'offre de 1997, la clause spéciale relative à « l'évaluation du coût total du crédit », mentionnée en grands caractères gras, stipule expressément, en des termes clairs et accessibles pour emprunteur profane, que le coût de l'assurance du prêt, les intérêts intercalaires, et la prime de raccordement ne sont pas inclus dans le coût du prêt déterminant le TEG

- dans l'offre de 2006, l'article 3 intitulé « caractéristique du financement », mentionné en grands caractères gras, détaillant le coût du crédit et le TEG en découlant, stipule expressément, en des termes clairs et accessibles pour un emprunteur non averti, que les intérêts intercalaires ne sont pas inclus dans le coût du prêt déterminant le TEG, tandis qu'il est aisé de relever encore que la prime de raccordement ne figure pas dans ce coût alors qu'elle fait l'objet d'une clause spéciale stipulant qu'une « prime de raccordement calculée prorata temporis sera exigible et prélevée à terme échu selon la même périodicité que les échéances du prêt pour la période comprise entre la date de l'acceptation de l'offre par les emprunteurs et le versement du prêt ».

Il s'ensuit que plusieurs des irrégularités alléguées par les intimés étaient décelables aisément à la simple lecture des offres, les mettant en mesure, le cas échéant, d'apprécier l'utilité de recourir à toute consultation technique sur l'incidence financière de ces irrégularités, de celles qui seraient découvertes, sur le calcul du TEG.

Par conséquent, en l'espèce, le point de départ de la prescription de l'action en déchéance du droit aux intérêts conventionnels doit être fixé à la date de l'acceptation des offres, sans report possible à la date de l'étude financière, aurait-elle identifiée un calcul prohibé sur une année bancaire de 360 jours.

L'action en déchéance du droit aux intérêts conventionnels des prêts de 1997 et 2006 était donc prescrite à la date de l'assignation.

Infirmant le jugement de ce chef, les époux [Y] seront déclarés irrecevables en leur demande de ces deux chefs.

sur la déchéance du droit aux intérêts de l'avenant de 2013

Les époux [Y] exposent que l'avenant de 2013 comporte une clause qui stipule que « durant la phase d'amortissement, les intérêts sont calculés sur le montant du capital restant dû, au taux d'intérêt indiqué ci-dessus sur la base d'une année bancaire de 360 jours, d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours ». Ils en déduisent que la banque a calculé les intérêts conventionnels sur la base d'une année bancaire prohibée de 360 jours, faussant le calcul du TEG mentionné dans l'avenant. Les appelants sollicitent la restitution du trop versé, entre le 5 juin 2013 et le 5 juillet 2015, représentant la différence entre les intérêts conventionnels et les intérêts au taux légal, soit la somme de 6.788,17 euros.

Mais, comme le relève l'appelante, qui conteste même avoir utilisé le diviseur 360, il résulte de l'article R. 313-1 du code de la consommation, en vigueur à la date de l'avenant, ayant vocation à s'appliquer au prêt immobilier, que l'inexactitude du TEG n'est sanctionnée que si elle est supérieure à la décimale.

En l'espèce, l'étude financière unilatérale versée aux débats déduit simplement de la rédaction de la clause litigieuse que les intérêts conventionnels, et donc le TEG, ont nécessairement été calculés sur la base du diviseur prohibé de 360 jours mais sans en faire la démonstration financière concrète, ni, en tout état de cause, démontrer que ce calcul aurait entraîné un écart, entre le TEG réel, non chiffré dans l'étude, et le TEG stipulé, supérieur à la décimale.

Par conséquent, échouant dans la preuve, qui leur incombe, d'une inexactitude du TEG supérieure à la décimale, les époux [Y] doivent être déboutés de leur demande de déchéance des intérêts conventionnels au titre de l'avenant 2013.

Le jugement sera infirmé en ce sens.

sur le caractère abusif de la clause de calcul des intérêts stipulée dans l'avenant

L'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016, dispose que dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Selon les époux [Y], la clause de l'avenant de 2013 stipulant que « durant la phase d'amortissement, les intérêts sont calculés sur le montant du capital restant dû, au taux d'intérêt indiqué ci-dessus sur la base d'une année bancaire de 360 jours, d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours », est abusive dès lors qu'elle a pour effet de masquer, à leur détriment, le coût réel de leur crédit. Ils demandent à la cour de la réputer non écrite.

L'appelante oppose la fin de non-recevoir tirée de la prescription de cette demande.

Par arrêt du 10 juin 2021 (C-776/19 à C- 782/19), la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que l'article 6, § 1, et l'article 7, § 1, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, lus à la lumière du principe d'effectivité, doivent être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une réglementation nationale soumettant l'introduction d'une demande par un consommateur aux fins de la constatation du caractère abusif d'une clause figurant dans un contrat conclu entre un professionnel et ce consommateur à un délai de prescription.

Il s'en déduit que la demande tendant à voir réputer non écrite une clause abusive sur le fondement de l'article L. 132-1 précité n'est pas soumise à la prescription quinquennale.

La fin de non-recevoir sera rejetée de ce chef.

Sur le fond, il ne résulte pas du texte précité qu'une clause prévoyant un calcul des intérêts sur la base d'une autre année que l'année civile de 365 jours est automatiquement abusive, mais qu'il incombe au juge d'apprécier quels sont ses effets sur le coût du crédit, afin de déterminer si elle entraîne ou non un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

En outre, la banque démontre qu'elle n'a pas utilisé le diviseur 360 mais le rapport 360/60 jours qui est équivalent au rapport 30,41666/365 prévu par l'annexe à l'article R. 313-1 du code de la consommation applicable à un prêt remboursable par mensualités.

A cet égard, si le rapport entre une année civile et un mois normalisé de 30,41666 jours équivaut à celui prohibé du rapport 360/60, une telle équivalence ne suffit pas à déduire le calcul des intérêts conventionnels sur une autre base que celle de l'année civile.

Enfin, les époux [Y] ne démontrent pas que la clause litigieuse a généré à leur détriment un surcoût, ni a fortiori que ce surcoût aurait eu une incidence significative sur les droits et obligations des parties.

Par conséquent, les époux [Y] seront déboutés de leur demande de réputer non écrite la clause litigieuse.

Les époux [Y] seront condamnés aux dépens de première instance et d'appel et à payer à la société Caisse d'épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes une indemnité de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

la cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

INFIRME en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

et statuant à nouveau,

DEBOUTE les époux [Y] de leur demande de nullité des clauses relatives aux intérêts conventionnels et substitution du taux légal à ceux-ci, mentionnées dans les offres de prêt acceptées les 12 novembre 1997 et 16 juillet 2006 ainsi que dans l'offre d'avenant accepté le 28 avril 2013,

DECLARE irrecevables, comme prescrites, les demandes de déchéance du droit aux intérêts conventionnels des offres de prêt acceptées les 12 novembre 1997 et 16 juillet 2006,

REJETTE la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la demande de déchéance du droit aux intérêts conventionnels de l'avenant du 28 avril 2013 et de la prescription de la demande de réputer non-écrite la clause de calcul des intérêts conventionnels mentionnée dans ledit avenant,

DEBOUTE les époux [Y] de leur demande de déchéance du droit aux intérêts conventionnels de l'avenant du 28 avril 2013,

DEBOUTE les époux [Y] de leur demande de réputer non-écrite la clause de calcul des intérêts conventionnels stipulée dans l'avenant du 28 avril 2013,

DEBOUTE les époux [Y] de l'ensemble de leurs demandes accessoires à leurs demandes principales prescrites ou mal fondées,

CONDAMNE les époux [Y] aux dépens de première instance et d'appel,

CONDAMNE les époux [Y] à payer à la société Caisse d'épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes une indemnité de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Marc MAGNON, Conseiller faisant fonction de Président, et par Madame Nathalène DENIS, greffière suivant les dispositions de l'article 456 du Code de Procédure Civile.

La Greffière, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : 2ème ch - section 1
Numéro d'arrêt : 20/01503
Date de la décision : 17/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-17;20.01503 ?
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