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20/10/2022 | FRANCE | N°20/00261

France | France, Cour d'appel de Pau, Chambre sociale, 20 octobre 2022, 20/00261


PS/SB



Numéro 22/0261





COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale







ARRÊT DU 20/10/2022







Dossier : N° RG 20/00261 - N° Portalis DBVV-V-B7E-HPIR





Nature affaire :



A.T.M.P. : demande d'un employeur contestant une décision d'une caisse









Affaire :



SAS [4]



C/



CPAM DU GERS









Grosse délivrée le

à :





















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R Ê T



Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 20 Octobre 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du ...

PS/SB

Numéro 22/0261

COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 20/10/2022

Dossier : N° RG 20/00261 - N° Portalis DBVV-V-B7E-HPIR

Nature affaire :

A.T.M.P. : demande d'un employeur contestant une décision d'une caisse

Affaire :

SAS [4]

C/

CPAM DU GERS

Grosse délivrée le

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 20 Octobre 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 16 Mai 2022, devant :

Madame SORONDO, magistrat chargé du rapport,

assistée de Madame BARRERE, faisant fonction de greffière.

Madame SORONDO, en application de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :

Madame CAUTRES, Présidente

Madame NICOLAS, Conseiller

Madame SORONDO, Conseiller

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

SAS [4], représenté(e) par son dirigeant légal domicilié de droit au siège social

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représentée par Maître TARDY loco Maître RIGAL de la SELARL ONELAW, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

CPAM DU GERS

[Adresse 1]

[Localité 2]

Comparante en la personne de Madame [L], munie d'un pouvoir régulier

sur appel de la décision

en date du 06 DECEMBRE 2019

rendue par le POLE SOCIAL DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONT DE MARSAN

RG numéro : 19/00087

FAITS ET PROCEDURE

La CPAM du Gers a été destinataire le 9 avril 2018 d'une déclaration de maladie professionnelle en date du 27 février 2018 établie par Mme [B] [F], salariée depuis le 1er janvier 1999 en qualité de préparatrice de commande de la société [4], portant sur une «'subluxation du tendon du long biceps sur rupture partielle du tendon du supra épineux épaule droite'». Elle était accompagnée d'un certificat médical initial du docteur [P] du 23 janvier 2018 faisant mention d'une «'périarthrite épaule droite chez une manutentionnaire'».

La CPAM du Gers a informé la société [4] de cette déclaration par courrier du 26 avril 2018. Elle l'a informée d'un délai complémentaire d'instruction par courrier recommandé en date du 6 juillet 2018. Par courrier recommandé en date du 3 août 2018, elle l'a informée de la fin de l'instruction sur le caractère professionnel de la maladie «'tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs de l'épaule droite'» inscrite au tableau n° 57 des maladies professionnelles : «'affections périarticulaires provoquées par certains gestes et postures de travail'», de la date de la décision à intervenir le 24 août 2018 et de sa possibilité de venir consulter les pièces constitutives du dossier. Par courrier en date du 24 août 2018, elle lui a notifié la prise en charge de cette pathologie au titre de la législation relative aux risques professionnels.

Par courrier en date du 24 octobre 2018, la société [4] a contesté cette décision devant la commission de recours amiable de la CPAM du Gers qui a rejeté sa demande le 15 novembre 2018.

Par lettre recommandée expédiée le 1er février 2019, la société [4] a saisi le pôle social du tribunal de grande instance de Mont-de-Marsan qui, par jugement du 6 décembre 2019, a :

- déclaré opposable à la société [4] la décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle de la maladie professionnelle déclarée le 27 février 2018 par Mme [B] [F],

- déclaré opposable à la société [4] les conséquences financières attachées à la prise en charge au titre de la législation professionnelle des arrêts de travail servis à Mme [B] [F] par la caisse à la suite de la maladie professionnelle déclarée le 27 février 2018,

- débouté la société [4] de toutes ses demandes,

- condamné la société [4] aux entiers dépens.

Ce jugement a été notifié à la société [4] par courrier recommandé qu'elle a réceptionné le 30 décembre 2019. Elle en a régulièrement interjeté appel par courrier recommandé expédié au greffe de la cour le 23 janvier 2020.

Selon avis de convocation du 16 novembre 2021, contenant calendrier de procédure, les parties ont été convoquées à l'audience du 4 avril 2022. A cette date, l'affaire a été renvoyée à l'audience du 16 mai 2022 à laquelle les parties ont chacune comparu.

PRETENTIONS DES PARTIES

Selon ses conclusions n° 2 visées par le greffe le 4 avril 2022, reprises oralement à l'audience de plaidoiries et auxquelles il est expressément renvoyé, la société [4], appelante, demande à la cour de :

- déclarer son recours recevable,

- infirmer le jugement déféré,

- à titre principal,

. constater que la CPAM ne justifie pas de la réunion des conditions médico-légales requises au tableau 57 A au titre de la pathologie retenue dans le dossier de Mme [F] et datée du 23 janvier 2018,

. déclarer inopposables à la société [4] la décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle du 24 août 2018 de la maladie professionnelle déclarée par Mme [F] (dossier 180123333) ainsi que toutes les conséquences financières y rattachées,

- à titre subsidiaire,

. constater que la CPAM ne justifie pas de la continuité des symptômes et soins justifiant la prise en charge des arrêts prescrits à Mme [F] à compter du 3 février 2018,

. déclarer en conséquence inopposables à la société [4] l'intégralité des soins et arrêts de travail ainsi que toutes les conséquences financières rattachées à la prise en charge des arrêts et soins prescrits à Mme [F] à compter du 3 février 2018,

. déclarer inopposables à la société [4] l'ensemble des soins, prestations, arrêts de travail de prolongation ainsi que toute rente présentés par Mme [F] dans le cadre du dossier de la maladie professionnelle prise en charge du 23 janvier 2018.

Selon ses conclusions n° 2 visées par le greffe le 25 avril 2022, reprises oralement à l'audience de plaidoirie, et auxquelles il est expressément renvoyé, la CPAM du Gers, intimée, demande à la cour de :

- lui décerner de ce qu'elle a fait une exacte application des textes en vigueur,

- confirmer purement et simplement le jugement déféré.

SUR QUOI LA COUR

Sur la demande d'inopposabilité de la décision de prise en charge

La société [4] fait valoir que la caisse doit démontrer que la pathologie dont souffre le salarié correspond à celle mentionnée par le tableau de maladie professionnelle retenu dans la décision de prise en charge. S'agissant du tableau 57 des maladies professionnelles, les conditions d'objectivation de la pathologie, à savoir la réalisation d'une IRM, doivent être respectées et ce n'est qu'en cas de contre-indication de celui-ci qu'un constat par arthroscanner est possible. Le compte-rendu de l'IRM ou de l'arthroscanner doit être communiqué. En l'espèce, il n'y a pas de cohérence entre la pathologie déclarée et celle prise en charge. Alors que la déclaration semble renvoyer à la pathologie «'rupture partielle ou transfixiante de la coiffe des rotateurs'», la caisse a reconnu une «'tendinopathie de la coiffe des rotateurs'». Le certificat médical vise une périarthrite, terme générique qui désigne plusieurs pathologies du tableau. Enfin, si la caisse a considéré que l'assurée était atteinte de la «'tendinopathie chronique, non rompue, non calcifiante avec ou sans enthésopathie de la coiffe des rotateurs objectivée par IRM'», elle devrait justifier par la production du compte-rendu d'IRM des caractères «'chronique'», «'non rompu'» et «'non calcifiant'» de la pathologie. L'IRM n'apparaît pas dans le dossier médico-administratif et plusieurs certificats médicaux communiqués par la caisse confirment que la pathologie dont a été victime Mme [F] est une «'rupture partielle ou transfixiante de la coiffe des rotateurs'» : certificat du 2/03/2018 «'épaule droite douloureuse sur rupture transfixiante du supra épineux'» ; certificat du 2/05/2018 «'chirurgie épaule droite 19103 ' suture coiffe + ténotomie long biceps droit suite rupture coiffe'». Elle se prévaut de l'avis du docteur [H] du 31 mars 2022, établi sur la base des certificats médicaux communiqués qui confirme l'existence d'une rupture de la coiffe des rotateurs.

La CPAM du Gers fait valoir que le docteur [P] fait mention dans un premier temps d'une péri-arthrite épaule droite, puis a précisé qu'il s'agissait d'une épaule douloureuse et a communiqué au service médical les éléments caractérisant une tendinopathie chronique de l'épaule droite à la date du 23 janvier 2018 comme certifie le médecin conseil qui s'est assuré de la correspondance entre le diagnostic et la dénomination qu'en fait le tableau n° 57 des maladies professionnelles, et a vérifié que la pathologie a été objectivée par IRM. Cet examen, élément constitutif du diagnostic, est soumis au secret médical et n'a pas à figurer dans les pièces du dossier constitué par la caisse. La pathologie est avérée, les conditions du tableau n° 57 A des maladies professionnelles sont remplies et l'employeur ne rapporte pas la preuve que le travail de Mme [F] n'a joué aucun rôle causal dans la survenance de la maladie.

Sur ce,

En application de l'article L.461-1 du code de la sécurité sociale, «'est présumée d'origine professionnelle, toute maladie désignée dans un tableau et contractée dans les conditions qui y sont décrites'».

A ce titre, la maladie telle qu'elle est désignée dans les tableaux des maladies professionnelles est celle définie par les éléments de description et les critères d'appréciation fixés par chacun de ces tableaux.

En l'espèce, la maladie retenue par la caisse et désignée par le tableau 57 A relatif aux affections périarticulaires provoquées par certains gestes et postures de travail consiste en une «'tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs de l'épaule droite'» et les dispositions du tableau 57 A sont les suivantes :

DÉSIGNATION DES MALADIES

DÉLAI

de prise en charge

LISTE LIMITATIVE DES TRAVAUX

susceptibles de provoquer ces maladies

- A -

Epaule

Tendinopathie aiguë non rompue non calcifiante avec ou sans enthésopathie de la coiffe des rotateurs.

30 jours

Travaux comportant des mouvements ou le maintien de l'épaule sans soutien en abduction (**) avec un angle supérieur ou égal à 60° pendant au moins 3 h 30 par jour en cumulé.

Tendinopathie chronique non rompue non calcifiante avec ou sans enthésopathie de la coiffe des rotateurs objectivée parIRM (*).

6 mois (sous réserve d'une durée d'exposition de 6 mois)

Travaux comportant des mouvements ou le maintien de l'épaule sans soutien en abduction (**) :

- avec un angle supérieur ou égal à 60° pendant au moins deux heures par jour en cumulé

ou

- avec un angle supérieur ou égal à 90° pendant au moins une heure par jour en cumulé.

Rupture partielle ou transfixiante de la coiffe des rotateurs objectivée par IRM (*).

1 an (sous réserve d'une durée d'exposition d'un an)

Travaux comportant des mouvements ou le maintien de l'épaule sans soutien en abduction (**) :

- avec un angle supérieur ou égal à 60° pendant au moins deux heures par jour en cumulé

ou

- avec un angle supérieur ou égal à 90° pendant au moins une heure par jour en cumulé

(*) Ou un arthroscanner en cas de contre-indication à l'IRM

(**) Les mouvements en abduction correspondent aux mouvements entraînant un décollement des bras par rapport au corps.

Il convient de ne pas se limiter à une analyse littérale du certificat médical initial mais de rechercher si la pathologie qui est visée est bien celle désignée par le tableau.

En l'espèce :

- les deux certificats médicaux des 23 janvier 2018 et 16 février 2018 du docteur [P] mentionnent respectivement une «'périarthrite de l'épaule droite'», donc une inflammation des tissus de l'épaule droite, et une «'épaule droite douloureuse'»,

- le certificat médical du 2 mars 2018 du docteur [P] mentionne une «'épaule droite douloureuse avec rupture transfixiante du supra épineux'», donc une rupture complète du tendon du muscle supra-épineux,

- le certificat médical du 3 avril 2018 du docteur [P] mentionne une «'tendinopathie de l'épaule droite'»,

- le certificat médical du 2 mai 2018 mentionne une «'chirurgie de l'épaule droite 19 mars 2018 = suture coiffe + ténotomie long biceps droit suite rupture coiffe'» ;

- la déclaration de maladie professionnelle vise une subluxation du tendon du long biceps sur rupture partielle du tendon du supra épineux épaule droite ;

- le médecin conseil a visé le 2 août 2018 dans la fiche du colloque médico administratif une «'tendinopathie épaule droite'», relativement objectivée par «'IRM du 22 février 2018'» et constatée pour la première fois le 23 janvier 2018 ; il n'est pas précisé si elle chronique ou aigüe, rompue ou non.

Il ressort de ces éléments que dans le mois qui a suivi l'IRM sur la base duquel s'est prononcé de façon particulièrement imprécise le médecin conseil de la caisse, le médecin traitant de Mme [F] a attesté le 2 mars 2018 d'une «'rupture transfixiante du supra épineux'» et il a été pratiqué une intervention chirurgicale le 19 mars 2018 consistant en une suture de la coiffe des rotateurs avec ténotomie du long biceps droit aux fins de traitement d'une'rupture de la coiffe'des rotateurs, de sorte qu'à tout le moins, il ne peut être considéré que le caractère non rompu de la tendinopthie visé au tableau n° 57 A est établi. Dès lors, la contestation de la société [4] est fondée. Il convient donc d'infirmer le jugement et de dire que la pathologie prise en charge par la caisse lui est inopposable.

Sur les autres demandes

La CPAM du Gers, qui succombe, sera condamnée aux dépens exposés en première instance et en appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré, statuant, publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement rendu le 6 décembre 2019 par le pôle social du tribunal de grande instance de Mont-de-Marsan,

Statuant de nouveau et y ajoutant,

Déclare inopposables à la société [4] la décision du 24 août 2018 de la CPAM du Gers de prise en charge au titre de la législation professionnelle de la maladie professionnelle déclarée par Mme [F] le 27 février 2018 ainsi que toutes les conséquences financières y rattachées,

Condamne la CPAM du Gers aux dépens exposés en première instance et en appel.

Arrêt signé par Madame CAUTRES, Présidente, et par Madame LAUBIE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE,LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/00261
Date de la décision : 20/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-20;20.00261 ?
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