PS/MS
Numéro 22/03503
COUR D'APPEL DE PAU
1ère Chambre
ARRÊT DU 04/10/2022
Dossier : N° RG 20/02344 - N° Portalis DBVV-V-B7E-HU7C
Nature affaire :
Demande d'indemnisation pour enrichissement sans cause
Affaire :
[R] [X]
C/
S.A SOCIÉTÉ GÉNÉRALE
Grosse délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 04 Octobre 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 04 Juillet 2022, devant :
Monsieur SERNY, magistrat honoraire chargé du rapport,
assisté de Madame HAUGUEL, greffière présente à l'appel des causes,
Monsieur [K], en application des articles 805 et 907 du code de procédure civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :
Madame DUCHAC, Présidente
Madame ROSA-SCHALL, Conseillère
Monsieur SERNY, magistrat honoraire
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANT :
Monsieur [R] [X]
né le 21 Octobre 1974 à [Localité 4]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 5] - ANGLETERRE
Représenté par Maître FOURALI de la SCP AMEILHAUD A.A/ARIES A.A/BERNARD-BROUCARET/FOURALI/LANGLA/SEN MARTIN A.A, avocat au barreau de TARBES
Assisté de Maître CHEVALIER, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE :
SOCIÉTÉ GÉNÉRALE, prise en la personne de son directeur du Service de Recouvrement de [Localité 6], domicilié [Adresse 7].
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Maître CHEVALLIER de la SCP CHEVALLIER-FILLASTRE, avocat au barreau de TARBES
sur appel de la décision
en date du 10 SEPTEMBRE 2020
rendue par le TRIBUNAL JUDICIAIRE DE TARBES
RG numéro : 19/00583
Vu l'acte d'appel initial du 12 octobre 2010 ayant donné lieu à l'attribution du présent numéro de rôle,
Vu le jugement dont appel rendu le 10 septembre 2020 par le tribunal judiciaire de TARBES qui
- a condamné [R] [X] à payer à la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE une somme de 59.957,24 euros correspondant au montant que la banque, en qualité de tiers saisi défaillant, a du acquitter à la SAS HEINEKEN ENTREPRISE, partie saisissante agissant au préjudice d'[R] [X],
- a condamné [R] [X] au paiement de 2.000 euros en compensation de frais irrépétibles ;
Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 12 mai 2021 par la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE qui poursuit la confirmation du jugement et sollicite 3.000 euros en compensation de frais irrépétibles exposés en cause d'appel ;
Vu les dernières conclusions (n°2) transmises par voie électronique le 05 avril 2022 par lesquelles [R] [X] poursuit l'infirmation du jugement en invoquant l'absence d'enrichissement injustifié de sa part, la faute de la banque et sa mauvais foi, en réclamant reconventionnellement la somme de 4.000 euros au titre de l'article du code de procédure civile ;
Vu l'ordonnance de clôture délivrée le 01 juin 2022.
Le rapport ayant été fait oralement à l'audience.
MOTIFS
Poursuivant l'exécution d'un titre exécutoire notarié du 21 septembre 2007, la SAS HEINEKEN ENTREPRISE a fait procéder le 26 juillet 2018 à 09 h 02 mn à la saisie attribution des comptes ouverts par [R] [X] auprès de la société GÉNÉRALE pour obtenir paiement d'une somme en principal de 398.163,49 euros outre accessoires portant la cause de la saisie à 405.620,35 euros.
La banque a déclaré être détentrice de trois comptes présentant des soldes créditeurs de 60.483,19 + 10,70 + 14,28 = 60.508,17 euros.
Mainlevée de cette saisie a été donnée ; les raisons pour lesquelles cette mainlevée est intervenue ne sont pas débattues.
Poursuivant toujours l'exécution du même titre exécutoire, la SAS HEINEKEN ENTREPRISE a fait procéder dès le lendemain 27 juillet 2018 à 13 h 57 mn à une nouvelle saisie de ces comptes pour avoir paiement des mêmes causes de créance portées à 405.968,59 euros, le principal réclamé étant inchangé, déclarant dans le délai de 48 heures de ce second acte de saisie, être détentrice de trois comptes ouverts par [R] [X] présentant des soldes créditeurs de 64.842,56 + 10,70 + 14,28 = 64.867,54 euros. La banque indique qu'elle vérifie sous 48 heures.
La saisie n'a pas eu d'effet immédiat ; la déclaration de créance du tiers saisi au saisissant n'est pas indiquée mais l'évolution du compte de [R] [X] montre que les comptes n'ont été bloqués qu'à auteur de 408,92 euros et non pour leur totalité ; la banque a donc commis une grossière erreur au bénéfice de [R] [X] et au détriment de la SAS HEINEKEN ENTREPRISE.
Le 28 septembre 2018, certificat de non opposition a été délivré par l'huissier instrumentaire à la SAS HEINEKEN ENTREPRISE, le certificat de non opposition mentionnant réactualisation des causes de la saisie à cette date à un montant porté à 409.256,20 euros
Averti de la saisie dans des conditions ignorées, [R] [X] a ainsi pu vider son compte le 30 juillet 2018 avant que la seconde saisie du 27 juillet 2018 n'ait eu effet de l'empêcher matériellement de le faire. L'historique de son compte montre que la banque, au lieu de bloquer à nouveau la somme de 59.957,24 euros comme elle l'avait fait en recevant la première saisie dont mainlevée a été donnée, elle n'a, lors de la seconde, bloqué que 408,92 euros. Entre le 03 août 2018 et le 06 août 2018, [R] [X] a ainsi pu retirer par virement les sommes de 4.000 + 10. 000 + 12.000 + 12.000 + 12.000 + 7.500 = 57.500 euros transférées sur un compte joint de son ménage. Or ces opérations n'auraient pas du être possible si la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE avait correctement rempli ses obligations de tiers saisi.
La SAS HEINEKEN lui a donc réclamé le montant de sa créance dont le paiement aurait pu intervenir lors de la saisie du 27 juillet 2018; la société GÉNÉRALE s'est acquittée de 59.957,24 euros, et, par acte du 19 novembre 2018, la SAS HEINEKEN lui a délivré quittance subrogative de ce montant ; cette somme correspond à un 'blocage provision sur saisie attribution' ; il ne correspond pas à la somme due précisément à la SAS HEINEKEN.
[R] [X] développe dans les motifs de ses conclusions divers moyens selon lesquels il ne serait pas débiteur de la SAS HEINEKEN mais il n'a pas contesté la saisie du 27 juillet 2018 en saisissant le juge de l'exécution de la contestation de la créance du saisissant ; le montant de la quittance remise par la SAS HEINEKEN ENTREPRISE à la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE correspond à une créance incontestablement prouvée de la SAS HEINEKEN ENTREPRISE à hauteur du montant de la quittance de 59.957,24 euros mais seulement à hauteur de ce montant dont il conviendra de déduire les frais de la première saisie du 26 juillet 2018 dont il a été donné mainlevée ; la somme de 59.957,24 euros est en effet présumée inclure ces frais qui ne doivent pas être à la charge du débiteur saisi.
[R] [X] ne démontre pas, par ailleurs, contrairement aux affirmations contenues dans ses écritures, que sa dette a pu être éteinte par d'autres moyens et il ne démontre donc pas que l'objet du litige serait devenu à ce jour un litige relatif à un double paiement de la SAS HEINEKEN ENTREPRISE ; or, c'est lui qui aurait la charge de prouver ce double paiement. Pour le démontrer, il n'a d'ailleurs pas appelé en cause la SAS HEINEKEN ENTREPRISE ce qui eut ouvert un débat entre la banque et la SAS HEINEKEN ENTREPRISE sur le point de savoir si la SAS HEINEKEN ENTREPRISE ne devrait alors pas restitution à la banque.
Si la faute d'un tiers saisi l'oblige selon la loi à payer en lieu et place du saisi, elle ne libère pas le débiteur de ses obligations et ne met pas à la charge du débiteur saisi la charge finale du paiement ; cette charge finale incombe au saisi qui ne saurait s'enrichir au détriment du tiers saisi fautif qui dispose d'un recours intégral contre lui.
Il y a eu faute de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE, qui la reconnaît, mais sa faute n' a préjudicié qu'à la SAS HEINEKEN ENTREPRISE, qu'elle a du payer ; cette faute n'a pas pu préjudicier à [R] [X], qui doit rester débiteur final de sommes égale à la cause de la saisie justifiée.
La SOCIÉTÉ GÉNÉRALE n'est pas de mauvaise foi à l'égard d'[R] [X] ; la situation est inverse.
[R] [X] sera débouté de son appel ; le jugement sera confirmé dans toutes ses dispositions sauf, en l'absence de données plus précises, à déduire de la somme réclamée le montant des frais de la première saisie.
La société GÉNÉRALE obtiendra 3.000 euros en compensation de frais irrépétibles exposés en appel.
[R] [X] paiera les dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par mise à disposition, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
* confirme le jugement dont appel SAUF à déduire du montant de la condamnation prononcée le montant des frais de la saisie du 26 juillet 2018 dont la banque a spontanément donné mainlevée ;
* y ajoutant,
* condamne [R] [X] aux dépens d'appel ;
* le condamne à payer à la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE une somme de 3.000 euros en compensation de frais irrépétibles.
Le présent arrêt a été signé par Mme DUCHAC, Présidente, et par Mme HAUGUEL, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.
LA GREFFIÈRE,LA PRÉSIDENTE,
Sylvie HAUGUEL Caroline DUCHAC