JP/CS
Numéro 22/3486
COUR D'APPEL DE PAU
2ème CH - Section 1
ARRET DU 29 septembre 2022
Dossier : N° RG 20/02073 - N° Portalis DBVV-V-B7E-HUEQ
Nature affaire :
Demande en dommages-intérêts formée par le bailleur en fin de bail en raison des dégradations ou des pertes imputables au locataire
Affaire :
[C] [N]
C/
[D] [W]
[V] [O] épouse [W]
Grosse délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R E T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 29 septembre 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 21 juin 2022, devant :
Jeanne PELLEFIGUES, magistrat chargé du rapport,
assisté de Madame SAYOUS, Greffière présente à l'appel des causes,
Jeanne PELLEFIGUES, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries, en présence de Marc MAGNON et en a rendu compte à la Cour composée de :
Madame Jeanne PELLEFIGUES, Présidente
Monsieur Marc MAGNON, Conseiller
Monsieur Philippe DARRACQ, Conseiller
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANT :
Monsieur [C] [N]
né le 13 Octobre 1988 à [Localité 7]
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représenté par Me Thomas GACHIE, avocat au barreau de MONT-DE-MARSAN
INTIMES :
Monsieur [D] [W]
né le 14 Avril 1960 à [Localité 8] (40)
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 2]
Madame [V] [O] épouse [W]
née le 27 Août 1958 à [Localité 6] (11)
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentés par Me Corinne CAPDEVILLE, avocat au barreau de MONT-DE-MARSAN
sur appel de la décision
en date du 10 JUILLET 2020
rendue par le TRIBUNAL D'INSTANCE DE MONT DE MARSAN
Par acte du 11 mars 2019, [D] [W] et [V] [O] épouse [W] ont assigné leur locataire [C] [N] devant le tribunal d'instance de Mont-de-Marsan, en exécution du contrat de bail du 28 octobre 2014, et vu l'état des lieux d'entrée du 28 octobre 2014 et l'état des lieux de sortie du 15 septembre 2016, aux fins de le condamner à leur payer la somme de 7858,19 € au titre des réparations de remise en état après déduction du dépôt de garantie, et la somme de 67,58 € au titre de la régularisation des charges 2016 ainsi que la somme de 1950 € au titre de la perte de jouissance et la somme de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement contradictoire du 10 juillet 2020, le tribunal a :
condamné [C] [N] à payer au demandeur la somme de 4000 € en principal, déduction faite du dépôt de garantie, celle de 1000 € pour perte de loyers, celle de 67,58 € pour charges locatives et celle de 600 € d' indemnité de procédure et rejeté les autres demandes après avoir condamné [C] [N] aux dépens.
Par déclaration du 11 septembre 2020,[C] [N] a interjeté appel de la décision.
Il sollicite par voie de conclusions devant la cour d'appel :
réformant le jugement dont appel,
débouter Monsieur et Madame [W] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions.
Reconventionnellement,
condamner solidairement Monsieur et Madame [W] à payer à Monsieur [N] la somme de 650 € au titre du dépôt de garantie,
condamner solidairement Monsieur et Madame [W] à payer à Monsieur [N] la somme de 1000 € à titre de dommages intérêts en réparation de son préjudice moral consécutif à l'abus d'ester en justice qu'ils ont commis.
condamner solidairement Monsieur et Madame [W] à payer à Monsieur [N] la somme de 3200 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel.
condamner solidairement Monsieur et Madame [W] aux entiers dépens de première instance et d'appel.
[D] [W] et [V] [O] épouse [W] sollicitent :
confirmer le jugement du tribunal judiciaire de MONT DE MARSAN du 10 juillet 2020 en ce qu'il a considéré que le locataire Monsieur [C] [N] était responsable des dégradations constatées et qu'il n'avait pas régularisé ses charges locatives il avait condamné au paiement de la somme de 67,58 € pour charges locatives,
débouter Monsieur [C] [N] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
reconventionnellement
condamner Monsieur [C] [N] à payer à Monsieur et Madame [D] [W] la somme de 7858,19 € au titre des réparations de remise en état après déduction du dépôt de garantie,
condamner Monsieur [C] [N] à payer à Monsieur et Madame [D] [W] à payer à Monsieur et Madame [D] [W] la somme de 67,58 € au titre de la régularisation des charges 2016,
condamner Monsieur [C] [N] à payer à Monsieur et Madame [D] [W] la somme de 1950 € au titre de la perte de jouissance,
- condamner Monsieur [C] [N] à payer à Monsieur et Madame [D] [W] la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel,
condamner le même aux entiers dépens de première instance d'appel.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 12 janvier 2022.
SUR CE
Par contrat du 28 octobre 2014, [D] [W] et [V] [O] épouse [W] ont consenti un bail d'habitation à [C] [N] portant sur un appartement situé [Adresse 1] moyennant un loyer mensuel de 650 € outre 18 € de provision mensuelle sur charges.
La date de prise d'effet du contrat a été fixée au 28 octobre 2014 et un état des lieux d'entrée était régularisé le même jour.
À l'occasion du départ du locataire le 15 septembre 2016,un procès-verbal d'état des lieux de sortie a été établi, ratifié expressément par le locataire et faisant état de plusieurs salissures et dégradations du fait du locataire de son animal décrit par le bailleur comme un chien d'attaque de type « American Staffordshire » de reprise de peinture de mauvaise qualité, de la disparition de certaines plantes du jardin privatif, du manque d'arrosage de celui-ci et de sa dégradation par le chien.
Par acte du 11 mars 2019, les bailleurs ont fait assigner le locataire devant le tribunal d'instance de Mont-de-Marsan pour le condamner à leur payer la somme de 7858,19 € au titre des réparations de remise en état après déduction du dépôt de garantie. La somme de 67,58 € au titre de la régularisation des charges 2016, la somme de 1950 € au titre de la perte de jouissance et la somme de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.
Par jugement dont appel le tribunal a partiellement fait droit aux prétentions des bailleurs et à rejeté les demandes d'indemnité de [C] [N] qui a interjeté appel de la décision.
- Sur les sommes réclamées par [D] [W] et [V] [O] épouse [W] au titre des réparations locatives :
L'article 1730 du Code civil prévoit que s'il a été fait un état des lieux entre le bailleur et le preneur, celui-ci doit rendre la chose telle qu'il a reçue, suivant cet état, excepté ce qui a péri ou a été dégradé par vétusté ou force majeure.
[C] [N] conteste son obligation à cet égard en faisant valoir que le bailleur lui-même a une obligation d'entretien des lieux loués prévue à l'article 1719 du Code civil.Ainsi l'entretien annuel du jardin ne lui incomberait pas.
Il reproche aux bailleurs de se constituer des preuves à eux-mêmes et d'en profiter pour exagérer leur demande de dédommagement en produisant des factures ne concernant pas strictement l'appartement loué mais portant notamment sur une remise en état complète des parties communes. Il produit des attestations de précédents locataires qui ont eu affaire aux mêmes bailleurs dont il ressort que ceux-ci cherchent à battre monnaie« sur le dos de leurs locataires »pour obtenir régulièrement une remise à neuf du logement même lorsque celui-ci présente un état de vétusté normal au regard d'une occupation de près de deux ans comme c'est le cas pour lui.
En l'espèce, un état des lieux a été établi à l'entrée du locataire ainsi qu'à sa sortie et [C] [N] doit donc répondre des dégradations présentées par le logement lui incombant et résultant de la comparaison entre l'état des lieux d'entrée et celui de sortie.
En effet un état des lieux établi contradictoirement par un bailleur et un preneur constate une situation de fait jusqu'à preuve contraire.
L'article 1720 du Code civil prévoit que le bailleur est tenu de délivrer la chose en bon état de réparations de toute espèce. Il doit y faire pendant la durée du bail toutes les réparations qui peuvent devenir nécessaires, autres que les locatives.
Les réparations locatives sont définies à l'article 7 de la loi du 6 juillet 1989.
Le locataire est obligé de :« prendre à sa charge l'entretien courant du logement, des équipements mentionnés au contrat et les menues réparations ainsi que l'ensemble des réparations locatives définies par décret en conseil d'État sauf celles occasionnées par vétusté, malfaçon, vice de construction, cas fortuit ou force majeure. »
Le décret N°87-712du 26 août 1987 dresse une liste des réparations locatives parmi lesquelles figurent l'entretien courant d'un jardin privatif dont le locataire l'usage exclusif notamment des allées, pelouses, massifs, bassin et piscine : taille, élagage, des arbres et arbustes remplacement des arbustes.
Il sera renvoyé à ce décret qui prévoit l'entretien des ouvertures intérieures et extérieures et le maintien en état de propreté des parties intérieures en effectuant les menus raccords de peinture et tapisserie et autres menues réparations.
Il résulte de la comparaison entre l'état des lieux d'entrée et de sortie que l'ensemble des équipements de l'appartement présente un défaut d'entretien avec un état de saleté de toutes les pièces, des volets des vitres, mais également des murs qui présentent des traces noires. Les meubles de cuisine doivent être dégraissés et lessivés. La salle de bains et les équipements sanitaires présentent le même état de saleté et d'encrassement. Il y a également des dégradations et quelques réparations à effectuer dans la cuisine avec en particulier le joint de silicone du plan de travail à refaire. Dans la salle de bains un porte-serviettes est cassé.
Cependant la lecture des factures, montre que certaines doivent être écartées, en particulier la remise en peinture complète des lieux qui n'incombe pas au locataire étant observé que certaines factures figurent en double exemplaire et que certaines dépenses concernent l'entretien des parties communes de l'immeuble.
De plus, certains travaux résultent d'un dégât des eaux déclaré tardivement par le locataire qui sera pris en charge par l'assurance et ne peuvent être mis à charge du locataire dans le cadre d'une remise en état des lieux.
Seules les factures portant sur les travaux de nettoyage extérieur et intérieur du logement pour un montant de 1690,60 €, les travaux de petites réparations extérieures et intérieures pour un montant de 439,90 € et les travaux de jardinage et remplacement des arbustes pour un montant de 165 € seront retenus soit un total de 2295,50 €.
- la demande de restitution du dépôt de garantie :
Il sera déduit de cette somme de 2295,50 € correspondant aux réparations locatives le montant du dépôt de garantie de 650 €, l'article 22 de la loi du 6 juillet 1989 prévoyant que le dépôt de garantie est restitué dans un délai maximal d'un mois à compter de la remise des clés par le locataire lorsque l'état des lieux de sortie est conforme à l'état des lieux d'entrée déduction faite, le cas échéant ,des sommes restant dues au bailleur et des sommes dont celui-ci pourrait être tenu en lieu et place du locataire sous réserve qu'elles soient dûment justifiées.
- Sur la demande de paiement de la somme de 67,58 € au titre de la régularisation des charges 2016 :
Les bailleurs justifient du montant de cette somme qui n'est pas contestée par l'appelant qui sera donc condamné au règlement de celle-ci.
- Sur la demande de paiement de dommages et intérêts pour perte de loyer :
Compte tenu du caractère aléatoire de la location d'appartement, ce préjudice allégué par les époux [W] ne sera pas indemnisé ne revêtant aucun caractère certain et directement imputable à leur ancien locataire.
- Sur la demande de dommages et intérêts de [C] [N] à l'encontre des époux [W] :
Cette demande en dommages-intérêts sur le fondement d'un préjudice moral consécutif à l'abus d'ester en justice reprochée aux époux [W] sera rejetée étant donné la teneur de la décision rendue.
[C] [N] sera condamné à payer la somme de 1500 € aux époux [W] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,
Infirmant le jugement déféré
Condamne [C] [N] à payer à [D] [W] et [V] [O] épouse[W]Ala somme de 2295,50 € au titre des réparations locatives soit après déduction du dépôt de garantie de 650 € , la somme de 1645,50 €.
Condamne [C] [N] à payer à [D] [W] et [V] [O] épouse [W] la somme de 67,58 € au titre de l'arriéré de charges.
Rejette l'ensemble des demandes de [C] [N].
Condamne [C] [N] à payer à [D] [W] et [V] [O] épouse [W] la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Dit [C] [N] tenu aux entiers dépens.
Le présent arrêt a été signé par Madame PELLEFIGUES, Présidente, et par Madame Catherine SAYOUS, greffier suivant les dispositions de l'article 456 du Code de Procédure Civile.
LA GREFFIÈRE,LE PRÉSIDENT,