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20/09/2022 | FRANCE | N°22/02539

France | France, Cour d'appel de Pau, Chambre des étrangers-jld, 20 septembre 2022, 22/02539


N°22/3340



REPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAISE



COUR D'APPEL DE PAU



L742-1 et suivants du Code de l'entrée et du séjour

des étrangers et du droit d'asile



ORDONNANCE DU vingt Septembre deux mille vingt deux





Numéro d'inscription au répertoire général RG 22/02539 - N° Portalis DBVV-V-B7G-IKHE



Décision déférée ordonnance rendue le 18 Septembre 2022 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bayonne,



Nous, Céci

le SIMON, Présidente de chambre, désignée par Ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'appel de Pau en date du 4 juillet 2022, assistée de Catherine SAYOUS, ...

N°22/3340

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAISE

COUR D'APPEL DE PAU

L742-1 et suivants du Code de l'entrée et du séjour

des étrangers et du droit d'asile

ORDONNANCE DU vingt Septembre deux mille vingt deux

Numéro d'inscription au répertoire général RG 22/02539 - N° Portalis DBVV-V-B7G-IKHE

Décision déférée ordonnance rendue le 18 Septembre 2022 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bayonne,

Nous, Cécile SIMON, Présidente de chambre, désignée par Ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'appel de Pau en date du 4 juillet 2022, assistée de Catherine SAYOUS, Greffier,

Monsieur [Z] SE DISANT [M] [F]

né le [Date naissance 1] 1986 à [Localité 5] - MAROC

de nationalité Marocaine

Retenu au centre de rétention d'[Localité 7]

Comparant et assisté de Maître Maripierre MASSOU DIT LABAQUERE, avocat au barreau de Pau.

INTIMES :

LE PREFET DES DEUX-SEVRES, avisé, absent, qui a transmis son mémoire

MINISTERE PUBLIC, avisé de la date et heure de l'audience,

ORDONNANCE :

- réputée contradictoire, après débats en audience publique,

*********

Vu l'ordonnance rendue le 18 septembre 2022 par le juge des libertés et de la détention de Bayonne, qui a :

- ordonné la jonction du dossier n°RG22/0598 au dossier n° RG22/059,

- déclaré recevable la requête de [M] [F] en contestation de placement en rétention,

- rejeté la requête de [M] [F] en contestation de placement en rétention,

- déclaré recevable la requête en prolongation de la rétention administrative présentée par le Préfet des Deux-Sèvres,

- déclaré régulière la procédure diligentée à l'encontre de [M] [F],

- dit n'y avoir lieu à assignation à résidence

- ordonné la prolongation de la rétention de [M] [F] pour une durée de vingt-huit jours à l'issue du délai de 48 heures de la rétention.

Vu la notification de l'ordonnance faite au retenu le 18 septembre 2022 à 11 heures 31.

Vu la déclaration d'appel motivée formée par [M] [F], reçue le 19 septembre 2022 à 11 heures 13.

Vu les observations du préfet des Deux-Sèvres, reçues le 20 septembre 2022 à 8 heures 54 et communiquées au conseil de l'appelant avant l'audience.

****

A l'appui de son appel, [M] [F] fait valoir dans sa déclarations deux moyens pour demander l'infirmation de l'ordonnance entreprise et sa remise en liberté :

Il fait en premier lieu grief au juge des libertés et de la détention d'avoir considéré qu'il ne disposait pas de garanties suffisantes de représentation, en retenant qu'il n'avait plus d'adresse certaine alors qu'il en a une, en lui reprochant de s'être soustrait à une assignation à résidence, ce qui est exact, mais qu'il doit être rappelé qu'il a répondu à la convocation des gendarmes de [Localité 6], témoignant ainsi de sa volonté de ne pas faire obstruction à la mesure d'éloignement prise par le préfet des Deux-Sèvres.

En second lieu, il fait grief au juge des libertés et de la détention un défaut d'examen de sa situation personnelle et une violation de l'article 8 de la C.E.D.H, dans la mesure où il est père de quatre enfants dont deux filles scolarisées et un nouveau-né d'un mois, que sa compagne, est enceinte de sept mois et rencontre des problèmes de santé de sorte qu'il se charge de l'entretien de [J] et de celui de la maison, que son placement en rétention le prive du droit de voir ses enfants, ce qui porte une atteinte manifestement disproportionnée à son droit au respect de sa vie familiale et privée.

Le conseil de [M] [F] a soutenu ces deux moyens à l'audience, ajoutant que l'appelant n'avait pas compris de que signifiait l'assignation à résidence dont il avait fait l'objet et qu'il était prêt à se soumettre à une telle mesure.

L'appelant a eu la parole en dernier, a précisé sa situation familiale et a indiqué que son passeport se trouvait chez lui.

****

Par ses observations écrites, le préfet des Deux-Sèvres conclut à la confirmation de l'ordonnance entreprise.

****

Sur ce :

En la forme, l'appel est recevable pour avoir été formé dans le délai prévu par l'article R743-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur le fond, l'examen des pièces de la procédure fait apparaître les éléments suivants quant à la situation de [M] [F].

[M] [F], ressortissant marocain né en février 1986, est entré en France en août 2008, sous couvert d'un visa long séjour « étudiant ». Il a bénéficié d'un titre de séjour « étudiant » renouvelé jusqu'au 14 octobre 2010. Par un arrêté du 14 février 2011, le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de renouveler son titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français.

[M] [F] est néanmoins resté en France, dans le département de la Vienne. Il s'est marié en [Date mariage 4] 2012 à [G] [L] [X], ressortissante française, mère de l'enfant [C], née le [Date naissance 3] 2012 qu'il avait reconnue le 9 février 2012. Il a ensuite bénéficié dans la Vienne d'un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français, valable du 24 août 2012 au 17 juillet 2013. Les conjoints se sont séparés en mars 2013.

Par un arrêté du 15 avril 2014, le préfet de la Vienne a refusé de renouveler le titre de séjour de [M] [F]. Par un jugement du 20 juin 2017, le tribunal administratif de Poitiers a confirmé cet arrêté.

A la suite de la naissance en juin 2015 de sa fille [H], dont la mère, [N] [V] est française, [M] [F] a de nouveau bénéficié dans la Vienne d'un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français, valable du 22 juin 2016 au 21 février 2017 puis renouvelé à deux reprises jusqu'au 6 mai 2020.

[M] [F] a alors demandé le renouvellement de ce titre de séjour et, par un courrier du 14 septembre 2020, la délivrance d'une carte de résident en qualité de parent d'enfant français. La commission du titre de séjour a émis un avis défavorable le 14 décembre 2021.

Par arrêté du 20 janvier 2022, le préfet des Deux-Sèvres a refusé de renouveler le titre de séjour de [M] [F] et de lui délivrer une carte de résident, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Cet arrêté précise, quant à la situation familiale de [M] [F] que ce dernier vivrait désormais avec [E] [Y], avec laquelle il aurait eu un enfant, cette femme ayant, dans une attestation, déclaré attendre un enfant de lui depuis janvier 2020.

Par arrêté du 1er août 2022, le préfet des Deux-Sèvres a assigné [M] [F] à résidence pour une durée de quarante-cinq jours à son adresse, [Adresse 2], avec obligation de pointage quotidien dans les locaux de la gendarmerie de cette commune.

[M] [F] a refusé de signer la décision d'assignation qui lui était notifiée par la Gendarmerie au motif qu'il refusait toute atteinte à sa liberté et a refusé de remettre son passeport à la gendarmerie. Sur le document, il a mentionné les motifs de son refus.

[M] [F] n'a pas respecté les obligations de son assignation à résidence, ce qui a conduit le préfet, sur autorisation du juge des libertés et de la détention, à faire procéder à une visite domiciliaire le 14 septembre 2022. Cette visite domiciliaire et les vérifications entreprises par les gendarmes, qui en ont dressé procès-verbal, ont mis en évidence que [M] [F] était en cours de déménagement et que sa dernière compagne, [E] [Y] ne vivait plus à cette adresse depuis mars 2022.

Contacté par téléphone par les gendarmes, [M] [F] s'est présenté, a été placé en garde à vue, a été entendu sur le non respect de son assignation à résidence. A l'issue, il a fait l'objet de la mesure de rétention contestée.

A l'audience, [M] [F] a précisé qu'il était père de quatre enfants : [C], [H], [J], né en 2020, dont la mère est [E] [Y], avec laquelle il partageait le domicile de [Localité 6], et enfin [P], né en août 2022, dont la mère est [R] [I]. Il a confirmé qu'il avait fait l'objet d'une procédure pour violences conjugales sur la personne de [E] [Y] en avril 2022, fait mentionné par les écrits du préfet.

S'agissant premier moyen relatif aux garanties de représentation de [M] [F], ainsi que cela vient d'être rappelé ci-dessus, la procédure établit que [M] [F] ne dispose plus d'un domicile certain à [Localité 6], qu'il était séparé de sa compagne depuis plusieurs mois et qu'il était manifestement en cours de déménagement. En outre, il a refusé de se plier aux obligations de la mesure d'assignation à résidence prise par le préfet le 1er août 2022.

Lorsqu'il a été entendu à ce sujet par les gendarmes de [Localité 6] le 14 septembre 2022, il a déclaré notamment « Comme je n'ai pas signé et comme je ne me suis pas présenté une seule fois, c'est un refus total. Je veux une explication, je ne peux pas suivre une décision basée sur une erreur. Soit il modifie leur erreur, soit je continue jusqu'à ce que j'ai raison ». Rappelons que le tribunal administratif a rejeté le recours formé par [M] [F] à l'encontre de l'arrêté du 20 janvier 2022 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi.

C'est donc à juste titre que le juge des libertés et de la détention a considéré que [M] [F] ne présentait pas de garanties de représentation effectives, étant observé qu'il s'est par le passé déjà soustrait à une mesure d'éloignement et qu'il a clairement manifesté sa détermination à se maintenir sur le territoire français.

Sur le second moyen pris de l'atteinte au droit de mener une vie familiale et normale et de la violation de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il doit être rappelé que le tribunal administratif, dans son jugement très récent du 8 juillet 2022, a retenu les motifs suivants :

« Il ressort des pièces du dossier que M. [F] est le père d'une enfant française, [H], née en juin 2015. Il a produit une attestation de la mère de sa fille, en date du 10 septembre 2020, qui déclare qu'il verse une pension alimentaire de cent euros par mois depuis le mois de décembre 2019, conformément à un jugement du tribunal de Niort du 13 décembre 2019. Toutefois, le requérant ne justifie de versements qu'au titre des mois de mars à octobre 2020 et ne produit, outre une attestation de scolarité pour l'année 2020-2021, aucun autre élément de nature à établir qu'il contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de sa fille française, avec laquelle il ne vit plus. Par suite, en refusant de renouveler son titre de séjour en qualité de parent d'enfant français et de lui délivrer la carte de résident sollicitée, le préfet n'a pas fait une inexacte application des dispositions des articles L. 423-7 et L. 423-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précités. ».

Aucun justificatif n'est produit devant nous par [M] [F] pour démontrer qu'il entretient des liens effectifs avec [C], ou encore [H], pas plus qu'il n'est produit de document attestant qu'il contribue à l'entretien et l'éducation de [J] et s'en occupe, alors qu'il est séparé de la mère de l'enfant sur lequel il a exercé des violences dites conjugales, ou encore qu'il contribue à l'entretien et l'éducation du dernier-né [P] et s'en occupe.

Ainsi, il n'est pas établi une atteinte à son droit de mener une vie familiale et normale.

En tout état de cause, [M] [F] a refusé de remettre son passeport.

Or, il résulte des dispositions de l'article L743-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qu'une assignation à résidence ne peut être ordonnée par le juge qu'après remise à un service de police ou à une unité de gendarmerie de l'original du passeport et de tout document justificatif de son identité en échange d'un récépissé valant justification de l'identité et sur lequel est portée la mention de la décision d'éloignement en instance. En l'état, aucune assignation à résidence ne peut être judiciairement ordonnée.

En conséquence, il convient de confirmer l'ordonnance entreprise.

PAR CES MOTIFS :

DECLARONS l'appel recevable.

CONFIRMONS l'ordonnance entreprise.

Disons que la présente ordonnance sera notifiée à l'étranger, à son conseil, à la préfecture des Deux-Sèvres.

Rappelons que la présente ordonnance peut être frappée d'un pourvoi en cassation dans le délai de deux mois à compter de sa notification, par déclaration déposée au greffe de la Cour de Cassation par l'intermédiaire d'un Avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation.

Fait au Palais de Justice de PAU, le vingt Septembre deux mille vingt deux à

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,

Catherine SAYOUSCécile SIMON-ROUX

Reçu notification de la présente par remise d'une copie

ce jour 20 Septembre 2022

Monsieur [Z] SE DISANT [M] [F], par mail au centre de rétention d'[Localité 7]

Pris connaissance le :À

Signature

Maître Maripierre MASSOU DIT LABAQUERE, par mail,

Monsieur le Préfet des Deux-Sèvres, par mail


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Chambre des étrangers-jld
Numéro d'arrêt : 22/02539
Date de la décision : 20/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-20;22.02539 ?
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