N°22/03182
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PAU
ORDONNANCE
CHAMBRE SPÉCIALE
Hospitalisation sous contrainte
8 septembre 2022
Dossier N°
N° RG 22/00044 - N° Portalis DBVV-V-B7G-IJ22
Objet :
Recours contre la décision du JLD statuant en application des articles L 3211-12-1 et suivants du code da la santé publique
Affaire :
[T] [R]
C/
CENTRE HOSPITALIER [6],
LE PREFET DES PYRENEES-ATLANTIQUES, ADTMP
Nous, Christel CARIOU, Conseillère, Secrétaire Générale à la Cour d'Appel de PAU, désignée par ordonnance de Monsieur le Premier Président en date du 4 juillet 2022, statuant en application des dispositions des articles R3211-18 et suivants du code de la santé publique, avons rendu après débat contradictoire tenu le 7 septembre 2022, l'ordonnance suivante à l'audience du 8 septembre 2022,
Avec l'assistance de Madame GABAIX-HIALE, Greffier
ENTRE :
Madame [T] [R]
[Adresse 3]
Actuellement au centre hospitalier [6]
[Localité 4]
comparante en personne
Assistée de Me Carine marguerite MAGNE, avocat au barreau de PAU
Suite à une ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de PÄU, en date du 29 Août 2022,
ET :
CENTRE HOSPITALIER [6]
[Adresse 1]
[Localité 5]
LE PREFET DES PYRENEES-ATLANTIQUES
Ars
L'ADTMP
[Adresse 2]
[Localité 4]
Monsieur Le Directeur du centre hospitalier de [Localité 9], avisé, non comparant,
Monsieur le Préfet des Pyrénées-Atlantiques, avisé, non comparant,
L'ADTMP, curateur, avisé, non comparant,
PARTIE JOINTE : Ministère public
Ouï à l'audience publique tenue le 7 septembre 2022 :
- Madame la Présidente en son rapport,
- l'appelante en ses explications,
- le conseil de l'appelant en ses conclusions orales,
- le Ministère Public, en ses réquisitions écrites,
- En cet état l'affaire a été mise en délibéré conformément à la loi
****************
Madame [T] [R] a été hospitalisée le 19 août 2022 en soins psychiatriques sans consentement sous la forme d'une hospitaliation complète, sur décision du représentant de l'Etat au centre hospitalier [6] à [Localité 9].
Sur saisine du Préfet des Pyrénées-Atlantiques en date du 23 août 2022, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Pau a, suivant ordonnance du 29 août 2022, confirmé la mesure de soins sans consentement sous le régime d'une hospitalisation complète prise à l'égard de Madame [T] [R].
Cette ordonnance lui a été notifiée le jour même.
Par courrier du 29 août transmis par le centre hospitalier [6] et reçu au greffe de la cour d'appel, Madame [T] [R] en a interjeté appel.
Mme [T] [R] se présente à l'audience. Elle ne soulève aucune irrégularité liée à la présente procédure.
Me Carine MAGNE, son conseil, sollicite la mainlevée de la mesure conformément au souhait de sa cliente. Elle fait état de sa situation personnelle difficile, de sa souffrance suite à la séparation d'avec ses enfants et de ses hospitalisations régulières depuis 2011.
Le Ministère public, dans ses réquisitions écrites du 6 septembre 2022, conclut à la confirmation de l'ordonnance.
Ni le directeur du centre hospitalier [6] ni le Préfet des Pyrénées-Atlantiques ne sont présents à l'audience.
L'ADTMP, son curateur, a fait parvenir un rapport à la cour d'appel, par mail du 6 septembre 2022. Il décrit une situation familiale complexe, un déni de la pathologie. Mme [T] [R] juge par ailleurs la mesure de curatelle inutile et reste très discrète sur sa vie sociale.
MOTIFS DE LA DECISION
Il résulte des pièces du dossier et de l'arrêt rendu précédemment que Mme [T] [R] a été hospitalisée sous contrainte le 11 juin 2021, au centre hospitalier de [Localité 8] puis de [Localité 7]. Le certificat médical du même jour du docteur [Z] [M] [C] faisait état de de bizarreries du comportement avec impulsivité sous-jacente et suspicion de consommation massive de cannabis ayant favorisé l'apparition des éléments de persécution. L'adhésion aux soins s'avérait en outre nulle.
Mme [T] [R] était transférée au bout de quelques jours au centre hospitalier [6] à [Localité 10], son secteur de domiciliation.
Elle bénéficiait d'un programme de soins à compter du 28 septembre 2021.
Le 18 janvier 2022, le docteur [G] [A] [Y] sollicitait la réintégration de Mme [T] [R] en hospitalisation complète au regard de la réapparition de sentiments délirants de persécution et le non-respect du programme de soins'; elle était réintégrée le 19 janvier 2022.
Elle bénéficiait à nouveau d'un programme de soins à compter du 23 mars 2022.
Le 10 mai 2022, le docteur [S] [V] rédigeait un certificat de réintégration en hospitalisation complète au regard d'une rupture de traitement, Mme [T] [R] étant par ailleurs en rupture de traitement depuis plusieurs semaines.
Il était fait état dans le certificat du docteur [W] [B] du 17 mai 2022 d'une absence de critique des éléments délirants persécutifs qu'elle rationalise de manière morbide et d'une persistance des idées délirantes à thématique mystique.
Dans un certificat médical du 19 août 2022, le docteur [F] [U] sollicitait la transformation de la mesure d'hospitalisation de Mme [T] [R] en hospitalisation complète en raison d'un péril imminent. Il indiquait dans son certificat que l'alliance aux soins est médiocre avec un mauvais insight et pointe des difficultés de prise en charge avec une dangerosité potentielle nécessitant une évaluation en unité pour malades difficiles.
La mesure était transformée en SDRE par arrêté du préfet du 19 août 2022.
Les certificats médicaux successifs soulignaient la nécessité de maintenir la mesure sous cette forme':
- Le docteur [P] [E], le 20 août 2022, décrivait une bizarrerie de contact, le persistance d'idées délirantes de thématiques mystiques et de persécution avec adhésion totale. La conscience des troubles est absente avec une mauvaise adhésion aux soins';
- Le docteur [W] [B], le 22 août 2022, décrit un discours délirant avec une adhésion totale et une absence de conscience des troubles et une négociation permanente de la prise de traitement.
- Le docteur [F] [U], le 25 août 2022 reprenait les mêmes termes et préconisait la poursuite de l'hospitalisation sous contrainte pour finaliser la procédure de transfert en UMD suite à l'accord de l'UMD de Montfavet le 11 août 2022.
Par ordonnance du 29 août 2022, le juge des libertés et de la détention a confirmé la mesure de soins sans consentement sous le régime d'une hospitalisation complète.
Dans son dernier certificat médical du 5 septembre 2022, le docteur [F] [U] décrit la persistance d'un discours délirant teinté d'éléments de persécution centré sur les soignants du CHP, mystiques et de grandeur.
* Sur la recevabilité de l'appel
L'ordonnance du juge des libertés et de la détention a été notifiée à Mme [T] [R] le 29 août 2022.
Elle a interjeté appel par courrier du 29 août 2022 adressé par mail à la cour d'appel le jour-même.
Il y lieu de déclarer l'appel recevable.
* Sur le bien-fondé de la mesure d'hospitalisation sous contrainte
Lors de l'audience, Mme [T] [R] a contesté la décision d'hospitalisation sous contrainte sous cette nouvelle forme indiquant qu'elle ne souffrait d'aucun délire mais seulement d'anxiété. Elle affirme accepter son traitement mais nie tout délire de persécution estimant qu'elle est véritablement persécutée par ses voisins. Elle nie également toute agression indiquant qu'elle n'avait fait que se défendre d'une patiente qui s'en était prise à elle.
Il ressort cependant du dossier que Mme [T] [R], âgée de 34 ans, est connue du secteur psychiatrique depuis plusieurs années. Son hospitalisation en juin 2021 a pour origine des troubles du comportement sur la voie publique dans un contexte de décompensation délirante. Sa réintégration en mai 2022 fait suite à une errance dans les bois pendant plusieurs jours avec tentative de suicide. Elle a de nouveau commis un passage à l'acte auto-agressif à l'hôpital. A l'audience, elle présente les symptômes décrits par les médecins à savoir notamment une tension palpable, une idée de persécution et une absence de conscience de ses troubles.
L'audience n'a pas permis d'apporter une appréciation différente de celle des médecins psychiatres.
Dès lors, s'agissant du bien-fondé actuel de l'hospitalisation complète, il ressort du dossier mais également de l'audience que Mme [T] [R] n'a aucune conscience de la gravité de ses troubles et de la nécessité de les traiter sous contrainte. Elle présente toujours à l'heure actuelle des troubles du comportement persistants qui nécessitent des soins et une période d'observation en UMD pour une personne en grande difficulté sociale et personnelle qui présente une dangerosité potentielle.
Au vu de ces troubles du comportement persistants, de la dénégation de Mme [T] [R] et de la nécessité de lui administrer des soins adaptés, l'hospitalisation sous contrainte apparaît toujours adaptée.
Dès lors, dans ces conditions et au vu des certificats médicaux successifs préconisant tous le maintien de la mesure d'hospitalisation, la poursuite de la mesure de soins sans consentement sous la forme de l'hospitalisation complète demeure actuellement nécessaire dans la perspective d'une amélioration de l'état de Mme [T] [R].
Dès lors, il convient de confirmer l'ordonnance du 29 août 2022.
Les dépens resteront à la charge du Trésor public.
PAR CES MOTIFS
Après en avoir délibéré, statuant publiquement, par décision mise à disposition au greffe, par ordonnance réputée contradictoire et en dernier ressort,
Déclarons recevable l'appel formé par Madame [T] [R],
Confirmons l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Pau en date du 29 août 2022,
Laissons les dépens à la charge du Trésor Public.
Le Greffier, P/ Le Premier Président,
La Conseillère
S. GABAIX-HIALE C. CARIOU