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06/09/2022 | FRANCE | N°19/00814

France | France, Cour d'appel de Pau, 1ère chambre, 06 septembre 2022, 19/00814


MARS / MS



Numéro 22/03124





COUR D'APPEL DE PAU



1ère Chambre







ARRÊT DU 06/09/2022







Dossier : N° RG 19/00814 - N° Portalis DBVV-V-B7D-HGAJ





Nature affaire :



Demande en réparation des dommages causés par des véhicules terrestres à moteur















Affaire :



Compagnie MMA IARD



Compagnie MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES





C/


r>[Y] [R]



CPAM PAU-PYRÉNÉES



SA ALLIANZ IARD













Grosse délivrée le :



à :

















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R E T



prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 06 Septembre 20...

MARS / MS

Numéro 22/03124

COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRÊT DU 06/09/2022

Dossier : N° RG 19/00814 - N° Portalis DBVV-V-B7D-HGAJ

Nature affaire :

Demande en réparation des dommages causés par des véhicules terrestres à moteur

Affaire :

Compagnie MMA IARD

Compagnie MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES

C/

[Y] [R]

CPAM PAU-PYRÉNÉES

SA ALLIANZ IARD

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 06 Septembre 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 11 Avril 2022, devant :

Madame ROSA-SCHALL, Conseillère faisant fonction de Présidente, qui a fait le rapport et Monsieur SERNY, magistrat honoraire

assistés de Madame DEBON, faisant fonction de Greffière, présente à l'appel des causes,

Madame ROSA-SCHALL, en application des articles 786 et 907 du code de procédure civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries, en présence de Monsieur SERNY et en a rendu compte à la Cour composée de :

Madame DUCHAC, Présidente

Madame ROSA-SCHALL, Conseillère

Monsieur SERNY, magistrat honoraire

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTES :

Compagnie MMA IARD SA

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Compagnie MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES SA

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentées et assistées de Maître ANCERET de la SARL ANCERET-FAISANT-DUPOUY, avocat au barreau de BAYONNE

INTIMES :

Monsieur [Y] [R]

né le [Date naissance 5] 1983 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représenté par Maître BUROSSE-GOURGUE de la SCP BLANC & BUROSSE-GOURGUE, avocat au barreau de BAYONNE

Assisté de Maître LE BONNOIS de la SELARL Cabinet Rémy LE BONNOIS, avocat au barreau de PARIS

CPAM PAU-PYRÉNÉES

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Assignée

SA ALLIANZ IARD

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1],

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Maître MARIOL de la SCP LONGIN/MARIOL, avocat au barreau de PAU

Assistée de Maître RISPAL-CHATELLE de la SCP LEMONNIER-DELION-GAYMARD RISPAL-CHATELLE, avocat au barreau de PARIS

sur appel de la décision

en date du 21 JANVIER 2019

rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BAYONNE

RG numéro : 17/02169

Le 3 septembre 2015, Monsieur [Y] [R] a été victime d'un accident de la circulation.

La motocyclette qu'il conduisait, assurée par la société Allianz, a été percutée par un véhicule conduit par Madame [W] et assuré par Covea Risks aux droits de laquelle sont venues les SA Mutuelles du Mans Assurances IARD, assurances mutuelles et MMA Mutuelles du Mans Assurances IARD.

Monsieur [Y] [R] a été blessé lors de cet accident, victime notamment d'une fracture fémorale diaphysaire gauche, d'une fracture sternale, d'un hémothorax droit de faible abondance et d'une lésion du flanc gauche.

Une expertise a été ordonnée par ordonnance de référé du 6 décembre 2016.

Le docteur [U] désigné à la suite d'une ordonnance de remplacement d'expert du 12 janvier 2017 a déposé son rapport le 30 mai 2017.

Par acte d' huissier du 15 novembre 2017, Monsieur [Y] [R] a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Bayonne, les sociétés Mutuelles du Mans Assurances IARD aux fins d'obtenir l'indemnisation de son entier préjudice et que le jugement soit rendu commun à Allianz et à la CPAM de Pau.

Par jugement réputé contradictoire (la CPAM de Pau n'a pas comparu) du 21 janvier 2019, le tribunal a fait droit à la demande de liquidation des préjudices de Monsieur [Y] [R] et a :

- déclaré la SA Mutuelles du Mans Assurances IARD Assurances Mutuelles et la SMA Mutuelles du Mans Assurances IARD tenues de réparer l'intégralité du préjudice de Monsieur [Y] [R],

- condamné la SA Mutuelles du Mans Assurances IARD Assurances Mutuelles et la SMA Mutuelle du Mans assurances IARD à payer à Monsieur [Y] [R] la somme de 109 350,66 € avec intérêts au taux légal à compter de ce jour,

- Dit que les intérêts échus sur une année entière produiront intérêts au taux légal,

- condamné la SA Mutuelles du Mans Assurances IARD Assurances Mutuelles et la SMA Mutuelles du Mans Assurances IARD à payer à la SA Allianz IARD la somme de 12 611,45 €, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour,

- condamné la SA Mutuelles du Mans Assurances IARD Assurances Mutuelles et la SMA Mutuelles du Mans Assurances IARD à payer à Monsieur [Y] [R] la somme de 3 000 € et à la SA Allianz IARD la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SA Mutuelles du Mans Assurances IARD, Assurances Mutuelles et la SMA Mutuelles du Mans Assurances IARD aux dépens, outre le coût de l'expertise judiciaire,

- déclaré le jugement commun à la caisse primaire d'assurance maladie de Pau,

- ordonné l'exécution provisoire.

Le 8 mars 2019 les sociétés d'assurance SA Mutuelles du Mans Assurances - ci-après MMA-IARD - et SA Mutuelles du Mans Assurances IARD assurances mutuelles ont interjeté appel de ce jugement.

Le 6 août 2019, Monsieur [R] a signifié ses conclusions à la CPAM des Pyrénées-Atlantiques qui n'était pas intimée ; le 26 octobre 2020 les MMA ont assigné en appel provoqué la CPAM des Pyrénées-Atlantiques.

Par conclusions n° 2 du 21 septembre 2019, la société MMA IARD et la société MMA IARD assurances mutuelles demandent de confirmer le jugement du 21 janvier 2019 en ce qu'il a :

- Déclaré la SA MMA IARD et SA MMA IARD Assurances Mutuelles tenues à réparer l'intégralité du préjudice de Monsieur [Y] [R],

- Déduit des sommes allouées la provision de 6 000 € déjà versée,

- Fixé le préjudice esthétique permanent à la somme de 2 500 €,

- Débouté Monsieur [R] de sa demande de remboursement de billets d'avion pour les USA à hauteur de 1 011,30 €.

Elles demandent d'infirmer le jugement en ce qu'il a :

- Alloué à Monsieur [R] une somme totale de 109 350,66 € en réparation de son préjudice,

- Condamné la SA MMA IARD et SA MMA IARD Assurances Mutuelles à régler à Allianz la somme de 12 611,45 €,

- Condamné la SA MMA IARD et SA MMA IARD Assurances Mutuelles à verser à Monsieur [R] la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et 1 500 € pour Allianz.

Statuant à nouveau, elles demandent de débouter Monsieur [R] de ses demandes relatives :

- Aux dépenses de santé,

- Aux honoraires de son médecin-conseil le Dr [J],

- Aux pertes de gains professionnels actuels,

- Aux pertes de gains professionnels futurs,

- Au préjudice sexuel.

Et de dire que les indemnités allouées à Monsieur [R] ne sauraient être supérieures aux sommes suivantes :

- 70,20 € au titre des frais de téléphone,

- 6,13 € au titre des frais de photocopie,

- 2.576 € au titre de l'assistance à tierce personne,

- 5.000 € au titre de l'incidence professionnelle,

- 3.067 € au titre du déficit fonctionnel temporaire,

- 12.000 € au titre des souffrances endurées,

- 500 € au titre du préjudice esthétique temporaire,

- 8.400 € au titre du déficit fonctionnel permanent,

- 1.800 € au titre du préjudice d'agrément,

- de dire que la créance de la société Allianz sera réduite à la somme de 11.477,45 € et de débouter Monsieur [R] de ses autres demandes, fins et prétentions.

À titre subsidiaire, elles demandent de réduire de 50 % les éventuelles indemnités allouées pour les postes de perte de gains professionnels actuels et perte de gains professionnels futurs, car ces préjudices doivent s'analyser comme une perte de chance.

- de dire que la perte de chance d'être embauché à temps plein et d'obtenir une rémunération ne peut être indemnisée deux fois, l'une sur le poste des pertes de salaire et l'autre sur le poste de l'incidence professionnelle.

En tout état de cause, elles demandent de réduire les sommes allouées à Monsieur [R] et à Allianz au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance et de dire que chaque partie conservera ses propres honoraires et dépens d'appel.

Par conclusions n° 4 du 22 février 2022, Monsieur [Y] [R] demande de confirmer le jugement en ce qu'il a :

- déclaré les MMA tenues de réparer l'intégralité de son préjudice et de rejeter les demandes, fins et conclusions des MMA.

- condamné les MMA à lui payer les sommes suivantes :

- 119,63 € au titre des dépenses de santé,

- 4 000 € au titre du déficit fonctionnel temporaire,

- 4 000 € au titre du préjudice esthétique temporaire,

- 11 000 € au titre du déficit fonctionnel permanent,

- 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Il demande d'infirmer le jugement pour le surplus et de condamner les MMA à lui payer les indemnités suivantes :

- 5 497,63 € au titre des frais divers,

- 6 240 € au titre de la tierce personne,

- 12 366,70 € au titre des PGPA,

- 30 000 € au titre de l'incidence professionnelle,

- 208 000 € au titre des PGPF,

- 20 000 € au titre des souffrances endurées,

- 6 000 € au titre du préjudice esthétique définitif,

- 5 000 € au titre du préjudice d'agrément,

- 5 000 € au titre du préjudice sexuel,

- 4 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens avec distraction au profit de la SCP Blanc & Burosse Gourgue, avocat, par application des articles 699 et suivants du code de procédure civile.

- De juger que les sommes porteront intérêt au taux légal à compter de l'assignation avec capitalisation des intérêts légaux par application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil.

- De rendre l'arrêt à intervenir commun à la CPAM de Pau et à Allianz.

Par conclusions n° 2 du 16 octobre 2019 la société Allianz IARD demande au visa de l'article 29 de la Loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 modifié par la Loi n° 94-678 du 8 août 1994 et l'article L.131-2 du code des assurances, de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions à son égard et de débouter la SA Mutuelles du Mans Assurances IARD Assurances Mutuelles, et la SA Mutuelles du Mans Assurances IARD de toutes leurs demandes fins et prétentions dirigées à l'encontre de la SA Allianz IARD.

Pour le surplus, elle demande de condamner in solidum la SA Mutuelles du Mans Assurances IARD Assurances Mutuelles, et la SA Mutuelles du Mans Assurances IARD à lui verser la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel et aux entiers dépens d'instance dont distraction au profit de Maître Olivia Rispal-Chatelle représentant la SCP Lemonnier -Delion-Gaymard Rispal-Chatelle suivant les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La CPAM de Pau n'a pas constitué avocat. Elle avait communiqué en première instance, le 15 novembre 2017, le montant de ses débours définitifs, créance arrêtée le 30 août 2017 à un total de 62 068,84 €.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 mars 2022.

Sur ce :

Le jugement n'est pas contesté en ce qu'il a déclaré la SA MMA IARD et la SA MMA IARD Assurances mutuelles tenues de réparer l'intégralité du préjudice de Monsieur [Y] [R], ni en ce qu'il a déclaré le jugement commun à la caisse primaire d'assurance maladie de Pau.

Sur la liquidation du préjudice de Monsieur [Y] [R]

Il n'est pas discuté par les parties, que l'indemnisation du préjudice de Monsieur [Y] [R] intervienne en vertu des dispositions de la loi du 5 juillet 1985.

La consolidation de Monsieur [Y] [R] a été fixée par l'expert à la date du 15 décembre 2016. Il était alors âgé de 33 ans pour être né le [Date naissance 5] 1983.

Sur les préjudices patrimoniaux

Sur les dépenses de santé actuelles

Les frais hospitaliers, médicaux, pharmaceutiques, d'appareillage, de transport pris en charge par la CPAM se sont élevés à la somme totale de 43 435,54 €.

Les frais santé pris en charge par la société Allianz se sont élevés à la somme de 12 611,45 €.

Les appelantes contestent la créance de la société Allianz considérant que le forfait journalier hospitalier - 1 134 € - ne constitue pas un préjudice pour la victime puisqu'il représente des frais d'entretien qui auraient été en toute hypothèse exposés.

Si cette demande de prise en charge aurait pu être sollicitée au titre des frais divers, il est constant que ces dépenses sont imputables à l'accident et que ces frais d'hébergement et d'entretien dans l'établissement de santé s'ajoutent aux charges que la victime continue à exposer pour son domicile. En outre, la société Allianz IARD fait exactement observer, que ce forfait hospitalier est fixé par arrêté ministériel et s'impose au patient.

C'est donc par de justes motifs que le tribunal a condamné les sociétés mutuelles du Mans assurances IARD à payer à la société Allianz IARD la somme de 12 611,45 € avec intérêts au taux légal à compter du jugement.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Monsieur [R] justifie, par ses pièces 8 et 9, que sont restés à sa charge, 105,33 € de frais de pharmacie et 14,30 € de frais d'infirmier, en sorte que c'est par des motifs exacts, que le premier juge a retenu la somme de 119,63 € de ce chef de préjudice.

Sur les frais divers

Les frais de téléphonie et de télévision (70,20 €) et les frais de photocopies (6,13 €) alloués par le premier juge ne sont pas contestés.

Sont contestés par les sociétés MMA IARD appelantes, les honoraires d'assistance du médecin-conseil au motif qu'ils sont excessifs et qu'il n'est pas justifié qu'ils n'aient pas été pris en charge par l'assureur Allianz.Elles soutiennent également que les frais liés au médecin-conseil sont inclus dans l'article 700 du code de procédure civile qui a été alloué par le tribunal.

Le premier juge avait alloué la somme demandée de 4 410 €.

S'agissant des frais d'assistance à expertise contradictoire, s'il est admis qu'ils doivent être indemnisés, Monsieur [R] doit apporter la preuve que ces frais sont restés à sa charge, or, il ne verse aux débats que les 4 notes d'honoraires du docteur [L] [J] et hormis la mention d'une provision de 270 € versée le 10 décembre 2015 par chèque Le Bonnois, il n'est pas établi, que Monsieur [R] ait supporté le coût de l'ensemble de ces honoraires observation faite que le rapport du docteur [J] mentionne dans son en-tête, le docteur [P] et la société Allianz.

En conséquence, il lui sera alloué de ce chef la somme de 270 €.

Est contesté par Monsieur [R], le rejet de sa demande afférente au remboursement de ses billets d'avion.

Le poste frais divers avant consolidation vise à indemniser la victime de toutes les dépenses exposées à titre temporaire, qui ont été rendues nécessaires par le fait générateur, en sorte que c'est à bon droit, que le premier juge n'a pas fait droit à cette demande de Monsieur [R] du remboursement de ses frais d'avion dont le voyage a été annulé.

L'aide à tierce personne

L'expert a précisé qu'elle avait été nécessaire 2 heures par jour du 5 novembre 2015 au 5 février 2016 et pendant les week-ends thérapeutiques.

Il résulte du rapport d'expertise que Monsieur [R] s'est déplacé avec 2 cannes anglaises du 5 novembre 2015 au 5 février 2016 et qu'il s'est déplacé en fauteuil roulant lors des week-ends thérapeutiques alors qu'il était aux Embruns, lorsqu'il portait une poche de recueil.

L'expert précise que l'aide était nécessaire 2 heures par jour pour les courses, le ménage, les soins d'hygiène et l'habillage.

Le premier juge a alloué une somme de 16 € de l'heure, sur la base de 2 heures par jour pendant 88 jours et 2 heures par jour pendant 8 week-ends soit un total de 3 328 € en sorte que contrairement à ce que soutiennent les sociétés MMA IARD le tribunal n'a pas statué ultra petita puisque Monsieur [R] sollicitait une somme de 4 695,67 €.

Elles demandent de retenir un taux de 14 € de l'heure et une période de 85 jours en raison, d'une part, de 8 jours d'hospitalisation et d'autre part, de ce que les week-ends ne sont en réalité qu'une journée, celle de fermeture hebdomadaire du centre de rééducation le dimanche et proposent ainsi d'allouer une somme de 2 576 €.

Monsieur [R] demande que lui soit allouée une somme de 6 240 € sur la base de 2 heures par jour, à 30 € de l'heure, et pour les périodes de 88 jours et 16 jours.

Pour la période du 5 novembre 2015 au 5 février 2016, la durée de 88 jours retenue par le premier juge tient compte des journées d'hospitalisation du 17 au 19 décembre 2015, puis du 6 janvier et du 15 janvier.

Concernant les 8 week-ends, aucune pièce ne démontre qu'ils se soient limités à la seule journée du dimanche comme soutiennent les appelantes, il convient donc de retenir 16 jours.

Au regard de la nature de l'aide apportée à raison de cette perte d'autonomie limitée à certaines tâches, les courses, le ménage, les soins d'hygiène et l'habillage, aide de nature familiale, il convient de retenir un taux horaire de 20 €.

En conséquence, il sera alloué à Monsieur [R] la somme de 3 520 € pour la période de 88 jours et de 640 € pour la période de 16 jours soit un total de 4 160 €.

Sur la perte de gains professionnels actuels

Les sociétés MMA IARD demandent d'infirmer le jugement et de débouter Monsieur [R] de cette demande en faisant observer qu'il était sans emploi lors de l'accident et que la promesse d'embauche qu'il a produite n'a pas de valeur probante puisqu'il devait partir en vacances aux États-Unis à la date où il était censé être embauché.

À titre subsidiaire, elles demandent, si la cour retient la promesse d'embauche, que l'indemnisation soit évaluée comme une perte de chance de rémunération en l'absence de contrat travail dûment régularisé en rappelant que cette perte de chance ne pourra plus être examinée dans le cadre de l'incidence professionnelle.

Monsieur [R] fait valoir qu'il devait être employé comme pizzaiolo à compter du 8 septembre 2015 pour un salaire net mensuel de 2 000 €. Il demande d'infirmer le jugement et que lui soit allouée la somme de 12 366,70 € déduction faite des indemnités journalières que lui a versées la CPAM.

Monsieur [R] n'a pas justifié de sa situation professionnelle et de ses revenus dans les années précédant l'accident ni communiqué aucun document concernant sa formation professionnelle. Il a uniquement indiqué être chef de cuisine. Aucun justificatif de ses emplois avant l'accident n'a été produit.

En 2015, sa déclaration de revenus démontre qu'il avait un revenu mensuel moyen de 1 445,82 €, soit 862,91 € au titre de salaires et 582,91 € au titre d'autres revenus salariaux.

Du 1er janvier 2015 au 1er janvier 2017, pendant 160 jours, il a perçu une allocation d'aide au retour à l'emploi de 47,33 € par jour.

Monsieur [R] produit un courrier du 24 août 2015,aux termes duquel lui est confirmé son embauche en CDI de 39 heures par semaine à compter du 8 septembre 2015, pour un salaire de 2 000 € par mois, toutefois, comme le font remarquer les sociétés MMA IARD, rien ne démontre que cette promesse d'embauche ait été acceptée par Monsieur [R] ce d'autant qu'il avait organisé son voyage à New York du 28 septembre 2015 au 13 octobre 2015 dont la facturation est intervenue le 26 août.

Dans ces circonstances, et quand bien même Monsieur [S] affirme dans un autre courrier, qu'il devait bien l'embaucher le 8 septembre 2015, nonobstant ce voyage, le caractère certain de cette embauche dont rien ne prouve qu'elle était acceptée, ne peut pas être retenu.

En conséquence, infirmant le jugement de ce chef, la perte de gains professionnels actuels sera fixée, pour mémoire, au montant des indemnités journalières versées par la caisse primaire d'assurance maladie de Pau, soit la somme de 18 633,33 € et Monsieur [Y] [R] sera débouté de cette demande d'indemnités.

Sur l'incidence professionnelle

Les sociétés MMA IARD font valoir qu'elle ne peut être que très modérée et proposent de la limiter à un maximum de 5 000 €.

Monsieur [R] soutient que la réduction de ses capacités physiques est génératrice de contraintes au quotidien et entraîne une pénibilité importante au travail ainsi qu'une dévalorisation de sa capacité de travail sur le marché de l'emploi. Pour autant, il ne conteste pas qu'il peut travailler mais il fait observer qu'en l'absence de diplôme il ne peut pas prétendre à un travail de bureau.

Il demande d'infirmer le jugement et de lui allouer une somme de 30 000 €.

L'expert a retenu une pénibilité accrue sur le plan professionnel et une perte de chance d'être embauché à plein temps.

Il avait en effet relevé dans son examen, outre une marche avec une légère boiterie, un accrouplissement incomplet à gauche et une station debout monopodale gauche difficilement maintenue, séquelles de l'accident qui peuvent entraîner une augmentation de la fatigabilité au travail dans la restauration ou dans le cadre de sa reconversion professionnelle envisagée dans un premier temps par l'ouverture d'un garage automobile en mai 2018, après avoir été suivi par Cap emploi pour une reconversion professionnelle. Monsieur [R] a également fait part d'un projet, qui n'a pu aboutir, d'ouvrir un bar à Majorque.

Compte tenu de ces éléments, le jugement, sera confirmé en ce qu'il a alloué une somme de 20 000 € au titre de l'incidence professionnelle.

Sur la perte de gains professionnels futurs

Les sociétés MMA IARD demandent d'infirmer le jugement et de débouter Monsieur [R] de cette demande et à titre subsidiaire, de ne retenir qu'une indemnité réduite de 50 % correspondant à une perte de chance d'emploi en qualité de pizzaiolo.

Elles font observer qu'aucun avis d'imposition pour les années antérieures à l'accident n'a été produit, que Monsieur [R] a ensuite monté une entreprise de garage automobile en mai 2018, puis est revenu vers un projet d'ouverture d'un bar à Majorque.

Monsieur [R] demande de lui allouer une somme de 208 000 € en considération de l'emploi de pizzaiolo pour lequel il devait percevoir 2 000 € par mois.

La cour ayant écarté cette promesse d'embauche pour les motifs ci-dessus exposés, la demande ne peut pas être examinée de ce chef.

Par ailleurs, aucun justificatifs des revenus antérieurs à l'accident, hormis les allocations-chômage versées à partir du 25 janvier 2015, n'ont été communiqués pour permettre de déterminer le revenu net annuel imposable Monsieur [Y] [R] avant l'accident.

Comme il a été indiqué, en 2015, Monsieur [R] avait un revenu mensuel moyen de 1 445,82 €.

En 2016, ses revenus annuels ont été de 13 858 €, soit un revenu mensuel moyen de 1 154,83 € et en 2017 de 8 676 € soit un revenu mensuel moyen de 723 €. Il n'a pas été justifié de l'année 2018.

Il est constant cependant, que les ressources dont il a été justifié avant et après l'accident sont uniquement des prestations versées par pôle emploi, lesquelles sont dégressives et sont désormais constituées, depuis le 15 mai 2017, de l'allocation de solidarité spécifique (excepté 5 jours de rémunération formation pôle emploi en mars 2018).

Dans ces circonstances, force est de constater que la cour ne peut retenir aucune perte de gains professionnels futurs, demande dont Monsieur [R] sera débouté, le jugement étant infirmé de ce chef.

Sur les préjudices extra patrimoniaux

Sur le déficit fonctionnel temporaire

Ce poste indemnise l'aspect non économique de l'incapacité temporaire.

Les sociétés MMA IARD demandent d'infirmer le jugement et de retenir une indemnisation de 20 € par jour soit 690 € par mois.

Monsieur [R] sollicite la confirmation du montant alloué par le premier juge, soit 4 000 € sur une base de 800 € par mois pendant 5 mois.

Le calcul du déficit fonctionnel temporaire total de 67 jours au cours de 5 périodes d'hospitalisation n'est pas contesté, ni celui du déficit fonctionnel temporaire partiel en classe 3 (50 %) du 5 novembre 2015 au 5 février 2016, en classe 2 (25 %) du 6 février 2016 au 24 mars 2016 et du 20 octobre 2016 au 5 novembre 2016, et en classe 1 (10 %) du 25 mars 2016 au 18 octobre 2016, puis du 6 novembre 2016 au 15 décembre 2016.

La base de 800 € par mois retenue par le premier juge répare exactement la gêne dans les actes de la vie courante, y compris le préjudice sexuel (dysfonctionnement érectile et éjaculation précoce) que Monsieur [R] a exposé à l'expert et au sujet duquel le docteur [J] avait indiqué qu'il devait être mis sur le compte du retentissement psychologique de l'accident et qu'il devrait rentrer dans l'ordre sans nécessité de poursuivre un traitement spécialisé.

Le montant de 4 000 € alloué en première instance sera confirmé.

Sur les souffrances endurées

L'expert les a chiffrées à 4,5/7.

Elles résultent des fractures initiales, des différentes interventions chirurgicales, des hospitalisations, du drainage thoracique, de la rééducation fonctionnelle et de la complication par le syndrome de [B] [K].

Elles ont été indemnisées par le premier juge à hauteur de 16 000 €.

Les sociétés MMA IARD demandent d'infirmer le jugement et d'allouer une somme de 12 000 € maximum.

Monsieur [R] demande également l'infirmation du jugement et que lui soit allouée une somme de 20 000 €.

Au regard des descriptions ci-dessus rappelées faites par l'expert, il y a lieu d'allouer à Monsieur [R] une somme de 20 000 € de ce chef de préjudice.

Sur le préjudice esthétique temporaire

L'expert l'a évalué à 2,5/7 notamment du fait de l'utilisation d'un fauteuil roulant et du port d'une poche de recueil.

Le premier juge a alloué une somme de 4 000 €.

Les sociétés MMA IARD demandent de réduire cette indemnisation à la somme de 500 € faisant valoir que le tribunal a statué ultra petita, puisqu' était sollicitée de ce chef par la victime, une somme de 3 000 €.

Il est constant qu'en première instance, Monsieur [R] sollicitait une somme de 3 000 € en réparation de ce préjudice temporaire.

En cause d'appel, il sollicite la confirmation du jugement.

Dès lors que la somme allouée correspond à l'indemnisation du préjudice esthétique temporaire décrit par l'expert, à laquelle il faut ajouter que Monsieur [R] a également utilisé 2 cannes anglaises pendant 3 mois, la cour retiendra pour ce poste de préjudice, la somme de 4 000 €.

Le préjudice esthétique permanent

Il a été chiffré à 2/7 par l'expert en considération de l'existence de 2 cicatrices à la face externe du genou gauche, de 2 cm, et d'un cal de la cuisse gauche épaissi.

Les sociétés MMA IARD demandent de confirmer le jugement qui a alloué une somme de 2 500 €.

Monsieur [R] demande de le réformer et de lui allouer une somme de 6 000 €.

Au regard de la localisation des cicatrices, de leur longueur et de l'existence du cal, c'est par une appréciation exacte des faits que le premier juge a alloué la somme de 2 500 €.

Sur le déficit fonctionnel permanent

L'expert a retenu un taux de 6 % en raison d'un petit déficit de flexion du genou et de rotation de la hanche gauches, ainsi que de douleurs séquellaires.

Cette évaluation n'est pas contestée.

Les sociétés MMA IARD demandent de réformer le jugement et de retenir une valeur du point de 1 400 € soit une somme de 8 400 €.

Monsieur [R] sollicite la confirmation du jugement qui lui a alloué une somme de 11 000 €.

Monsieur [R] avait 33 ans au jour de la consolidation. La valeur du point de 1850 € correspond donc bien à celle retenue pour sa tranche d'âge pour un taux de 6 %.

Conformément à la demande de Monsieur [R], le jugement sera confirmé en ce qu'il lui a été alloué la somme de 11 000 €.

Sur le préjudice d'agrément

L'expert a relevé que seule la pratique du ski était contre-indiquée.

Les sociétés MMA IARD demandent d'infirmer le jugement et de réduire l'indemnité à la somme de 1800 € en faisant observer que l'expert n'a retenu qu'une contre-indication à la pratique du ski lequel ne se pratique que 4 mois sur 12.

Monsieur [R] indique qu'il ne peut plus pratiquer les nombreuses activités sportives qu'il avait avant son accident et notamment le ski et le snowboard.

Il demande d'infirmer le jugement et que lui soit allouée une somme de 5 000 €.

Des attestations produites, il apparaît que la pratique du ski et du snowboard, pour lesquelles l'expert retient des contre-indications, était effectuée à titre de loisirs, pendant les vacances, avec des amis.

Aucune restriction n'est indiquée concernant les autres pratiques sportives.

Compte tenu de ces éléments, la somme de 4 000 € allouée par le premier juge répare exactement ce poste.

Le préjudice sexuel permanent

Les sociétés MMA IARD demandent de débouter Monsieur [R] de ce chef de préjudice faisant valoir que la certitude n'en est pas établie et que la preuve n'est pas rapportée d'un lien de causalité avec l'accident.

Monsieur [R] conteste les conclusions de l'expert judiciaire et soutient subir toujours des troubles de l'érection et d'éjaculation précoce.

Il demande d'infirmer le jugement et de lui allouer une somme de 5 000 € indiquant que ces symptômes pris en charge par un traitement médical sont liés au stress post-traumatique.

L'expert judiciaires avait conclu que le préjudice sexuel ne paraissait pas évident du tout et expliquait que les troubles allégués étaient plutôt à mettre sur le compte des troubles d'ordre psychologique. Il indiquait qu'ils devraient rentrer dans l'ordre sans besoin de poursuivre un traitement spécialisé.

Monsieur [R] ne produit aucune pièce établissant que les difficultés d'ordre sexuel qu'il a rencontrées après l'accident, en raison du stress post-traumatique se soient poursuivies après la date de la consolidation.

L'expert n'ayant pas retenu ce préjudice et en absence de tout élément médical apporté par Monsieur [R], qui ne justifie d'aucun suivi pour les difficultés qu'il invoque, le jugement sera infirmé en ce qu'il a alloué la somme de 2 500 € de ce chef.

# # #

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, infirmant le jugement, le préjudice de Monsieur [Y] [R] sera fixé à la somme de 70 125,96 € dont doit être déduite la provision de 6 000 € en sorte que la société MMA IARD et la société MMA IARD assurances mutuelles seront condamnées in solidum à payer à Monsieur [Y] [R] la somme de 64 125,96 € qui portera intérêt au taux légal à compter du présent arrêt.

En application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil, les intérêts échus dus au moins pour une année entière produiront intérêts à compter du présent arrêt.

Sur les demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Le jugement sera confirmé de ces chefs.

La société MMA IARD et la société MMA IARD assurances mutuelles qui succombent partiellement en leur recours seront déboutées de leur demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et condamnées in solidum à payer à Monsieur [Y] [R], la somme de 3 000 € au titre des frais exposés en cause d'appel.

Il n'y a pas lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure en cause d'appel à l'égard de la société Allianz IARD qui sera déboutée de cette demande.

La société MMA IARD et la société MMA IARD assurances mutuelles seront condamnées in solidum aux dépens de l'appel.

Il sera fait droit aux demandes d'application de dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par ces motifs

La cour après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement entrepris en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu'il a alloué les indemnités suivantes :

- 4 410 € au titre des frais divers pour le médecin-conseil,

- 3 328 € pour l'assistance tierce personne,

- 2 816,70 € pour les PGPA,

- 16 000 € pour les souffrances endurées,

- 2 500 € pour le préjudice sexuel permanent,

Statuant à nouveau de ces chefs,

- fixe les frais divers au titre du médecin-conseil à la somme de 270 €,

- fixe les frais de la tierce personne avant consolidation à la somme de 4 160 €,

- fixe le montant des indemnités au titre des souffrances endurées à la somme de 20 000 €,

Déboute Monsieur [Y] [R] de ses demandes afférentes aux PGFA, aux PGPF et au préjudice sexuel permanent,

En conséquence,

Condamne in solidum la société MMA IARD et la société MMA IARD assurances mutuelles à payer à Monsieur [Y] [R] la somme de 64 125,96 € déduction faite de la provision de 6 000 €,

Dit que la somme de 64 125,96 € portera intérêt au taux légal à compter du présent arrêt,

Dit que les intérêts échus dus au moins pour une année entière produiront intérêts à compter du présent arrêt,

Condamne in solidum la société MMA IARD et la société MMA IARD assurances mutuelles à payer à Monsieur [Y] [R] la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

Déboute la société MMA IARD et la société MMA IARD assurances mutuelles et la société Allianz IARD de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum la société MMA IARD et la société MMA IARD assurances mutuelles aux dépens de l'appel et autorise la SCP Blanc & Burosse Gourgue et Me Olivia Rispal-Chatelle de la SCP Lemonnier -Delion-Gaymard Rispal-Chatelle à procéder au recouvrement direct des dépens dont elles ont fait l'avance sans avoir reçu provision, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Mme DUCHAC, Présidente, et par Mme DEBON, faisant fonction de Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

LA GREFFIÈRE,LA PRÉSIDENTE,

Carole DEBONCaroline DUCHAC


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19/00814
Date de la décision : 06/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-06;19.00814 ?
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