La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/07/2022 | FRANCE | N°22/01854

France | France, Cour d'appel de Pau, Chambre des étrangers-jld, 04 juillet 2022, 22/01854


N°22/2666



REPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAISE



COUR D'APPEL DE PAU



L742-1 et suivants du Code de l'entrée et du séjour

des étrangers et du droit d'asile



ORDONNANCE DU quatre Juillet deux mille vingt deux





Numéro d'inscription au répertoire général N° RG 22/01854 - N° Portalis DBVV-V-B7G-IIFZ



Décision déférée ordonnance rendue le 01 JUILLET 2022 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bayonne,



Nous, Céc

ile SIMON-ROUX, Présidente de chambre, désignée par Ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'appel de Pau en date du 3 décembre 2021, assistée de Catherine SA...

N°22/2666

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAISE

COUR D'APPEL DE PAU

L742-1 et suivants du Code de l'entrée et du séjour

des étrangers et du droit d'asile

ORDONNANCE DU quatre Juillet deux mille vingt deux

Numéro d'inscription au répertoire général N° RG 22/01854 - N° Portalis DBVV-V-B7G-IIFZ

Décision déférée ordonnance rendue le 01 JUILLET 2022 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bayonne,

Nous, Cécile SIMON-ROUX, Présidente de chambre, désignée par Ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'appel de Pau en date du 3 décembre 2021, assistée de Catherine SAYOUS, Greffier,

Monsieur X SE DISANT [B] [Z]

né le [Date naissance 1] 2002 à [Localité 2]

de nationalité Algérienne

Retenu au centre de rétention d'[Localité 4]

Comparant et assisté de Maître PATHER, avocat au barreau de Pau et de Monsieur [C], interprète assermenté en langue arabe.

INTIMES :

LE PREFET DES PYRENEES ATLANTIQUES, avisé, absent qui a transmis un mémoire

MINISTERE PUBLIC, avisé de la date et heure de l'audience,

ORDONNANCE :

- réputée contradictoire, après débats en audience publique,

*********

Vu l'ordonnance rendue le 1er juillet 2022 par le juge des libertés et de la détention de [Localité 3], qui a :

rejeté l'exception d'irrecevabilité soulevée,

déclaré recevable la requête en prolongation de la rétention administrative présentée par le Préfet des Pyrénées-Atlantiques,

ordonné la prolongation de la rétention de [B] [Z] pour une durée de trente jours à l'issue de la fin de la première prolongation de la rétention.

Vu la notification de l'ordonnance faite au retenu le 1er juillet 2022 à 16 heures 11.

Vu la déclaration d'appel motivée formée le conseil de [B] [Z], reçue le 1er juillet 2022 à 20 heures 12.

Vu le mémoire et les pièces jointes, adressés par le préfet des Pyrénées-Atlantiques le 4 juillet 2022 à 9 heures 23 et communiqué par le greffe au conseil de [B] [Z] avant l'audience.

****

[B] [Z], ressortissant algérien né le [Date naissance 1] 2022 a été condamné le 6 septembre 2021 par le tribunal correctionnel de Toulon, pour rébellion et infractions à la législation sur les stupéfiants à une peine de un an d'emprisonnement avec maintien en détention et à une peine complémentaire du territoire français pour une durée de dix ans.

A sa libération en avril 2022, il a fait l'objet d'un arrêté ordonnant sa reconduite d'office à destination du pays dont il a la nationalité ou de tout autre pays dans lequel il peut apporter la preuve qu'il est légalement admissible et d'un second arrêté l'assignant à résidence dans le département du Var pour 45 jours, pris le 7 avril 2022 par le préfet du Var.

Le 31 mai 2022, après avoir été contrôlé dans un train sans titre de transport ni document d'identité, [B] [Z] a été interpellé par les services de police.

Entendu, il a déclaré être arrivé en France via l'Espagne il y a trois ans, n'y avoir aucune attache familiale, avoir « navigué » entre [Localité 5] et [Localité 6], ne pas vouloir retourné en Algérie car il craint pour sa vie, son frère ayant été tué en Algérie, et enfin, avoir demandé l'asile en Suisse et ignorer où en était sa demande.

La consultation des fichiers FAED et EURODAC a montré que [B] [Z] était connu en France depuis novembre 2019, sous dix identités différentes, et qu'il avait présenté une demande d'asile, non pas en Suisse mais aux Pays-Bas. Une prise d'empreintes avait été réalisée dans ce pays le 2 janvier 2020.

Une demande de reprise en charge a été adressée aux autorités néerlandaises le 1er juin 2022, et par arrêté du même jour, [B] [Z] a été placé en rétention administrative pendant la durée nécessaire à l'organisation de son transfert aux autorités néerlandaises, décision prolongée pour une durée de vingt-huit jours par ordonnance du juge des libertés et de la détention de [Localité 3] en date du 3 juin 2022.

Les autorités néerlandaises ont répondu par courrier du 9 juin 2022, qu'elles n'acceptaient pas la demande de transfert relative à [B] [Z], qui avait présenté une demande de protection internationale aux Pays-Bas le 2 janvier 2020, demande rejetée le 26 mai 2020 sans être examinée au fond, l'intéressé s'étant enfui vers le 6 juin 2020. Elles ajoutaient que si l'autorité requérante fournissait plus d'information sur la localisation de [B] [Z] depuis son départ des Pays-Bas, elles étaient prêtes à réexaminer la demande de transfert.

Au vu de ce refus de prise en charge, porté à la connaissance de [B] [Z] qui n'a formulé aucune observation, le préfet des Pyrénées-Atlantiques a pris le 10 juin 2022 une décision de rétention modificative, se substituant au premier arrêté et une décision fixant le pays de renvoi. Aucun recours n'a été formé par le retenu.

Depuis, le préfet des Pyrénées-Atlantiques a effectué plusieurs démarches auprès des autorités consulaires algériennes aux fins d'obtenir un laisser-passer consulaire pour permettre l'éloignement de [B] [Z] vers l'Algérie.

C'est en considération de l'ensemble de ces éléments que le juge des libertés et de la détention a rendu l'ordonnance entreprise.

****

Par sa déclaration d'appel, le conseil de [B] [Z] fait valoir d'une part un défaut manifeste de diligences de l'administration préfectorale, caractérisé par une absence de transmission de renseignements complémentaires aux autorités néerlandaises dans le cadre de la demande de reprise en charge. Il prétend d'autre part que c'est à tort que la préfecture a considéré que les autorités néerlandaises avaient refusé de reprendre en charge [B] [Z] alors que dans leur courrier du 9 juin, elles invitaient la préfecture requérante à compléter sa demande afin qu'elles puissent déterminer si l'étranger relevait d'une reprise en charge. Il soutient que la préfecture a refusé de répondre à la demande néerlandaise au titre du partage d'informations prescrit par l'article 34 du règlement (UE) N°604/2013, concernant les lieux de séjours et les itinéraires de voyage de [B] [Z] et a privilégié son éloignement vers l'Algérie. Il est demandé l'infirmation de l'ordonnance entreprise et la libération immédiate de [B] [Z].

Ce moyen a été soutenu à l'audience par le conseil de [B] [Z], qui a ajouté que l'arrêté modificatif du 10 juin 2022 était illégal et que la France était tenue de prendre en charge [B] [Z], qui était demandeur d'asile.

Sur quoi, la Cour :

L'appel est recevable pour avoir été formé dans le délai prévu par l'article R743-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

L'article L741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose qu'un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ et que l'administration exerce toute diligence à cet effet.

En outre, et selon l'article L 742-4 du même code, le juge des libertés et de la détention peut, dans les même conditions qu'à l'article L.742-1, être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours, et pour une nouvelle période d'une durée maximale de trente jours, dans les cas suivants :

1° En cas d'urgence absolue ou de menace d'une particulière gravité pour l'ordre public ;

2° Lorsque l'impossibilité d'exécuter la décision d'éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l'intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l'obstruction volontaire faite à son éloignement ;

3° Lorsque la décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison :

a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l'exécution de la décision d'éloignement ;

b) de l'absence de moyens de transport.

Contrairement à ce qui est soutenu par l'appelant et ainsi que l'a retenu le premier juge, aucun défaut de diligences ne peut être reproché à l'autorité administrative.

En effet, la réponse adressé le 9 juin 2022 par les autorités néerlandaises constitue sans ambiguïté un refus de reprise en charge de [B] [Z], dont la demande d'asile dans cet Etat avait été rejetée le 26 mai 2020, du fait de sa fuite dans les jours qui ont suivi le dépôt de sa demande en janvier 2020.

Les autorités néerlandaises ont précisé dans ce courrier de réponse que si l'autorité française pouvait apporter des précisions sur le parcours de [B] [Z] depuis janvier 2020, elles étaient disposées à réexaminer la demande de transfert.

L'examen de la demande de reprise qui a été adressée aux Pays-Bas par l'autorité administrative établit qu'elle a communiqué toutes les informations dont elle disposait sur le parcours de [B] [Z], à l'exception du fait qu'il a été incarcéré en France de septembre 2021 à avril 2022.

L'article 34 du règlement (UE) N°604/2013 du Parlement Européen et du Conseil en date du 26 juin 2013 est relatif au partage d'informations entre États membres et prévoit dans son paragraphe 2 que les informations communiquées ne peuvent porter que sur :

a) les données d'identification relatives au demandeur et, le cas échéant, aux membres de sa famille, à ses proches ou tout autre parent (nom, prénom, le cas échéant, nom de famille à la naissance; surnoms ou pseudonymes; nationalité - actuelle et antérieure; date et lieu de naissance);

b) les documents d'identité et de voyage (références, durée de validité, date de délivrance, autorité ayant délivré le document, lieu de délivrance, etc.) ;

c) les autres éléments nécessaires pour établir l'identité du demandeur, y compris les empreintes digitales traitées conformément au règlement (UE) n°603/2013 ;

d) les lieux de séjour et les itinéraires de voyage ;

e) les titres de séjour ou les visas délivrés par un État membre ;

f) le lieu où la demande a été introduite ;

g) la date d'introduction d'une éventuelle demande de protection internationale antérieure, la date d'introduction de la demande actuelle, l'état d'avancement de la procédure et, le cas échéant, la teneur de la décision prise.

L'autorité préfectorale ayant communiqué dès sa demande du 1er juin 2022, tous les renseignements qu'elle avait à sa disposition correspondant aux rubrique a) à g) rappelées ci-dessus, elle n'avait plus aucune information pertinente à transmettre à la suite de la réponse des autorités néerlandaises.

Ainsi, il n'y a eu aucun refus de l'autorité administrative ni aucun manquement aux dispositions de l'article 34 du règlement précité.

S'agissant des arguments soulevés pour la première fois à l'audience par le conseil de [B] [Z], il l'ont été de manière non contradictoire et doivent être rejetés. Il sera juste observé qu'aucun recours n'a été exercé devant la juridiction administrative à la suite des décisions prises le 10 juin 2022 par le préfet des Pyrénées-Atlantiques.

Pour le reste, il doit être rappelé que [B] [Z] qui fait l'objet d'une interdiction du territoire français pendant dix ans, s'est soustrait à une précédente décision d'éloignement et n'a pas respecté son assignation à résidence ordonnée par le préfet du Var. En outre, il ne remplit pas les conditions d'une assignation à résidence, telles que fixées par l'article L.743-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en ce sens qu'il n'a pas préalablement remis à un service de police ou à une unité de gendarmerie l'original de son passeport et tout autre document justificatif de son identité. Par ailleurs, il ne dispose en France d'aucune attache ni garantie de représentation effective. Enfin, il a déclaré lors d'une audition du 31 mai 2022 qu'il n'entendait pas retourner en Algérie.

En conséquence, il convient de confirmer l'ordonnance entreprise.

PAR CES MOTIFS :

DECLARONS recevable en la forme l'appel de [B] [Z].

CONFIRMONS l'ordonnance entreprise.

Disons que la présente ordonnance sera notifiée à l'étranger, à son conseil, à la préfecture des Pyrénées Atlantiques.

Rappelons que la présente ordonnance peut être frappée d'un pourvoi en cassation dans le délai de deux mois à compter de sa notification, par déclaration déposée au greffe de la Cour de Cassation par l'intermédiaire d'un Avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation.

Fait au Palais de Justice de PAU, le quatre Juillet deux mille vingt deux à

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,

Catherine SAYOUSCécile SIMON-ROUX

Reçu notification de la présente par remise d'une copie

ce jour 04 Juillet 2022

Monsieur X SE DISANT [B] [Z], par mail au centre de rétention d'[Localité 4]

Pris connaissance le :À

Signature

Maître PATHER, par mail,

Monsieur le Préfet des Pyrénées Atlantiques, par mail


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Chambre des étrangers-jld
Numéro d'arrêt : 22/01854
Date de la décision : 04/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-04;22.01854 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award