JLG/BE
Numéro 20/3320
COUR D'APPEL DE PAU
2ème CH - Section 2
Arrêt du 24 novembre 2020
Dossier : N° RG 19/01919 - N° Portalis DBVV-V-B7D-HIX2
Nature affaire :
Demande en divorce autre que par consentement mutuel
Affaire :
[D] [J]
C/
[F] [U] épouse [J]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 24 novembre 2020, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile,
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience en chambre du conseil tenue le 13 octobre 2020, devant :
Monsieur GRACIA, Conseiller chargé du rapport,
assisté de Madame BARREAU, Greffière, présente à l'appel des causes,
Monsieur GRACIA, en application des articles 786 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :
Monsieur CERTNER, Président,
Monsieur LAUNOIS, Conseiller,
Monsieur GRACIA, Vice-président placé désigné par Ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'Appel de Pau en date du 07 juillet 2020,
qui en ont délibéré conformément à la loi.
Grosse délivrée le :
à :
dans l'affaire opposant :
APPELANT :
Monsieur [D] [J]
né le [Date naissance 4] 1977 à [Localité 13]
de nationalité Française
[Adresse 6]
[Localité 9]
Représenté par Me Isabelle BURTIN de la SCP BERRANGER & BURTIN, avocat au barreau de TARBES
INTIMEE :
Madame [F] [U] épouse [J]
née le [Date naissance 2] 1981 à [Localité 11] (47)
de nationalité Française
[Adresse 7]
[Localité 8]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/04589 du 16/08/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PAU)
Représentée par Me Pascal MARKHOFF, avocat au barreau de TARBES
sur appel de la décision
en date du 19 AVRIL 2019
rendue par le JUGE AUX AFFAIRES FAMILIALES DE TARBES
RG numéro : 16/00901
EXPOSE DU LITIGE
Madame [F] [U] et Monsieur [D] [J] se sont mariés le [Date mariage 5] 2010 devant l'officier de l'état civil de la commune d'[Localité 10] (65), après avoir préalablement établi un contrat de mariage, optant pour le régime de la séparation de biens.
De leur union sont issus deux enfants, [X], né le [Date naissance 3] 2009 et [O], né le [Date naissance 1] 2013.
Consécutivement à la requête en divorce déposée le 24 mai 2016 par Madame [F] [U], les époux ont accepté lors de l'audience de conciliation la rupture du mariage, sans considération des faits à l'origine de celle-ci.
Aux termes de l'ordonnance de non-conciliation rendue le 26 septembre 2016, le juge aux affaires familiales de TARBES a principalement :
- organisé la résidence habituelle des enfants au domicile maternel, avec un droit de visite et d'hébergement usuel au profit du père,
- fixé la contribution mensuelle de Monsieur [D] [J] à l'entretien des enfants à la somme de 350 euros pour chacun d'eux, cette somme ayant ensuite été réduite à 300 euros par un arrêt de la Cour d'appel de PAU du 27 mars 2017.
Sur assignation de Madame [F] [U] en date du 23 janvier 2019, fondée sur l'article 233 du code civil, le divorce des époux a été prononcé par un jugement en date du 19 avril 2019. La résidence habituelle des enfants a été fixée au domicile de Madame [F] [U], avec un droit d'hébergement classique au profit du père dont la contribution a été maintenue à la somme de 300 euros par mois et par enfant. Une prestation compensatoire a été fixée en capital à la somme de 25.000 euros au bénéfice de Madame [F] [U].
Le 06 juin 2019, Monsieur [D] [J] a interjeté appel de ce jugement, limitant son recours aux dispositions relatives à sa condamnation au paiement de cette prestation compensatoire.
Les autres faits de la cause ont été relatés par la décision querellée en des énonciations auxquelles la Cour se réfère expressément.
Une ordonnance de clôture est intervenue à la date du 22 septembre 2020 pour fixer la date des plaidoiries au 13 octobre 2020.
Vu les dernières conclusions de Monsieur [D] [J] déposées le 02 octobre 2020;
Vu les dernières conclusions de Madame [F] [U] déposées 05 octobre 2020;
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la demande de révocation de l'ordonnance de clôture :
Il résulte de l'article 784 du code de procédure civile que l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue. L'ordonnance de clôture peut alors être révoquée après l'ouverture des débats, d'office ou à la demande des parties, par décision du tribunal.
Dans ses conclusions n'5 notifiées par le réseau privé virtuel des avocats le 02 octobre 2020, Monsieur [D] [J] sollicite le rabat de l'ordonnance de clôture du 22 septembre 2020. Il reproche à Madame [F] [U] d'avoir signifié des conclusions le 21 septembre 2020 à 13h50, la veille de la clôture, l'empêchant d'y répondre de manière contradictoire.
Pour conclure au rejet de la demande de l'appelant, Madame [F] [U] lui rétorque, dans des nouvelles conclusions notifiées le 05 octobre 2020, après la clôture, n'avoir fait que répondre le lundi 21 septembre 2020 au quatrième jeu de conclusions notifié par l'appelant le vendredi 18 septembre 2020 à 19h44.
Les conclusions n'5 établies dans l'intérêt de Monsieur [D] [J] limitent leur nouveauté à quelques paragraphes. Ces ultimes observations illustrent le conflit parental qui apparaissait déjà dans les quatrièmes conclusions, avec notamment pour enjeu la question de la résidence habituelle des enfants. Les douze nouvelles pièces communiquées après la clôture par Monsieur [D] [J], à l'appui de ses cinquièmes écritures, ne font qu'illustrer ce conflit déjà apparent dans les pièces antérieurement produites. La plupart de ces nouvelles pièces datent du premier semestre 2020 et entretiennent pour partie un lien avec la période de confinement. Ainsi, à les supposer déterminantes pour l'issue du litige, la Cour ne peut que remarquer leur communication extrêmement tardive.
Dans ce contexte, les écritures et pièces communiquées dans l'intérêt de Monsieur [D] [J] après la clôture ne peuvent suffire pour caractériser une cause grave qui viendrait rendre nécessaire le rabat de l'ordonnance de clôture. Il en résulte que la Cour doit statuer sur les seuls éléments contradictoirement communiqués à la date de la clôture, soit, pour Monsieur [D] [J] ses pièces et conclusions n°4 notifiées à la date du 18 septembre 2020 et, pour Madame [F] [U], ses pièces et quatrièmes écritures notifiées le 21 septembre 2020.
Les communications ultérieures à la clôture doivent d'autant plus être écartées qu'elles font écho aux demandes irrecevables de l'appelant.
Sur le caractère limité de l'appel :
Madame [F] [U] fait justement remarquer que dans sa déclaration d'appel Monsieur [D] [J] a limité son recours à la disposition suivante du jugement querellé : 'Condamne Monsieur [J] à payer à Madame [U] un capital de 25.000 euros à titre de prestation compensatoire'.
Madame [F] [U] relève que le principe de cet appel limité est repris en page huit des conclusions de l'appelant, bien que celui-ci, dans le dispositif de ses écritures, sollicite de la Cour, outre la question de la prestation compensatoire, qu'elle ordonne une résidence alternée et qu'elle diminue le montant de sa contribution à l'entretien des enfants.
Se fondant sur les dispositions des articles 562 et 901 du code de procédure civile, Madame [F] [U] estime que la Cour n'est pas valablement saisie par les autres prétentions de Monsieur [D] [J] sur lesquelles l'intimée n'a pas formé d'appel incident.
Monsieur [D] [J] indique littéralement que la Cour ne pourrait pas être saisie de cette demande d'irrecevabilité, puisque celle-ci ne figurerait au dispositif des écritures adverses qu'au titre d'un 'dire et juger'. Cette demande ne pourrait dès lors être considérée comme une véritable prétention.
Nullement fondé en droit, cet argument ne peut convaincre puisque le dispositif des écritures de Madame [F] [U] vise de manière expresse les articles 562 et 901 du code de procédure civile pour fonder juridiquement cette demande.
Au demeurant, l'appelant estime qu'il existe un lien suffisant entre l'ensemble de ses prétentions, sous-entendant que le défaut de mention dans sa déclaration d'appel de ses contestations relatives à la résidence des enfants, et au montant de sa contribution à leur entretien, ne serait pas déterminant pour leur examen dans le cadre de son appel.
Pourtant, l'article 562 du code civil dispose que l'appel ne défère à la Cour que la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent. La dévolution ne s'opère pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.
En l'occurrence, la contestation de la prestation compensatoire servant les intérêts de son seul débiteur, elle se trouve entièrement divisible et dépourvue de liens avec les demandes formulées concernant la résidence habituelle des enfants, le montant de la contribution à leur entretien, ou encore le droit de visite et d'hébergement.
Or, l'appelant ne peut, par des conclusions postérieures, sortir des limites qu'il a lui-même assignées à son appel.
Si Monsieur [D] [J] souhaitait remettre en cause d'autres dispositions du jugement, celles-ci devaient nécessairement être mentionnées dans son acte d'appel, lequel est demeuré limité à la seule contestation du principe même du paiement d'une prestation compensatoire.
En conséquence, la Cour ne se trouve valablement saisie que du seul chef critiqué dans l'acte d'appel de Monsieur [D] [J], l'appel incident de Madame [F] [U] se limitant à la question du montant de la prestation compensatoire.
Ainsi, les autres demandes de Monsieur [D] [J] aux fins d'instauration d'une résidence alternée et de diminution de sa part contributive seront déclarées irrecevables.
Sur la prestation compensatoire
L'article 270 du Code Civil dispose que le divorce met fin au devoir de secours entre époux, mais que l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité créée par la rupture du mariage dans les conditions de vie respectives. Cette prestation a un caractère forfaitaire et prend la forme d'un capital dont le montant est fixé par le juge.
Aux termes de l'article 271 du même code, la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre, en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l' évolution de celle-ci dans un avenir prévisible, le juge prenant notamment en considération :
- la durée du mariage ;
- l'âge et l'état de santé des époux ;
- leur qualification et leur situation professionnelles ;
- les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer, ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne ;
- le patrimoine estimé ou prévisible des époux tant en capital qu'en revenu après la liquidation du régime matrimonial ;
- leurs droits existants et prévisibles ;
- leur situation respective en matière de pensions de retraite ;
Monsieur [D] [J] conclut à la suppression de la prestation compensatoire arrêtée par le premier juge à la somme de 25.000 euros. Il soutient que Madame [F] [U] ne chercherait pas à travailler davantage qu'à temps partiel, bien qu'elle ne puisse faire valoir aucun motif valable pour justifier de cette position. Contrairement à Madame [F] [U], Monsieur [D] [J] indique que ses revenus restent soumis aux aléas de son entreprise, ces aléas se trouvant majorés par la crise sanitaire liée à la pandémie de covid-19. Il évoque une situation financière dégradée par rapport aux revenus qui étaient les siens du temps de la vie commune. Il précise continuer de régler l'important emprunt immobilier, ainsi que les taxes et impositions pour l'immeuble acquis en indivision avec Madame [F] [U]. Une fois la contribution à l'entretien des enfants et ses autres charges réglées, Monsieur [D] [J] soutient ne disposer d'aucun revenu disponible.
Comme en première instance, Madame [F] [U] sollicite une prestation compensatoire de 60.000 euros. Elle précise avoir augmenté son temps de travail dans la limite de ce que lui permet l'éloignement du lieu de scolarité des enfants, situé dans la commune de résidence du père. L'intimée reproche à Monsieur [D] [J] un manque de transparence concernant ses revenus d'activités et ses ressources locatives. Elle précise avoir pris durant le mariage un congé parental d'une durée de trois ans, lequel aura des incidences sur ses futurs droits à la retraite.
Au titre de l'appréciation de l'existence ou non d'une disparité économique générée par la rupture du mariage, la Cour retient au vu des pièces produites aux débats que la situation actuelle et prévisible des parties s'établit ainsi qu'il suit :
* Monsieur [D] [J], âgé de 42 ans, est dirigeant de la société par actions simplifiée 'Etablissements [J] FRÈRES' dont il est salarié selon les termes d'un contrat à durée indéterminée conclu le 1er février 2002.
L'appelant a produit des éléments fiscaux relativement anciens concernant les années 2010, 2011, 2013, 2016, afin d'illustrer son moyen selon lequel sa situation financière serait aujourd'hui davantage dégradée par rapport à celle qui existait du temps du mariage.
Monsieur [D] [J] se plaît à comparer ses revenus fiscaux avec ceux de Madame [F] [U] pour conclure à une diminution de 98% de ses ressources par rapport à la période au cours de laquelle il était marié avec Madame [F] [U]. Selon ses calculs, la diminution des revenus de l'intimée au cours des mêmes quatre dernières années serait de 33 %. Il en conclut qu'il ne peut y avoir une disparité lorsque l'époux auquel on demande le versement d'une prestation compensatoire expose une situation dégradée par rapport à celle qui existait lors de la vie commune, lorsque cette dégradation est causée par la conjoncture économique et sanitaire.
Cette présentation, essentiellement financière, ne peut occulter la consistance du patrimoine immobilier locatif de Monsieur [D] [J]. Il ne conteste pas être propriétaire de cinq appartements. De plus, même en constatant une minoration de ses finances, celle-ci n'est pas nécessairement exclusive d'une disparité entre les époux.
L'appréciation de l'existence d'une éventuelle disparité doit se faire au moment le plus proche de la rupture de l'union.
L'article 260 du code civil précise notamment que le mariage est dissous par la décision qui prononce le divorce, à la date à laquelle elle prend force de chose jugée. En l'espèce, ni l'appel limité de Monsieur [D] [J], ni les conclusions Madame [F] [U] n'ont remis en cause le prononcé du divorce. Dès lors, la rupture du mariage est passée en force de chose jugée à la date des premières conclusions de l'intimée.
L'avis d'imposition sur les revenus de Monsieur [D] [J] de l'année 2018 fait apparaître des revenus totaux annuels imposables de 52.042 euros, avant imputation de charges déductibles d'un montant de 7.200 euros. Ces revenus annuels se composent de salaires (42.710 euros), de revenus de capitaux mobiliers (1.900 euros) et de revenus fonciers (7.432 nets). Après soustraction des charges déductibles, son revenu fiscal de référence s'établit à 38.542 euros.
A défaut d'informations aussi précises pour l'année 2019, Monsieur [D] [J] justifie pour l'année 2020 d'un salaire moyen net imposable de 3.307,31 euros et de revenus fonciers d'une moyenne de 2.527, 61 euros par mois. Ainsi, son revenu global mensuel net imposable peut être retenu pour la somme moyenne de 5.828,92 euros.
Les extraits de comptes bancaires les plus récents datent de décembre 2019 et font état d'avoirs de 3.417,12 euros à la Banque populaire et de 5.086,23 euros à la Caisse d'épargne.
Monsieur [D] [J] ne fait état d'aucun élément concernant sa future retraite.
Relativement à ses charges, en comptabilisant celles relatives aux emprunts immobiliers, assurances et impositions diverses dont il est personnellement redevable, Monsieur [D] [J] déclare un total mensuel de charges pour l'année 2020 de 5.083,50 euros dont il justifie pour l'essentiel. Concernant la seule résidence principale acquise en commun avec Madame [F] [U] pour la somme de 440.000 euros, Monsieur [D] [J] paye la taxe foncière (2.189 euros en 2019) et la taxe d'habitation (1796 euros en 2019).
Il s'évince des conclusions des parties qu'elles se trouvent toujours en état d'indivision sur ce bien. Lors de cette acquisition, Monsieur [D] [J] avait accompli un apport d'un peu plus de 100.000 euros, quand Madame [F] [U] avait apporté une somme d'environ 10.000 euros. Monsieur [D] [J] doit régler mensuellement jusqu'en 2029 la somme de 2.065,13 euros pour le remboursement du prêt immobilier relatif à cette ancienne résidence familiale.
Outre les charges courantes, Monsieur [D] [J] a payé les frais de scolarité des deux enfants pour l'année 2018/2019 pour un total de 598 euros. Il règle également la somme de 300 euros par mois et par enfant au titre d'une contribution à leur entretien.
Actuellement, ce montant conséquent de charges peut notamment s'expliquer par le remboursement du prêt de l'immeuble acquis avec Madame [F] [U], ainsi qu'en raison d'autres prêts afférents à des biens immobiliers dont Monsieur [D] [J] est seul propriétaire. Monsieur [D] [J] a une charge mensuelle de 984,10 euros relative à deux crédits concernant des appartements en location dont il est propriétaire en nom propre.
Cependant, les biens propres de l'époux entrent en considération pour apprécier le principe et le montant de la prestation compensatoire, notamment en tenant compte, pour les revenus qu'ils génèrent, de la rentabilité locative nette annuelle des biens donnés à bail.
Les parts que détenait Madame [F] [U] dans la société civile immobilière créée avec Monsieur [D] [J] ont été cédées le 12 mai 2017 à l'appelant pour la somme totale de 200 euros. Monsieur [D] [J] est ainsi seul bénéficiaire des actifs de cette société dont la consistance n'a pas été précisée.
Monsieur [D] [J] produit les bilans simplifiés de la S.A.S. 'Etablissements [J] FRÈRES' pour la période 2015/2019, afin de soutenir que la société a connu quatre années consécutives de pertes. Si formellement cette affirmation ne peut être contestée, ces pièces comptables sommaires demeurent insuffisantes pour apprécier la véritable situation de l'entreprise.
Cependant, Monsieur [D] [J] justifie de la conclusion par la société, le 29 avril 2020, durant le contexte de pandémie de covid-19, d'un prêt bancaire de trésorerie garanti par l'Etat d'un montant de 384.000 euros. Il évoque également un autre prêt du même type au bénéfice des 'carrières du Lavedan', sans préciser le lien juridique qu'il peut entretenir avec cette entité.
Bien qu'il cherche à mêler ses crédits personnels avec ceux qui ont été conclus par ces personnes morales, la Cour ne peut apprécier l'existence d'une disparité qu'en se fondant sur le patrimoine rattaché à la personne de Monsieur [D] [J] et non à ceux dépendant de personnes morales dans lesquelles il peut avoir des intérêts.
* Madame [F] [U], âgée de 39 ans, est technicienne de l'intervention sociale et familiale (T.I.S.F.) en contrat à durée indéterminée et travaille actuellement à temps partiel.
Au titre de ses revenus professionnels, Madame [F] [U] a perçu un revenu mensuel net imposable de 1.047,23 euros en 2018, 1.175,82 euros en 2019 et de 1.161,01 euros pour les premiers mois de l'année 2020, selon le cumul figurant sur le bulletin de salaire du mois de mars. Elle fait valoir qu'elle ne perçoit plus d'indemnités kilométriques, disposant désormais d'un véhicule de service. Toutefois, cet élément reste neutre puisque les indemnités anciennement versées n'avaient, par nature, vocation qu'à seulement compenser les frais engagés par la salariée pour ses déplacements professionnels et non à lui procurer un enrichissement.
S'il n'en sera pas tenu compte au titre des ressources propres de Madame [F] [U], un relevé de la caisse d'allocations familiales du 09 septembre 2020 permet de savoir qu'elle reçoit 131,95 euros de prestations familiales.
Madame [F] [U] écarte l'argument de Monsieur [D] [J] selon lequel elle pourrait recevoir, si elle travaillait à temps complet, un salaire d'environ 1.800 euros net par mois. Elle produit la fiche de paie d'une collègue travaillant à temps complet, avec 17 années d'ancienneté, et dont le salaire net imposable s'établit pour le mois de mars 2020 à la somme de 1.673,88 euros.
Bien qu'elle reste employée à temps partiel, il est établit que le temps de travail de Madame [F] [U] a augmenté depuis la séparation conjugale. Selon un avenant à son contrat de travail en date du 29 décembre 2017, Madame [F] [U] travaille désormais, en moyenne, à une hauteur hebdomadaire de 25 heures. Cette durée moyenne hebdomadaire a été très légèrement augmentée d'une demi-heure, selon un avenant du 30 décembre 2019.
Madame [F] [U] soutient qu'elle ne pourrait concilier un volume horaire supplémentaire avec les obligations inhérentes à la prise en charge des enfants. Ceux-ci sont scolarisés dans la commune de [Localité 12], à une dizaine de kilomètres de la résidence maternelle. Madame [F] [U] indique que le père s'opposerait à un changement d'établissement scolaire. Madame [F] [U] rajoute devoir composer avec de nombreux déplacements dans sa zone d'intervention professionnelle, son métier la conduisant à intervenir aux domiciles des personnes bénéficiant de ses services.
Elle ne produit aucune pièce relative à ses futurs droits concernant sa retraite et ne dispose d'aucun patrimoine immobilier autre que ses droits sur le bien indivis. Toutefois, les droits de Madame [F] [U] sur ce bien seront moindres, en comparaison avec ceux de Monsieur [D] [J] dont l'apport a été plus conséquent lors de l'acquisition. L'appelant continue de régler le remboursement du prêt pour le compte de l'indivision.
Outre les charges de la vie courante, Madame [F] [U] justifie régler mensuellement un loyer (584,56 euros) pour le paiement duquel elle perçoit une aide au logement (78 euros), ainsi que le remboursement d'un crédit automobile jusqu'au mois de mars 2022 (184,64 euros). Madame [F] [U] prend également en charge les frais de cantine des enfants pour un coût total mensuel de 103,50 euros. Madame [F] [U] a connu une période d'interdiction bancaire au cours de l'année 2019.
Madame [F] [U] et Monsieur [D] [J] sont mariés depuis le [Date mariage 5] 2010 et ont vécu ensemble environ cinq ans.
Le premier juge a justement relevé l'existence d'une disparité dans les conditions de vie respectives des parties, après avoir rappelé que Madame [F] [U] a bénéficié d'un congé parental durant le mariage. Cependant, Monsieur [D] [J] n'allègue pas que cette circonstance lui ait été imposée par son épouse lors de l'arrivée de leur second enfant.
Le premier juge a également retenu que Madame [F] [U] disposait de la faculté de travailler à temps plein. Cette considération doit toutefois être appréciée au regard des sujétions professionnelles de Madame [F] [U], notamment en tenant compte de ses déplacements en journée, lesquels peuvent l'éloigner encore davantage du lieu de scolarisation des enfants.
Au regard du jeune âge des enfants, âgés de onze et sept ans, et de leur prise en charge quotidienne par leur mère, ces sujétions doivent être prises en compte. Elles viennent justifier que Madame [F] [U] ne puisse encore reprendre une activité professionnelle à temps complet, afin de pouvoir assumer la prise en charge matérielle des enfants.
Ainsi, les revenus actuels et prévisibles des parties, ainsi que la disparité liée à la rupture du mariage, ouvrent droit au profit de Madame [F] [U] à une prestation compensatoire. Celle-ci, conformément à sa finalité, paraît nécessaire pour pallier la réalité du déséquilibre généré au détriment de l'épouse du fait du divorce, sachant que la prestation compensatoire n'est pas destinée à égaliser le niveau des fortunes.
En conséquence, le jugement déféré sera réformé sur le montant alloué, et Monsieur [D] [J] sera condamné à verser à Madame [F] [U] la somme de 42.000 € au titre d'une prestation compensatoire.
Sur les demandes accessoires
Madame [F] [U] sollicite la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale, Madame [F] [U] craint cependant que cette mesure puisse lui être retirée. Cependant, à ce jour, selon une décision du 16 août 2019, cette aide juridictionnelle totale est maintenue de plein droit, Madame [F] [U] étant intimée devant la Cour d'appel. En considération de cet élément, sa demande sera rejetée.
Les dépens d'appel seront partagés par moitié entre les parties.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, après débats en chambre du Conseil, contradictoirement et en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la Loi,
Déclare recevable l'appel limité interjeté par Monsieur [D] [J] ;
Déboute Monsieur [D] [J] de sa demande de rabat de l'ordonnance de clôture datée du 22 septembre 2020 et écarte les écritures et pièces communiquées par les parties postérieurement à cette date ;
Statuant dans les limites de sa saisine et de l'effet dévolutif qui y est attaché ;
Déclare irrecevables les demandes de Monsieur [D] [J] aux fins d'instauration d'une résidence alternée, et de diminution de sa contribution à l'entretien des enfants communs;
Infirme partiellement le jugement rendu le 19 avril 2019 par le Juge aux Affaires Familiales de TARBES en ce qu'il a condamné Monsieur [D] [J] à verser à Madame [F] [U] à titre de prestation compensatoire la somme en capital de 25.000 euros;
Statuant à nouveau,
Condamne Monsieur [D] [J] à verser à Madame [F] [U] la somme en capital de 42.000 € à titre de prestation compensatoire ;
Confirme la décision entreprise pour le surplus ;
Y ajoutant,
Déboute Madame [F] [U] de sa demande formulée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;
Dit que les dépens d'appel seront partagés par moitié entre les parties, étant précisé que Madame [F] [U] bénéficie du maintien de l'aide juridictionnelle totale accordée en première instance ;
Arrêt signé par François CERTNER, Président et Julie BARREAU, Greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIERELE PRESIDENT
Julie BARREAUFrançois CERTNER