La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/06/2020 | FRANCE | N°19/00379

France | France, Cour d'appel de Pau, 2ème ch - section 1, 29 juin 2020, 19/00379


HD/ND



Numéro 20/1745





COUR D'APPEL DE PAU

2ème CH - Section 1







ARRET DU 29/06/2020







Dossier : N° RG 19/00379 - N° Portalis DBVV-V-B7D-HE35





Nature affaire :



Demande du locataire tendant à la diminution du loyer ou des charges, et/ou à la résiliation du bail, et/ou à des dommages-intérêts, en raison de troubles de jouissance















Affaire :



[J] [M]





C/



[Z] [N]





















Grosse délivrée le :

à :











RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R E T



Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 29 Juin 2020, les parti...

HD/ND

Numéro 20/1745

COUR D'APPEL DE PAU

2ème CH - Section 1

ARRET DU 29/06/2020

Dossier : N° RG 19/00379 - N° Portalis DBVV-V-B7D-HE35

Nature affaire :

Demande du locataire tendant à la diminution du loyer ou des charges, et/ou à la résiliation du bail, et/ou à des dommages-intérêts, en raison de troubles de jouissance

Affaire :

[J] [M]

C/

[Z] [N]

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 29 Juin 2020, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

En application de la loi n°2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19 et de l'article 8 de l'ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale, l'affaire, fixée à l'audience du 28 mai 2020 a été examinée selon la procédure sans audience.

Monsieur Hervé DUPEN, magistrat chargé du rapport, en application de l'article 786 du Code de Procédure Civile et a rendu compte à la Cour composée de :

Madame Valérie SALMERON, Président

Monsieur Marc MAGNON, Conseiller

Monsieur Hervé DUPEN, Conseiller

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

Madame [J] [M]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Barbara CANLORBE de la SELARL HEUTY LONNE CANLORBE VIAL, avocat au barreau de MONT-DE-MARSAN

INTIME :

Monsieur [Z] [N]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représenté par Me Grégory Malik KEDIRI BONNY de la SCP LE DANIEL-PIOVESAN ET KEDIRI BONNY, avocat au barreau de MONT-DE-MARSAN

sur appel de la décision

en date du 06 NOVEMBRE 2018

rendue par le TRIBUNAL D'INSTANCE DE DAX

Faits et procédure

Par acte sous seing privé en date du 30 septembre 2017, [Z] [N] a donné à bail à [J] [M], avec effet à compter du 1er décembre 2017, un local à usage d'habitation consistant en un appartement situé [Adresse 2] à [Localité 5], moyennant un loyer mensuel de 685€.

Le 8 décembre 2017, [J] [M] adressait à son bailleur une lettre dans laquelle elle invoquait des dysfonctionnements des équipements de la salle de bains et du système de chauffage des lieux, ainsi que la vétusté de certains éléments d'équipement, en mettant en demeure son propriétaire d'y remédier.

Par lettre du 26 décembre 2017, elle indiquait à son propriétaire son intention de quitter les lieux le 31 décembre 2017.

Par acte d'huissier de justice en date du 23 mars 2018, [J] [M] a fait assigner [Z] [N] devant le tribunal d'instance de Dax en demandant de :

- dire et juger son action recevable et bien fondée,

- accueillir l'exception d'inexécution et condamner [Z] [N] au remboursement de la somme de 685€ indûment perçue au titre du loyer de décembre,

- dire et juger que [Z] [N] a engagé sa responsabilité à raison des manquements à ses obligations contractuelles, s'agissant des désordres affectant le logement,

- dire et juger que ces manquements ont occasionné un préjudice matériel et de jouissance certain à [J] [M] et sa famille,

- condamner [Z] [N] au paiement de la somme de 3000 € de dommages-intérêts en réparation des préjudices moral et de jouissance subis,

- condamner [Z] [N] au paiement de la somme de 490,74 € en réparation du préjudice matériel subi,

- condamner en tant que de besoin [Z] [N] à restituer la somme de 680 € outre la somme mensuelle de 68 € à compter du mois de mars 2018 jusqu'à restitution complète du dépôt de garantie,

- condamner [Z] [N] au paiement de la somme de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens,

- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir.

Par jugement en date du 6 novembre 2018, le tribunal a :

- dit que [J] [M] est mal fondée à se prévaloir de l'exception d'inexécution et de la résolution du bail conclu le 30 septembre 2017,

- dit que [Z] [N] a manqué à son obligation de délivrer un logement en bon état,

- condamné en conséquence [Z] [N] à payer à [J] [M] la somme de 500 € en réparation du préjudice de jouissance subi,

- débouté [J] [M] de ses demandes d'indemnisation de préjudices matériels,

- dit que le bail est résilié avec effet au 26 mars 2018,

- condamné [J] [M] à payer à [Z] [N] la somme de 1250,51 € au titre des loyers échus et impayés jusqu'au 26 mars 2018, déduction faite du dépôt de garantie versé par la locataire,

- débouté [Z] [N] de sa demande de dommages-intérêts,

- condamné [J] [M] à verser à [Z] [N] une somme de 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

Par déclaration en date du 31 janvier 2019, [J] [M] a relevé appel du jugement.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 7 avril 2020.

Dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire en application de la loi 2020-290 du 23 mars 2020, la fixation de l'affaire a été maintenue avec procédure de dépôt sans audience au 28 mai 2020 selon les dispositions de l'article 8 de l'ordonnance 2020-304 du 25 mars 2020.

Vu l'acceptation du recours à la procédure sans audience dans le cadre de l'ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020 de Maître Canlorbe-Dubedout en date du 18 mai 2020 et de Maître Kediri-Bony en date du même jour.

Vu la vérification du dépôt des dossiers de plaidoirie par le Premier président de la cour d'appel de Pau pour le dépôt du 28 mai 2020 selon ordonnance d'organisation des services en date du 14 mai 2020 et après communication aux avocats des parties du feuilleton des dossiers retenus et précisant la composition de la cour et la date de délibéré fixée au 9 septembre 2020.

Les parties ont été avisées par message RPVA que le délibéré sera rendu par anticipation le 29 juin 2020.

Prétentions et moyens des parties

Par voie de conclusions notifiées le 12 avril 2019, [J] [M], au visa des articles 1719 et 1720 du Code civil, du décret du 30 janvier 2002 et de la loi du 6 juillet 1989, formule les demandes suivantes :

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit que [Z] [N] avait manqué à son obligation de délivrance d'un logement en bon état et débouté celui-ci de ses demandes en indemnisation pour procédure abusive,

- infirmer la décision pour le surplus,

Statuant à nouveau,

- débouter [Z] [N] de toutes ses demandes, fins et conclusions contraires comme particulièrement mal fondées,

- accueillir l'exception inexécution de [J] [M],

- condamner [Z] [N] au paiement des sommes de :

* 645 € indûment perçue au titre du loyer de décembre 2017,

* 3000 € de dommages-intérêts en réparation des préjudices moraux et de jouissance subis,

* 490,74 € en réparation du préjudice matériel subi,

- condamner en tant que de besoin [Z] [N] à restituer la somme de 685 €, outre au paiement de la somme mensuelle de 68,50 € à compter du mois de mars 2018 et jusque restitution complète du dépôt de garantie,

- condamner [Z] [N] au paiement de la somme de 3000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens au titre des frais exposés en première instance et en appel et, au besoin, ceux d'exécution forcée, avec distraction au profit de Maître Barbara Canlorbe-Dubedout, membre de la SELARL Heuty-Lonné-Canlorbe-Vial, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions notifiées le 4 juillet 2019, [Z] [N], au visa des articles 1217, 1231 - 1 et 1240 du Code civil, ainsi que l'article 32 - 1 du code de procédure civile, présente les demandes suivantes :

Sur les demandes de [J] [M],

- confirmer le jugement concernant la résiliation unilatérale de [J] [M] comme étant abusive,

- confirmer l'inopposabilité du rapport de l'expert de la compagnie d'assurance MACIF à [Z] [N],

- constater que [Z] [N] n'a pas manqué à ses obligations de mise à disposition d'un logement en bon état,

- débouter purement et simplement [J] [M] de l'ensemble de ses demandes, fins, moyens et conclusions,

Sur les demandes reconventionnelles [Z] [N],

- dire et juger que le tribunal d'instance a statué ultra petita,

- dire et juger qu'en raison de la résiliation abusive du contrat de bail par [J] [M], le contrat de location doit être maintenu,

- dire et juger que [J] [M] est débitrice des loyers (685 € par mois) jusqu'à la résiliation effective du contrat de bail par lettre recommandée avec accusé de réception, déduction faite du montant de la caution,

- fixer une astreinte de 20€ par jour à compter de la signification de l'arrêt à intervenir pour le paiement des loyers impayés,

- dire et juger que la procédure judiciaire de [J] [M] est abusive,

- condamner [J] [M] au paiement de la somme de 1000 € pour procédure abusive,

- dire et juger que [J] [M] est responsable des préjudices de [Z] [N],

- condamner [J] [M] au paiement de la somme de 5000 € au titre du préjudice de [Z] [N],

- condamner [J] [M] à verser [Z] [N] également la somme de 3000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'état du logement

L'article 1719 du Code civil prévoit que le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière, de délivrer au preneur la chose louée et, s'il s'agit de son habitation principale, un logement décent et qu'il doit entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée.

L'article 6 de la loi du 6 juillet 1989 impose au bailleur de remettre au locataire un logement décent, ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé et doté des éléments le rendant conforme à l'usage d'habitation. Il rappelle l'obligation faite au bailleur de délivrer au locataire un logement en bon état d'usage et de réparation, pourvu des équipements mentionnés au contrat de location et en bon état de fonctionnement.

En l'espèce, il ressort des éléments de la cause que [J] [M], pour des raisons personnelles tenant à son éloignement géographique, et après avoir répondu à une annonce diffusée par [Z] [N] sur un site Internet, a signé, le 30 septembre 2017, un contrat de bail qui lui avait été adressé par ce dernier, sans qu'elle n'ait, au préalable, pu procéder à une visite des lieux. Ce bail portait sur un appartement de cinq pièces principales. Il était convenu d'un loyer mensuel de 685€ et d'un dépôt de garantie de même montant et la prise d'effet de la convention était fixée au 1er décembre 2017.

Le bail mentionnait que des travaux récents avaient été effectués dans le logement depuis la fin du dernier contrat ou du dernier renouvellement, intéressant la salle de bains, les fenêtres et portes-fenêtres ainsi que l'isolation des pièces principales, pour un montant de 20'000 €.

Au moment de la prise d'effet du bail, un état des lieux était contradictoirement établi, le 2 décembre 2017. Celui-ci mentionne que les lieux loués étaient alors en cours de rénovation, faisant l'objet de travaux portant notamment sur les fenêtres, les portes-fenêtres, le balcon, les stores et la porte d'entrée.

Il s'en déduit que, contrairement à ce qui était indiqué dans le bail, un certain nombre de travaux restait à réaliser. Dans la lettre qu'il adressait à sa locataire le 26 décembre 2017, [Z] [N] admettait d'ailleurs que le changement des menuiseries extérieures devait intervenir courant janvier 2018 et que des convecteurs devaient être ensuite installés dans les trois chambres de l'appartement. L'intimé reconnait cette même situation dans ses écritures.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 8 décembre 2017, donc postérieure d'une semaine à compter de son entrée dans les lieux, [J] [M] dénonçait des fuites apparaissant dans la salle de bain après utilisation de la douche, la nécessité d'installer des radiateurs dans les chambres aux lieu et place du matériel de chauffage les équipant mais non utilisable ainsi que d'importants jours aux ouvertures, laissant passer l'air de toute part et elle mettait en demeure son bailleur d'assurer la mise en conformité du logement à sa destination à usage d'habitation. [Z] [N] ne peut contester avoir bien reçu cette lettre, même si l'appelant n'en produit pas l'accusé de réception, puisqu'il l'évoque expressément dans sa lettre de réponse du 26 décembre 2017.

Il ressort par ailleurs d'une correspondance adressée le 28 décembre 2017 à [Z] [N] par la MACIF, en sa qualité d'assureur de [J] [M], que cette dernière ainsi que ses trois enfants à charge ont été relogés dans une structure hôtelière à compter du 15 décembre 2017 après qu'un technicien intervenant en qualité d'expert mandaté par cette compagnie a constaté l'état des lieux loués. Le rapport établi en ces circonstances indique que le chauffage des chambres ne pouvait être assuré compte tenu du non fonctionnement des convecteurs électriques, que des radiateurs neufs étaient entreposés sur place, dans l'attente d'être installés par le propriétaire ou par un tiers, que les défauts d'étanchéité des menuiseries extérieures entraînaient des infiltrations d'eau depuis plusieurs mois et que la douche équipant le logement était inutilisable.

Ce rapport, bien qu'établi de manière unilatérale et non contradictoire, peut être retenu dans le cadre du débat judiciaire opposant les parties puisqu'il a été soumis à leur discussion et que son contenu est corroboré par d'autres pièces relatives au mauvais état des éléments d'équipement du logement.

La Cour estime, au vu de ce qui précède, que [Z] [N] ne s'est pas acquitté à l'égard de sa locataire des obligations mises à sa charge par la loi. En effet, le fait de donner à bail, en période hivernale, un logement dont les chambres destinées à abriter une mère de famille et ses trois enfants à charge étaient dépourvues de moyens de chauffage, dont les fenêtres n'assuraient pas l'étanchéité à l'air et à l'eau et dont la douche était inutilisable est contraire à l'obligation de fournir un logement en état de servir à l'usage pour lequel il a été loué.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que [Z] [N] a manqué à ses obligations de délivrer un logement en bon état.

Sur le sort du bail

[J] [M], ainsi qu'elle l'a fait en première instance, se prévaut de l'exception d'inexécution pour affirmer que le bail a pris fin le 31 décembre 2017, conformément à l'intention qu'elle exprimait en ce sens dans sa lettre à son bailleur en date du 26 décembre 2017, avec dispense de préavis, et pour exiger de son bailleur qu'il lui restitue les sommes versées à titre de loyer et de dépôt de garantie.

[Z] [N] soutient, quant à lui, que la lettre du 26 décembre 2017 est inefficace pour entraîner une résiliation du bail et que le contrat de location a dès lors continué à courir, [J] [M] étant toujours redevable du loyer, sa dette locative continuant à être exigible jusqu'à ce qu'un congé soit régulièrement notifié.

L'article 1217 du Code civil, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 10 février 2016, relatif à l'inexécution du contrat et de ses conséquences, et auquel [Z] [N] se réfère expressément dans ses écritures, énonce que : « La partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté ou l'a été imparfaitement peut :

- refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation,

- poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation,

- solliciter une réduction du prix,

- provoquer la résolution du contrat,

- demander réparation des conséquences de l'inexécution.

Les sanctions ne sont pas incompatibles et peuvent être cumulées ; des dommages-intérêts peuvent toujours s'y ajouter ».

En vertu de ce texte, un locataire peut toujours demander à ce qu'il soit mis fin au bail dès lors que son bailleur lui fournit un logement qui ne répond pas aux normes élémentaires de confort, d'habitabilité et de sécurité.

En outre, dès lors que le départ du locataire est motivé par un manquement du bailleur à son obligation de délivrance d'un logement conforme à sa destination, il ne peut être exigé du preneur qu'il respecte le délai de préavis de trois mois fixé par les dispositions combinées des articles 12 et 15 de la loi du 6 juillet 1989.

En conséquence, c'est à juste titre que le premier juge a déclaré le bail résilié. En effet, la carence du bailleur motivait l'initiative de la locataire de mettre fin au bail.Toutefois, la résiliation doit nécessairement prendre effet au 31 décembre 2017 et il convient de réformer en conséquence le jugement en ce qu'il a fixé les effets de la résiliation du bail au 26 mars 2018.

C'est en outre à tort que [Z] [N] soutient que le bail a continué à produire ses effets, jusqu'à une date future, faute d'un congé valablement délivré par sa locataire. Celui-ci doit donc être débouté des demandes présentées de ce chef.

Sur les demandes pécuniaires et indemnitaires

[J] [M] demande tout d'abord la condamnation de son bailleur au paiement de la somme de 685 € correspondant au loyer qu'elle a réglé pour le mois de décembre 2017.

Il est constant que celle-ci n'a pu jouir du logement loué puisque, quelques jours seulement après son arrivée, elle était contrainte de mettre en demeure son propriétaire de lui fournir un logement correspondant à sa destination de local à usage d'habitation pour elle-même et sa famille.

Dans la mesure ou il est admis, en droit, que le locataire peut suspendre le paiement des loyers au propriétaire qui ne respecte pas son obligation de délivrer un logement décent, il convient d'ordonner à [Z] [N] de restituer à [J] [M] la somme de 685 € qu'il a perçue dès lors qu'il n'a pas fourni à celle-ci la contrepartie de ce paiement.

[J] [M] demande par ailleurs que soit mis à la charge de son bailleur le paiement d'une somme de 490,74€ en réparation des préjudices matériels qu'elle a subis, cette somme correspondant à des factures réglées au Syndicat d'Equipement des Communes des Landes au titre de la fourniture de l'eau potable, à son fournisseur d'énergie électrique ainsi qu'au titre de la location d'un véhicule de déménagement.

La somme de 72,46 € correspondant au coût d'un véhicule de location au moyen duquel elle a effectué son déménagement, ainsi qu'il apparaît des pièces produites, doit bien être assumée par l'intimé puisqu'il s'agit d'une dépense à laquelle [J] [M] a dû faire face en urgence, le 29 décembre 2017, pour quitter le logement qu'elle avait pris en location.

La facture de résiliation émise par Direct Energie le 20 janvier 2018 pour un montant de 347 € TTC correspond, à concurrence de 191,10 € à la consommation électrique du mois de décembre 2017, ce qui est manifestement excessif au regard des conditions de vie qui ont été imposées à [J] [M] et sa famille entre le 2 décembre 2017, date d'entrée dans les lieux, et le 15 décembre 2017, date à laquelle les mêmes ont été accueillis en logement hôtelier sur l'initiative et aux frais de leur assureur. Cette somme doit donc être mise à la charge du bailleur, ainsi que le surplus de la facturation puisque ces autres sommes correspondent à des frais d'ouverture et de fermeture de compteur électrique ainsi que des taxes d'acheminement de l'énergie électrique, lesquels ne se rattachent à aucune prestation dont l'abonné a bénéficié compte tenu des conditions d'exécution du bail.

Enfin, la facture concernant la consommation d'eau, pour un montant de 71,28 €, doit également être mise à la charge de [Z] [N] pour les mêmes raisons.

[J] [M] sollicite en outre la condamnation de ce dernier au paiement d'une somme de 3000 € à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices moraux et de jouissance qu'elle a subis. Si le premier juge a retenu à juste titre que le manquement de [Z] [N] à son obligation de délivrance d'un bien en bon état a causé à sa locataire un préjudice de jouissance, caractérisé en l'espèce, il convient de porter le montant des dommages-intérêts alloués à la somme de 1000 €, eu égard aux éléments de l'espèce.

Enfin, il appartiendra à [Z] [N] de restituer à [J] [M] le dépôt de garantie d'un montant de 685 € qu'il a conservé par-devers lui. Par application des dispositions de l'article 22 de la loi du 6 juillet 1989, cette somme sera majorée d'une somme égale à 10% du loyer mensuel en principal, pour chaque période mensuelle écoulée à compter de la remise des clés au bailleur après libération des lieux.

La demande de dommages-intérêts présentée par [Z] [N] à l'encontre de l'appelante pour procédure abusive n'est pas justifiée, l'action engagée par celle-ci ne pouvant être qualifiée comme telle, au regard des motifs ci-dessus exprimés.

La demande qu'il présente en outre à concurrence d'une somme de 5000€ en indemnisation des préjudices subis est également rejetée, dans la mesure où il ne démontre pas la perte de chance de conclure un bail avec un autre locataire. En outre, il convient de rappeler que l'occupation des lieux n'a été que d'une durée d'à peine un mois et que la perte de chance invoquée n'est donc pas constituée.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Les entiers dépens de l'instance seront mis à la charge de [Z] [N] qui succombe.

Il sera par ailleurs tenu de verser à [J] [M] une indemnité de 1000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile dans la mesure où il serait contraire à l'équité de laisser à la charge de celle-ci la totalité des frais irrépétibles dont elle a pu faire l'avance.

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement du tribunal d'instance de Dax en date du 6 novembre 2018 en ce qu'il a dit que [Z] [N] a manqué à son obligation de délivrer un logement en bon état et en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages-intérêts,

Le réforme pour le surplus et,

Statuant à nouveau,

Dit que le bail passé entre [Z] [N] et [J] [M] a été résilié avec effet au 31 décembre 2017,

Condamne [Z] [N] à verser à [J] [M] les sommes suivantes :

- 685 € au titre du loyer du mois de décembre 2017,

- 490,74 € en réparation de son préjudice matériel,

- 1000 € à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices moraux et de jouissance,

- 685 € au titre du dépôt de garantie, majorée d'une somme égale à 10% du loyer mensuel pour chaque période mensuelle écoulée à compter de la remise des clefs au bailleur,

Condamne [Z] [N] aux entiers dépens de première instance et d'appel,

Condamne [Z] [N] à verser à [J] [M] une indemnité de 1000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Madame Valérie SALMERON, Président, et par Madame Nathalène DENIS, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE,LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : 2ème ch - section 1
Numéro d'arrêt : 19/00379
Date de la décision : 29/06/2020

Références :

Cour d'appel de Pau 21, arrêt n°19/00379 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-06-29;19.00379 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award