La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/05/2020 | FRANCE | N°18/01948

France | France, Cour d'appel de Pau, 1ère chambre, 20 mai 2020, 18/01948


CD/CD



Numéro 20/01273





COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre







ARRET DU 20/05/2020







Dossier : N° RG 18/01948 -

N° Portalis DBVV-V-B7C-G546





Nature affaire :



Demande du syndicat tendant à la cessation et/ou à la sanction d'une violation des règles de la copropriété commise par un copropriétaire















Affaire :



Syndicat des copropriétaires RESIDENCE EDERRA



C/



[J] [A],

[U] [L] épouse [A],

[O] [P] épouse [Z],

[H] [F],

SCI LES MOUSQUETAIRES, SARL ELO ET JO,

SARL ITSAS GIZONAK, SARL EXTREM GLISS





Grosse délivrée le :



à :

















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRAN...

CD/CD

Numéro 20/01273

COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRET DU 20/05/2020

Dossier : N° RG 18/01948 -

N° Portalis DBVV-V-B7C-G546

Nature affaire :

Demande du syndicat tendant à la cessation et/ou à la sanction d'une violation des règles de la copropriété commise par un copropriétaire

Affaire :

Syndicat des copropriétaires RESIDENCE EDERRA

C/

[J] [A],

[U] [L] épouse [A],

[O] [P] épouse [Z],

[H] [F],

SCI LES MOUSQUETAIRES, SARL ELO ET JO,

SARL ITSAS GIZONAK, SARL EXTREM GLISS

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 20 Mai 2020, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 03 Mars 2020, devant :

Madame DUCHAC, Président, magistrat chargé du rapport conformément à l'article 785 du code de procédure civile

Monsieur CASTAGNE, Conseiller

Madame ROSA-SCHALL, Conseiller

assistés de Madame DEBON, faisant fonction de Greffier, présente à l'appel des causes.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANT :

Syndicat des copropriétaires de la RESIDENCE EDERRA sis [Adresse 7], représenté par son syndic la société OFFICE DE GESTION IMMOBILIERE (en abrégé OGI), SARL au capital de 7 622.45 €, immatriculée au RCS de Bayonne sous le numéro 300 685 088, elle-même représentée par son gérant Mme [T] [A], domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 11],

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représenté par la SCP LONGIN/MARIOL, avocat au barreau de PAU

Assisté de la SCP VELLE-LIMONAIRE & DECIS, avocat au barreau de BAYONNE

INTIMÉS :

Monsieur [J] [A]

[Adresse 1]

[Localité 6]

Madame [U] [L] épouse [A]

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentés et assistés de Maître GUEROULT de la SCP GUEROULT, avocat au barreau de BAYONNE

Madame [O] [P] épouse [Z]

de nationalité Française

[Adresse 8]

[Localité 5]

Assignée

Monsieur [H] [F]

de nationalité Française

[Adresse 10]

[Localité 4]

Assigné

SCI LES MOUSQUETAIRES

représentée par son gérant, domicilié ès qualités audit siège

[Adresse 7]

[Localité 6]

Représentée par Maîtr PIAULT de la SELARL LEXAVOUE, avocat au barreau de PAU

Assistée de Maître COURREGELONGUE de la SELARL COURREGELONGUE ET ASSOCIES, avocat au Barreaud e BAYONNE

SARL ELO ET JO

[Adresse 7]

[Localité 6]

Représentée et assistée de Maître JUNQUA-LAMARQUE de la SCP JUNQUA-LAMARQUE & ASSOCIÉS, avocat au barreau de BAYONNE

SARL ITSAS GIZONAK

[Adresse 3]

[Localité 6]

Assignée

SARL EXTREM GLISS

[Adresse 7]

[Localité 6]

Assignée

sur appel de la décision

en date du 14 MAI 2018

rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BAYONNE

RG numéro : 15/00074

FAITS ET PROCÉDURE :

La résidence EDERRA, construite en 1971 et 1972 à [Localité 6], est soumise à un règlement de copropriété ayant fait l'objet d'un acte authentique de dépôt le 7 décembre 1971. Ce règlement a divisé l'immeuble en 188 lots de copropriété dont 63 d'appartements et 6 de commerces.

Cinq lots de commerces sur six sont concernés par la présente affaire, à savoir :

- les lots n° 119 et 120, propriété de la SCI LES MOUSQUETAIRES, loués à la SARL ELO ET JO et exploités à usage de restaurant à l'enseigne 'la Caravelle',

- le lot n° 137, propriété des époux M. [J] et [U] [A], loué à la SARL ITSAS GIZONAK et exploité à usage d'école de surf,

- le lot n° 174, propriété de Mme [O] [Z], loué par M. [H] [F] et exploité à usage d'école de surf et de location de planches de surf,

- le lot n° 173, propriété de M. [H] [F], loué à la SARL EXTREM GLISS et exploité à usage de boutique de prêt-à-porter et, épisodiquement, de snack-bar.

Devant les commerces, avant le trottoir public se trouve une zone de circulation en pavés auto-bloquants sont le Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA soutient qu'elle constitue une partie commune de la résidence. L'assemblée générale des copropriétaires de la résidence EDERRA se plaint depuis plusieurs années de ce que les commerçants susvisés occupent irrégulièrement l'espace situé en face de leur devanture respective, sans aucune autorisation.

Des constats d'huissier ont été établis les 12 juin 2012 et 29 août 2013, puis les 9 avril 2014 et 18 avril 2014.

Le 29 novembre 2010, le SDC DE LA RÉSIDENCE EDERRA a adressé des mises en demeure à chacun des propriétaires des lots concernés ainsi qu'à leurs locataires de l'époque.

Lors de l'assemblée générale des copropriétaires du 11 août 2011, une majorité des copropriétaires ont refusé d'autoriser le SDC DE LA RÉSIDENCE EDERRA a intenter une action en justice à l'encontre des propriétaires et locataires concernés afin de privilégier une solution amiable.

Des pourparlers sont intervenus entre le Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA et les propriétaires et locataires concernés. La signature d'un bail qui leur a été proposée a été refusée.

Le 6 août 2013, l'assemblée générale des copropriétaires a autorisé le SDC DES COPROPRIÉTAIRES DE LA RÉSIDENCE EDERRA à ester en justice afin de faire respecter le règlement de copropriété quant à l'occupation illicite des parties communes et obtenir une indemnisation.

C'est en application de cette décision que, dans un premier temps, le SDC DE LA RÉSIDENCE EDERRA a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de BAYONNE afin de voir ordonner une mesure d'expertise. Suivant une ordonnance rendue le 20 mai 2014, cette demande a été rejetée.

Une première procédure a été intentée par des copropriétaires à l'encontre des propriétaires et locataires des lots n° 119 120 et 137 et du syndicat des copropriétaires. Cette action n'a pas eu de suite, la radiation a été ordonnée le 23 octobre 2012 à la requête des demandeurs.

C'est dans ces conditions que, suivants exploits d'huissier séparés en date des 1er et 4 décembre 2014, le SDC DE LA RÉSIDENCE EDERRA a attrait la SCI LES MOUSQUETAIRES, les époux [A], Mme [Z], M. [F], la SARL ELO ET JO, la SARL ITSAS GIZONAK et la SARL EXTREM GLISS devant le tribunal de grande instance de BAYONNE, sur le fondement des articles 544 et suivants, 1134 et 1147 du code civil, aux fins notamment de les voir condamner, sous astreinte, à cesser tout encombrement des parties communes et à l'indemniser pour l'occupation litigieuse.

La SARL ITSAS GIZONAK n'a pas comparu.

Par jugement réputé contradictoire rendu le 14 mai 2018, le tribunal de grande instance de BAYONNE (RG n°15/00074) a :

- déclaré irrecevable comme prescrite l'action relative au non-respect du règlement de copropriété engagée par le SDC DE LA RÉSIDENCE EDERRA à l'encontre de la SCI MOUSQUETAIRES, les époux [J] et [U] [A], Madame [O] [P] épouse [Z], Monsieur [H] [F], la société ELO et JO, la société ITSAS GIZONAK et la société EXTREM GLISS ;

- condamné le SDC DE LA RÉSIDENCE EDERRA à payer :

* à M. [F], la SARL EXTREM GLISS et Mme [Z], la somme de 1000€ chacun en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civil,

* à la SARL ELO ET JO, la somme de 3000€ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

* à la SCI LES MOUSQUETAIRES, la somme de 3000€ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

* aux époux [A] la somme de 2000€ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté les demandes formées par le SDC DE LA RÉSIDENCE EDERRA sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné le SDC DE LA RÉSIDENCE EDERRA aux dépens pour lesquels il a été fait application, pour les avocats qui en avaient fait la demande, des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par déclaration n° 18/01388 régularisée le 14 juin 2018, le SDC DE LA RÉSIDENCE EDERRA a interjeté appel de cette décision qu'il conteste en chacune de ses dispositions.

La déclaration d'appel a été signifiée le 2 août 2018, suivant exploits d'huissier séparés à Mme [Z], M. [F], la SARL ITSAS GIZONAK et la SARL EXTREM GLISS.

Aux termes de ses dernières écritures en date du 23 janvier 2020, le SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DE LA RÉSIDENCE EDERRA demande à la cour, statuant sur le fondement des articles 544 et suivants, 1134, 1147, 2227, 2241, 2261, 2262, 2265 et 2266 du code civil, des dispositions prévues par la loi du 10juillet 1965 et son décret d'application du 17 mars 1967 de réformer en toutes ses dispositions, le jugement dont appel et statuant à nouveau :

- de condamner, in solidum, la SCI LES MOUSQUETAIRES et la SARL ELO ET JO, propriétaire et locataire des lots n° 119 et 120 à usage de restaurant, à libérer les parties communes indûment occupées et, par voie de conséquence, à démonter les dispositifs fixes installés en parties communes, notamment les planchers-estrades, palissades en bois et lampadaires et à remettre les lieux en leur état antérieur, dans le mois de la signification du jugement à intervenir, sous astreinte de 200€ par jour de retard,

- de condamner, in solidum, les époux [A] ainsi que la SARL ITSAS GIZONAK, propriétaires et locataire du lot n° 137 à usage d'école de surf, à libérer les parties communes indûment occupées et, par voie de conséquence, à déposer les dispositifs fixes, planchers et clôtures en bois situés en face de la devanture dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte,

- d'interdire aux quatre requis susvisés tout encombrement ultérieur des parties communes situés en face des devantures de leur lot respectif constituant une appropriation de fait de parties communes, sous astreinte de 500€ par jour pour toute infraction constatée,

- de condamner la SCI LES MOUSQUETAIRES à lui payer une indemnité d'occupation de 34,40€ par m² et par an depuis le 1er décembre 2009 puisque les caillebotis sont permanents, soit, pour 100 m² une somme de 3440€ x 5 ans = 17 200€, outre 3440€ par année supplémentaire à compter du 1er décembre 2014,

- de condamner, in solidum, les époux [A] à lui payer une indemnité d'occupation depuis le 1er décembre 2009 pour les 45 m² de terrasse utilisés avec un plancher permanent, soit 45 m² x 34,40€ = 1548 € x 5 ans = 7240€ outre 1548€ par année supplémentaire à compter du 1er décembre 2014,

- de condamner, in solidum, Mme [Z] et M. [F], propriétaire et locataire du lot n° 174 à usage d'école de surf, à libérer les parties communes indûment occupées et, par voie de conséquence, à retirer les éléments situés en parties communes, dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte que dessus,

- de condamner, in solidum, M. [F] et la SARL EXTREM GLISS, propriétaire et locataire du lot n° 173 à usage de boutique de prêt a porter, à libérer les parties communes indûment occupées et, par voie de conséquence, à retirer les portants actuellement en place en parties communes, dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte,

- d'interdire aux quatre requis susvisés tout encombrement ultérieur des parties communes situées en face des devantures de leur lot respectif, sous astreinte de 500€ par jour pour toute infraction constatée,

- de condamner Mme [Z] à lui payer une indemnité d'occupation depuis le 1er décembre 2009 pour une surface de partie commune de 39 m² à raison de 24€ le m² par saison, soit 936€ x 5 = 4680€, outre 936€ par année supplémentaire à compter du 1er décembre 2014,

- de condamner de même M. [F], qui occupe depuis le 1er décembre 2009 une même superficie sans caillebotis, à lui payer 4680€ outre 936€ par année supplémentaire à compter du 1er décembre 2014,

- de condamner chacun des sept intimés, parties succombantes, à lui payer une indemnité de procédure de première instance et d'appel de 3000€ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre conjointement et in solidum les dépens de première instance et d'appe1 incluant le coût des constats d'huissier des 29 août 20l3 ainsi que 9 et 18 avril 2014, pour lesquels il sera fait application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

- de débouter les intimés de toutes leurs demandes, fins, moyens et conclusions contraires,

A l'issue de leurs dernières écritures en date du 23 janvier 2020, M. [J] [A] et Mme [U] [L] épouse [A], demandent à la cour :

- de confirmer en toutes ses dispositions du jugement entrepris ;

- de dire le SDC DE LA RÉSIDENCE EDERRA soit déclaré irrecevable en son action ;

- de constater la prescription de l'action ;

- d'écarter des débats le bornage effectué par M. [S], non contradictoire ;

- de débouter le Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA de l'ensemble de ses demandes ;

- de constater l'absence de préjudice du Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA ;

- de condamner le SDC DE LA RÉSIDENCE EDERRA à leur payer la somme de 5000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 24 janvier 2020, la SCI LES MOUSQUETAIRES demande à la cour, statuant sur le fondement des articles 2258 et suivants du code civil, de la loi du 10 juillet 1965 et des articles 4 et 5 du règlement de copropriété :

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

* déclaré irrecevable comme prescrite, l'action relative au non-respect du règlement de copropriété engagée par le SDC DE LA RÉSIDENCE EDERRA

* condamné celui-ci à lui payer la somme de 3000€ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

* rejeté les demandes formées par le SDC DE LA RÉSIDENCE EDERRA sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamné le SDC DE LA RÉSIDENCE EDERRA aux dépens.

Y ajoutant,

- de condamner le SDC DE LA RÉSIDENCE EDERRA à lui verser la somme de 5000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile en sus des entiers dépens d'appel pour lesquels il sera fait application des dispositions prévues à l'article 699 du code de procédure civile ;

Subsidiairement,

- de débouter le SDC DE LA RÉSIDENCE EDERRA de l'ensemble de ses demandes.

- de condamner le SDC DE LA RÉSIDENCE EDERRA à lui verser la somme de 5000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile en sus des entiers dépens d'appel pour lesquels il sera fait application des dispositions prévues à l'article 699 du code de procédure civile ;

Par conclusions déposées le 26 septembre 2018, la SARL ELO ET JO demande à la cour :

- de déclarer irrecevable car prescrite, en application de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965, les actions et demandes du SDC DE LA RÉSIDENCE EDERRA,

- de confirmer, en toutes ses dispositions, le jugement dont appel ;

- de condamner le SDC DE LA RÉSIDENCE EDERRA à lui payer une somme de 5000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre tous les dépens pour lesquels il sera fait application des dispositions prévues par l'article 699 du même code.

Bien que régulièrement assignés, Mme [O] [P] épouse [Z], M. [H] [F], la SARL ITSAS GIZONAK et la SARL EXTREM GLISS n'ont pas constitué avocat.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 29 janvier 2019 et l'affaire, appelée à être plaidée à l'audience du 3 mars 2020 a été mise en délibéré.

MOTIFS

Sur la prescription

Suivant les dispositions de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965, dans sa rédaction applicable au présent litige, ' sans préjudice des textes spéciaux fixant des délais plus courts, les actions personnelles nées de l'application de la présente loi, entre copropriétaires ou entre un copropriétaire et le syndicat, se prescrivent par dix ans'.

Les actions réelles quant à elles se prescrivent par 30 ans.

Il appartient à celui qui invoque la prescription de rapporter la preuve de ce qu'elle est acquise.

Les intimés constitués soutiennent que la prescription applicable au présent litige est celle de 10 ans prévue aux dispositions de l'article 42 ci dessus, l'action du syndicat étant de nature mobilière.

Ils avancent que l'action est prescrite, leur occupation des lieux en cause remontant pour chacun à plus de dix ans.

Devant la cour, le Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA, admet en principal que son action est de nature personnelle et que donc le délai de prescription applicable est de dix ans. La prescription trentenaire n'est avancée par le Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA qu'à titre subsidiaire.

Ainsi, la discussion relative à la nature de l'action, réelle ou personnelle, n'a donc plus lieu d'être, les parties s'accordant à titre principal sur l'application de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965. La cour confirmera que l'action du Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA, qui tend à obtenir le démontage et l'enlèvement des équipements et aménagements installés par les commerçants mis en cause sur l'espace situé face à leurs devantures respectives constitue bien une action personnelle relative à l'affectation et à l'usage des parties communes.

Le délai de prescription applicable au présent litige est donc de dix ans.

S'agissant de l'occupation sans titre des parties que le Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA considère communes, le point de départ du délai court soit à compter du jour où a été commise l'infraction au règlement de copropriété, soit à compter du jour où le demandeur à l'action a pu avoir connaissance de la violation du règlement de copropriété.

La charge de la preuve du point de départ du délai à partir duquel court la prescription incombe aux parties qui invoquent cette fin de non recevoir, c'est à dire à la SCI LES MOUSQUETAIRES, les époux [J] et [U] [A] et leurs locataires respectifs, la SARL ELO ET JO et la Société ITSAS GIZONAK.

Lorsque l'occupation des parties alléguées communes est temporaire du fait d'une exploitation saisonnière qui se répète d'année en année, les lieux étant rendus en fin de saison à leur aspect et destination initiaux, chaque nouvelle occupation est le point de départ d'une nouvelle prescription décennale.

* en ce qui concerne le restaurant 'la Caravelle', dont les murs appartiennent à la SCI LES MOUSQUETAIRES, loués à la SARL ELO ET JO

La description des aménagements mis en place par les exploitants du restaurant 'la caravelle', réalisée par acte d'huissier en date du 12 juin 2012 et 29 août 2013 ne fait pas l'objet de contestation.

Devant la vitrine du restaurant a été mise en place une structure lourde constituée d'un caillebotis en bois sur une centaine de mètres carrés, créant de fait deux salles de restaurant extérieures séparées par un passage. Côté rue, cette terrasse est clôturée par des palissades en bois et dotée d'un châssis en aluminium fixe surmonté d'une bâche sous laquelle se trouvent des lampadaires avec leurs alimentations électriques.

Il s'agit là d'éléments fixés au sol, non amovibles.

Par ailleurs, cette terrasse, pendant la période d'ouverture du restaurant est occupée par les chaises, tables et autres éléments mobiliers utilisés par le commerce.

En ce qui concerne les éléments fixes portant occupation permanente des lieux, il appartient au SCI LES MOUSQUETAIRES, copropriétaire et à la SARL ELO ET JO, locataire, de rapporter la preuve de ce qu'ils ont été installés depuis plus de dix dans, la mise en place de ces équipements constituant le point de départ de la prescription.

Or ces intimés ne versent au débat aucune facture relative à l'installation de la structure constitué d'un caillebotis, des palissades sur châssis aluminium fixe, de la bâche équipée de lampadaires.

Les attestations produites par la SARL ELO ET JO font état de ce que les déclarants ont 'toujours' connu la terrasse de ce restaurant, ou l'ont connue depuis l'année 2000, ou encore depuis 1992. Elles sont muettes quant à la date d'installation des équipements fixes, si ce n'est le témoignage de Monsieur [E] qui fait état, de façon floue dont aucune conséquence ne peut être tirée, d'une construction ' depuis la fin des années 2000, semble-t-il'.

Les attestations produites par la SCI LES MOUSQUETAIRES ne donnent pas non plus d'indication quant à la date d'installation des éléments fixes, les déclarants faisant seulement état de la terrasse du restaurant en tant qu'élément extérieur.

Enfin, les photographies versées au débat n'ont pas date certaine, elles n'ont pas de force probante relativement au point de départ de la prescription.

Par suite, faute pour les intimés de justifier de la date de mise en place des structures fixes et permanentes devant la devanture du restaurant 'la Caravelle', constitutive du point de départ de la prescription, la preuve de l'acquisition de celle-ci n'est pas rapportée concernant l'occupation continue qui découle ces installations.

Les intimés ne démontrent donc pas que la structure fixe et permanente a été mise en place plus de dix ans avant les assignations en dates des 1er et 4 décembre 2014.

Faute de preuve de l'acquisition de la prescription concernant l'occupation continue du fait des éléments fixes, il faut donc considérer qu'ils ont été mis en place après le 1er décembre 2004.

Reste alors à déterminer si préalablement à cette date, la prescription de l'action avait été acquise du fait de l'occupation des lieux au moyen des éléments amovibles.

En ce qui concerne ces éléments amovibles, tables, chaises et autres mobiliers nécessaires à l'exploitation du commerce, le Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA soutient que l'occupation par ces éléments est temporaire, pendant la seule saison estivale et qu'elle l'était antérieurement à l'installation des éléments fixes ; que chaque nouvelle occupation fait alors courir un nouveau délai de prescription décennale.

Le Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA produit un extrait du site internet du restaurant et deux extraits du site de l'office du tourisme d'[Localité 6] dont il résulte que le restaurant ferme chaque année de décembre à mars. Le caractère temporaire de l'exploitation n'est pas contesté, du moins à partir de 2011 (exploitation par la SARL ELO ET JO ), la SCI LES MOUSQUETAIRES faisant toutefois valoir que les exploitants qui ont précédé la SARL ELO ET JO ne fermaient pas pendant l'hiver.

Cependant, l'acte de vente du fonds de commerce intervenu le 24 mai 2005, dispose en page 10, relativement aux déclarations de chiffre d'affaire, que de 2002 à 2005 le commerce était 'exploité de manière saisonnière'. En particulier, sur le chiffre d'affaires entre le 1er janvier 2005 et le 24 mai 2005, jour de la vente du fonds, le chiffre d'affaires est porté : ' NEANT (le fonds étant exploité de manière saisonnière'.

Par la suite, du 25 mai 2005 à 2011, date de la cession à la SARL ELO ET JO, le fonds de commerce, exploité par une SARL LA CARAVELLE avait une activité continue attestée par deux de ses salariés qui font état de contrats de travail à durée indéterminée, pour l'année entière.

Il résulte par ailleurs des attestations produites par la SCI LES MOUSQUETAIRES que le restaurant existait avec sa terrasse dès 1973 ou 1974. Certaines de ces attestations, suivant lesquelles 'la terrasse existait' sont trop vagues pour que l'on puisse en tirer une conclusion quant à une occupation permanente ou saisonnière. Les attestations suivant lesquelles la terrasse a de tout temps existé en permanence, ou encore entre 1986 et 2005 sont contredites par les pièces du dossier dont il résulte que le restaurant n'était ouvert que de manière saisonnière entre 2002 et le 24 mai 2005. La SCI LES MOUSQUETAIRES et la SARL ELO ET JO ne rapportent donc pas la preuve d'une occupation continue de la terrasse entre 1973 et 2002.

De ces éléments de faits, la chronologie suivante peut être établie :

- 1973/1974 : début de l'exploitation dont le caractère continu n'est pas établi.

- 2002 au 24 mai 2005, exploitation temporaire par la LA CARAVELLE SARL

- 25 mai 2005 à 2011, exploitation continue par la SARL LA CARAVELLE

- à compter de 2011, exploitation temporaire par la SARL ELO ET JO

L'utilisation des parties alléguées communes par le restaurant n'a pas donc pas été ininterrompue.

Ainsi, avant le 1er décembre 2004 et depuis l'année 2002 le caractère saisonnier de l'activité du restaurant a fait courir autant de prescriptions que d'ouvertures.

De plus, entre 1973 à 2002, la SCI LES MOUSQUETAIRES et la SARL ELO ET JO à qui incombent la charge de la preuve de l'acquisition de la prescription, ne justifient pas d'une occupation continue ayant permis de prescrire l'action du Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA.

Par conséquent,

- les intimées ne démontrent pas que la prescription a été acquise entre 1973 et 2002 ;

- de 2002 au 1er décembre 2004 (et jusqu'au 24 mai 2005), l'exploitation temporaire a fait courir autant de prescriptions de d'ouvertures et fermetures du restaurant, étant acquis qu'avant cette date les éléments fixes (planchers et autres) n'étaient pas installés.

Par suite, antérieurement au 1er décembre 2004, chaque nouvelle occupation a constitué le point de départ d'une prescription décennale pour la seule saison considérée.

A supposer même que les éléments fixes aient été installés postérieurement au 24 mai 2005, à cette date, il résulte de l'acte de cession du fonds de commerce que celui-ci n'était pas exploité. Une prescription de 10 ans aurait alors commencé à courir à compter de sa réouverture par le nouvel exploitant. En considérant que l'ouverture pour une exploitation continue a pu intervenir dés le 25 mai 2005, date la plus favorable aux intimés, le délai de prescription de 10 ans prenait fin le 24 mai 2015, soit postérieurement à l'assignation.

Par conséquent,

- la prescription n'est pas démontrée du fait d'une occupation continue suite à l'installation des éléments fixes de la terrasse du restaurant,

- la prescription n'est pas démontrée non plus du fait d'une exploitation continue pendant dix ans entre 1973 et le 1er décembre 2004,

- en tout état de cause une exploitation continue à compter du 25 mai 2005 n'a pas permis l'acquisition de la prescription, les assignations des 1er et 4 décembre 2004 étant antérieures à l'expiration du délai.

La fin de non recevoir tirée de la prescription de l'action du Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA, soulevée par la SCI LES MOUSQUETAIRES et la SARL ELO ET JO sera rejetée. La décision dont appel sera infirmée de ce chef.

* en ce qui concerne les époux [J] et [U] [A]

Ils louent leurs murs à l'école de Surf dite LEHENA, exploitée par la Société ITSAS GIZONAK (qui n'a pas constitué avocat). Les époux [J] et [U] [A] soulèvent la prescription décennale de l'action du Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA.

Suivant les constats d'huissier établis respectivement les 12 juin 2012 et 29 août 2013, le lot des époux [J] et [U] [A] est doté d'une estrade-plancher. L'huissier relève que pendant la saison, la terrasse de 45 m² est encombrée de présentoirs avec de nombreuses planches de surf ainsi que des plantes vertes. En période de fermeture, l'estrade est laissée en place avec les palissades.

Les époux [J] et [U] [A] ne justifient d'aucune facture ou autre élément de nature à rapporter la preuve de la date d'installation du plancher et des éléments fixes. Par conséquent, le point de départ de l'occupation permanente, constitutif du point de départ du délai de prescription pour une telle occupation n'est pas justifié par les intimés qui entendent se prévaloir de la prescription.

Par ailleurs, le même raisonnement que ci-dessus sera tenu quant à l'ouverture saisonnière de l'exploitation du locataire dont découle l'occupation temporaire de la terrasse litigieuse.

En effet, la capture d'écran de la page Facebook de l'école de surf LEHENA montre une ouverture saisonnière de cet établissement, ce que les époux [J] et [U] [A] ne contestent pas.

Ainsi, avant même l'installation des éléments fixes, à une date non démontrée, le caractère saisonnier de l'activité de l'école de surf a fait courir autant de prescriptions que d'ouvertures. Faute pour les époux [J] et [U] [A] de rapporter la preuve qui leur incombe de la date de la dernière ouverture temporaire ayant fait courir la prescription avant l'installation de l'estrade et autres dispositifs fixes, ils ne démontrent pas que l'action du Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA est prescrite.

La date du point de départ de la prescription n'étant pas justifiée, le moyen tenant à l'interruption du délai par l'assemblée générale du 17 août 2017 et non par l'assignation de décembre 2014 est inopérant.

En conséquence, la fin de non recevoir tirée de la prescription de l'action du Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA, soulevée par les époux [J] et [U] [A] sera rejetée. La décision dont appel sera infirmée de ce chef.

* en ce qui concerne, Mme [O] [P] épouse [Z], M. [H] [F] et la SARL EXTREM GLISS, ayant constitué avocat en première instance mais non comparants devant la cour,

Ces parties en première instance avaient soulevé la prescription de l'action du Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA que le premier juge a retenue au motif de l'ancienneté de ces établissements.

Madame [O] [P] épouse [Z] est propriétaire du lot 173 qu'elle loue à Monsieur [H] [F]. Ce dernier y exerce une activité d'école de surf, 'ECOLE FRANÇAISE DE SURF' et de location de planches.

Monsieur [H] [F] est propriétaire du lot 174 qu'il loue à la SARL EXTREM GLISS, laquelle exploite une boutique de prêt à porter à l'enseigne 'ALOHA' et épisodiquement un snack-bar.

Il résulte des constats d'huissier en dates des 12 juin 2012 et 29 août 2013, que :

- sur le lot n° 173, « l'ÉCOLE FRANÇAISE DE SURF » occupe toute la zone de 39m² située entre la devanture et des bornes blanches qu'elle a installées au sol en limite du trottoir, avec plusieurs portiques ou sont présentés des planches de surf ainsi que divers portants avec des combinaisons et vêtements de surf. Le commerce est également doté, au même endroit, d'une petite estrade en bois et d'une planche de surf en guise d'enseigne, fixée à l'aide d'un ferraillage à la sous-face du balcon du 1er étage de l'immeuble. Durant l'hiver, ne subsiste que le store.

- pendant la saison estivale, la boutique située sur le lot n° 174 occupe aussi la zone de 39m² située au droit de sa devanture, avec 4 tables et des chaises, parfois des présentoirs et des portants de « l'école française de surf », pour des planches et des vêtements de surf. Y est également situé un store fixé sous le gros-'uvre de l'immeuble ainsi qu'un robinet d'eau 'xé sur un montant latéral. Durant la fermeture, subsiste le store en façade ainsi que deux portants devant les bornes blanches.

A l'instar des autres intimés, l'école française de surf et le magasin ALOHA, dont le dispositif fixe est constitué par un store et une estrade pour la première et un store pour la seconde, n'ont pas justifié de la date d'installation de ces éléments.

De plus leur activité est également saisonnière, ce qui apparaît notamment sur le site de l'école française de surf.

Par suite, avant même l'installation des éléments fixes, à une date non démontrée, le caractère saisonnier de l'activité de l'école française de surf et de la boutique de prêt à porter a fait courir autant de prescriptions que d'ouvertures. Faute pour Mme [O] [P] épouse [Z], M. [H] [F] et la SARL EXTREM GLISS de rapporter la preuve qui leur incombe de la date de la dernière ouverture temporaire ayant fait courir la prescription avant l'installation de l'estrade et autres dispositifs fixes, ils ne démontrent pas que l'action du Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA est prescrite.

En conséquence, la fin de non recevoir tirée de la prescription de l'action du Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA, soulevée par les époux [J] et [U] [A] sera rejetée. La décision dont appel sera infirmée de ce chef.

* en ce qui concerne la SARL ITSAS GIZONAK, non comparante en première instance et devant la cour

N'ayant pas comparu, ni en première instance ni en appel, cette partie ne soutient pas le moyen tiré de la prescription. L'action à son égard sera déclarée recevable le jugement déféré sera infirmé de ce chef.

En conclusion, la décision dont appel sera infirmée en ce qu'elle a déclaré l'action du Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA irrecevable. Statuant à nouveau, la cour la déclarera recevable.

Sur la nature des emplacements en cause

Les intimés contestent que les emplacements que le Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA entend voir libérer constituent des parties communes.

La SCI LES MOUSQUETAIRES soutient :

- au principal, que les terrasses appartiennent au domaine public de la commune

- subsidiairement, si elles sont considérées comme appartenant à la résidence EDERRA, qu'elles présentent un caractère privatif

- plus subsidiairement si elles sont considérées comme des parties communes, que leur jouissance privative a été acquise par usucapion.

Les époux [J] et [U] [A] avancent que les terrasses constituent des parties privatives, à moins qu'elles relèvent du domaine public ; qu'en tout état de cause leur occupation intervient de bonne foi.

Les intimés demandent dans les motifs de leurs conclusions que soit écarté le 'bornage' établi par Monsieur [S] à la demande du Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA, car non contradictoire.

La cour fait observer que la limite entre une propriété privée et le domaine public ne s'établit pas par un 'bornage' mais par un arrêté d'alignement pris par le représentant légal de la collectivité dont relève le domaine public.

L'étude établie par Monsieur [S], certes non contradictoire, ne saurait donc être analysée comme un bornage. N'étant ni contradictoire ni établi sur mandat judiciaire, il n'a bien évidemment pas la valeur probante d'une expertise. Ce document doit être regardé comme une pièce du dossier du Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA qui a été soumise à la discussion des parties dans le cadre de la présente procédure. Ayant pu être discutée par les conseils des parties, il n'y a pas lieu de l'écarter des débats.

Pour rappel, le litige porte sur la zone pavée située, côté front de mer, entre le bâtiment copropriété EDERRA et le trottoir.

* domaine public ou propriété de la résidence

La matrice cadastrale fait apparaître que la parcelle [Cadastre 9] de 1810 m², située 7[Adresse 7], sur laquelle est édifiée la résidence EDERRA, inclut bien la zone pavée le long de la façade Nord (front de mer) et ceci jusqu'au trottoir public du [Adresse 7].

L'architecte ayant établi le plan de masse de la résidence, le cabinet [D], a écrit au conseil du Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA le 21 mars 2014 : ' il est tout à fait clair que la partie terrasse fait partie de la copropriété et vient en limite avec le trottoir en domaine public. Cela est d'autant plus clair que l'on retrouve le même symbole du traitement de sol côté Sud . '

Par courrier en date du 5 mars 2014, le Maire de la commune d'[Localité 6] expose qu'au vu du plan de masse annexé à la demande de permis de construire, il apparaît que la terrasse dallée fait partie du terrain appartenant à la copropriété, seul le trottoir situé au-delà fait partie du domaine public.

L'examen de ce plan désigne le domaine public par une mention située sous la délimitation de la terrasse.

Le plan de masse annexé au rang des minutes du notaire ayant reçu l'acte de dépôt du règlement de copropriété porte la mention suivante : 'Domaine public : trottoir [Adresse 7]'. Le fait que le terme 'domaine public' soit inscrit sur la représentation graphique de la terrasse ne vient pas contredire sa description littérale, confirmée par le courrier du maire de la commune et les indications du plan cadastral.

Les pièces jointes au dossier que le Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA a adressé au géomètre [S] contiennent l'arrêté d'alignement pris par le Président du Conseil Départemental en date du 17 juin 2016, produit au débat, auquel est annexé le plan d'alignement qui confirme que le domaine public s'arrête en limite du trottoir et n'inclut pas la zone pavée située devant la résidence.

Cet arrêté d'alignement n'a pas fait l'objet de contestation devant la juridiction administrative.

Enfin, cet ensemble d'éléments qui démontre suffisamment que la zone pavée objet du litige appartient à la résidence EDERRA est corroboré par l'étude réalisée à la demande du Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA par Monsieur [S].

A l'inverse, les intimés ne justifient pas de ce que la terrasse en question relève du domaine public. A cet égard, alors qu'ils ne contestent pas occuper les lieux, ils ne produisent aucune autorisation leur permettant d'installer leur activité sur le domaine public, ni aucune redevance réglée en ce sens.

Par conséquent, la zone pavée située entre le bâtiment Résidence EDERRA et le trottoir, appartient bien à cette résidence.

* parties communes ou parties privatives

L'article 4 du règlement de copropriété définit comme suit les parties communes :

' les parties communes sont celles qui ne sont pas affectées à l'usage exclusif d'un copropriétaire déterminé. (....) Elles comprennent toutes les parties de l'immeuble qui ne sont pas affectées à l'usage exclusif et particulier d'un appartement et de ses dépendances, d'un magasin ou d'un local et notamment :

- la totalité du sol des bâtiments, des cours, jardins et espaces verts (...)

Cette énumération est purement énonciative et non limitative.'

L'article 5 du règlement de copropriété définit comme suit les parties privatives :

' les parties privatives d'un local ou appartement sont celles qui sont réservées à l'usage exclusif de chaque copropriétaire. Elles comportent, dans les lieux constituant ce local ou cet appartement (...).

Les barres d'appui, les garde-corps, les balustrades, les balcons, les balconnets, les terrasses, les grilles (.....)

D'une manière générale tout ce qui est inclus à l'intérieur des locaux, l'énumération qui précède étant énonciative et non limitative.'

Les intimés arguent des dispositions de l'article 5 pour soutenir que la zone pavée est constitutive de terrasses, par définition parties privatives.

Cependant, contrairement à ce que soutiennent les intimés, la description des parties communes contenue à l'article 4, non limitatif, n'exclut nullement la zone pavée située entre le bâtiment et le trottoir, devant les commerces du rez-de-chaussée.

En effet,

- il s'agit d'une zone bâtie, constituée de pavés, qui fait partie du sol des bâtiments ;

- ni l'état descriptif de division, ni les plans annexés au règlement de copropriété ne divisent cette zone comme attachée aux différents lots du rez-de-chaussée. Les abords des devantures de commerces ne sont matérialisés par aucun ouvrage. Ces éléments conduisent à écarter la définition de 'terrasses' telle qu'entendue à l'article 5 ;

- la superficie des lots visés au règlement de copropriété et à l'état descriptif de division, n'inclut pas la surface de la zone pavée située devant chacun des lots.

Par ailleurs, l'utilisation du terme 'devanture' dans le règlement de copropriété n'inclut nullement la 'totalité du devant', mais au contraire l'immédiat pas de porte du commerce.

En conséquence, faute d'entrer dans la définition des parties privatives, la zone pavée litigieuse constitue bien une partie commune de la copropriété.

Sur l'usucapion de la jouissance privative de la zone objet du litige

La SCI LES MOUSQUETAIRES et époux [J] et [U] [A] soutiennent qu'ils ont acquis par prescription la jouissance privative de la portion de zone pavée située devant le lot leur appartenant.

Suivant les dispositions de l'article 2261 du code civil, 'pour pouvoir prescrire, il faut une prescription continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire'.

Suivant les dispositions de l'article 2266 du code civil, 'ceux qui possèdent pour autrui ne prescrivent jamais, par quelque laps de temps que ce soit. Ainsi, le locataire, le dépositaire, l'usufruitier et tous autres qui détiennent précairement le bien ou le droit du propriétaire ne peuvent prescrire'.

Il est acquis que les locataires ne peuvent pas prescrire, mais devant la cour la SARL ELO ET JO ne le soutient pas.

Il a été établi ci-dessus que pour chacun des commerces, la possession n'a pas été continue, puisque l'occupation était temporaire. Concernant plus particulièrement la SCI LES MOUSQUETAIRES et les époux [J] et [U] [A] dont les locataires ont fait installer des éléments permanents (planchers notamment) à une date dont elles ne rapportent pas la preuve, l'occupation a été temporaire avant ces installations dont il n'est pas démontré ni soutenu qu'elles sont anciennes de plus de trente ans.

Une telle possession temporaire, interrompue chaque année à la fin de la saison touristique ne peut donner lieu à aucune prescription, y compris la prescription acquisitive.

Les intimés ne sauraient donc prétendre avoir acquis par usucapion la jouissance privative de l'espace commun situé devant leurs lots.

Sur les demandes du Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA tenant au non-respect du règlement de copropriété

Suivant les dispositions de l'article 9 de la loi du 10 juillet 1965, 'chaque copropriétaire dispose des parties privatives comprises dans son lot ; il use et jouit librement des parties privatives et des parties communes sous la condition de ne porter atteinte ni aux droits des autres copropriétaires ni à la destination de l'immeuble'.

L'article 25 b de la loi précise qu'un copropriétaire ne peut réaliser des travaux affectant les parties communes de l'immeuble sans autorisation de l'assemblée générale.

Le règlement de copropriété énonce en son article 7, 'aucun des copropriétaires ne pourra encombrer les entrées de la maison, les vestibules, paliers, escaliers, cages d'escalier, cours et autres parties communes ni laisser séjourner qui que ce soit.

Chacun des copropriétaires, pour la jouissance des locaux qui lui appartient indivisément pourra user librement des parties communes suivant leur destination et sans faire obstacle aux droits des autres propriétaires'.

Les intimés ne contestent pas occuper la zone pavée située devant leurs lots et commerces, y compris avec des dispositifs installés de façon permanente dans le sol ou sur la façade.

L'occupation de cette partie commune a été constatée par les constats d'huissier en dates des 12 juin 2012 et 29 août 2013.

Les manquements au règlement de copropriété sont donc avérés.

La cour fera droit aux demandes d'enlèvement et démontage comme il sera dit au dispositif de l'arrêt, contre les propriétaires bailleurs et leurs locataires, in solidum.

Ces enlèvements devront intervenir dans un délai de 4 mois à compter de la signification du présent arrêt, sous astreinte de 200 € par jour de retard, pendant une période de trois mois à l'issue de laquelle l'astreinte pourra être liquidée, in solidum entre propriétaires et locataires.

Afin que soit respecté pour l'avenir le règlement de copropriété, la cour fera interdiction aux intimés de procéder à l'avenir, à compter de l'enlèvement ou de la fin de la période d'astreinte, à tout encombrement, sous peine de nouvelle astreinte de 200 € par jour pour toute infraction constatée pendant une période de trois mois.

Sur les indemnités d'occupation

En réparation de l'occupation sans titre des parties communes, la cour fera droit aux demandes d'indemnités d'occupation, à la charge des seuls copropriétaires.

Ces indemnités seront fixées pour les cinq années précédant les actes introductifs d'instance des 1er et 4 décembre 2014 et jusqu'à libération effective des lieux.

Les montants réclamés par le Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA, basés sur celui des redevances municipales pour l'année 2013, en distinguant les occupations permanentes (planchers fixes) et saisonnières correspondent à la valeur locative des lieux.

Par suite,

- la SCI LES MOUSQUETAIRES sera condamnée à payer au Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA la somme de 17.200 € à titre d'indemnité d'occupation outre 3.440 € par année supplémentaire à compter du 1er décembre 2014 (34,40 € par m² et par an, pour 100 m² depuis le 1er décembre 2009);

- les époux [J] et [U] [A] seront condamnés à payer au Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA la somme de 7.740 € à titre d'indemnité d'occupation, outre 1.548 € par année supplémentaire à compter du 1er décembre 2014 (34,40 € par m² et par an, pour 45 m² depuis le 1er décembre 2009) ;

- Madame [O] [P] épouse [Z] sera condamnée à payer au Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA la somme de 4.680 € à titre d'indemnité d'occupation outre 936 € par saison supplémentaire à compter du 1er décembre 2014 (24 € par m² et par saison pour 39 m²);

- Monsieur [H] [F] sera condamné à payer au Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA la somme de 4.680 € à titre d'indemnité d'occupation outre 936 € par saison supplémentaire à compter du 1er décembre 2014 (24 € par m² et par saison pour 39 m²) ;

Sur les demandes annexes

Les intimés qui succombent supporteront les dépens, in solidum.

Au regard de l'équité et de la situation des parties, les intimés seront condamnés à payer les sommes suivantes au Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA :

- la SCI LES MOUSQUETAIRES et la SARL ELO ET JO in solidum : 3.000 €

- les époux [J] et [U] [A] et la Société ITSAS GIZONAK, in solidum : 3.000 €

- Madame [O] [P] épouse [Z] et Monsieur [H] [F], in solidum : 3.000 €

- Monsieur [H] [F] et la SARL EXTREM GLISS, in solidum : 3.000 €

PAR CES MOTIFS :

La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt par défaut et en dernier ressort,

Infirme la décision dont appel,

Statuant à nouveau,

Déclare recevable l'action du Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA contre chacun des défendeurs à cette action,

Dit qu'il n'y a pas lieu d'écarter des débats l'étude réalisée par Monsieur [S],

Condamne in solidum la SCI LES MOUSQUETAIRES et la SARL ELO ET JO, respectivement propriétaire et locataire des lots 119 et 120 à usage de restaurant, à libérer les parties communes, et pour ce :

* démonter et enlever les dispositifs fixes installés en parties communes, notamment les planchers, estrades, palissades en bois, lampadaires

* remettre les lieux en leur état initial,

Dit que ces enlèvements et démontages devront intervenir dans un délai de 4 mois à compter de la signification du présent arrêt, sous astreinte de 200 € par jour de retard, pendant une période de trois mois à l'issue de laquelle l'astreinte pourra être liquidée, in solidum entre propriétaire et locataire,

Fait interdiction à la SCI LES MOUSQUETAIRES et à la SARL ELO ET JO de procéder à l'avenir, à compter de l'enlèvement ci-dessus ou de la fin de la période d'astreinte, à tout encombrement, sous peine de nouvelle astreinte de 200 € par jour pour toute infraction constatée, pendant une période de trois mois, à l'issue de laquelle l'astreinte pourra être liquidée,

Condamne in solidum les époux [J] et [U] [A] et la Société ITSAS GIZONAK, respectivement propriétaire et locataire du lot 137 à usage d'école de surf, à libérer les parties communes, et pour ce :

* démonter et enlever les dispositifs fixes installés en parties communes, notamment les planchers, clôtures en bois,

* remettre les lieux en leur état initial,

Dit que ces enlèvements et démontages devront intervenir dans un délai de 4 mois à compter de la signification du présent arrêt, sous astreinte de 200 € par jour de retard, pendant une période de trois mois à l'issue de laquelle l'astreinte pourra être liquidée, in solidum entre propriétaire et locataire,

Fait interdiction aux époux [J] et [U] [A] et à la Société ITSAS GIZONAK de procéder à l'avenir, à compter de l'enlèvement ci-dessus ou de la fin de la période d'astreinte, à tout encombrement, sous peine de nouvelle astreinte de 200 € par jour pour toute infraction constatée, pendant une période de trois mois, à l'issue de laquelle l'astreinte pourra être liquidée,

Condamne in solidum Madame [O] [P] épouse [Z] et la Société ITSAS GIZONAK, respectivement propriétaire et locataire du lot 174 à usage d'école de surf, à libérer les parties communes, en retirant les éléments situés en parties communes,

Dit que ces enlèvements devront intervenir dans un délai de 4 mois à compter de la signification du présent arrêt, sous astreinte de 200 € par jour de retard, pendant une période de trois mois à l'issue de laquelle l'astreinte pourra être liquidée, in solidum entre propriétaire et locataire,

Fait interdiction à Madame [O] [P] épouse [Z] et à la Société ITSAS GIZONAK de procéder à l'avenir, à compter de l'enlèvement ci-dessus ou de la fin de la période d'astreinte, à tout encombrement, sous peine de nouvelle astreinte de 200 € par jour pour toute infraction constatée, pendant une période de trois mois, à l'issue de laquelle l'astreinte pourra être liquidée,

Condamne in solidum Monsieur [H] [F] et la SARL EXTREM GLISS, respectivement propriétaire et locataire du lot 173 à usage de boutique de prêt à porter, à libérer les parties communes, en retirant les éléments situés en parties communes,

Dit que ces enlèvements devront intervenir dans un délai de 4 mois à compter de la signification du présent arrêt, sous astreinte de 200 € par jour de retard, pendant une période de trois mois à l'issue de laquelle l'astreinte pourra être liquidée, in solidum entre propriétaire et locataire,

Fait interdiction à Monsieur [H] [F] et à la SARL EXTREM GLISS de procéder à l'avenir, à compter de l'enlèvement ci-dessus ou de la fin de la période d'astreinte, à tout encombrement, sous peine de nouvelle astreinte de 200 € par jour pour toute infraction constatée, pendant une période de trois mois, à l'issue de laquelle l'astreinte pourra être liquidée,

Condamne la SCI LES MOUSQUETAIRES à payer au Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA la somme de 17.200 € à titre d'indemnité d'occupation outre 3.440 € par année supplémentaire à compter du 1er décembre 2014,

Condamne solidairement les époux [J] et [U] [A] à payer au Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA la somme de 7.740 € à titre d'indemnité d'occupation, outre 1.548 € par année supplémentaire à compter du 1er décembre 2014,

Condamne à payer au Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA la somme de 4.680 € à titre d'indemnité d'occupation outre 936 € par saison supplémentaire à compter du 1er décembre 2014,

Condamne Monsieur [H] [F] à payer au Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA la somme de 4.680 € à titre d'indemnité d'occupation outre 936 € par saison supplémentaire à compter du 1er décembre 2014,

Condamne in solidum la SCI LES MOUSQUETAIRES et la SARL ELO ET JO à payer au Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA la somme de 3.000 €, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne solidairement les époux [J] et [U] [A], in solidum avec la Société ITSAS GIZONAK à payer au Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA la somme de 3.000 €, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum Madame [O] [P] épouse [Z] et Monsieur [H] [F] à payer au Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA la somme de 3.000 €, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum Monsieur [H] [F] et la SARL EXTREM GLISS à payer au Syndicat des copropriétaires de la Résidence EDERRA la somme de 3.000 €, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum la SCI LES MOUSQUETAIRES, la SARL ELO ET JO, les époux [J] et [U] [A], la Société ITSAS GIZONAK, Madame [O] [P] épouse [Z], Monsieur [H] [F] et la SARL EXTREM GLISS aux dépens d'appel et de première instance, dont distraction au profit de la SCP LONGIN et ASSOCIES.

Le présent arrêt a été signé par Mme DUCHAC, Président, et par Mme BLONDEL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,

Corinne BLONDELCaroline DUCHAC


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18/01948
Date de la décision : 20/05/2020

Références :

Cour d'appel de Pau 01, arrêt n°18/01948 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-05-20;18.01948 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award