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30/01/2020 | FRANCE | N°17/00397

France | France, Cour d'appel de Pau, Chambre sociale, 30 janvier 2020, 17/00397


MHD/SB



Numéro 20/481





COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale







ARRÊT DU 30/01/2020







Dossier : N° RG 17/00397 - N° Portalis DBVV-V-B7B-GOM2





Nature affaire :



Demande d'annulation d'une mise en demeure ou d'une contrainte









Affaire :



Société OLANO LOGISTIQUE FROID



C/



URSSAF AQUITAINE









Grosse délivrée le

à :





















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R Ê T



Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 30 Janvier 2020, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa d...

MHD/SB

Numéro 20/481

COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 30/01/2020

Dossier : N° RG 17/00397 - N° Portalis DBVV-V-B7B-GOM2

Nature affaire :

Demande d'annulation d'une mise en demeure ou d'une contrainte

Affaire :

Société OLANO LOGISTIQUE FROID

C/

URSSAF AQUITAINE

Grosse délivrée le

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 30 Janvier 2020, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 25 Novembre 2019, devant :

Madame DIXIMIER, magistrat chargé du rapport,

assistée de Madame LAUBIE, greffière.

Madame DIXIMIER, en application des articles 786 et 910 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :

Madame DEL ARCO SALCEDO, Présidente

Madame NICOLAS, Conseiller

Madame DIXIMIER, Conseiller

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

Société OLANO LOGISTIQUE FROID

[Adresse 6]

[Localité 5]

Représentée par Maître DUBERNET DE BOSCQ, avocat au barreau de BAYONNE

INTIMEE :

URSSAF AQUITAINE

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par la SCP CB2P AVOCATS, avocats au barreau de BORDEAUX

sur appel de la décision

en date du 06 JANVIER 2017

rendue par le TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE BAYONNE

RG numéro : 20140447

FAITS PROCEDURE PRETENTIONS DES PARTIES

Du 25 mars au 19 juin 2014, l'URSSAF Aquitaine a procédé au contrôle de la SARL Olano Logistique Froid, entreprise de transports routiers de fret interurbains pour la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013.

Par lettre d'observations en date du 19 juin 2014, elle a relevé six chefs de redressement à l'encontre de la société, à savoir :

- la réduction Fillon au 1er janvier 2011 : absence proratisation,

- les frais professionnels non justifiés,

- les avantages en nature : principe et évaluation - hors cas des constructeurs et concessionnaires,

- frais professionnels - limitent d'exonération : chauffeurs-routiers -grands déplacements,

- acomptes, avances, prêts non récupérés,

- prise en charge par l'employeur de contraventions.

Par courrier en date du 28 juillet 2014, la société Olano Logistique Froid a contesté les méthodes de calcul retenues pour chiffrer le redressement sur les frais professionnels - limites d'exonération.

Par courrier du 20 août 2014, l'URSSAF a ramené le montant du redressement relatif aux ' frais professionnels - limites d'exonération : chauffeurs-routiers - grands déplacements' à la somme de 32'298 € indiquant que de ce fait la vérification entraînait un rappel global de cotisations et contributions de sécurité sociale, d'assurance-chômage et d'AGS d'un montant de 77'668 €.

Le 29 août 2014, elle a fait notifier une mise en demeure à la société Olano Logistique Froid pour le recouvrement de la somme totale de 88'697€, soit en cotisations le montant de 77'665 et en majoration de retard de 11'032€.

Le 24 septembre 2014, la société Olano Logistique Froid a saisi la commission de recours amiable de l'URSSAF Aquitaine d'une contestation portant sur les chefs de redressement suivants :

- les frais professionnels non justifiés'principes généraux,

- les avantages en nature véhicules : principe évaluation,

- les frais professionnels limites d'exonération : chauffeurs-routiers grands déplacements,

- la prise en charge par l'employeur de contraventions.

Par courrier du 22 mai 2015, l'URSSAF a sollicité de la société la production du contrat de mise à disposition du véhicule attribué à Monsieur [Z] [T].

Par courrier du 8 juin 2015, la société a indiqué qu'aucune convention de mise à disposition n'avait été conclue pour ce véhicule.

Par décision du 14 décembre 2015, notifiée le 28 décembre 2015, la commission de recours amiable de l'URSSAF Aquitaine a maintenu l'intégralité du redressement contesté à la charge de la société.

La créance de l'organisme de recouvrement a été ramenée à la somme de 38'082 € en cotisations et majorations de retard, après le règlement par la société d'un montant de 39'583 €.

Par courrier du 1er décembre 2014, reçu le 2 décembre suivant, la société Olano Logistique Froid a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bayonne.

Par jugement en date du 6 janvier 2017, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bayonne a :

- rejeté la demande en nullité de la mise en demeure de la société,

- débouté la société Olano Logistique Froid de ses demandes

- confirmé la décision de la commission de recours amiable de l'URSSAF du 14 décembre 2015,

- condamné la société Olano Logistique Froid au règlement de la somme de 49'114 € correspondant au solde de la mise en demeure,

- renvoyé la société Olano Logistique Froid vers l'URSSAF Aquitaine pour l'étude de toute demande de délais de paiement et de remise de majorations de retard,

- condamné la société Olano Logistique Froid à payer à l'URSSAF Aquitaine la somme de 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rappelé qu'il est statué sans formes ni frais.

Par courrier recommandé en date du 26 janvier 2017, la société Olano Services a interjeté appel de cette décision dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas discutées.

***

Par conclusions en date du 25 octobre 2019, reprises oralement à l'audience et auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens, la société Olano Logistique du Froid demande à la cour de :

- l'accueillir en l'intégralité de ses demandes,

- réformer dans toutes ses dispositions le jugement attaqué,

- en conséquence, statuant à nouveau :

- à titre principal :

- constater la nullité de la mise en demeure du 29 août 2014 que lui a adressée l'URSSAF Aquitaine,

- annuler par voie de conséquence la décision de rejet de la commission de recours amiable et par là-même, la totalité du redressement effectué par l'URSSAF Aquitaine, objet de la mise en demeure en date du 29 août 2014,

- débouter l'URSSAF Aquitaine de l'intégralité de ses demandes,

- condamner l'URSSAF Aquitaine à lui payer la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner l'URSSAF Aquitaine aux entiers dépens,

- à titre subsidiaire :

- dire et juger que les frais professionnels exposés par Madame [E] [T] sont parfaitement justifiées,

- dire et juger que le véhicule utilisé par Monsieur [Z] [T] à des fins strictement professionnelles ne saurait être considéré comme un avantage en nature,

- dire et juger que les méthodes d'évaluation appliquées par l'URSSAF Aquitaine lors de son contrôle sur les limites d'exonération des frais professionnels des chauffeurs routier ( point 4 de la lettre d'observations) n'ont pas fait l'objet d'un accord préalable,

- dire et juger que le redressement opéré au titre des contraventions n'est pas fondé,

- annuler par voie de conséquence la décision de rejet de la commission de recours amiable et par là-même le redressement effectué par l'URSSAF Aquitaine objet de la mise en demeure en date du 29 août 2014 sur les chefs de redressement 2, 3, 4 et 6 de la lettre d'observations,

- condamner l'URSSAF Aquitaine à lui payer la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner l'URSSAF Aquitaine aux entiers dépens.

Par conclusions en date du 13 novembre 2019, reprises oralement à l'audience et auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens, l'URSSAF Aquitaine demande à la cour de :

- la recevoir en ses demandes et l'en déclarer bien fondée,

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement attaqué,

- débouter la société Olano Logistique du Froid de l'ensemble de ses demandes comme non fondée ni justifiée,

- condamner la société Olano Logistique du Froid au paiement d'une somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre aux entiers dépens.

SUR QUOI,

I - SUR LA NULLITE DE LA MISE EN DEMEURE :

A - Sur la recevabilité de la demande de nullité :

En application des articles :

* R 142-1 du code de la sécurité sociale, pris dans sa rédaction applicable au litige :

' ....les contestations formées à l'encontre des décisions prises par les organismes chargés du recouvrement des cotisations, des majorations et des pénalités de retard doivent être présentées à la commission de recours amiable dans un délai d'un mois à compter de la notification de la mise en demeure,

* R 142-18 du même code, pris dans sa rédaction applicable au litige :

' Le tribunal des affaires de sécurité sociale est saisi, après l'accomplissement, le cas échéant, de la procédure prévue à la section 2 du présent chapitre, par simple requête déposée au secrétariat ou adressée au secrétaire par lettre recommandée dans un délai de deux mois à compter soit de la date de la notification de la décision, soit de l'expiration du délai d'un mois prévu à l'article R. 142-6....'

Il en résulte que peut être soulevée, pour la première fois, devant le tribunal des affaires de sécurité sociale ou devant une cour d'appel la nullité de la mise en demeure.

En l'occurrence, en application des principes sus - rappelés, contrairement à ce que soutient l'URSSAF, même si le courrier de la société se termine de la façon suivante : ' tels sont les raisons pour lesquelles nous sollicitons de votre bienveillance l'annulation du redressement et de la mise en demeure du 29 août 2014 opéré sur les thèmes précités...' - à savoir les frais professionnels non justifiés'principes généraux, les avantages en nature de véhicule : principe évaluation, les frais professionnels limites d'exonération : chauffeurs-routiers grands déplacements, la prise en charge par l'employeur de contraventions - , il n'en demeure pas moins que la société Olano Logistique Froid est recevable dans sa contestation de la régularité de la mise en demeure.

B - Sur le fond :

L'article L. 244-2 du Code de la sécurité sociale exige l'envoi d'une mise en demeure à l'employeur.

L'article R244-1 dudit code pris dans sa rédaction applicable au litige prévoit que :

- ' ...la mise en demeure précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées ainsi que la période à laquelle elles se rapportent.

Lorsque la mise en demeure ou l'avertissement est établi en application des dispositions de l'article L. 243-7, le document mentionne au titre des différentes périodes annuelles contrôlées les montants notifiés par la lettre d'observations, corrigés le cas échéant à la suite des échanges entre la personne contrôlée et l'agent chargé du contrôle. La référence et les dates de la lettre d'observations et le cas échéant du dernier courrier établi par l'agent en charge du contrôle lors des échanges mentionnés au III de l'article R. 243-59 figurent sur le document. Les montants indiqués tiennent compte des sommes déjà réglées par la personne contrôlée.'

Ces précisions sont exigées à peine de nullité afin que l'employeur cotisant soit informé de tous les éléments se rapportant à sa dette et dispose de toutes les renseignements utiles pour en évaluer le bien fondé.

En l'espèce, la société Olano Logistique Froid soulève la nullité de la mise en demeure du 29 août 2014 en raison :

- de l'imprécision des motifs de la mise en recouvrement, des périodes visées dans la mise en demeure et du taux des majorations de retard,

- de l'absence de tout état détaillé, annexé à la mise en demeure, lui permettant de connaître avec certitude l'étendue, la nature et la cause de son obligation.

Cela étant, la mise en demeure indique :

- dans le paragraphe : motif de mise en recouvrement : ' contrôle . chefs de redressement notifiés le 24 juin 2014 article R243. 59 du code de la sécurité sociale,'

- dans le paragraphe : nature des cotisations : ' régime général ',

- les numéros Siren de la société et du cotisant,

- dans la colonne : périodes : ' 01 01 20 11 / 31 12 2011 ; 01 01 2012 / 3112 2012  ; 01 01 2013/ 31 12 2013 ',

- les montants des cotisations et des majorations afférents à chacune des trois périodes.

Contrairement à ce que soutient la société Olano Logistique Froid :

- elle était parfaitement en mesure d'identifier la lettre d'observations visée par la mise en demeure contestée en dépit de l'erreur matérielle affectant sa date qui était en réalité du 19 juin 2014 et non du 24 juin 2014 dans la mesure où elle n'avait fait l'objet d'aucun autre contrôle de l'URSSAF sur la même période,

- même si le taux de majoration n'a pas été repris dans la mise en demeure, la lettre d'observations qui lui avait été envoyée lui avait précisé que le calcul des majorations de retard serait effectué en application des dispositions de l'article R2143'18 du code de la sécurité sociale,

- le montant total des cotisations qui lui a été réclamé tient compte de la réponse qui avait été apportée le 20 août 2014 aux observations qu'elle avait formulées le 28 juillet précédent dans la mesure où il correspondait exactement à celui qui lui avait été notifié par l'URSSAF à ce moment là,

- aucune obligation n'incombait à l'URSSAF de préciser au titre des périodes annuelles visées dans la mise en demeure les dates d'exigibilité des cotisations sociales.

En conséquence, la mise en demeure délivrée à la société Olano Logistique Froid est régulière.

L'appelante doit être déboutée de toutes ses prétentions formées de ce chef.

II - SUR LE BIEN FONDE DU REDRESSEMENT :

A - Sur les frais professionnels non justifiés :

Sur le fondement des articles :

* L242-1 du code de la sécurité sociale, pris dans sa rédaction applicable au cas particulier :

' Pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire...

Il ne peut être opéré sur la rémunération ou le gain des intéressés servant au calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, de déduction au titre de frais professionnels que dans les conditions et limites fixées par arrêté interministériel....'

* 1 de l'arrêté du 20 décembre 2002 pris dans sa rédaction applicable au cas d'espèce:

'Les frais professionnels s'entendent des charges de caractère spécial inhérentes à la fonction ou à l'emploi du travailleur salarié ou assimilé que celui-ci supporte au titre de l'accomplissement de ses missions,'

* 2 du même arrêté :

' L'indemnisation des frais professionnels s'effectue :

1° Soit sous la forme du remboursement des dépenses réellement engagées par le travailleur salarié ou assimilé ; l'employeur est tenu de produire les justificatifs y afférents. Ces remboursements peuvent notamment porter sur les frais prévus aux articles 6, 7 et 8 (3°, 4° et 5°) ;

2° Soit sur la base d'allocations forfaitaires ; l'employeur est autorisé à déduire leurs montants dans les limites fixées par le présent arrêté, sous réserve de l'utilisation effective de ces allocations forfaitaires conformément à leur objet. Cette condition est réputée remplie lorsque les allocations sont inférieures ou égales aux montants fixés par le présent arrêté aux articles 3, 4, 5, 8 et 9,

Il en résulte que si la démonstration n'est pas faite que le salarié est exposé à des frais supplémentaires notamment de transport du fait d'une situation de déplacement, les indemnités doivent être réintégrées dans l'assiette des cotisations en application de l'article L 242- 1 du code de la sécurité sociale.

En l'espèce, il résulte de la lettre d'observations :

- que l'inspecteur a constaté le versement à la directrice d'exploitation (mandataire de la société) d'une indemnité kilométrique forfaitaire et mensuelle (attribuée 12 mois sur 12 dans l'année) en contrepartie de l'utilisation de son véhicule personnel de 381 €,

- qu'il a considéré qu'il s'agissait de compléments de rémunération à soumettre aux charges sociales,

- que ce point avait déjà fait l'objet d'une régularisation non contestée lors d'un contrôle réalisé en 2004 qui avait conclu à la réintégration dans l'assiette aux deux tiers des indemnités.

La société Olano Logistique Froid conteste et soutient :

- que Madame [E] [T], responsable d'exploitation de l'entreprise, est amenée à se rendre au moins une fois par mois au sein de l'entreprise Olano Carla Montauban, - située sur Montauban ( 82 ) à plus de 320 km de distance de l'entreprise basée à [Localité 5] ( 64 ) - afin de traiter le marché [Localité 3], client commun aux sociétés Olano Logistique Froid et Olano Carla Montauban,

-qu'elle en verse les justificatifs sous la forme du témoignage d'un responsable de la société Olano Carla Montauban et des factures émises par chacune des deux sociétés à destination de [Localité 3].

Cependant, à défaut de tout autre élément comme notamment des justificatifs de paiement de péages ou de frais de restauration et d'hôtel, ces pièces sont totalement insuffisantes pour étayer le bien-fondé de la contestation de la société Olano Logistique Froid dans la mesure :

- où l'attestation du directeur de la société Olano Carla Montauba se borne à énoncer que Madame [E] [T] et lui se réunissent régulièrement sur le site de [Localité 4] pour partager la gestion d'un client commun [Localité 3] sans autre précision,

- où les factures versées ne démontrent pas la réalité des trajets revendiqués par la société.

En conséquence il convient de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a validé ce chef de redressement à hauteur de 4168 €.

B - Sur l'avantage en nature véhicule, principe et évaluation hors cas de constructeurs et concessionnaires :

Sur le fondement de l'article L 242-1 du code de la sécurité sociale précitée, les avantages en nature constituent un élément de rémunération qui, au même titre que le salaire proprement dit, doit donner lieu à cotisation.

Il en est ainsi de la mise à disposition par l'employeur d'un véhicule en l'absence de justificatifs établissant que le véhicule a un usage exclusivement professionnel, l'économie de frais réalisé par le salarié devant donner lieu à l'intégration d'un avantage en nature.

En application de l'article 3 de l'arrêté du 10 décembre 2002, pris dans sa version applicable au cas particulier :

' Lorsque l'employeur met à la disposition permanente du travailleur salarié ou assimilé un véhicule, l'avantage en nature constitué par l'utilisation privée du véhicule est évalué, sur option de l'employeur, sur la base des dépenses réellement engagées ou sur la base d'un forfait annuel estimé en pourcentage du coût d'achat du véhicule ou du coût global annuel comprenant la location, l'entretien et l'assurance du véhicule en location ou en location avec option d'achat, toutes taxes comprises.

Les dépenses réellement engagées sont évaluées comme suit :

- en cas de véhicule acheté, elles comprennent l'amortissement de l'achat du véhicule sur cinq ans, l'assurance et les frais d'entretien et, le cas échéant, les frais de carburant. Si le véhicule a plus de cinq ans, l'amortissement de l'achat du véhicule est de 10 % ;

- en cas de location ou de location avec option d'achat, elles comprennent le coût global annuel de la location, l'entretien et l'assurance du véhicule et, le cas échéant, les frais de carburant.

Les dépenses sur la base d'un forfait sont évaluées comme suit :

- en cas de véhicule acheté, l'évaluation est effectuée sur la base de 9 % du coût d'achat et lorsque le véhicule a plus de cinq ans sur la base de 6 % du coût d'achat. Lorsque l'employeur paie le carburant du véhicule, l'avantage est évalué suivant ces derniers pourcentages auxquels s'ajoute l'évaluation des dépenses du carburant à partir des frais réellement engagés ou suivant un forfait global de 12 % du coût d'achat du véhicule et de 9 % lorsque le véhicule a plus de cinq ans ;

- en cas de véhicule loué ou en location avec option d'achat, l'évaluation est effectuée sur la base de 30 % du coût global annuel comprenant la location, l'entretien et l'assurance du véhicule. Lorsque l'employeur paie le carburant du véhicule, l'avantage est évalué suivant ce dernier pourcentage auquel s'ajoute l'évaluation des dépenses de carburant à partir des frais réellement engagés ou suivant un forfait global de 40 % du coût global annuel comprenant la location, l'entretien, l'assurance du véhicule et le carburant.'

En l'espèce, il résulte de la lettre d'observations :

-que Monsieur [Z] [T], salarié de l'entreprise, bénéficie de la mise à disposition entière d'un véhicule Renault Clio appartenant à la société,

- que l'inspecteur a procédé à des régularisations et un redressement de ce chef.

La société Olano Logistique Froid conteste et soutient que Monsieur [Z] [T] n'a jamais bénéficié d'un véhicule de l'entreprise à des fins personnelles.

Elle en veut pour preuve l'attestation que ce salarié lui-même a établie affirmant qu'il n'utilisait le véhicule litigieux qu'à des fins professionnelles, que ce véhicule était stationné dans l'entreprise chaque soir, chaque week-end, qu'il ne l'utilisait pas pendant les congés et qu'en tout état de cause, cette voiture était en réparation depuis le 7 mars 2013.

Cependant, ce témoignage, rédigé par le bénéficiaire lui-même du véhicule, qui est tout à la fois le frère de la gérante de la société et le chef de quai de l'entreprise ne saurait valablement appuyer les allégations de la société dès lors qu'il n'est conforté par aucun autre élément de fait.

En conséquence à défaut de tout élément contraire, le jugement attaqué sera confirmé de ce chef.

C - Sur les frais professionnels et limites d'exonération : chauffeurs-routiers grands déplacements :

Lors d'un contrôle destiné notamment à vérifier les frais professionnels exposés par les salariés d'une entreprise, l'URSSAF peut utiliser :

- soit la méthode de vérification par échantillonnage et extrapolation qui constitue une alternative à l'examen exhaustif des chefs de redressement potentiel sur la totalité des salariés de l'entreprise contrôlée, qui a pour finalité d'alléger les contraintes liées à la fourniture de très nombreuses pièces justificatives, de réduire la durée du contrôle et qui est régie par l'article R 243-59 -2 du code de la sécurité sociale,

- soit la méthode de la taxation forfaitaire qui permet de remédier aux lacunes d'une comptabilité incomplète ou inexistante ou frauduleuse ou de pallier l'absence de documents justificatifs nécessaires à la réalisation du contrôle ou leur présentation inadaptée empêchant leur exploitation et qui est régie par les articles R 242-5 du code de la sécurité sociale.

Qu'elle recoure à l'une ou à l'autre de ces méthodes, L'URSSAF doit respecter la procédure contradictoire du contrôle et la sauvegarde des droits de la défense.

Si dans le cadre d'une taxation par la méthode de l'échantillonnage et de l'extrapolation, la consultation de l'employeur à tous les stades de la mise en oeuvre de la procédure est obligatoire sous peine de nullité du redressement ainsi opéré pour défaut de respect du contradictoire, en revanche, dans le cadre de la taxation forfaitaire, la procédure contradictoire est respectée dès lors que l'organisme de recouvrement invite l'employeur à présenter ses observations et que de ce fait, il lui laisse le droit d'établir l'inexactitude et le caractère excessif de l'évaluation qu'il a réalisée.

1 - En l'espèce, il convient tout d'abord - avant de statuer sur la régularité du redressement et son bien fondé - de déterminer la méthode retenue par l'URSSAF, à savoir si cette dernière a opté pour la méthode de vérification par échantillonnage et extrapolation ou pour celle de la taxation forfaitaire ; les parties s'opposant sur ce point.

Contrairement à ce que soutient la société, la méthode retenue n'est pas celle de la vérification par échantillonnage et extrapolation mais la méthode forfaitaire.

En effet, même si le terme de ' sondage ' est présent en pages 11 et 12 de la lettre d'observation dans le paragraphe relatif aux frais professionnels des chauffeurs routiers lorsqu'il est expliqué que l'inspecteur a procédé à une approche des différents types de frais exposés par catégorie d'emploi et sur certains secteurs, il s'agit d'une maladresse de langage dans la mesure où ledit inspecteur n'a pas eu recours à la méthode du sondage pour les opérations de contrôle elles-mêmes et où il a appliqué la taxation forfaitaire pour apprécier la masse des frais concernés par les irrégularités appliquées aux seules personnes concernées.

Par ailleurs, l'énumération des documents qu'il a consultés effectivement, - à savoir livres et fiches de paie, DADS, convention collective, statue, état justificatif des aides et allégements à la réduction du temps de travail, contrats de retraite et prévoyance, DAS2, relevé deux semaines, tachygraphe -établissent qu'il n'a eu recours aux sondages que pour rechercher dans un premier temps les éventuels points de redressement procédant ensuite pour tout chef de redressement éventuellement décelé à l'examen exhaustif des documents permettant ou non de le justifier puis de le chiffrer.

En outre, les courriers électroniques que la société a échangés avec l'inspecteur URSSAF et qu'elle produit démontrent strictement l'inverse de ce qu'elle soutient dans la mesure où ils rappellent que la ' technique de l'échantillonnage ..ne pouvait être mise en place compte tenu de la variété des frais, de la nature des dépassements... etc..etc..'

Cela étant, même en optant pour la taxation forfaitaire, l'URSSAF se devait de respecter la procédure contradictoire du contrôle et la sauvegarde des droits de la défense.

Or dans ce cadre, dès lors que l'organisme de recouvrement invite l'employeur à présenter ses observations et que de ce fait, il lui laisse le droit d'établir l'inexactitude et le caractère excessif de l'évaluation qu'il a réalisée, il respecte la procédure contradictoire.

Et au cas particulier, un délai de trente jours a été accordé à la société Olano Logistique Froid pour faire valoir ses observations courant à compter de la notification de la lettre d'observations de l'URSSAF.

Il en résulte donc que le principe du contradictoire a été respecté au cas d'espèce.

***

Sur le fondement de l'article R. 242-5 du code de la sécurité sociale, l'inspecteur de l'URSSAF peut recourir à une taxation forfaitaire dans deux cas :

' lorsque la comptabilité de l'employeur est insuffisante ou incomplète et qu'elle ne permet pas d'établir le chiffre exact des rémunérations servant de base au calcul des cotisations dues ;

' ou lorsque l'employeur ne met pas à disposition de L'URSSAF les documents ou justificatifs nécessaires au contrôle ou lorsque leur présentation n'en permet pas l'exploitation.

En l'espèce, la lettre d'observations indique très clairement que l'ampleur des investigations qu'il avait à mener, la diversité des anomalies qu'il avait constatées, l'impossibilité dans laquelle se trouvait l'employeur de lui fournir tous les éléments d'une manière détaillée et suffisamment explicite et probante pour effectuer une régularisation exhaustive avaient conduit l'organisme de recouvrement à procéder à une taxation forfaitaire.

Il en résulte donc que le recours à la taxation forfaitaire était parfaitement justifié au vu des documents difficilement exploitables produits par l'employeur.

En conséquence, il y a lieu de rejeter la nullité du redressement de ce chef .

Le jugement attaqué doit être confirmé.

***

Sur le fond, il résulte de la lettre d'observations :

- 1 - que l'inspecteur de l'URSSAF a constaté que la comptabilité de la société a enregistré dans le poste ' frais de déplacement des chauffeurs ' le paiement de sommes très importantes relatives à l'exercice d' une intense activité de transport et du nombre de chauffeurs concernés par ces remboursements,

- 2 - qu'ainsi, il a relevé :

- que certains chauffeurs faisaient le choix de ne pas rentrer chez eux le matin pendant leur temps de coupure qui leur aurait permis normalement de regagner leur domicile respectif et que de ce fait ils percevaient à tort leur indemnité journalière complète,

- que toutes les autres vérifications qu'il a réalisées lui ont permis de conclure à des dépassements, exagérations et doubles paiements quelquefois de frais présentés par certains chauffeurs qu'il s'agisse de versement d'indemnités de casse-croûte au-delà de l'heure indiquée de départ prévue à cet effet, du paiement de repas en dehors des plages de conduite obligatoire pour y ouvrir droit ou d'indemnités versées en matinée sans raison.

Pour toute défense, la société Olano Logistique Froid se borne :

- à contester la méthode retenue consistant, sans produire la moindre nouvelle pièce, à diminuer de moitié le redressement réalisé, en retenant une régularisation forfaitaire fixée totalement de manière unilatérale et arbitraire,

- à contester fermement avoir donné un accord quelconque sur la méthode envisagée et sur le taux retenu.

Cependant, ces seuls arguments présentés au soutien d'une révision du redressement dont elle fait l'objet sont totalement insuffisants pour étayer ses demandes.

Seule la production de justificatifs permettant de contester utilement ou d'expliquer les irrégularités relevées par l'URSSAF dans ses écritures aurait été opérante.

En conséquence, le jugement attaqué doit être confirmé de ce chef.

D - Sur la prise en charge par l'employeur du paiement des contraventions des salariés:

Sur le fondement de l'article L 242-1 du code de la sécurité sociale précitée, les avantages en nature constituent un élément de rémunération qui, au même titre que le salaire proprement dit, doit donner lieu à cotisation.

Il est ainsi constant que la prise en charge, par l'employeur, des amendes réprimant une contravention au code de la route commise par un salarié constitue un avantage en nature dans la mesure où le fait d'assumer la charge financière de la contravention revient à accorder à l'auteur de l'infraction un avantage en nature, correspondant à l'économie de frais qu'il aurait normalement dû supporter.

De ce fait, l'employeur est tenu de cotiser de ce chef au titre d' un avantage en nature.

En l'espèce, il résulte de la lettre d'observations :

- que l'inspecteur a relevé que le compte de la société a enregistré que les amendes pour infractions étaient payées par la société pour le compte de ses salariés,

- qu'il a isolé les amendes imputables aux chauffeurs dans l'exercice de leur métier et qui n'ont pas été récupérées auprès d'eux par l'employeur,

- qu'il en a conclu à l'existence d'un avantage en espèces qu'il a réintégré dans l'assiette des cotisations et contributions.

La société conteste cette position et soutient que seul le titulaire du certificat d'immatriculation du véhicule est redevable pécuniairement de l'amende pour une infraction commise par ses salariés dans l'exercice de leurs fonctions avec les véhicules de l'entreprise.

Cependant, en application des principes sus rappelés l'existence d'un avantage en nature est constitué.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il avait validé le redressement de ce chef .

III - SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES :

Les dépens de la présente instance doivent être supportés par la SARL Olano Logistique Froid.

***

Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de cette dernière une somme de 1000  € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement contradictoirement et en dernier ressort et par arrêt mis à disposition au greffe ;

Confirme le jugement entrepris dans toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la SARL Olano Logistique Froid à verser à l'URSSAF Aquitaine la somme de 1000 €en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SARL Olano Logistique Froid aux dépens.

Arrêt signé par Madame DEL ARCO SALCEDO, Présidente, et par Madame LAUBIE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE,LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17/00397
Date de la décision : 30/01/2020

Références :

Cour d'appel de Pau 3S, arrêt n°17/00397 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-01-30;17.00397 ?
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