MHD/SB
Numéro 20/483
COUR D'APPEL DE PAU
Chambre sociale
ARRÊT DU 30/01/2020
Dossier : N° RG 17/00393 - N° Portalis DBVV-V-B7B-GOMQ
Nature affaire :
Demande d'annulation d'une mise en demeure ou d'une contrainte
Affaire :
Société OLANO FRET INTER
C/
URSSAF AQUITAINE
Grosse délivrée le
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 30 Janvier 2020, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 25 Novembre 2019, devant :
Madame DIXIMIER, magistrat chargé du rapport,
assistée de Madame LAUBIE, greffière.
Madame DIXIMIER, en application des articles 786 et 910 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :
Madame DEL ARCO SALCEDO, Présidente
Madame NICOLAS, Conseiller
Madame DIXIMIER, Conseiller
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANTE :
Société OLANO FRET INTER
[Adresse 6]
[Localité 3]
Représentée par Maître DUBERNET DE BOSCQ, avocat au barreau de BAYONNE
INTIMEE :
URSSAF AQUITAINE
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par la SCP CB2P AVOCATS, avocats au barreau de BORDEAUX
sur appel de la décision
en date du 06 JANVIER 2017
rendue par le TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE BAYONNE
RG numéro : 20140444
FAITS PROCEDURE PRETENTIONS DES PARTIES
Du 24 mars au 18 juin 2014, l'URSSAF Aquitaine a procédé au contrôle de la SARL Olano Fret Inter, entreprise de transports routiers interurbains, pour la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013.
Par lettre d'observations en date du 19 juin 2014, elle a relevé six chefs de redressement à l'encontre de la société, à savoir :
- la réduction Fillon : rémunération brute à prendre en compte dans la formule jusqu'au 31 décembre 2011,
- les frais professionnels - limites d'exonération : chauffeur routier grand déplacement,
- les assiettes minimum des cotisations : majorations pour heures supplémentaires,
- la retraite supplémentaire : non-respect du caractère collectif,
- les frais professionnels- limites d'exonération : utilisation du véhicule personnel (indemnités kilométriques)
- la prise en charge par l'employeur de contraventions.
Par courrier en date du 28 juillet 2014, la société Olano Fret Inter a contesté les méthodes de calcul retenu pour chiffrer le redressement sur les frais professionnels - limites d'exonération.
Par courrier du 1 septembre 2014, l'inspecteur de l'URSSAF a maintenu le montant total du redressement cotisations pour la somme de 42'494 € en indiquant que s'agissant des frais des chauffeurs, il avait déjà écarté une masse de frais non négligeables de la base du réajustement, comme cela figurait sur la lettre d'observations, en prenant en considération le fait que certains chauffeurs effectuaient dans certains sites des déclarations sérieuses et probantes.
Le 4 septembre 2014, l'URSSAF a fait notifier une mise en demeure à la société Olano Fret Inter pour le recouvrement de la somme totale de 47'124€, soit les montants de 42'494 € en cotisations et de 4630 € en majoration de retard.
Le 24 septembre 2014, la société Olano a saisi la commission de recours amiable de l'URSSAF Aquitaine d'une contestation portant sur les chefs de redressement suivants :
- les frais professionnels - limitent d'exonération : chauffeurs routiers, grands déplacements,
- l'assiette minimum des cotisations : majorations pour heures supplémentaires.
Par décision du 23 juin 2015, notifiée le 29 juillet 2015, la commission de recours amiable a maintenu le redressement et a validé la mise en demeure pour son montant total.
Par courrier du 1er décembre 2014, reçu le 2 décembre suivant, la société Olano Fret Inter a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bayonne d'une contestation de la décision de rejet de la commission de recours amiable de l'URSSAF.
Par jugement en date du 6 janvier 2017, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bayonne a :
- rejeté la demande en nullité de la mise en demeure de la société,
- débouté la société Olano Fret Inter de l'ensemble de ses demandes,
- confirmé la décision de la commission de recours amiable de l'URSSAF du 14 décembre 2015,
- condamné la société Olano Fret Inter au règlement de la somme de 47'124 € correspondant au solde de la mise en demeure,
- renvoyé la société Olano Fret Inter vers l'URSSAF Aquitaine pour l'étude de toute demande de délais de paiement et de remise de majorations de retard,
- condamné la société Olano Fret Inter à payer à l'URSSAF Aquitaine la somme de 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- rappelé qu'il est statué sans formes ni frais.
Par courrier recommandé en date du 26 janvier 2017, la société Olano Fret Inter a interjeté appel de cette décision dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas discutées.
***
Par conclusions en date du 25 octobre 2019, reprises oralement à l'audience et auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens, la société Olano Fret Inter demande à la cour de :
- l'accueillir en l'intégralité de ses demandes,
- réformer dans toutes ses dispositions le jugement attaqué,
- en conséquence, statuant à nouveau :
- à titre principal :
- constater la nullité de la mise en demeure du 29 août 2014 que lui a adressée l'URSSAF Aquitaine,
- annuler par voie de conséquence la décision de rejet de la commission de recours amiable et par là-même, la totalité du redressement effectué par l'URSSAF Aquitaine, objet de la mise en demeure en date du 29 août 2014,
- débouter l'URSSAF Aquitaine de l'intégralité de ses demandes,
- condamner l'URSSAF Aquitaine à lui payer la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner l'URSSAF Aquitaine aux entiers dépens,
- à titre subsidiaire :
- dire et juger que les méthodes d'évaluation appliquée par l'URSSAF Aquitaine lors de son contrôle sur les limites d'exonération des frais professionnels des chauffeurs routier ( point 2 de la lettre d'observations) n'ont pas fait l'objet d'un accord préalable,
- dire et juger que le redressement opéré au titre des heures supplémentaires n'est pas fondé,
- annuler par voie de conséquence la décision de rejet de la commission de recours amiable et par là-même le redressement effectué par l'URSSAF Aquitaine objet de la mise en demeure en date du 29 août 2014 sur les chefs de redressement 2 et 3 de la lettre d'observations,
- condamner l'URSSAF Aquitaine à lui payer la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner l'URSSAF Aquitaine aux entiers dépens.
Par conclusions en date du 13 novembre 2019, reprises oralement à l'audience et auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens, l'URSSAF Aquitaine demande à la cour de :
- la recevoir en ses demandes et l'en déclarer bien fondée,
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement attaqué,
- débouter la société Olano Fret Inter de l'ensemble de ses demandes comme non fondée ni justifiée,
- condamner la société Olano Fret Inter au paiement d'une somme de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre aux entiers dépens.
SUR QUOI,
I - SUR LA NULLITE DE LA MISE EN DEMEURE :
A - Sur la recevabilité de la demande de nullité :
En application des articles :
* R 142-1 du code de la sécurité sociale, pris dans sa rédaction applicable au litige :
' ....les contestations formées à l'encontre des décisions prises par les organismes chargés du recouvrement des cotisations, des majorations et des pénalités de retard doivent être présentées à la commission de recours amiable dans un délai d'un mois à compter de la notification de la mise en demeure,
* R 142-18 du même code, pris dans sa rédaction applicable au litige :
' Le tribunal des affaires de sécurité sociale est saisi, après l'accomplissement, le cas échéant, de la procédure prévue à la section 2 du présent chapitre, par simple requête déposée au secrétariat ou adressée au secrétaire par lettre recommandée dans un délai de deux mois à compter soit de la date de la notification de la décision, soit de l'expiration du délai d'un mois prévu à l'article R. 142-6....'
Il en résulte que peut être soulevée, pour la première fois, devant le tribunal des affaires de sécurité sociale ou devant une cour d'appel la nullité de la mise en demeure.
En l'occurrence, en application des principes sus - rappelés, contrairement à ce que soutient l'URSSAF, même si le courrier de la société se termine de la façon suivante : ' tels sont les raisons pour lesquelles nous sollicitons de votre bienveillance l'annulation du redressement et de la mise en demeure du 4 septembre 2014 opéré sur les thèmes précités...' à savoir les avantages en nature de logement, les frais professionnels non justifiés, les avantages en nature avec un moyen de transport exceptionnel et la prise en charge de dépenses personnelles du salarié (voyage agrément), il n'en demeure pas moins que la société Olano Fret Inter est recevable dans sa contestation de la régularité de la mise en demeure.
B - Sur le fond :
L'article L. 244-2 du Code de la sécurité sociale exige l'envoi d'une mise en demeure à l'employeur.
L'article R244-1 dudit code pris dans sa rédaction applicable au litige prévoit que :
- ' ...la mise en demeure précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées ainsi que la période à laquelle elles se rapportent.
Lorsque la mise en demeure ou l'avertissement est établi en application des dispositions de l'article L. 243-7, le document mentionne au titre des différentes périodes annuelles contrôlées les montants notifiés par la lettre d'observations, corrigés le cas échéant à la suite des échanges entre la personne contrôlée et l'agent chargé du contrôle. La référence et les dates de la lettre d'observations et le cas échéant du dernier courrier établi par l'agent en charge du contrôle lors des échanges mentionnés au III de l'article R. 243-59 figurent sur le document. Les montants indiqués tiennent compte des sommes déjà réglées par la personne contrôlée.'
Ces précisions sont exigées à peine de nullité afin que l'employeur cotisant soit informé de tous les éléments se rapportant à sa dette et dispose de toutes les renseignements utiles pour en évaluer le bien fondé.
En l'espèce, la société Olano Fret Inter soulève la nullité de la mise en demeure du 4 septembre 2014 en raison :
- de l'imprécision des motifs de la mise en recouvrement, des périodes visées dans la mise en demeure et du taux des majorations de retard,
- de l'absence de tout état détaillé, annexé à la mise en demeure, lui permettant de connaître avec certitude l'étendue, la nature et la cause de son obligation.
Cela étant, la mise en demeure indique :
- dans le paragraphe : motif de mise en recouvrement : ' contrôle . chefs de redressement notifiés le 26 juin 2014 article R243. 59 du code de la sécurité sociale,'
- dans le paragraphe : nature des cotisations : ' régime général ',
- les numéros Siren de la société et du cotisant,
- dans la colonne : périodes : ' 01 01 20 11 / 31 12 2011 ; 01 01 2012 / 3112 2012 ; 01 01 2013/ 31 12 2013 ',
- les montants des cotisations et des majorations afférents à chacune des trois périodes.
Contrairement à ce que soutient la société Olano Fret Inter :
- elle était parfaitement en mesure d'identifier la lettre d'observations visée par la mise en demeure contestée en dépit de l'erreur matérielle affectant sa date qui était en réalité du 19 juin 2014 et non du 26 juin 2014 dans la mesure où elle n'avait fait l'objet d'aucun autre contrôle de l'URSSAF sur la même période,
- même si le taux de majoration n'a pas été repris dans la mise en demeure, la lettre d'observations qui lui avait été envoyée lui avait précisé que le calcul des majorations de retard serait effectué en application des dispositions de l'article R2143'18 du code de la sécurité sociale,
- aucune obligation n'incombait à l'URSSAF de préciser au titre des périodes annuelles visées dans la mise en demeure les dates d'exigibilité des cotisations sociales.
En conséquence, la mise en demeure délivrée à la société Olano Fret Inter est régulière.
L'appelante doit être déboutée de toutes ses prétentions formées de ce chef.
II - SUR LE BIEN FONDE DU REDRESSEMENT :
A - Sur les frais professionnels et limites d'exonération : chauffeurs-routiers grands déplacements :
Sur le fondement des articles :
* L242-1 du code de la sécurité sociale, pris dans sa rédaction applicable au cas particulier :
' Pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire...
Il ne peut être opéré sur la rémunération ou le gain des intéressés servant au calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, de déduction au titre de frais professionnels que dans les conditions et limites fixées par arrêté interministériel....'
* 1 de l'arrêté du 20 décembre 2002 pris dans sa rédaction applicable au cas d'espèce:
'Les frais professionnels s'entendent des charges de caractère spécial inhérentes à la fonction ou à l'emploi du travailleur salarié ou assimilé que celui-ci supporte au titre de l'accomplissement de ses missions,'
* 2 du même arrêté :
' L'indemnisation des frais professionnels s'effectue :
1° Soit sous la forme du remboursement des dépenses réellement engagées par le travailleur salarié ou assimilé ; l'employeur est tenu de produire les justificatifs y afférents. Ces remboursements peuvent notamment porter sur les frais prévus aux articles 6, 7 et 8 (3°, 4° et 5°) ;
2° Soit sur la base d'allocations forfaitaires ; l'employeur est autorisé à déduire leurs montants dans les limites fixées par le présent arrêté, sous réserve de l'utilisation effective de ces allocations forfaitaires conformément à leur objet. Cette condition est réputée remplie lorsque les allocations sont inférieures ou égales aux montants fixés par le présent arrêté aux articles 3, 4, 5, 8 et 9,
Lors d'un contrôle destiné notamment à vérifier les frais professionnels exposés par les salariés d'une entreprise, l'URSSAF peut utiliser :
- soit la méthode de vérification par échantillonnage et extrapolation qui constitue une alternative à l'examen exhaustif des chefs de redressement potentiel sur la totalité des salariés de l'entreprise contrôlée, qui a pour finalité d'alléger les contraintes liées à la fourniture de très nombreuses pièces justificatives, de réduire la durée du contrôle et qui est régie par les articles R 243-59-2 et suivants du code de la sécurité sociale,
- soit la méthode de la taxation forfaitaire qui permet de pallier les lacunes d'une comptabilité incomplète ou inexistante ou frauduleuse ou de pallier l'absence des documents justificatifs nécessaires à la réalisation du contrôle ou leur présentation inadaptée empêchant leur exploitation et qui est régie par les articles R 242-5 du code de la sécurité sociale.
Qu'elle recoure à l'une ou à l'autre de ces méthodes, l'URSSAF doit respecter la procédure contradictoire du contrôle et la sauvegarde des droits de la défense.
Si dans le cadre d'une taxation par la méthode de l'échantillonnage et de l'extrapolation, la consultation de l'employeur à tous les stades de la mise en oeuvre de la procédure est obligatoire sous peine de nullité du redressement ainsi opéré pour défaut de respect du contradictoire, en revanche, dans le cadre de la taxation forfaitaire, la procédure contradictoire est respectée dès lors que l'organisme de recouvrement invite l'employeur à présenter ses observations et que de ce fait, il lui laisse le droit d'établir l'inexactitude et le caractère excessif de l'évaluation qu'il a réalisée.
1 - En l'espèce, il convient tout d'abord de déterminer la méthode retenue par l'URSSAF, à savoir si cette dernière a opté pour la méthode de vérification par échantillonnage et extrapolation ou pour celle de la taxation forfaitaire ; les parties s'opposant sur ce point.
Contrairement à ce que soutient la société Olano Fret Inter , la méthode retenue est celle de la taxation forfaitaire et non celle de la vérification par échantillonnage et extrapolation.
En effet, même si le terme de ' sondage' est présent en page 6 de la lettre d'observation dans le paragraphe relatif aux frais professionnels des chauffeurs routiers lorsqu'il est expliqué que l'inspecteur a procédé à une approche des différents types de frais exposés par catégorie d'emploi, il s'agit d'une maladresse de langage dans la mesure où le vocable n'a plus été utilisé dans la suite du rapport.
Par ailleurs, l'énumération des documents qu'il a consultés effectivement, - à savoir livres et fiches de paie, DADS, convention collective, statue, état justificatif des aides et allégements à la réduction du temps de travail, contrats de retraite et prévoyance, DAS2, relevé deux semaines, tachygraphe - établissent qu'il n'a eu recours aux sondages que pour rechercher dans un premier temps les éventuels points de redressement procédant ensuite pour tout chef de redressement éventuellement décelé à l'examen exhaustif des documents permettant ou non de le justifier puis de le chiffrer.
En outre, les courriers électroniques que la société a échangés avec l'inspecteur URSSAF et qu'elle produit démontrent strictement l'inverse de ce qu'elle soutient dans la mesure où ils rappellent que la ' technique de l'échantillonnage ..ne pouvait être mise en place compte tenu de la variété des frais, de la nature des dépassements... etc..etc..'
Il en résulte donc que l'URSSAF n'avait aucun accord préalable de l'employeur cotisant à recueillir.
Cela étant, même en optant pour la taxation forfaitaire, l'URSSAF se devait de respecter la procédure contradictoire du contrôle et la sauvegarde des droits de la défense.
Or dans ce cadre, dès lors que l'organisme de recouvrement invite l'employeur à présenter ses observations sur la taxation appliquée et que de ce fait, il lui laisse le droit d'établir l'inexactitude et le caractère excessif de l'évaluation qu'il a réalisée, il respecte la procédure contradictoire.
Et au cas particulier, un délai de trente jours a été accordé à la société Olano Fret Inter pour faire valoir ses observations courant à compter de la notification de la lettre d'observations de l'URSSAF.
Il en résulte donc que le principe du contradictoire a été parfaitement respecté en l'espèce.
***
Sur le fondement de l'article R. 242-5 du code de la sécurité sociale, l'inspecteur de l'URSSAF peut recourir à une taxation forfaitaire dans deux cas :
' lorsque la comptabilité de l'employeur est insuffisante ou incomplète et qu'elle ne permet pas d'établir le chiffre exact des rémunérations servant de base au calcul des cotisations dues ;
' ou lorsque l'employeur ne met pas à disposition de L'URSSAF les documents ou justificatifs nécessaires au contrôle ou lorsque leur présentation n'en permet pas l'exploitation.
En l'espèce, la lettre d'observations indique très clairement que l'ampleur des investigations que l'inspecteur de l'URSSAF avait à mener, la diversité des anomalies qu'il avait constatées, l'impossibilité dans laquelle se trouvait l'employeur de lui fournir tous les éléments d'une manière détaillée et suffisamment explicite pour effectuer une régularisation exhaustive l'ont conduit à procéder à une taxation forfaitaire en tenant compte de certaines particularités tenant aux défraiements effectués par les chauffeurs de [Localité 4]/ [Localité 5].
Il en résulte donc au vu des principes sus rappelés que le recours à la taxation forfaitaire était parfaitement justifié au vu des carences de l'employeur qui avait produit des documents difficilement exploitables.
En conséquence, il y a lieu de rejeter la nullité du redressement de ce chef.
Le jugement attaqué doit être confirmé.
***
Sur le fond, il résulte de la lettre d'observations :
- 1 - que l'inspecteur de l'URSSAF a constaté que la comptabilité de la société a enregistré dans le poste ' frais de déplacement des chauffeurs ' le paiement de sommes très importantes relatives à l'exercice d'une intense activité de transport et du nombre de chauffeurs concernés par ce type de remboursements,
- 2 - qu'ainsi, il a relevé :
- que certains chauffeurs faisaient le choix de ne pas rentrer chez eux le matin alors que leur temps de coupure leur aurait permis normalement de regagner leur domicile respectif et que de ce fait ils percevaient à tort leur indemnité journalière complète,
- que de même, d'autres salariés résidant à l'étranger (Portugal, Espagne) faisaient le choix personnel de travailler de manière consécutive deux semaines d'affilée par exemple et de rentrer la troisième semaine dans leur pays, que ces situations engendraient l'octroi de frais de fins de semaines qui n'était pas justifié par des impératifs relevant de la stratégie de l'entreprise mais de la seule volonté du salarié, que ces participations financières hors cadre professionnel imposé constituaient la prise en charge de dépenses personnelles,
- qu'un agent de quai qui était amené à réaliser certaines tournées avec un fourgon pour lequel aucun relevé de temps de conduite, ni d'heure précise d'embauche et de fin de travail ne lui avait été présenté, percevait des indemnités forfaitaires de casse-croûte et de repas sans que les heures de départ et de retour qui conditionnaient l'octroi de ces frais professionnels puissent être vérifiées,
- que toutes les autres vérifications qu'il a réalisées lui ont permis de conclure à des dépassements, exagérations et doubles paiements quelquefois de frais présentés par certains chauffeurs qu'il s'agisse de versement d'indemnités de casse-croûte au-delà de l'heure indiquée de départ prévue à cet effet, du paiement de repas en dehors des plages de conduite obligatoires pour y ouvrir droit ou d'indemnités versées en matinée sans raison.
Pour toute défense, la société Olano Fret Inter se borne à soutenir que la société Olano Logistique du Froid a obtenu, sans produire de nouvelle pièce, une réduction du taux d'anomalies détectées de 10 % à 5 %, ramenant ainsi la régularisation effectuée à la somme de 32'298 € au lieu de celle de 64'594 € qui lui avait été notifiée alors qu'elle-même s'est heurtée à un refus catégorique de l'URSSAF de modifier la taxation la concernant de ce chef.
Cependant, ces seuls arguments présentés au soutien d'une révision du redressement dont elle a fait l'objet sont totalement insuffisants pour étayer ses demandes.
Seule la production de justificatifs permettant de contester utilement ou d'expliquer les irrégularités relevées par l'URSSAF dans ses écritures aurait été opérante.
En conséquence, le jugement attaqué doit être confirmé de ce chef.
B - Sur l'assiette minimum des cotisations : majorations pour heures supplémentaires
En application des articles :
* R242-1 alinéas 1 et 6 du code de la sécurité sociale :
' Les cotisations à la charge des employeurs et des salariés ou assimilés au titre de la législation des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales sont calculées, lors de chaque paie, sur l'ensemble des sommes comprises dans ladite paie, telles qu'elles sont définies à l'article L. 242-1, y compris, le cas échéant, la valeur représentative des avantages en nature, mais déduction faite des prestations familiales mentionnées aux articles L. 511-1 et L. 755-11 à L. 755-23.....
Le montant des rémunérations à prendre pour base de calcul des cotisations en application des alinéas précédents ne peut être inférieur, en aucun cas, au montant cumulé, d'une part, du salaire minimum de croissance applicable aux travailleurs intéressés fixé en exécution de la loi n° 70-7 du 2 janvier 1970 et des textes pris pour son application et, d'autre part, des indemnités, primes ou majorations s'ajoutant audit salaire minimum en vertu d'une disposition législative ou d'une disposition réglementaire...'
* L 3121-22 du code du travail :
' Les heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale hebdomadaire fixée par l'article L. 3121-10, ou de la durée considérée comme équivalente, donnent lieu à une majoration de salaire de 25 % pour chacune des huit premières heures supplémentaires. Les heures suivantes donnent lieu à une majoration de 50 %.
Une convention ou un accord de branche étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement peut prévoir un taux de majoration différent. Ce taux ne peut être inférieur à 10 %.'
* L 3121-4 dudit code :
' Une convention ou un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche peut prévoir le remplacement de tout ou partie du paiement des heures supplémentaires, ainsi que des majorations prévues à l'article L. 3121-22, par un repos compensateur équivalent.
Dans les entreprises dépourvues de délégué syndical non assujetties à l'obligation de négocier prévue à l'article L. 2242-1, ce remplacement peut être mis en place par l'employeur à condition que le comité d'entreprise ou les délégués du personnel, s'ils existent, ne s'y opposent pas.
La convention ou l'accord d'entreprise ou le texte soumis à l'avis du comité d'entreprise ou des délégués du personnel peut adapter les conditions et les modalités d'attribution et de prise du repos compensateur de remplacement à l'entreprise.'
En l'espèce, il résulte de la lettre d'observations :
- que l'inspecteur a constaté d'importants dépassements d'horaires pour certains chauffeurs de l'entreprise sans pour autant que les heures comptabilisées aient été payées ou récupérées au jour de la vérification,
- qu'il a réajusté une partie importante des heures supplémentaires pour trois salariés, au titre du non-respect de l'assiette minimum, selon les quotas suivants :
- Monsieur [O] : 300 heures (il en cumulait 700)
- Monsieur [D] : 182 heures,
- Monsieur [F] : 232 heures.
La société Olano Fret Inter conteste le redressement et soutient :
- que le cumul des repos compensateurs au titre des heures supplémentaires résultait d'une pratique antérieure à l'arrivée des nouveaux dirigeants de l'entreprise dont les salariés avaient parfaitement connaissance,
- qu'il avait été convenu en application des dispositions légales précitées que ces heures seraient accordées sous forme de repos compensateur de remplacement lorsque les salariés en auraient besoin, notamment pour ceux, qui proches de la retraite, souhaitaient anticiper leur départ,
- que la mention de ces heures supplémentaires dans les documents internes de l'entreprise démontrait son absence totale de volonté de les dissimuler
- que les trois salariés mentionnés par l'inspecteur dans la lettre d'observations ont pu bénéficier pleinement des jours de repos au titre du repos compensateur de remplacement.
Cependant, si effectivement l'employeur peut adapter à l'entreprise les conditions et les modalités d'attribution et de prise du repos compensateur prévu dans le cadre de l'accord de branche, il n'en demeure pas moins qu'en application de l'article D 3171-11 du code du travail les modalités propres au repos compensateur obligatoire s'appliquent au repos compensateur de remplacement, que de ce fait, les salariés sont informés du nombre d'heures de repos compensateur de remplacement et de contrepartie obligatoire en repos portés à leur crédit par un document annexé au bulletin de paie et que dès que ce nombre atteint sept heures, ce document comporte une mention notifiant l'ouverture du droit à repos et l'obligation de le prendre dans un délai maximum de deux mois après son ouverture.
Or présentement aucune de ces modalités n'a jamais été respectée par l'entreprise et l'inspecteur a constaté des cumuls extrêmement importants de repos compensateur de remplacement.
En conséquence, à défaut de tout élément pertinent contraire, le jugement attaqué doit être confirmé de ce chef en ce qu'il a réintégré les heures supplémentaires dans l'assiette des cotisations au titre du non-respect de l'assiette minimum des cotisations et a validé le redressement de ce chef à hauteur de 5705 €
III - SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES :
Les dépens de la présente instance doivent être supportés par la SARL Olano Fret Inter.
***
Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de cette dernière une somme de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement contradictoirement et en dernier ressort et par arrêt mis à disposition au greffe ;
Confirme le jugement entrepris dans toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne la SARL Olano Fret Inter à verser à l'URSSAF Aquitaine la somme de 1000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SARL Olano Fret Inter aux dépens.
Arrêt signé par Madame DEL ARCO SALCEDO, Présidente, et par Madame LAUBIE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE,LA PRÉSIDENTE,