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19/02/2019 | FRANCE | N°16/02361

France | France, Cour d'appel de Pau, 1ère chambre, 19 février 2019, 16/02361


PC/AM



Numéro 19/682





COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre







ARRÊT DU 19/02/2019







Dossier N° RG 16/02361

N° Portalis DBVV-V-B7A-GH6F





Nature affaire :



Autres demandes relatives à un contrat de réalisation de travaux de construction









Affaire :



SA ERILIA SOCIETE ANONYME D'HLM



C/



BETA CONKRET IMMOAVANTAGE GROUPE UTE










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Grosse délivrée le :



à :























RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R Ê T



prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 19 février 2019, les parties en ayant été préalablemen...

PC/AM

Numéro 19/682

COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRÊT DU 19/02/2019

Dossier N° RG 16/02361

N° Portalis DBVV-V-B7A-GH6F

Nature affaire :

Autres demandes relatives à un contrat de réalisation de travaux de construction

Affaire :

SA ERILIA SOCIETE ANONYME D'HLM

C/

BETA CONKRET IMMOAVANTAGE GROUPE UTE

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 19 février 2019, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 22 octobre 2018, devant :

Monsieur CASTAGNE, magistrat chargé du rapport,

assisté de Madame FITTES-PUCHEU, greffier, présente à l'appel des causes,

Monsieur CASTAGNE, en application des articles 786 et 907 du code de procédure civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :

Madame BRENGARD, Président

Monsieur CASTAGNE, Conseiller

Madame ROSA SCHALL, Conseiller

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

La société ERILIA, société anonyme d'HLM

[Adresse 1]

[Localité 1]

prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège

représentée par Maître Pierre CAMBOT, avocat au barreau de PAU

assistée de Maître Olivier GIRAUD de la SELARL GIRAUD-GAY & Associés, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE :

La société BETA CONKRET IMMOAVANTAGE GROUPE UTE, groupe d'intérêt économique

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Monsieur [B] [M], en sa qualité de dirigeant en France en exercice domicilié ès qualités audit siège

représentée par Maître Richard ANCERET de la SARL DUPOUY & ANCERET, avocat au barreau de BAYONNE

assistée de Maître Catherine MARTI DE ANZIZU, avocat aux barreaux de BARCELONE et des PYRENEES-ORIENTALES

sur appel de la décision

en date du 16 JUIN 2016

rendue par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE BAYONNE

Selon actes d'engagement distincts du 2 février 2015, la société anonyme d'H.L.M. Erilia a confié à un groupement constitué par les sociétés Beta Conkret et Immoavantage Group UTE (ci-après groupement Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE) des travaux de construction de quatre programmes immobiliers, dénommés îlots 5 AP, 6 AP, 4SL et 10SL, à réaliser dans le périmètre de la Z.A.C. [Localité 3] à [Localité 4].

Les ordres de service pour le démarrage des travaux ont été délivrés en novembre 2014 pour l'îlot 10 SL et en février 2015 pour les autres chantiers.

Le 28 janvier 2016, la société Erilia notifiait au groupement Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE des ordres de service d'arrêt de travaux par courriers électroniques et L.R.A.R. ainsi rédigées : 'compte tenu des nombreux manquements aux règles légales concernant ce chantier, nous vous demandons d'interrompre l'exécution des travaux objet du marché. Cette interruption prend effet à réception de la présente par courrier électronique.'

Le 2 février 2016, la SA Erilia adressait au groupement Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE une LRAR de mise en demeure commune aux quatre chantiers, ainsi rédigée :

'Vous avez reçu par courrier recommandé du 28/01/2016 des ordres de service d'arrêt des travaux pour les 4 chantier, lesquels font suite à des manquements relatifs à la réglementation du travail d'une part, et à des manquements contractuels d'autre part.

$gt; non-conformité au droit français du détachement de travailleurs étrangers :

Ces ordres de service d'arrêt de travaux font suite aux constatations faites par la société Elyfec dans deux documents du 19/01/2016 ... de manquements par vos soins ou vos sous-traitants aux règles françaises du droit du travail e matière de détachement de travailleurs étrangers.

Ces rapports font également état d'un manque de coopération caractérisé de votre part sur ce sujet. Ces manquements ont été explicités à votre responsable par la société Elyfec lors de la réunion du 01/02/2016.

Je vous rappelle que la société Erilia, en sa qualité de maître d'ouvrage, est tenue d'une obligation de vigilance et d'une responsabilité en matière de bonne application du droit du travail.

C'est dans ces conditions que la société Erilia a été contrainte d'arrêter l'exécution des travaux, la quasi-totalité des exécutants étant des travailleurs étrangers (les vôtres ou ceux de vos sous-traitants).

En conséquence, je vous mets en demeure de m'apporter dans un délai de quinze jours à compter de la réception de la présente tous éléments de nature à justifier le bon respect des règles du droit du travail visées dans les rapports évoqués. A défaut, l'exécution des travaux ne pourra pas reprendre.

Je vous précise qu l'ensemble des préjudices subis du fait de ces arrêts de travaux et de leurs éventuelles non reprises relèveront de votre entière responsabilité. Je vous rappelle également que la société Erilia sera contrainte d'appliquer toutes les mesures coercitives prévues aux marchés, pouvant aller jusqu'à leur résiliation.

$gt; non-conformité aux marchés signés :

Ces ordres de service d'arrêt de travaux font également suite à un certain nombre de manquements à vos obligations contractuelles signalés à plusieurs reprises dans les différents comptes-rendus et courriers et qui sont repris dans les courriers en pièces jointes.

Je vous mets en demeure dans un délai de 15 jours à compter de la réception de la présente de m'indiquer les moyens et la méthodologie que vous comptez mettre en place pour remédier à tous les problèmes soulevés par les maîtres d'oeuvre, en tenant compte des points critiques du planning. A défaut l'exécution ne pourra reprendre...'

Le 4 mars 2016, la SA Erilia adressait au groupement Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE une nouvelle mise en demeure ainsi rédigée :

'Je fais suite à no s courriers des 2, 23 février et 1er mars 2016 ainsi qu'à votre réponse du 26 février 2016 et notre rencontre du 2 mars.

1 - s'agissant du non-respect de la réglementation française au cas de reprise du chantier :

$gt; concernant la situation des travailleurs détachés et la mise en conformité des situations sociales des intervenants sur le site, vous vous êtes engagés lors de cette réunion :

* à transmettre à Elyfec copies des déclarations de détachement dûment complétées conformément aux exigences de l'inspection du travail. A cet égard je vous rappelle que l détachement doit demeurer temporaire et ne saurait durer plus de 24 mois,

* à respecter et collaborer ... à l'ensemble des diligences, investigations et contrôles et ne plus mettre obstacle à la bonne réalisation de la mission d'Elyfec comme ce la avait été constaté et relevé jusqu'alors,

$gt; concernant les sous-traitants intervenant sur les chantiers, vous vous êtes engagés à respecter les réglementations françaises et notamment les procédures concernant les déclarations préalables de ces sous-traitants et de leurs garanties de paiement. En outre, il est nécessaire que nous dispositions des éléments suivants :

* pour les sous-traitants déjà acceptés par Erilia : copies de leurs contrats précisant clairement la nature des prestations sous-traitées, leur montant et leur localisation et, au cas de modification, la demande de modification accompagnée du nouveau contrat et de préciser pour chaque sous-traitant les travaux réalisés et ceux restant à réaliser...

2 - s'agissant des difficultés techniques :

au regard du retard que vous avez pris sur ces différents chantiers et des nombreuses doléances graves, précises et motivées des maîtres d'oeuvre, vous nous avez indiqué qu'il existait un réel blocage entre vos entreprises et les différentes maîtrises d'oeuvre que vous pensiez pouvoir lever pour permettre une reprise des travaux.

Compte tenu de l'urgence à trouver une issue à ces difficultés qui persistent depuis de nombreux mois, vous vous êtes engagés à fournir les documents d'exécution nécessaires à la reprise des travaux (listés par les maîtres d'oeuvre dans les comptes-rendus de chantiers et issus des échanges que vous avez eus avec eux) et justifier d'une collaboration effective avec les maîtres d'oeuvre d'ici le 11 mars au plus tard. D'autre part, la méthodologie et le planning prévisionnel de reprise effective et d'achèvement des travaux devront être fournis à la même date.

Au regard de l'importance du retard pris sur les chantiers et à défaut de remise au plus tard le 11 mars 2016 de tous les documents et éléments demandés, les travaux ne pourront pas reprendre et les marchés seront résiliés de plein droit à cette date, à vos torts exclusifs et sans accomplissement d'aucune formalité judiciaire, la présente valant mise en demeure.'

Le 11 mars 2016, le groupement Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE adressait à la SA Erilia une LRAR par laquelle il contestait toute imputabilité des difficultés techniques rencontrées et des retards constatés sur les chantiers des îlots 4, 5, 6 et 10.

Par mails et LRAR datés du 15 mars 2016, la SA Erilia notifiait au groupement Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE la résiliation des marchés par LRAR et mail ainsi rédigés :

'Je fais suite à vos trois correspondances des 9, 10 et 11 mars 2016.

A la lecture de celles-ci, je ne peux que constater que vous n'avez pas entendu tenir les engagements que vous aviez pris lors de la réunion du 2 mars.

Ainsi, conformément à l'article 10-9 des CCAP et conformément aux termes de ma mise en demeure du 4 mars 2016, je prend acte de la résiliation au 11 mars 2016 des marchés de travaux, à vos torts exclusifs.

Conformément à l'article 22-4-1 des CCAG, il est nécessaire d'établir un constat contradictoire des travaux exécutés à la date du 11 mars 2016. Vous voudrez bien à cette fin être présents sur les chantiers...

Vous voudrez bien également procéder à l'enlèvement sans délai des différentes installations et engins de chantier et des matériaux non utilisés et nous informer de la date à laquelle vous pourrez nous remettre les lieux dans les meilleurs délais pour procéder à un second état des lieux contradictoire.'

Par acte des 18 et 20 mai 2016, la S.A Enilia a fait assigner le groupement Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE ainsi que les sociétés le constituant en référé aux fins :

- de les voir condamner in solidum à libérer les quatre chantiers et retirer tous les engins, matériaux et personnels, sous astreinte de 5 000 € par jour de retard et par chantier, à compter de la signification de l'ordonnance à intervenir,

- de le voir condamner in solidum à lui verser une provision de 50 000 € sur dommages-intérêts pour résistance abusive, outre la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens.

Par ordonnance du du 16 juin 2016, le juge des référés du tribunal de commerce de Bayonne a, au visa des articles 872 et 873 du code de procédure civile :

- rejeté la demande formée in limine litis et déclaré la SA Erilia recevable et fondée en ses demandes dirigées contre les sociétés Immoavantage Groupe SL et Beta Conkret SA,

- pris acte de l'engagement in solidum du groupement Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE et des sociétés Beta Conkret et Immoavantage Group SL de démonter et évacuer tous les matériels se trouvant sur le site [Localité 3] pour le 27 juin 2016,

- dit qu'à défaut de réalisation de cette évacuation au 27 juin 2016, un exploit d'huissier sera établi et une indemnité de 5 000 € sera due par jour de retard,

- condamné par provision la société Erilia à payer au groupement Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE la somme de 400 000 €,

- condamné in solidum les sociétés Beta Conkret et Immoavantage Group SL et le groupement Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE à payer à la société Erilia la somme de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à attribution de dommages-intérêts,

- ordonné une mesure d'expertise, aux frais avancés des sociétés Beta Conkret et Immoavantage Group SL et du groupement Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE, avec mission, notamment :

$gt; d'examiner les éventuels désordres, retards affectant la conduite des travaux,

$gt; de procéder aux constats contradictoires techniques d'état définitif d'avancement des travaux sur le site avant leur reprise,

$gt; le cas échéant, de décrire les retards et désordres en indiquant leur origine et leur cause,

$gt; de fournir tous éléments pour permettre de déterminer les responsabilités encourues ensuite des retards,

$gt; de décrire l'ensemble des manquements éventuels des sociétés Beta Conkret et Immoavantage Group SL et du groupement Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE au regard des pièces du marché et des réglementations applicables,

$gt; d'évaluer les préjudices de toutes natures subis par la société Erilia du fait de la résiliation des marchés consécutive aux manquements de l'entreprise,

$gt; fournir tous éléments de nature à permettre de déterminer ultérieurement éventuellement le caractère abusif de la résiliation anticipée des contrats et, dans ce cas-là, d'évaluer les p préjudices de toutes natures subis par UTE du fait de la résiliation anticipée des marchés.

La SA Erilia a interjeté appel de cette décision, selon déclaration transmise au greffe de la cour le 30 juin 2016, en limitant son recours à sa condamnation au paiement d'une provision de 400 000 €.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du magistrat de la mise en état en date du 19 septembre 2018.

Dans ses dernières conclusions déposées le 18 septembre 2018, la SA Erilia demande à la cour :

- à titre principal, d'infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a l'a condamnée à régler au groupement Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE une provision de 400 000 € et débouter celui-ci de sa demande de ce chef,

- subsidiairement, de constater l'existence de contestations sérieuses sur une telle condamnation provisionnelle et de renvoyer le groupement Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE à mieux se pourvoir et d'ordonner la déconsignation des fonds Carpa ordonnée par l'ordonnance du Premier président de la cour d'appel de Pau du 28 juillet 2016,

- en toute hypothèse, de condamner le groupement Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE à lui payer la somme de 4 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, la SA Erilia expose :

- que le premier juge a prononcé condamnation à paiement de provision sur la seule base d'une attestation 'sous réserve' d'un cabinet d'expertise comptable pourtant imprécise, insuffisante et peu sérieuse,

- qu'en désignant un expert judiciaire, le premier juge a admis qu'un apurement des comptes est nécessaire et qu'elle produit elle-même des documents comptables établissant qu'elle peut s'estimer créancière de ses constructeurs, d'autant que les premiers éléments de l'expertise judiciaire démontrent que le site n'a pas été évacué dans le délai imposé et que la réalité des travaux facturés est discutable, outre les retards considérables dans l'avancement des travaux,

- que les multiples manquements avérés du groupement Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE entrent dans les prévisions de l'article 4 des CCAP et permettent de considérer que la seul poste 'pénalités de retard' pourrait déjà équivaloir à ce stade au montant de la provision allouée par le premier juge, alors que les situations de travaux versées dans le cadre de l'instance devant le premier président doivent faire l'objet d'une validation par la maîtrise d'oeuvre,

- que le groupement Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE intègre, dans la créance par lui revendiquée, des sommes dues au titre de chantiers (sites 11SL et 12SL) sans rapport avec les quatre chantiers litigieux,

- que la contestation par le groupement Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE de la résiliation est purement artificielle alors même qu'elle en a donné acte en ùmars 2016, sans en contester le principe ni les effets,

- que le caractère contestable des créances invoquées par le groupement Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE résulte de l'arrêt même de travaux sur le site lequel a généré divers préjudices dont il est justifié par des documents comptables visés par le commissaire aux comptes,

- qu'elle n'invoque pas une compensation entre des créances réciproques mais souligne d'une part que la créance revendiquée par groupement Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE est totalement contestable tant sur la seule attestation comptable produite en première instance que sur les pièces produites en cause d'appel qui ne révèlent aucune certitude quant au caractère exigible des prétendues factures produites qui ne respectent pas les règles du marché et que d'autre part la somme de 400 000 € retenue par le premier juge ne repose sur aucune certitude, car fondée sur des pièces internes, non certifiées de manière indépendante et faisant l'objet de l'expertise sollicitée par le groupement Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE lui-même,

- que dans le cadre de l'expertise, a été produit un solde de compte faisant état d'une créance de 242 819,35 € alors que l'état des préjudices actualisés révèle une créance de 7 756 000 €,

- que les premiers éléments de l'expertise judiciaire imputent l'essentiel des dysfonctionnements et retards des chantiers au groupement Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE ,

- qu'il y a donc lieu de rejeter la demande de provision et subsidiairement de constater l'existence de contestations sérieuses sur la prétendue créance de l'intimée.

Dans ses dernières conclusions déposées le 15 novembre 2016, le groupement Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE, formant appel incident, demande à la cour, au visa des articles 873 alinéa 2, 548, 550 et 909 du code de procédure civile :

- de dire qu'aucune contestation sérieuse aux créances par lui invoquées ne peut être soulevée,

- de confirmer l'ordonnance déférées en ce qu'elle a condamné la société Erilai à lui verser une provision,

- de réviser le montant de cette provision à 723 460,83 €,

- de débouter la société Erilia de ses demandes,

- d'ordonner la levée de la consignation à la CARPA de la somme de 400 000 € et sa restitution à l'UTE,

- de condamner la société Erilia à lui payer la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Il soutient pour l'essentiel :

- que l'octroi d'une provision sur le fondement de l'article 873 du code de procédure civile suppose la condition préalable d'existence de créance du requérant sur le défendeur et la condition unique du caractère non sérieusement contestable de ces créances,

- qu'elle est en l'attente du règlement de plusieurs factures d'un montant global de 1 587 176,38 €, établi sur la base des visas d'architectes et confirmé par son expert-comptable, dont, d'une part, des retenues de garantie sur factures réglées (pour 695 000 € arrondis) pour des travaux réalisés sur deux autres îlots (11 et 12) ayant fait l'objet de réceptions conformes en octobre 2015 et, d'autre part, des factures sur situations certifiées d'octobre 2015 à janvier 2016 (997 000 € arrondis) au titre des travaux réalisés sur les îlots objets du litige principal,

- que si les travaux des îlots 11 et 12 n'entrent pas dans l'objet du litige au principal, la société Erilia n'ayant toujours pas levé la réserve constituée à ce titre, la provision ordonnée par le premier juge porte sur cette créance,

- que le retard dans l'exécution des travaux ne lui est pas imputable mais est dû à la gestion chaotique de la société Erilia à l'égard des différents intervenants du chantier et qu'aucune infraction à la réglementation sur les travailleurs détachés n'a été caractérisée,

- que si la caractère sérieusement contestable d'une créance peut être retenu en cas de compensation éventuelle, c'est à la condition d'une part, que l'existence de la créance réciproque soit elle-même certaine ce qui n'est pas le cas en l'espèce, dès lors que l'expertise est en cours et qu'aucune faute n'est caractérisée à son encontre et, d'autre part, que les créances réciproques soient toutes deux certaines, liquides et exigibles, ce qui, à l'inverse de la créance de solde de facturation, n'est le cas ni de la créance indemnitaire revendiquée par la société Erilia ni des pénalités de retard qu'elle entend voir appliquer,

- que les créances objets de la provision ne peuvent être sérieusement contestables, sur la base d'une prétendue compensation éventuelle ni prouvée ni avérée,

- que si le juge des référés a limité la provision allouée aux seules créances correspondant aux îlots 11 et 12 apparaissant dans les documents comptables produits, il peut prétendre désormais, sur la base des documents produits par l'appelante elle-même, à provision sur l'ensemble des créances certaines, liquides et exigibles dues par Erilia à la somme de 723 460,83 € représentant le solde dû sur les factures non contestées.

MOTIFS

L'article 873 alinéa 2 du code de procédure civile dispose que dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal de commerce, statuant en référé, peut accorder une provision au créancier.

Au soutien de sa décision, le premier juge a considéré :

- qu'il est produit par le groupement Beta Conkret Immoavantage Group UTE une attestation du 7 juin 2016 du cabinet d'expertise comptable Exco confirmant la situation des créances clients Erilia dans les livres de Beta UTE de 1 587 176,38 € 'avec factures sur situations certifiées non réglées d'octobre 2015 à janvier 2016 de 997 575,96 € sur lesquelles des acomptes et règlements ont été reçus en 2016 pour 106 524,16 €' soit un solde actuel, hors retenues de garantie, de 891 051,80 €,

- qu'il existe des litiges entre les parties (indemnités diverses...) et qu'une expertise établira le compte définitif entre elles,

- que cependant, compte tenu des travaux déjà effectués, il y a lieu d'attribuer à Beta UTE une provision sur les factures de situations certifiées à hauteur de 400 000 €.

L'attestation à laquelle fait référence le premier juge est ainsi rédigée :

'Confirmation d'extrait comptable :

Sous réserve de l'exhaustivité des factures qui lui ont été transmises par Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE à ce jour, le cabinet Exco FSO confirme que le solde des créances clients correspondant à la société Erilia dans les livres comptables de groupement Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE au 31 mai 2016 s'élève à 1 587 176,38 €.

Le détail de l'encours est le suivant :

retenues de garanties sur factures réglées : 695 572,86 €

fixation panneau chantier : 551,70 €

factures sur situations certifiées non réglées : 997 575,96 €

acomptes et règlements reçus en 2016 : - 106 524,14 €

Solde TTC : 1 587 176,38 €'

Dans le dernier état de ses conclusions, le groupement Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE sollicite la condamnation de la société Erilia à lui payer une provision de 723 460,83 € correspondant au solde de facturation restant dû sur les chantiers 11 et 12, dont il soutient, sans être contesté, qu'ils ont fait l'objet en octobre 2015 de réceptions avec réserves, la provision sollicitée correspondant aux soldes restant dus sur ces chantiers, en ce compris la retenue de garantie de 5 % à la libération de laquelle la société Erilia ne justifie pas s'être régulièrement opposée dans les conditions prévues par l'article 2 de la loi 71-584 du 16 juillet 1971.

Force est de constater que le solde des marchés de travaux afférents aux îlots 11 et 12, tel que déterminé sur la base des propres documents comptables produits par la société Erilia (soldes des marchés visés par le commissaire aux comptes, pièce 35 de l'appelante) ne fait l'objet d'aucune contestation sérieuse alors que l'existence même et l'étendue de la créance indemnitaire invoquée par la SA Erilia au titre des chantiers des îlots 4, 5, 6 et 10 (et, in fine, d'une éventuelle compensation) sont contestées par l'intimé et font l'objet d'une expertise judiciaire pendante.

Il convient dans ces conditions, réformant la décision entreprise sur le montant de la provision devant être allouée au groupement Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE, de condamner la SA Erilia à payer à celui-ci, à titre de provision, la somme de 723 460,83 € TTC.

L'équité commande d'allouer au groupement Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE, en application de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 2 000 € au titre des frais irrépétibles par lui exposés en cause d'appel.

La SA Erilia sera condamnée aux entiers dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

Vu l'ordonnance du président du tribunal de commerce de Bayonne, statuant en référé, en date du 16 juin 2016,

Dans les limites de sa saisine :

Réformant partiellement la décision entreprise, condamne la SA Erilia à payer au groupement Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE la somme de 723 460,83 € TTC à titre de provision à valoir sur le solde des travaux de construction des îlots 11 et 12,

Ajoutant à la décision entreprise :

- Condamne la SA Erilia à payer au groupement Beta Conkret Immoavantage Groupe UTE, en application de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 2 000 € au titre des frais irrépétibles par lui exposés en cause d'appel,

- Condamne la SA Erilia aux entiers dépens d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Mme Marie-Florence Brengard, Président, et par Mme Annie Miqueu, adjoint administratif, faisant fonction de Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

Annie MIQUEU Marie-Florence BRENGARD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 16/02361
Date de la décision : 19/02/2019

Références :

Cour d'appel de Pau 01, arrêt n°16/02361 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-02-19;16.02361 ?
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