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09/10/2018 | FRANCE | N°17/00168

France | France, Cour d'appel de Pau, 1ère chambre, 09 octobre 2018, 17/00168


MFB/AM



Numéro 18/3490





COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre







ARRET DU 09/10/2018







Dossier : N° RG 17/00168





Nature affaire :



Demande en réparation des dommages causés par un intermédiaire















Affaire :



SARL TOIT BASQUE



C/



Xavier X...

SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL

SA AXA FRANCE IARD



























Grosse délivrée le :



à :





















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R E T



prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 09 octobre 2018, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions ...

MFB/AM

Numéro 18/3490

COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRET DU 09/10/2018

Dossier : N° RG 17/00168

Nature affaire :

Demande en réparation des dommages causés par un intermédiaire

Affaire :

SARL TOIT BASQUE

C/

Xavier X...

SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL

SA AXA FRANCE IARD

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 09 octobre 2018, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 19 juin 2018, devant :

Madame BRENGARD, Président, magistrat chargé du rapport conformément à l'article 785 du code de procédure civile

Monsieur CASTAGNE, Conseiller

Madame ROSA SCHALL, Conseiller

assistés de Madame MIQUEU, adjoint administratif, faisant fonction de greffier, et de Madame LE MEUR, greffier stagiaire, présentes à l'appel des causes.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

SARL TOIT BASQUE exerçant sous l'enseigne LAFORET IMMOBILIER

5 Allées Marines

[...]

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

représentée et assistée de Maître Isabelle ETESSE de la SELARL GARDACH & ASSOCIÉS, avocat au barreau de PAU

INTIMES :

Monsieur Xavier X...

né le [...] à BAYONNE (64)

de nationalité française

[...]

représenté et assisté de Maître Alain ASTABIE de la SCP ABC AVOCAT, avocat au barreau de BAYONNE

SA AXA FRANCE IARD

313 Terrasses de l'Arche

[...]

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

représentée par Maître Sophie Y... membre de la SELARL LEXAVOUE PAU-TOULOUSE, avocat au barreau de PAU

assistée de Maître Karl Fredrik Z..., avocat au barreau de PARIS

SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL prise en la personne de son mandataire Maitre A... demeurant [...]

assignée

sur appel de la décision

en date du 12 DECEMBRE 2016

rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BAYONNE

FAITS ET PROCEDURE :

M. Xavier X... est propriétaire d'un immeuble à usage locatif sis à BAYONNE (64100).

Le 28 mai 2014, il a engagé une action civile devant le tribunal de grande instance de BAYONNE à l'égard de la SARL TOIT BASQUE exerçant sous l'enseigne LAFORET IMMOBILIER, et de la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL, en leur faisant grief d'avoir commis des fautes dans la gestion locative de son bien immobilier, en ce sens que son appartement a, par leur intermédiaire, été loué à un locataire impécunieux et qu'en outre le non-paiement des loyers n'a pas été déclaré en temps utile à l'assureur B... Assurances qui a refusé de prendre en charge les arriérés locatifs au titre de la police d'assurance contractée par le propriétaire.

M. X... exposait notamment que :

- la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL, dans le cadre d'une convention de partenariat conclue avec la SARL TOIT BASQUE le 26 décembre 2008, était chargée de la gestion de son bien par l'intermédiaire d'un mandat d'administration de biens conclu avec M. X... le 16 décembre 2008,

- la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL était assurée en responsabilité civile professionnelle auprès de la compagnie AXA FRANCE IARD,

- le 6 novembre 2010, la SARL TOIT BASQUE avait signé, pour le compte du bailleur, un contrat de location sur le bien pour un loyer mensuel de 750 € provisions sur charges comprises,

- le locataire choisi, M. C... n'a pas honoré ses loyers, de sorte que l'impayé locatif que le bailleur n'a pu récupérer s'élève à la somme de 15 968,80 €,

- malgré une déclaration de sinistre effectuée par la société TOIT BASQUE, la B... refusait de prendre en charge le sinistre au titre de la garantie d'impayés de même que les frais de justice liés à l'affaire,

- M. X... a fait assigner M. C... devant le juge des référés du tribunal d'instance de BAYONNE qui, par ordonnance contradictoire rendue le 10 juillet 2013, a notamment constaté la résiliation du bail en cause à compter du 26 janvier 2013, prononcé l'expulsion du locataire privé de titre, et le locataire défaillant à payer à son bailleur, une indemnité d'occupation égale au loyer courant augmenté des charges à compter de février 2013 jusqu'au départ effectif des lieux en sus d'une provision d'un montant de 9 968,80 € représentative de l'arriéré locatif (loyers, charges et indemnités d'occupation) au mois de juin 2013 inclus.

M. X... demandait donc au tribunal, au principal, de condamner solidairement la SARL TOIT BASQUE et la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL à lui verser les sommes de 15968,80 € à titre de dommages et intérêts au titre des loyers impayés, 1196 € au titre des honoraires de procédure de référé et 2000 € en réparation de son préjudice moral.

La SARL TOIT BASQUE a assigné en intervention forcée, la compagnie AXA FRANCE IARD, ès qualités d'assureur D... de la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL.

* * *

La SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL n'ayant pas comparu, le tribunal de grande instance de BAYONNE statuant par jugement réputé contradictoire rendu le 12 décembre 2013 (RG n° 14/01126), a :

- condamné in solidum la SARL TOIT BASQUE LAFORET IMMOBILIER et la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL à payer à M. X... la somme de 15968,80€ avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

- condamné la SARL TOIT BASQUE LAFORET IMMOBILIER à payer à M. X... la somme de 1 196 € avec intérêts au taux légal à compter du jugement outre les dépens de ladite procédure (assignation, signification de l'ordonnance, commandement de payer, et, le cas échéant, commandement de quitter les lieux et procès-verbal d'expulsion ou de reprise des lieux),

- débouté M. X... de sa demande de dommages et intérêts,

- condamné la SARL TOIT BASQUE LAFORET IMMOBILIER et la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL chacune à payer à M. X... la somme de 1000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SARL TOIT BASQUE LAFORET IMMOBILIER à payer à la SA AXA FRANCE IARD la somme de 800 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SARL TOIT BASQUE LAFORET IMMOBILIER et la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL aux dépens.

* * *

Suivant déclaration d'appel n° 17/00128 régularisée le 16 janvier 2017, la SARL TOIT BASQUE a interjeté appel de cette décision.

Au terme de ses dernières écritures déposées le 14 avril 2017, la SARL TOIT BASQUE LAFORET IMMOBILIER conclut à titre principal à l'infirmation du jugement querellé et, statuant à nouveau, demande à la cour, de rejeter toutes prétentions formées à son encontre, et en outre, de condamner toute partie succombante, à lui verser une somme de 4000 € au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel, outre les entiers dépens.

A titre subsidiaire, elle sollicite d'une part, la réduction de l'indemnité qui viendrait à être allouée à M. X... au titre des loyers non encaissés à une somme qui ne saurait excéder celle de 12691,21 €, et d'autre part, la condamnation de la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL, prise en la personne de son mandataire ad'hoc, solidairement avec son assureur, la compagnie AXA FRANCE IARD, à la relever et la garantir des condamnations prononcées à son encontre.

La SARL TOIT BASQUE soutient que :

- M. X... ne lui a confié que la recherche d'un locataire et la rédaction d'un bail, et s'est adressé à la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL pour la gestion locative de son bien,

- à la fin de l'année 2011, la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL s'est déchargée de son mandat d'administration de manière «cavalière» en renvoyant par la poste, le dossier du bien de M. X... et la SARL TOIT BASQUE a repris la gestion locative pour épargner des soucis à son client. Elle ignorait alors que le locataire, M. C..., avait cessé les paiements des loyers et elle a tenté de suppléer à la défaillance de la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL en procédant à la déclaration de sinistre auprès de l'assureur B..., puis a diligenté une procédure d'expulsion à l'égard de M. C... qui a abouti à la résiliation du bail et à la condamnation de ce dernier au paiement des arriérés locatifs,

- le tribunal s'est donc trompé en reprochant à la SARL TOIT BASQUE d'avoir présenté à M. X... un locataire insolvable et n'a pas pris en compte les relations contractuelles existantes entre les trois parties,

- s'agissant de ces relations, dans le cadre de la convention signée le 26 décembre 2008, la SARL TOIT BASQUE était chargée de rechercher des locataires pour les clients communs tandis que la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL était chargée de la gestion locative ; c'est d'ailleurs un mandat de gestion locative que M. X... a consenti à la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL le 16 décembre 2008,

- la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL est à l'origine du préjudice subi par M. X... car le refus de prise en charge du sinistre (loyers impayés) par la B... est motivé par la tardiveté de la déclaration de sinistre qui aurait dû être faite dans un délai de 45 jours à compter du premier retard de paiement,

- le locataire, M. C..., présentait des garanties suffisantes, qui n'ont pas été correctement analysées par le tribunal. La SARL TOIT BASQUE ne pouvait demander un cautionnement puisque M. X... avait souscrit une assurance contre les risques locatifs ( art. 22-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989),

- en tout état de cause, M. X... ne justifie pas d'un lien de causalité entre les manquements reprochés à la SARL TOIT BASQUE et le préjudice qu'il prétend avoir subi,

- sur le préjudice, M. X... ne peut se voir allouer des dommages-intérêts correspondant aux entiers loyers non réglés par le locataire débiteur. Il ne peut qu'invoquer une perte de chance de procéder au recouvrement des sommes dues par le locataire. M. X... a obtenu une décision de condamnation qu'il peut faire exécuter. En outre, sur la totalité des loyers dus par le preneur, il aurait dû déduire la commission d'agence et les impôts, et ne peut donc réclamer ces sommes à la SARL TOIT BASQUE,

- s'agissant de la garantie due par la SA AXA FRANCE IARD, si la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL a été dissoute le 9 août 2013, son assureur reste tenu de couvrir ses manquements professionnels pour la période de validité de la police d'assurance. Le tribunal a omis de se prononcer sur les demandes présentées à l'égard de la SA AXA FRANCE IARD.

En réplique, dans ses conclusions d'appel incident régularisées le 8 juin 2017, la compagnie AXA FRANCE IARD demande que,

- le jugement entrepris soit réformé en ce qu'il a retenu la responsabilité de la société JURIS EXPERTISE CONSEIL dans le préjudice subi par M. X...,

- statuant à nouveau de ce chef, la SARL TOIT BASQUE LAFORET IMMOBILIER et M. X... soient déboutés de l'ensemble de leurs demandes la concernant,

- tout succombant soit condamné à lui payer la somme de 2000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Dans ses dernières écritures en date du 9 juin 2017, M. X... sollicite de la cour:

- le débouté de la SARL TOIT BASQUE LAFORET IMMOBILIER,

- la confirmation du jugement dont appel en ce qu'il a condamné :

Y ajoutant,

** de la somme de 1196 € avec intérêts au taux légal à compter du jugement outre frais de ladite procédure (assignation, signification de l'ordonnance, commandement de payer, et, le cas échéant, commandement de quitter les lieux et procès-verbal d'expulsion ou de reprise des lieux),

** de la somme de 2000 € au titre des dommages et intérêts pour préjudice moral,

** d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile de 4000 € pour la première instance,

M. X... reprend les moyens et arguments développés en première instance, en ce qu'il fait notamment valoir que :

- il a confié la gestion locative de son appartement à la SARL TOIT BASQUE LAFORET comme le montrent les mails échangés avec cette agence entre le 15 décembre 2008 et le 13 janvier 2009,

- la SARL TOIT BASQUE lui a présenté la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL avec laquelle il a signé un mandat d'administration du bien, mais la convention de partenariat passée entre la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL et la SARL TOIT BASQUE prévoit que tous les mandats de gestion restent la propriété de la SARL TOIT BASQUE,

- la SARL TOIT BASQUE a choisi M. C... et un bail donc été signé le 6 novembre 2010. Dès le mois suivant, le locataire a cessé d'honorer le paiement du loyer mais la SARL TOIT BASQUE et la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL n'ont pas agi, et le locataire n'a effectivement libéré l'appartement qu'en février 2014. Les garanties offertes par ce locataire étaient illusoires et insuffisantes. LA SARL TOIT BASQUE aurait pu lui demander un cautionnement car l'article du 6 juillet 1989 n'est entré en vigueur que postérieurement à la signature du bail,

- comme la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL, la SARL TOIT BASQUE était également titulaire d'un mandat de gestion du bien.

* * *

Bien que régulièrement assignée, la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL prise en la personne de son mandataire ad'hoc, Maître A..., n'a pas constitué avocat et n'a pas déposé de conclusions.

* * *

L'ordonnance de clôture est intervenue le 16 mai 2018 et l'affaire appelée à être plaidée à l'audience du 19 juin 2018.

SUR CE :

M. X... a engagé l'action devant le tribunal de grande instance de de BAYONNE sur le fondement de l'article 1147 du code civil - se prévalant ainsi des relations contractuelles de droit commun avec ses défendeurs - et des articles 1991 à 1993 visant plus spécifiquement les relations contractuelles entre mandant et mandataire.

Le contrat de bail portant sur l'appartement de M. X... qui a été consenti à M. Michaël C... le 6 novembre 2010 moyennant le paiement d'un bail mensuel de 700 €, mentionne que le mandataire immobilier est la SARL TOIT BASQUE et que les loyers sont réglés à la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL.

Ce bail a, semble-t'il, fait l'objet d'une reconduction (tacite ou non, les pièces produites ne permettent pas de le savoir) et le commandement de payer - versé au dossier par M. X... - a été signifié au locataire débiteur le 20 août 2012 et vise des arriérés locatifs échus depuis le mois de novembre 2011.

L'ordonnance de référé rendue le 10 juillet 2013 ayant constaté la résiliation du bail, a condamné M. C... au paiement d'un somme principale de 9968,80 € représentant les arriérés locatifs échus jusqu'au mois de juin 2013 inclus, sur la base d'un commandement de payer délivré le 26 novembre 2012 - mais ni le décompte de créance ni le commandement de payer sur lesquels le juge fonde sa décision ne sont versés au dossier.

Dans son courrier du 7 juin 2012, la B... Assurances a refusé de prendre en charge le sinistre résultant du non-paiement des loyers au motif qu'elle ne peut intervenir quand le locataire est en situation d'arriérés lors des 6 mois précédant la date de mise en garantie du lot, et en précisant qu'en l'espèce, les impayés remontent au 1er août 2011 alors que la mise en garantie du bien a été faite le 1er février 2012.

Le bail du 6 novembre 2010 a été versé aux débats par la SARL TOIT BASQUE et il peut être déduit des éléments du dossier qu'il s'est renouvelé. Aucune pièce du dossier n'atteste de ce que M. X... a contracté l'assurance garantie des loyers impayés dès la signature du bail original, mais les autres parties à l'instance n'émettent aucune objection à cet égard.

Il y a donc lieu de déterminer laquelle des deux sociétés parties au procès, était tenue de la gestion de la location du bien de M. X... à compter du mois d'août 2011.

Il résulte des explications des parties et des pièces versées aux débats par leur avocat respectif, que :

- des messages électroniques échangés entre le 15 décembre 2008 et le 13 janvier 2009 confirment que Xavier X... a confié à la SARL TOIT BASQUE la gestion de son appartement et a contracté par son intermédiaire, une assurance garantie loyers impayés auprès de la B..., la SARL TOIT BASQUE s'engageant à rechercher un locataire moyennant des honoraires s'élevant à 12 % du loyer annuel hors charges,

- le 16 décembre 2008, M. X... a consenti à la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL un mandat d'administration du bien loué,

- le 26 décembre 2008, la SARL TOIT BASQUE et la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL ont conclu une convention de partenariat par laquelle la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL fournissait une structure d'accueil à sa partenaire pour la gestion des biens de tous ses clients souhaitant déléguer cette gestion, en contrepartie d'une commission,

- le bail consenti à M. C... le 6 novembre 2010 désigne comme mandataire, la SARL TOIT BASQUE et stipule que les loyers sont versés entre les mains de « JURIS EXPERTISE CONSEIL BIARRITZ ». Il est également produit des relevés de compte de gestion émis par la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL pour le bien de M. X... jusqu'au 30 novembre 2011. D'ailleurs, dans un courrier, la SARL TOIT BASQUE LAFORET a informé M. X... de ce qu'elle reprenait la gestion de son patrimoine à compter du 1er décembre 2011.

M. X... était donc bien contractuellement lié pour la recherche d'un locataire et la signature du bail avec la SARL TOIT BASQUE d'une part, et la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL, d'autre part, pour l'administration et la gestion de la location de son appartement.

Les modalités de partenariat décidées par ces deux sociétés ne concernaient pas M. X... puisqu'il n'est pas partie à la convention du 26 décembre 2008.

Il reste à déterminer si une faute contractuelle a été commise, et dans l'affirmative, par laquelle des deux sociétés.

C'est la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL qui était chargée de percevoir les loyers et dès lors, il est manifeste que si le locataire a laissé plusieurs mensualités arriérées, seule cette société pouvait s'en apercevoir. Or, d'après le mandat que lui a consenti M. C..., outre la perception des sommes résultant de l'occupation locative, la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL avait également l'obligation d'effectuer les rappels des loyers échus, poursuites, expulsion, saisies etc... Le mandat du 16 décembre 2008 montre qu'elle a reçu la déclaration de M. X... souhaitant souscrire à une assurance garantie impayés.

A la reprise du dossier de l'appartement de M. X..., le 1er décembre 2011, par la SARL TOIT BASQUE, le sinistre était déjà consommé puisque dans son courrier du 7 juin 2012, la B... a refusé de couvrir les impayés locatifs après avoir constaté qu'à la fin de chacun des mois d'août à novembre 2011, il restait un solde débiteur.

S'il est ainsi acquis que la négligence et l'inertie fautive de la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL - qui n'a pas agi à l'égard de M. C... ni effectué la déclaration de sinistre auprès de la B... en temps utile - ont occasionné un préjudice à M. X..., il n'apparait pas que la SARL TOIT BASQUE ait commis un manquement en lien avec ses engagements contractuels à l'égard de celui-ci.

M. X... soutient également que la SARL TOIT BASQUE est responsable de son préjudice pour lui avoir fait signer un bail avec un locataire impécunieux, et qu'elle l'a privé d'une possibilité de demander un cautionnement en l'incitant à signer l'assurance garantie des impayés.

A cet égard, la cour observe que le mandat consenti par M. X... à la SARL TOIT BASQUE est formalisé par des messages électroniques et non par un contrat signé par les deux parties, énonçant de manière précise, les obligations de chacune des parties. En particulier, les éléments versés aux débats ne permettent pas de s'assurer que M. X... a donné des instructions concernant les justificatifs à fournir par le locataire qu'il souhaitait voir entrer dans son appartement. En effet, M. X... ne peut se borner à alléguer de ce qu'il avait demandé que les critères «habituels» concernant les garanties de solvabilité des candidats à la location soient appliqués, puisque le propriétaire d'un bien est totalement libre de louer son bien à la personne de son choix sans se référer à des conditions-type, dès lors que les conditions posées sont plus favorables que celles qui sont fixées par la loi.

Au surplus, rien ne démontre que M. X... n'a pas été mis en mesure d'évaluer lui-même ou de refuser la candidature de M. C... avant de signer le bail : en effet, le mail du 15 décembre 2008 contenant l'offre de mandat soumise par la SARL TOIT BASQUE à M. X... mentionne l'engagement pris par l'agence immobilière de rechercher un locataire, et donc de le présenter au bailleur auquel revenait donc la décision finale de signer ou non le bail. Si M. X... a bien adressé un mail du 3 janvier 2011 à la SARL TOIT BASQUE pour indiquer qu'il aurait souhaité voir le dossier de son locataire, M. C..., il s'agit d'une demande postérieure à la signature du bail, ne suffisant pas à démontrer que son consentement à la location a été surpris ou forcé.

Dès lors que l'étendue des obligations contractuelles de la SARL TOIT BASQUE n'est pas déterminée, rien n'établit qu'elle a commis une faute à l'égard de son mandant en lui présentant M. C....

Le jugement entrepris sera en conséquence réformé en ce qu'il a retenu la responsabilité de la SARL TOIT BASQUE solidairement avec celle de la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL.

S'agissant de l'étendue du préjudice causé directement à M. X... par la faute de la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL, la cour entrera également en voie de réformation du jugement querellé.

En effet, M. X... dispose avec l'ordonnance de référé ayant condamné M. C..., d'un titre exécutoire de condamnation à l'égard de M. C..., la seule partie qui en enfreignant ses obligations contractuelles, lui a causé un dommage direct et certain. D'ailleurs, il sera relevé qu'aucune pièce du dossier n'atteste de ce que M. X... a tenté en vain de faire exécuter ladite décision et qu'il n'a pas déjà recouvré au moins en partie, les sommes qu'il réclame aujourd'hui. Or, M. X... ne peut prétendre récupérer deux fois le montant des mêmes loyers impayés.

M. X... affirme également que son locataire n'a quitté les lieux qu'en février 2014 mais là encore, il lui sera répondu qu'il lui appartenait de faire procéder à l'exécution de l'ordonnance de référé exécutoire par provision, qui prononçait l'expulsion de M. C....

Par ailleurs, aucun décompte précis ne figure au dossier de M. X..., de sorte que la cour n'est pas en mesure de vérifier les arriérés qui sont en relation directe avec la faute de gestion commise par la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL et ceux qui sont nés postérieurement, au moment où le bailleur s'est nécessairement aperçu que les loyers ne lui étaient pas reversés par l'intermédiaire du mandataire immobilier.

En tout état de cause, la faute de la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL n'a fait que contribuer au préjudice causé à M. X..., en le privant d'une chance de bénéficier de l'assurance garantie des impayés ou d'engager moins tardivement, des poursuites contre le locataire indélicat.

Compte tenu des éléments du dossier et au regard des pièces versées aux débats, la cour condamnera la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL au paiement d'une somme de 3000 € représentant le préjudice qu'elle a effectivement causé à M. X....

M. X... ne fait état d'aucun lien de droit avec la SA AXA FRANCE IARD : il ne peut donc réclamer pour le compte de la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL, défaillante devant la cour, l'application de la garantie résultant de la police d'assurance qui la lie à la SA AXA FRANCE IARD. Dès lors, M. X... n'ayant pas demandé la condamnation solidaire de la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL et de la SA AXA FRANCE IARD, cette dernière sera mise hors de cause.

Dès lors, il sera fait droit à l'appel de la SARL TOIT BASQUE en ce qu'après infirmation du jugement entrepris, elle sera mise hors de cause.

M. X... verra, s'agissant de sa demande de confirmation partielle du jugement, la condamnation prononcée à l'égard de la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL maintenue sur le principe mais réduite sur le quantum. Il sera débouté de l'ensemble de ses autres prétentions, notamment à l'égard de la SARL TOIT BASQUE et la SA AXA FRANCE IARD.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt rendu par défaut et en dernier ressort,

Vu l'appel principal de la SARL TOIT BASQUE, et l'appel incident de M. X...,

Réforme le jugement entrepris et statuant à nouveau,

Déboute M. X... de l'ensemble de ses demandes à l'égard de la SARL TOIT BASQUE et la met hors de cause,

Condamne la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL à payer à M. X..., la somme de 3000 € au titre de la perte de chance occasionnée par sa défaillance contractuelle,

Déboute M. X... de ses prétentions à l'égard de la SA AXA FRANCE IARD prise en sa qualité d'assureur de la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL, et la met hors de cause,

Condamne la SARL JURIS EXPERTISE CONSEIL prise en la personne de son mandataire ad'hoc, Maître A..., aux dépens dont distraction pour ceux d'appel au profit de la SELARL GARDACH ET ASSOCIES et de Maître Sophie Y..., avocat au Barreau de PAU, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

Dit n'y avoir lieu d'appliquer l'article 700 du code de procédure civile en l'espèce,

Rejette toute autre fin plus ample ou contraire.

Le présent arrêt a été signé par Mme Marie-Florence BRENGARD, Président, et par Mme Annie MIQUEU, adjoint administratif, faisant fonction de Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

Annie MIQUEU Marie-Florence BRENGARD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17/00168
Date de la décision : 09/10/2018

Références :

Cour d'appel de Pau 01, arrêt n°17/00168 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-10-09;17.00168 ?
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