MARS/AM
Numéro 18/2929
COUR D'APPEL DE PAU
1ère Chambre
ARRET DU 04/09/2018
Dossier N° RG 16/01366
Nature affaire :
Demande d'exécution de travaux, ou de dommages-intérêts, formée par le maître de l'ouvrage contre le constructeur ou son garant, ou contre le fabricant d'un élément de construction
Affaire :
D... X...
C/
Bernard M...
MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS
Grosse délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R E T
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 04 septembre 2018, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 15 mai 2018, devant :
Madame BRENGARD, Président
Monsieur CASTAGNE, Conseiller
Madame ROSA SCHALL, Conseiller, magistrat chargé du rapport conformément à l'article 785 du code de procédure civile
assistés de Madame Q..., Greffier, présente à l'appel des causes.
Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANTE :
Madame D... X...
née le [...] à PARIS (75)
de nationalité française
[...]
représentée et assistée de Maître Loïc Y... de la SCP Y... & BURTIN, avocat au barreau de TARBES
INTIMES :
Monsieur Bernard M...
né le [...] à LOURDES
de nationalité française
[...]
représenté par Maître Martine N... , avocat au barreau de PAU
assisté de la SELARL A.A.D Avocats, représentée par Maître Armelle O..., avocat au barreau de TOULOUSE
MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS
[...]
représentée et assistée de Maître Olivia MARIOL de la SCP LONGIN - MARIOL, avocat au barreau de PAU
sur appel de la décision
en date du 19 NOVEMBRE 2015
rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE TARBES
Mme D... Z... veuve X... a fait construire une maison d'habitation à Argeles Gazost.
Sont intervenues à la construction :
- la SARL Amota assurée à la Mutuelle des Architectes Français chargée du dossier du permis de construire et M. Bernard M..., architecte titulaire du brevet de fabrication de la structure métallique,
- l'EURL Be Patrice A... assurée à la SMABTP, chargée de l'étude des structures métalliques selon le système breveté par M. M...,
- la SARL concept Bati chargée suivant devis acceptés le 10 mai 2011 des ouvrages de terrassement et maçonnerie,
- la SARL Design Métal qui a réalisé l'ossature métallique de la maison, assurée auprès de la SA MAAF assurances.
En raison de l'inadéquation de la surface et de la forme du sous-sol avec les plans du permis de construire et de désordres et malfaçons importants de la structure métallique, Mme X... a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Tarbes qui, par ordonnance du 24 janvier 2012, a désigné M. B... en qualité d'expert.
Le rapport d'expertise a été déposé le 13 juillet 2012.
Par actes d'huissier des 16, 17, 19 et 24 avril 2013, Mme D... X... a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Tarbes, l'EURL Be Patrice A..., SA MAAF assurances, la SMABTP, la Mutuelle des Architectes Français, l'EURL Desing Métal, Me C..., liquidateur de la SARL Concept Bati et M. Bernard M... aux fins d'obtenir le paiement des travaux de remise en état et l'indemnisation des préjudices subis.
Par acte d'huissier du 1er avril 2014, Mme X... a appelé en la cause de Me C..., ès qualités de liquidateur de la société Design Métal.
Par acte d'huissier du 19 avril 2014, l'EURL Be Patrice A... a fait assigner Mme X... devant le juge de proximité de Tarbes en paiement d'un solde de factures.
Par jugement du 7 janvier 2014, le juge de proximité a renvoyé l'affaire devant le tribunal de grande instance de Tarbes.
Par jugement du 19 novembre 2015, le tribunal de grande instance de Tarbes a :
- déclaré Mme X... née Z... irrecevable en ses demandes à l'encontre de la SARL Amotac,
- mis hors de cause l'EURL Be Patrice A..., la SMABTP, la Mutuelle des Architectes Français et la SA MAAF assurances,
- déclaré M. Bernard M..., la SARL Concept Bati et l'EURL Desing Métal responsables in solidum du préjudice subi par Mme D... X... précision faite que la solidarité de l'EURL Desing Metal se limite au désordre de la structure métallique,
- condamné M. Bernard M... à payer à Mme D... X... née Z... :
° la somme de 85 155,63 € pour la reprise des désordres qui sera revalorisée sur la base du dernière indice du coût de la construction publié par l'INSEE au 13 juillet 2012 en fonction du dernier indice publié à la date du paiement,
° la somme de 897 € pour le coût des travaux de consolidation du mur ouest,
° la somme de 10 000 € au titre des préjudices induits,
- fixé la créance de Mme D... X... née Z... à l'égard de la SARL Concept Bati représentée par son liquidateur judiciaire Me Jean-Pierre C... :
- à la somme de 85 155,63 € pour la reprise des désordres (avec la même revalorisation que ci-dessus),
- à la somme de 897 € pour le coût des travaux de consolidation du mur ouest,
- à la somme de 10 000 € au titre des préjudices induits,
- fixé la créance de Mme D... X... née Z... à l'égard de l'EURL Desing Metal à la somme de 3 438,50 €,
- condamné Mme D... née Z... à payer à M. Bernard M... la somme de 3200 € outre la TVA en vigueur à la date du paiement,
- dit que les créances respectives des 2 parties se compenseront,
- condamné Mme D... X... née Z... à payer à l'EURL Be Patrice A... la somme de 3 348,81 € au titre d'un solde de factures et la somme de 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. Bernard M... à payer à Mme D... X... la somme de 4000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. Bernard M... aux dépens y compris ceux du référé et les frais d'expertise judiciaire,
- fixé la créance de Mme D... X... née Z... à la liquidation judiciaire de la SARL Concept Bati et à la liquidation judiciaire de l'EURL Desing Métal au montant des dépens et de la somme de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné l'éxécution provisoire.
Le tribunal a retenu la responsabilité de M. M..., en considérant que les divers désordres ne pouvaient pas lui échapper lors de ses visites sur le chantier destinées à vérifier la réalisation de son procédé, en tant que détenteur d'un brevet concernant la structure métallique, et que ses interventions excédaient la visite occasionnelle du titulaire d'un brevet et s'apparentaient à une mission de maîtrise d'oeuvre de conception et d'exécution.
Mme D... X... a interjeté appel de ce jugement le 14 avril 2016 à l'encontre de M. M... et de son assureur la Mutuelle des Architectes Français.
Par conclusions du 21 avril 2017, la Mutuelle des Architectes Français demande de débouter Mme X... de l'intégralité de ses demandes à son encontre, de dire que seul M. Bernard M... est intervenu à l'acte de construire et de prononcer par conséquent sa mise hors de cause dès lors qu'elle n'est pas son assureur.
Elle fait valoir que M. M... n'est plus son adhérent depuis 1990, que Mme X... a signé un contrat d'honoraires pour une mission de permis de construire, qu'aucun contrat n'est produit signé par la société Amotac pour une mission de maîtrise d'oeuvre et que cette société n'a perçu aucun honoraire, ce qui a été retenu par les premiers juges qui n'ont retenu aucune responsabilité à l'encontre de la société Amotac.
Subsidiairement, elle demande de dire qu'elle est fondée à opposer une non garantie à l'encontre de la société Amotac conformément aux dispositions de l'annexe aux conditions générales du contrat d'assurance dès lors que M. M... était le concepteur du système constructif de la structure métallique de sorte que la société Amotac n'avait pas l'indépendance nécessaire pour évaluer la pertinence du systhème constructif dont il est l'auteur.
Elle fait observer que la société Amotac avait la possibilité de souscrire une clause d'extension de garantie dans cette hypothèse où l'architecte, de quelque manière que ce soit, a la qualité de constructeur vendeur, ou d'architecte bâtisseur, or la société Amotac n'a effectué aucune déclaration préalable de ce chef à son assureur aux fins d'obtenir une éventuelle extension de garantie pour ce risque spécifique non couvert par la police.
À titre infiniment subsidiaire, elle demande de confirmer le jugement en ce qu'il a limité le poste des préjudices induits à 10 000 €.
En tout état de cause, elle demande de dire que la garantie de la Mutuelle des Architectes Français vis-à-vis de la société Amotac se fera dans la limite et aux conditions de la police qui contient notamment une franchise opposable au tiers lésé et demande de condamner Mme X... à lui payer la somme de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens avec distraction au profit de la SCP Longin Mariol.
Par conclusions III du 2 mars 2018, Mme D... X... demande de réformer la décision entreprise en ce qu'elle a mis hors de cause la Mutuelle des Architectes Français et sur le montant des dommages et intérêts fixés au titre des préjudices induits par la reconstruction.
Elle demande à la cour :
- de déclarer la société Amotac responsable de l'ensemble de son préjudice solidairement sinon in solidum avec M. Bernard M...,
- de dire que la Mutuelle des Architectes Français doit sa garantie à son assurée la SARL Amotac et de la condamner solidairement sinon in solidum avec M. Bernard M... à lui payer au visa de l'article L 134-3 du code des assurances, les sommes de :
° 85 155,63 € pour la reprise des désordres revalorisés sur la base du dernier indice du coût de la construction publiée par l'INSEE le 13 juillet 2012,
- la somme de 897 € pour le coût des travaux de consolidation du mur ouest,
- la somme de 38 790,09 € au titre des préjudices induits
et de les condamner sous la même solidarité à lui payer la somme de 4000 € au titre des frais irrépétibles en première instance et de 3 500 € au titre de ceux exposés en cause d'appel ainsi qu'aux entiers dépens.
Elle fait valoir que M. M... exerçant sous couvert de la SARL Amotac a assumé une mission réelle de maîtrise d'oeuvre tant pour la conception de l'ouvrage que pour sa réalisation ce qui résulte de ses interventions à ces différents stades et auprès des entreprises et qui a été retenu par le premier juge.
Rappelant qu'à l'époque des travaux de construction de sa maison en 2011, seule la société d'architecture Aomtac était inscrite au tableau de l'ordre régional des architectes d'Aquitaine, elle souligne que tous les actes professionnels accomplis par M. M... relèvent de son activité d'associé de cette société de sorte que la responsabilité contractuelle de la société Amotac est engagée sur le fondement des articles 1134, 1135 et 1147 du code civil.
Dans ces conditions, et contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, la Mutuelle des Architectes Français doit sa garantie à la SARL Amotac pour la responsabilité qu'elle encourt du fait des actes professionnels dommageables commis par son associé.
Rappelant qu'elle a fait exécuter les travaux de démolition-reconstruction de sa maison elle demande, réformant de ce chef le jugement, de fixer l'ensemble de ses préjudices induits par les désordres et la reprise à la somme de 38 790,09 €.
Par conclusions récapitulatives du 3 avril 2018, M. M... demande de réformer le jugement déféré et de débouter Mme X... de toutes ses demandes à l'encontre de la SARL Amotac et/ou de M. M... faisant valoir :
- que l'expert judiciaire ne retient pas sa responsabilité ni celle de la SARL Amotac au titre d'une prétendue maîtrise d'oeuvre d'exécution de fait,
- que c'est la SARL Bati Concept en charge du gros oeuvre qui est à l'origine des désordres selon l'expert,
- que Mme X... n'a pas eu recours à un maitre d'oeuvre d'exécution et est intervenue sur le chantier et sur la gestion de la construction,
- que la SARL Amotac a reçu une seule mission de maîtrise d'oeuvre de conception,
- qu'il a fait uniquement 3 visites sur le chantier, et que si des actes qu'il a réalisés ont outrepassé la mission de conception, la preuve n'est pas rapportée qu'il soit à l'origine des désordres.
Il demande de condamner Mme X... à lui payer la somme de 3 200 € outre la TVA au titre de la facture de royalties avec les intérêts à compter de la date de l'assignation en référé expertise.
À titre subsidiaire, si la société Amotac a pu assurer une maîtrise d'oeuvre d'exécution de fait, il demande de condamner la société MAF assurances au paiement du coût des travaux de réfection des désordres et des autres préjudices.
En toute hypothèse, il demande de débouter la Mutuelle des Architectes Français de l'ensemble de ses demandes dirigées à son encontre, d'ordonner la capitalisation des intérêts et de condamner Mme X... à lui payer la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 4 avril 2018.
Sur ce :
Il n'est pas contesté comme relevé par le premier juge, que l'ouvrage n'ayant pas été réceptionné à la date de l'apparition des désordres et malfaçons, les demandes sont présentées par Mme D... X... sur le fondement de la responsabilité contractuelle, au visa des articles 1134 et suivants et 1147 et 1184 du code civil.
Sur l'existance de désordres
Il résulte du rapport d'expertise judiciaire :
- qu'il existe une erreur de superficie du sous-sol qui ne correspond pas au plan joint au dossier de la demande de permis de construire, non conformité élaborée entre l'ouverture du chantier le 5 mai 2011 et fin mai 2011, ayant pour conséquence la création d'une extension ouest non prévue au plan.
Elle est consécutive à l'utilisation par la société Concet Bati, du plan d'une autre villa conçue par M. M... suivant le même procédé breveté.
Cette erreur a eu notamment pour conséquence d'assujettir des éléments de l'ouvrage à des contraintes pour lesquelles ils n'avaient pas été étudiés.
- qu'il existe une hauteur trop importante du sous-sol par rapport au plan de coupe de la villa intégré dans le dossier de plan de la demande de permis de construire ce qui a eu notamment pour incidence l'augmentation du nombre de marches des 2 escaliers, extérieur et intérieur,
- qu'ont été relevées d'autres malfaçons affectant le gros oeuvre qualifiées de rédhibitoires par l'expert : l'absence de massif en béton armé sous les 4 poteaux, l'insuffisance des chaînes parasismiques, l'absence de dispositifs d'étanchéité des maçonneries enterrées, l'irrégularité de la maçonnerie, la non-conformité des 4 poteaux de sections circulaires qui ne correspond pas aux plans d'exécution.
Concernant l'ossature métallique,
- qu'il existe un désaxage entre la trame d'appui de la structure et les 4 poteaux ainsi qu'un défaut de parallélisme,
- que le plan du rez-de-chaussée de la villa étant plus grand que celui du sous-sol, certaines gerbettes sont à porte-à-faux au-delà des maçonneries du sous-sol, par ailleurs, les boulons de fixation des éléments de l'ossature métallique ne sont pas du type HER, notamment ceux maintenant les gerbettes.
Cette structure métallique a été exécutée entre le 4 juillet 2011 et le 17 août 2011 date de l'arrêt du chantier.
Sur la mission de l'architecte
Il résulte des pièces produites notamment de la demande de permis de construire transmise à la commune d'Argeles-Gazost, que Mme D... X... a confié à la SARL Amotac la mission d'établir le dossier de permis de construire de sa maison individuelle [...] , suivant un système breveté n° 013863, permis de construire qu'elle a obtenu le 21 mars 2011.
L'expert judiciaire a fait le constat d'une mission limitée à la demande du permis de construire mais également d'une implication plus importante de l'architecte, notamment au stade du choix des entreprises, avec déplacements sur le chantier.
Il ne s'est pas prononcé sur le dire du 13 avril 2012 de Me Y... afférent à la responsabilité de maîtrise d'oeuvre d'opération considérant que cela ne relevait pas de sa compétence.
Il a par ailleurs relevé que les différents désordres et malfaçons étaient imputables à l'entreprise Concept Bati (pour les travaux de terrassement et de maçonnerie) et à l'EURL Desing Metal (notamment pour les désordres afférents à l'ossature métallique).
Concernant la rémunération de l'architecte, les pièces produites démontrent :
- que l'acompte n° 1 de 1 500 € en date du 11 mars 2011 porte l'en-tête : M... Bernard architecte DPLG inscrit à l'ordre des architectes région Aquitaine.
Cet acompte est demandé à Mme X... au titre de la construction d'une maison individuelle.
- que dans le contrat d'honoraires en date du 25 mai 2011 (suivant système constructif brevet n° 01033863) les honoraires de 1 722,24 € TTC sont dus à M. M... Bernard architecte, SARL Amotac, pour la mission de conception : mission de permis de construire.
Le chèque de 1 722,24 € a été émis le 28 juin 2011 à l'ordre de "M... architecte Bernard" qui ne conteste pas l'avoir encaissé à titre personnel.
- que le 25 mai 2011, M. M... a édité un relevé n° 1 "royalties" afférent à un acompte de 3 200 € pour l'utilisation du brevet pour la construction de la maison de Mme X....
La rémunération est donc intervenue tant au titre de la mission de permis de construire, que pour l'utilisation du procédé breveté dont M. M... ne prouve pas, comme il l'allègue, qu'il en ait cédé les droits.
Il n'existe aucune contestation sur la mission de permis de construire donnée à la SARL Amotac.
Est objet du litige, l'existence ou non d'une mission de maître d'oeuvre d'exécution.
Sur la maitrise d'oeuvre d'exécution
M. M... fait valoir que Mme X... a elle-même assuré la surveillance et la direction du chantier or il n'est pas contesté qu'elle est profane en la matière.
Plusieurs témoins indiquent avoir vu M. M... sur le chantier de Mme X..., ce que celui-ci reconnaît en spécifiant cependant qu'il est venu à 3 reprises, en raison du problème de non-paiement par Mme X... des factures au titre de la maîtrise d'oeuvre de conception et des royalties.
Il résulte cependant des pièces produites que :
- M. F... indique avoir vu régulièrement M. M... sur le terrain en construction d'avril à juillet 2011, précisant qu'il se présentait comme l'architecte de Mme X....
- Mme P... a fait le même constat, précisant que l'architecte donnait des conseils à M. G..., le maçon et qu'elle l'a vu prendre des mesures.
(Le 5 juillet 2011 Mme X... a renvoyé un mail à M. A... lui indiquant que M. M... est venu le 4 juillet mesurer avec M. G... les 4 poteaux. Elle ajoute "ils ont contrôlé l'emplacement de la maison, le niveau de la maison et du garage").
M. G... a toutefois attesté avoir rencontré M. M... dans le cadre d'un permis de construire le concernant à Aureilhan et n'avoir reçu aucun ordre, aucun écrit, aucun conseil ni aucun plan concernant les travaux du chantier de Mme X....
- Mme H... a également vu plusieurs fois M. M... sur le chantier de la construction de Mme X... y prendre des mesures, descendre dans les fondations, mesurer les piliers etc. elle ajoute que le 2 mai M. M... et M. I... sont venus chez elle, ils avaient rendez-vous avec X... (sa belle-soeur) de même que le 27 mai, M. J..., M. K... et M. M... avaient également rendez-vous et se sont présentés chez elle.
L'intervention effective de M. M... lors de la réalisation du chantier résulte également :
- du témoignage du responsable de la société Desing métal qui indique avoir été présenté à Mme X... par M. M... le 20 mai 2011,
- de l'attestation de M. J... représentant de la société J... et de M. K... pour la société J... énergies qui indiquent avoir rencontré Mme X... et M. M... le 27 mai 2011 pour faire une mise au point définitive sur les projets menuiserie et solaires, signer les marchés y afférents et avoir débattu et arrêté avec Mme X... et M. M... toutes les prestations concernant leurs lots respectifs,
- du devis de l'EURL design métal en date du 24 mai 2011 pour un montant de 41202,20€ portant la mention « bon pour accord le 23 avril 2011 l'architecte » et la signature M..., sans que rien ne permette de démontrer, comme le soutient M. M... que cette signature soit intervenue dans le cadre de l'utilisation des brevets,
- de nombreux mails échangés entre Mme X... et les entrepreneurs présents sur son chantier qui établissent que M. M... était en contact avec ces différentes entreprises et particulièrement qu'il a eu des échanges avec M. Patrice A... le 11juillet 2011, au sujet de la rehausse de 17 cm des poteaux (pièces 28-3 de l'appelante).
Il est établi par le rapport d'expertise de M. B..., que les difficultés sont intervenues sur le chantier du fait que l'entreprise Concept Bati a travaillé avec le plan d'une autre villa construite selon le même procédé breveté mais intégrant un rectangle complémentaire qui n'existait pas dans le plan de la villa de Mme X....
Il résulte de l'ensemble de ces éléments, qu'à la première mission afférente à la demande de permis de construire confiée à l'architecte DPLG SARL Amotac B. M... s'est ajoutée consensuellement, une mission de maîtrise d'oeuvre tant de conception que d'exécution pour laquelle il convient de rappeler qu'aucun formalisme n'est exigé.
Il s'ensuit que l'architecte était tenu d'une obligation de conseil à l'égard du maître de l'ouvrage, Mme D... X... ce d'autant plus que M. M... est détenteur du brevet de l'ossature métallique dont la mise en oeuvre a été compliquée à la suite de l'utilisation d'un mauvais plan, l'origine de cette erreur n'ayant pas pu être précisément déterminée.
En lecture de la fiche extraite du tableau de l'ordre des architectes, il est établi que M. Bernard M... exerce sa profession sous le mode d'associé de la société d'architecture Amotac depuis le 10 septembre 2002.
En conséquence, en sa qualité d'architecte associé il est responsable de ses actes solidairement avec la société Amotac, seule inscrite à l'ordre des architectes du 10septembre 2002 au 27 mars 2012.
Sur les préjudices induits
Le premier juge a alloué à Mme X... la somme globale de 10 000 € au titre de ces préjudices.
L'expert judiciaire n'a fait aucune observation sur les frais consécutifs à la plus-value prévisible sur les matériaux de la couverture (513 €), les frais d'expertise amiable du bureau Bert (956,80 €) et les frais de constat d'huissier (572,71 €).
Il a été justifié de frais le garde-meuble à hauteur de 1 170 € (SCI la foncière pyrénéenne).
Ces frais sont ainsi justifiés à hauteur de la somme de 2 699,51 €.
Mme X... sollicite une somme de 9 100 € au titre de la perte de jouissance résultant du retard de la construction de la maison, sur la base d'une valeur locative minimale de 700 € par mois. S'il n'est justifié d'aucune location ni d'aucun frais effectivement payés par Mme X... pendant la période résultant du retard de la construction, l'expert a rappelé que le chantier qui devait être livré le 30 septembre 2011 ne pourrait pas l'être avant le 31septembre 2012, soit avec un an de retard, ce qui établit la réalité de la perte de jouissance ; il sera alloué de ce chef à Mme X... la somme de 9 000 €.
Les autres factures, afférentes à la couverture en zinc pour 1 406,82 €, aux bandes-seuils et aux appuis des fenêtres (1 001,05 €) aux enduits de façade, à l'isolation de la sous toiture correspondent à des travaux de reprise de la construction qui n'ont pas été envisagés par l'expert judiciaire.
D'autres demandes sont effectuées à partir de simples devis.
Elle se prévaut par ailleurs, d'un manque à gagner de 1 750 € en vertu d'un contrat EDF (panneaux solaires) qui aurait dû être opérationnel en octobre 2011 et de pénalités à compter du 16 novembre 2011. Elle ne produit cependant aucun document démontrant la réalité de ce manque à gagner et de ces pénalités.
Compte tenu de ces éléments, c'est par une exacte appréciation des éléments de l'espèce que le premier juge a rejeté ces demandes après avoir relevé que ces dépenses n'étaient pas justifiées par des factures ou n'étaient pas démontrées.
Est également sollicité, le paiement du dernier constat d'huissier réalisé le 7 mars 2017 par Me L... pour un montant de 408,09 €. Ce constat a été réalisé à la seule initiative de Mme X.... Il n'y a donc pas lieu de faire droit à la demande.
En conséquence, le jugement sera infirmé de ce chef il sera alloué à Mme D... X... la somme de 11 699,51 € au titre des préjudices induits.
Sur les demandes à l'encontre de la Mutuelle des Architectes Français
En application des dispositions de l'alinéa 1er de l'article L 124-3 du code des assurances « le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable ».
En application des alinéas 1 et 2 l'article 16 de la loi du 3 janvier 1977 « tout architecte dont la responsabilité peut être engagée en raison des actes qu'il accomplit à titre professionnel ou des actes de ses préposés doit être couvert par une assurance.
Lorsque l'architecte intervient en qualité d'associé, une assurance est également souscrite pour couvrir la responsabilité de la société d'architecture ».
Il sera rappelé qu'à la période du chantier de Mme X..., M. Bernard M... exercait sa profession sous le mode d'associé de la société d'architecture Amotac dont il n'est pas contesté qu'il était le gérant.
Lors de la réalisation du chantier litigieux la SARL Amotac était adhérente de la Maf (numéro identification Maf : 254239/X/2) au titre de la police n° 144435/B pour sa responsabilité engagée à raison des actes qu'elle accomplit à titre professionnel ou des actes de ses préposés.
Les conditions particulières du contrat d'assurance responsabilité professionnelle des architectes de la SARL Amotac sont signées par M. Bernard M..., sociétaire inscrit au tableau régional des architectes.
La MAF fait valoir à titre subsidiaire, une cause de non garantie en vertu des dispositions de l'article 2.1 de l'annexe aux conditions générales du contrat d'assurance, soutenant que dès lors que M. M... était le concepteur du système constructif de la structure métallique, la société Amotac n'avait pas l'indépendance nécessaire pour évaluer la pertinence du système construit dont il est l'auteur et ne disposait pas de l'indépendance nécessaire pour accomplir sa mission, situation constitutive d'un risque qui n'était pas couvert par la police souscrite.
Les dispositions de cette annexe, au titre de l'extension de garantie, énoncent notamment que pour toute opération ne répondant pas strictement au champ d'application de la garantie, une extension peut être accordée, sous réserve d'un accord exprès préalable et écrit.
Sont notamment concernées :
2 - les opérations dans lesquelles, au-delà de l'activité de maître d'oeuvre, l'architecte participe, de quelque manière que ce soit, à la réalisation matérielle des travaux : contractant général, architecte bâtisseur'
Il convient cependant de rappeler, que le nom de la société Amotac signifie : architecture modulaire technique de l'acier tel que cela résulte du tableau de l'ordre des architectes, de sorte que la MAF n'établit pas en quoi son assurée ne pouvait pas évaluer la pertinence du système construit, ni avoir l'indépendance nécessaire pour accomplir sa mission, s'agissant précisément d'une ossature modulaire métallique.
Il résulte par ailleurs, de la demande de permis de construire déposée par l'architecte "SARL Amotac B. M..." que ce document fait expressément référence au système breveté n° 013863 (reproduction interdite) soit au numéro du brevet de M. M... intitulé « procédé de fabrication du bâtiment à partir d'éléments modulaires et bâtiments ainsi obtenus » tel que le précise le relevé n° 1 royalties dues par Mme X... et en date du 25 mai 2011.
A la lecture de ces éléments, la MAF n'est pas fondée à refuser sa garantie laquelle s'appliquera, dans les limites des conditions de la police, notamment de la franchise prévue à l'article : 2.32 des conditions particulières opposables au tiers lésé en application de l'article L 112-6 du code des assurances soit "20 % sur la tranche de sinistre inférieure à 2 856,26 €, 10 % sur la tranche de sinistre comprise entre 2 856,26 € et 14 281,30 € (')'.
En conséquence, le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a déclaré Mme D... X... née Z... irrecevable en ses demandes à l'encontre de la SARL Amotac et a mis hors de cause la Mutuelle des Architectes Français.
M. Bernard M... et la Mutuelle des Architectes Français seront condamnés in solidum à payer à Mme D... X... les sommes de 85 155,63 € et de 897 € dont les montants n'ont pas été contestés en appel et celle de 11 699,51 € au titre des préjudices induits.
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Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a condamné Mme X... à payer à M. Bernard M... la facture de royalties de 3 200 € outre la TVA en vigueur à la date du paiement, ce qui n'est pas contesté Mme X....
Sur les demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a condamné M. Bernard M... à payer la somme de 4000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens y compris ceux du référé et de l'expertise judiciaire.
M. Bernard M... et la Mutuelle des Architectes Français seront déboutés de ce chef de demande et condamnés solidairement à payer à Mme D... X... la somme de 3 500 € au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.
La Mutuelle des Architectes Français sera déboutée de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
M. Bernard M... et la Mutuelle des Architectes Français seront condamnés solidairement aux dépens de l'instance en appel.
Il sera fait droit à la demande sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile.
Par ces motifs
La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme la décision entreprise en ses dispositions afférentes :
- à la condamnation de Mme D... X... à payer à M. Bernard M... la somme de 3 200 € au titre de la facture des royalties outre la TVA en vigueur à la date du paiement,
- à la condamnation de M. M... à payer la somme de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens y compris ceux du référé et de l'expertise judiciaire.
L'infirmant pour le surplus,
Déclare la société d'architecture Amotac solidairement responsable avec M. Bernard M... des préjudices subis par Mme D... X....
Déboute la Mutuelle des Architectes Français de sa demande de non garantie.
Condamne in solidum M. Bernard M... et la Mutuelle des Architectes Français à payer à Mme D... X... :
- la somme de 85 155,63 € pour la reprise des désordres qui sera revalorisée sur la base du dernière indice du coût de la construction publié par l'INSEE au 13 juillet 2012 en fonction du dernier indice publié à la date du paiement,
- la somme de 897 € pour le coût des travaux de consolidation du mur ouest
- la somme de 11 699,51 € au titre des préjudices induits.
Dit que la garantie de la Mutuelle des Architectes Français s'effectuera dans les limites et aux conditions de la franchise de la police d'assurance de la SARL Amotac.
Condamne in solidum M. Bernard M... et la Mutuelle des Architectes Français à payer à Mme D... X... la somme de 3 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
Déboute la Mutuelle des Architectes Français et M. M... de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne in solidum M. Bernard M... et la Mutuelle des Architectes Français aux dépens de l'appel et autorise la SCP Longin Mariol à procéder au recouvrement direct des dépens dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par M. Castagné, Conseiller, par suite de l'empêchement de Madame Brengard, Président, et par Mme Fittes-Pucheu, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, Pour LE PRESIDENT empêché,
Julie Q... Patrick CASTAGNE