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27/02/2018 | FRANCE | N°16/03396

France | France, Cour d'appel de Pau, 1ère chambre, 27 février 2018, 16/03396


PS/AM



Numéro 18/736





COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre







ARRÊT DU 27/02/2018







Dossier : 16/03396





Nature affaire :



Demande en paiement du prix formée par le constructeur contre le maître de l'ouvrage ou son garant

















Affaire :



SARL Guy FOURNIER



C/



SCI LES GRANDS ESPACES















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Grosse délivrée le :



à :

























RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R Ê T



prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 27 février 2018, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions pr...

PS/AM

Numéro 18/736

COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRÊT DU 27/02/2018

Dossier : 16/03396

Nature affaire :

Demande en paiement du prix formée par le constructeur contre le maître de l'ouvrage ou son garant

Affaire :

SARL Guy FOURNIER

C/

SCI LES GRANDS ESPACES

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 27 février 2018, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 18 décembre 2017, devant :

Monsieur SERNY, magistrat chargé du rapport,

assisté de Madame FITTES-PUCHEU, greffier, et de Madame Estelle DE RUEDA, greffier stagiaire, présentes à l'appel des causes,

Monsieur SERNY, en application des articles 786 et 907 du code de procédure civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :

Madame BRENGARD, Président

Monsieur CASTAGNE, Conseiller

Monsieur SERNY, Conseiller

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

SARL Guy FOURNIER

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Maître Jessica DELCAMBRE, avocat au barreau de MONT DE MARSAN

assistée de Maître Ingrid THOMAS, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMEE :

SCI LES GRANDS ESPACES

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par son gérant, domicilié en cette qualité audit siège social

représentée par Maître François PIAULT, avocat au barreau de PAU

assistée de Maître Thomas RIVIERE, avocat au barreau de BORDEAUX

sur appel de la décision

en date du 14 SEPTEMBRE 2016

rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONT DE MARSAN

Vu l'acte d'appel initial du 04 octobre 2016 ayant donné lieu à l'attribution du présent numéro de rôle 16/03396,

Vu l'assignation du 17 novembre 2016 portant dénonciation à la S.C.I. LES GRANDS ESPACES de l'appel formé par la S.A.R.L. GUY FOURNIER,

Vu le jugement dont appel rendu le 14 septembre 2016 par le tribunal de grande instance de MONT DE MARSAN sous le numéro de rôle 13/1482,

Vu les dernières conclusions transmises par la S.C.I. LES GRANDS ESPACES par voie électronique le 16 novembre 2016,

Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique par la S.A.R.L. GUY FOURNIER par voie électronique le 17 novembre 2017,

Vu l'ordonnance de clôture délivrée le 20 novembre 2011.

Le rapport ayant été fait oralement à l'audience.

La S.C.I. LES GRANDS ESPACES a confié à la S.A.R.L. FOURNIER la réalisation du lot de travaux concernant la plomberie et les sanitaires lors de la construction d'une résidence dénommée les GRANDS ESPACES située au [Adresse 3] cadastré AB [Cadastre 1] ; le marché portait sur un immeuble de 5 niveaux, sous-sol compris, et aboutissait à la réalisation de 36 appartements.

Le prix convenu lors du marché d'origine, stipulé forfaitaire, conclu le 10 février 2004, a été fixé à 127.305,62 euros HT outre 24.951 euros de TVA soit un total de 152.257,52 euros T.T.C. au taux de TVA de l'époque. Trois avenants ont porté ce prix à 175.200,54 euros.

Les travaux ont été réalisés mais la maîtrise d'oeuvre a fait procéder à des modifications des ouvrages prévus, obligeant l'entreprise, selon elle, à reprendre certains ouvrages. La réception est intervenue le 04 octobre 2005. La S.A.R.L. GUY FOURNIER s'estime d'abord créancière d'une somme de 37.163,62 euros due en exécution des contrats comprenant 7.796,80 euros de travaux supplémentaires, ainsi que d'une somme de 9.330,54 euros en règlement de travaux réalisés en cours d'expertise.

C'est par ordonnance de référé du 10 août 2006 que l'expert judiciaire [O] [B] a été désigné sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile avec mission de rechercher d'une part les causes de préjudices subis par le maître de l'ouvrage, d'autre part de faire les comptes entre parties ; l'expertise a donc été instituée avant tout procès après délivrance de diverses assignations qui ont donc interrompu les délais de prescriptions alors en cours, notamment le délai de la prescription civile applicable à l'action en paiement qui entre dans l'objet de la mission d'expertise puisque l'expert a reçu mandat d'apurer les comptes entre parties, et d'apprécier non seulement l'ampleur des préjudices mais le bien fondé des réclamations en paiement de prix.

Le jugement dont appel

Saisi par assignation du 11 décembre 2013 par la S.A.R.L. FOURNIER d'une action en paiement de 46.494,16 euros qui lui resteraient dus sur un marché de travaux, le tribunal de grande instance de MONT DE MARSAN, statuant en lecture du rapport d'expertise instituée entre les parties au présent litige en 2006, puis étendue par diverses ordonnances subséquentes à d'autres parties, et enfin déposé le 12 avril 2013, a déclaré prescrite cette action en paiement.

Sur demande reconventionnelle, le tribunal a condamné la S.A.R.L. FOURNIER à payer à la S.C.I. LES GRANDS ESPACES une indemnité de 7.389,07 euros correspondant au coût de reprise de malfaçons, outre 1.500 euros de frais irrépétibles et les dépens.

Prétentions et moyens des parties

La S.C.I. LES GRANDS ESPACES sollicite la confirmation du jugement dans toutes ses dispositions et réclame paiement d'une somme de 4.500 euros sur le fondement de l'article 700 code de procédure civile.

La S.A.R.L. FOURNIER demande l'infirmation du jugement, soutient que le délai de prescription de son action en paiement a commencé à courir à la date du rapport d'expertise ayant donné mission à l'expert d'apurer les comptes entre parties, invoquant en premier lieu l'application de l'article 2239 du code civil issu de la loi du 17 juin 2008 et en second lieu le fait qu'elle n'a pu connaître le montant de la somme à réclamer qu'à la date du dépôt du rapport qui a donné la mesure de la créance indemnitaire compensable avec ce qu'elle estime comme lui restant dû ; elle demande ainsi paiement de la somme de 46.494,16 euros outre intérêts moratoires contractuels avec anatocisme, paiement de 8.000 euros sur le fondement de l'article 1153 du code civil et enfin paiement de 4.500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile outre dépens de première instance et d'appel.

MOTIFS

Sur l'application immédiate de l'article 2239 du code civil issu de la loi 2008-0561

En l'état du droit de la prescription applicable avant l'entrée en vigueur de la loi 2008-0561, tout délai de prescription interrompu par une assignation en référé était suspendu jusqu'à l'ordonnance de référé désignant l'expert mais la suspension ne se prolongeait pas au-delà, notamment pas durant le cours des opérations d'expertise.

L'expertise initiale, décidée le 10 août 2006, a ensuite été étendue à d'autres parties par quatre autres ordonnances de référé successives du 02 mars 2007, du 04 juin 2007, du 04 février 2008 et du 14 avril 2008, toutes décisions dont on ne sache pas qu'elles aient été frappées d'appel et qui sont toutes intervenues avant la date d'entrée en vigueur de la loi 2008-0561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription.

L'article 26 de cette loi est ainsi rédigé :

I - Les dispositions de la présente loi qui allongent la durée d'une prescription s'appliquent lorsque le délai de prescription n'était pas expiré à la date de son entrée en vigueur. Il est alors tenu compte du délai déjà écoulé.

II- Les dispositions de la présente loi qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la présente loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

III- Lorsqu'une instance a été introduite avant l'entrée en vigueur de la présente loi, l'action est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne. Cette loi s'applique également en appel et en cassation.

Pour la présente espèce, les conséquences de l'entrée en vigueur de ce texte sont les suivantes :

- les assignations en référé ont interrompu les délais de prescription en cours aux dates auxquelles elles ont été délivrées et elles en ont suspendu le cours jusqu'aux dates des ordonnances successives qui ont chacune marqué le point de départ d'un nouveau délai de prescription d'une durée égale à celui qui avait été interrompu, qui était en vigueur avant la loi du 2008-0561 ; il s'agit du délai de prescription applicable à l'action contractuelle en paiement, étant relevé que la mission d'expertise portait sur l'action en paiement en ce qu'elle prévoyait depuis l'origine de faire les comptes entre parties, ce qui impliquait l'appréciation du solde de prix par comparaison de ce qui était exécuté et de ce qui ne l'était pas, avant toute compensation avec des dommages-intérêts liés à l'action réciproque en responsabilité. Par conséquent, aucun délai de prescription en cours n'était donc suspendu au moment où la loi est entrée en vigueur, puisque les suspensions avaient cessé à la date de chaque ordonnance rendue avec la conséquence que chacune de ces décisions faisait repartir chacune un nouveau délai de prescription concernant l'action en paiement du prix du marché, dont le solde à payer entrait dans la mission de l'expert.

La loi 2008-0561 du 17 juin 2008 a créé un régime nouveau ; les dispositions de l'article 2239 du code civil dans sa rédaction applicable à compter de cette date, institue la prolongation de l'effet suspensif des assignations au-delà des décisions ordonnant des expertises en prolongeant cette suspension pour toute la durée d'exécution des expertises judiciaires ainsi ordonnées (durée au besoin majorée d'une durée supplémentaire maximale de 6 mois) ; mais, en l'absence de disposition transitoire spécifique prévoyant l'application immédiate aux expertises judiciaires en cours, les délais de prescriptions qui avaient recommencé à courir depuis la dernière ordonnance et qui, lors de la réforme, courraient encore entre la S.A.R.L. FOURNIER et la S.C.I. LES GRANDS ESPACES n'ont pas été suspendus par l'entrée en vigueur de cette nouvelle loi, laquelle n'a pas d'effet rétroactif et ne peut pas être déclarée applicable aux expertises judiciaires dont la teneur de la mission et le périmètre avait été définitivement déterminés en juin 2008.

En revanche, la loi a eu pour effet immédiat d'appliquer à l'action en paiement de la S.A.R.L. FOURNIER le nouveau délai de prescription de droit commun de 5 ans à l'action en paiement de l'entreprise, quel qu'ait pu être la durée du délai antérieurement applicable ; comme il n'y a eu aucun acte interruptif de prescription de l'action en paiement entre l'entrée en vigueur du nouveau régime de prescription à compter du 19 juin 2008 et la date de l'assignation du 11 décembre 2013 au fond ayant saisi le tribunal de MONT DE MARSAN, l'action en paiement de la S.A.R.L. FOURNIER est donc aujourd'hui prescrite pour toutes les sommes contractuellement dues avant la date du 11 décembre 2008. La requête en injonction de payer introduite le 03 juin 2008 n'a eu aucun effet interruptif pour avoir donné lieu à une ordonnance de rejet du 21 juin 2013 par le magistrat à qui elle avait été présentée.

Ainsi à la date d'entrée en vigueur de la nouvelle loi, tant les délais de prescription de l'action en responsabilité et réparation que ceux de l'action réciproque en paiement du solde de prix courraient contre les parties au contrat, et ce même si les opérations d'expertise étaient en cours concernant ces deux actions ; la nouvelle loi, qui n'a pas d'effet rétroactif, n'a pas eu pour effet d'en suspendre le cours jusqu'à la date de dépôt du rapport ; décider le contraire reviendrait à donner un effet rétroactif à la loi en appliquant l'article 2239 nouveau à une situation dans laquelle les décisions de justices successives rendues en application de ce texte avaient fait cesser l'effet suspensif de prescription des assignations en référé, et donc à donner rétroactivement un effet suspensif de prescription à des décisions qui n'en avaient pas lorsqu'elles ont été rendues.

Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a énoncé que l'article 2239 du code civil issu de la loi 2008-0531 ne trouvait pas à s'appliquer en l'espèce et que l'expertise en cours depuis une date antérieure à cette entrée en vigueur n'avait pas eu pour effet de suspendre les délais de prescriptions en cours jusqu'à la date de dépôt du rapport d'expertise, éventuellement rallongée de 6 mois.

Sur le point de départ de la prescription de l'action en paiement de l'entreprise

S'agissant de l'action en paiement, la S.A.R.L. FOURNIER se prévaut d'une créance liquide et exigible de 46.494,16 euros qui correspond :

- au montant du certificat de paiement n° 11 validé le 28 juin 2005 pour 8.810,09 euros,

- au montant d'un DGD établi le 20 octobre 2005 pour le lot plomberie pour 11.597,70 euros,

- au montant d'un DGD établi le 20 octobre 2005 pour le lot VMC pour 8.959,03 euros,

- au montant du prix de travaux supplémentaires pour 7.796,80 euros,

- au montant de travaux réalisés en cours d'expertise pour 9.330,54 euros.

A) prescription et compensation

La S.A.R.L. FOURNIER soutient encore que le point de départ du délai de prescription applicable à son action en paiement s'est trouvé reporté jusqu'à la date de dépôt du rapport d'expertise dont dépendait la somme qu'elle serait appelée à réclamer au maître de l'ouvrage.

Le moyen n'est pas fondé, car il confond le délai de prescription applicable à l'action en paiement d'un prix d'une créance liquide et exigible avec l'action tendant à la détermination du solde à payer en numéraires après détermination judiciaire de la créance réciproque en dommages-intérêts qui permet de déterminer ce solde restant du après compensation judiciaire. Sous l'aspect de la liquidation du préjudice dû à son cocontractant, l'entreprise n'agit pas en paiement mais défend à une action en responsabilité et en liquidation du préjudice, ce qui détermine le solde à payer après compensation avec le solde qu'elle entend réclamer. Certes ce solde était en discussion devant l'expert jusqu'au dépôt de son rapport, mais il n'y a eu aucune impossibilité d'agir et l'expertise en cours ne constituait pas un cas d'impossibilité d'agir créant un effet suspensif de prescription dans le droit antérieur à celui mise en vigueur par la loi du 17 juin 2008.

L'action en paiement du prix et l'action en responsabilité pouvaient au demeurant être menées distinctement en vue de l'obtention de deux titres réciproques, le second obtenu opérant permettant une compensation avec le premier à concurrence du montant le plus faible ; les délais de prescription concernant chacune de ces actions sont distincts et ont chacun leur propre point de départ ; la S.A.R.L. FOURNIER n'a d'ailleurs pas manqué de tirer le conséquences de cette autonomie puisqu'elle a tenté de recouvrer unilatéralement le prix en recourant à une procédure d'injonction de payer. Elle ne peut donc pas soutenir que les opérations d'expertise l'avaient empêchée d'agir en paiement.

B) paiement des prestations rattachées au marché initial et paiement de prestations postérieures à la réception du 04 octobre 2005

Le contrat d'entreprise souscrit le 04 février 2010 a pris fin le 04 octobre 2005 ; à cette date en effet, sont intervenues les actes de réception ; la S.A.R.L. FOURNIER n'y a pas assisté mais elle a été convoquée ; elle n'a pas signé l'acte de réception sur lequel le maître de l'ouvrage a porté une liste de réserves, avant de prendre possession des lieux en considérant que le contrat d'entreprise était achevé ; la S.A.R.L. FOURNIER ne conteste d'ailleurs pas que des réserves aient été faites à l'égard des prestations qu'elle avait fournies ; elle utilise elle-même le terme de réserves et de levée de réserves dans ses conclusions, de sorte qu'elle a, à tout le moins ratifié l'acte de réception intervenu le 04 octobre 2005 et donc la fin du contrat, lequel ne s'est pas poursuivi au-delà ; elle n'était donc plus tenue à compter de cette date que de la garantie de parfait achèvement et de ses obligations de réparation des désordres ayant fait l'objet de réserves ; elle s'y est d'ailleurs employée, ratifiant ainsi par ses actes les documents par lesquels le maître de l'ouvrage avait déclaré accepter ce qu'elle avait fait, sauf à ce que les réserves soient levées. La réception des ouvrages est donc incontestable.

Le marché de travaux liant les parties a donc pris fin le 04 octobre 2005 par un acte de réception ; il résulte de la fin du contrat qu'elle était en droit de facturer le prix des prestations effectivement réalisées en exécution du marché initial du 10 février 2004, et que le point de départ du délai de prescription pour réclamer paiement du prix lui restant dû sur la base de marché a bien couru à compter de la fin du contrat intervenue le 04 octobre 2005.

A la date de l'assignation au fond ayant saisi le tribunal de première instance, aucun acte interruptif du délai légalement applicable n'était donc intervenu depuis le 14 avril 2008 (point de départ du délai de prescription alors applicable) alors que plus de 5 années s'étaient écoulées depuis la date d'entrée en vigueur de cette nouvelle loi postérieure à l'ordonnance qui avait fait cesser l'effet suspensif des assignations ; la prescription est donc opposable à la demande en ce qu'elle porte sur la somme de 37.163,62 euros, qui est la seule partie de la demande en paiement dont on soit certain que le recouvrement pouvait en être demandé en justice avant le 11 décembre 2008.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a retenu la prescription mais la confirmation ne vaut que pour les chefs de demande limitée à 37.163,62 euros.

c) paiement des prestations exécutées en cours d'expertise

L'entreprise FOURNER réclame aussi la somme de 9.330,54 euros en réglement de travaux qui auraient été réalisés durant l'expertise sans qu'on en connaisse la date exacte. Or, la prescription n'est pas opposable à cette demande, un prix ne peut être dû que si celui qui en réclame paiement prouve l'existence d'un nouveau contrat distinct du

marché initial. La S.A.R.L. FOURNIER doit prouver l'existence de ce marché complémentaire, puis sa réalisation effective alors que le marché du 10 février 2004 avait été exécuté et que l'ouvrage a été considéré comme achevé et réceptionné par le maître de l'ouvrage. Or, l'existence d'un tel contrat complémentaire de celui du 04 octobre 2005 n'est pas prouvée. Il n'existe aucun écrit dont résulterait un accord de volontés pour la réalisation de prestations supplémentaires pour un prix déterminé s'ajoutant aux prestations du marché du 10 février 2004 ; il est certain que des travaux ont été réalisés durant l'expertise par la S.A.R.L. FOURNIER et en un temps dont il n'est pas démontré qu'il soit prescrit ; mais la cour n'est pas mise en situation de vérifier si les prestations dont s'agit correspondent à des travaux nouveaux, ou s'ils correspondent seulement à la levées de réserves par la S.A.R.L. FOURNIER ; dans le second cas, cette entreprise n'a pas droit à rémunération car elle ne fait alors que réparer en nature un préjudice qui relève de sa propre responsabilité.

L'entreprise n'a pas davantage droit à rémunération du maître de l'ouvrage pour le cas où ces prestations correspondraient à des reprises imputables à d'autres entreprises intervenues sur l'ouvrage ; elle a certes droit à rémunération mais elle n'est pas en situation d'en demander paiement au maître de l'ouvrage qui subit le préjudice, sauf s'il y a pas préalablement consenti, ce qui n'est pas le cas ; pour un tel travail, le maître de l'ouvrage n'est pas son cocontractant ; l'obligation relève par conséquent soit d'un compte interentreprises sur lequel aucun renseignement n'est fourni, soit d'une action en indemnisation visant l'entreprise défaillante dont elle a réparé les prestations défaillantes.

La S.A.R.L. FOURNIER ne démontre donc pas l'obligation de payer la somme de 9.330,54 euros dont elle réclame l'exécution à la S.C.I. LES GRANDS ESPACES. Par application de l'article 1315 du code civil, elle sera déboutée de ce chef de demande.

Sur l'action en réparation du maître de l'ouvrage

S'agissant de la demande en paiement de dommages-intérêts réclamés par la S.C.I. LES GRANDS ESPACES à la S.A.R.L. FOURNIER, le jugement doit être confirmé pour avoir relevé que la somme de 7.389,07 euros correspond au coût de reprise des malfaçons des appartements 409, 410 et 411 qui n'avaient jamais été levées. Il s'agit donc bien d'un préjudice dont la S.A.R.L. FOURNIER doit encore réparation.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

En synthèse

Le jugement, qui a justement relevé que les ordonnances de référé étaient toutes antérieures à l'entrée en vigueur de la loi portant réforme de la prescription, sera confirmé en ce qu'il a accueilli le moyen de prescription soulevé par la S.C.I. LES GRANDS ESPACES, mais ce moyen n'est applicable à la demande que dans la limite de 37.163,62 euros.

Pour ce qui est de la demande complémentaire de 9.330,54 euros pour laquelle la prescription n'est pas démontrée, le moyen d'irrecevabilité retenu par le tribunal sera rejetée mais la demande ainsi déclarée recevable sera jugée non fondée.

Le jugement sera aussi confirmé dans ses dispositions statuant sur l'action en réparation du maître de l'ouvrage, ainsi que sur dans toutes ses dispositions annexes.

L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 code de procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire en dernier ressort :

* confirme partiellement le jugement en ce qu'il a retenu la prescription de la demande en paiement de la S.A.R.L. FOURNIER mais dit que la prescription n'est acquise que pour l'action en paiement d'une somme de 37.163,62 euros,

* rejette le moyen de prescription pour le surplus de la demande portant sur 9.330,54 euros pour cause d'indétermination de la date du point de départ du délai de prescription,

* mais déclare mal fondée cette demande complémentaire de 9.330,54 euros et la rejette,

* confirme le jugement en toutes ses autres dispositions,

!

* dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamne la S.A.R.L. FOURNIER aux dépens dont distraction au bénéfice de Me PIAULT.

Le présent arrêt a été signé par Mme Marie-Florence Brengard, Président, et par Mme Annie Miqueu, adjoint administratif, faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

Annie MIQUEU Marie-Florence BRENGARD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 16/03396
Date de la décision : 27/02/2018

Références :

Cour d'appel de Pau 01, arrêt n°16/03396 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-02-27;16.03396 ?
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