La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/02/2018 | FRANCE | N°15/04811

France | France, Cour d'appel de Pau, 1ère chambre, 20 février 2018, 15/04811


MARS/AM



Numéro 18/672





COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre







ARRÊT DU 20/02/2018







Dossier : 15/04811





Nature affaire :



Demande relative à un droit de passage

















Affaire :



[I] [X] [J] [N]



C/



[Y] [U]



























Grosse délivrée le :

r>
à :























RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R Ê T



prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 20 février 2018, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.







* ...

MARS/AM

Numéro 18/672

COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRÊT DU 20/02/2018

Dossier : 15/04811

Nature affaire :

Demande relative à un droit de passage

Affaire :

[I] [X] [J] [N]

C/

[Y] [U]

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 20 février 2018, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 11 décembre 2017, devant :

Madame ROSA SCHALL, magistrat chargé du rapport,

assisté de Madame FITTES-PUCHEU, greffier, et de Madame Juinna SUORM, présentes à l'appel des causes,

Madame ROSA SCHALL, en application des articles 786 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :

Madame BRENGARD, Président

Monsieur CASTAGNE, Conseiller

Madame ROSA SCHALL, Conseiller

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

Madame [I] [X] [J] [N]

née le [Date naissance 1] 1950 à [Localité 1]

de nationalité française

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée et assistée de Maître Pierre-Bernard DUCAMP, avocat au barreau de MONT DE MARSAN

INTIME :

Monsieur [Y] [U]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représenté et assisté de Maître Thomas GACHIE, avocat au barreau de MONT DE MARSAN

sur appel de la décision

en date du 16 DECEMBRE 2015

rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONT DE MARSAN

Faits et procédure :

Mme [I] [N] possède sur la commune de [Localité 1] ([Localité 2]) un ensemble foncier à vocation agricole sur lequel se situe une grange.

Cet ensemble est constitué des parcelles cadastrées D.[Cadastre 1], D.[Cadastre 2], D.[Cadastre 3] et D.[Cadastre 4].

Le 7 mai 2015, Mme [N] a passé avec Melle [Z] et M. [U] un compromis de vente d'une partie de cette propriété et de la grange, la vente porte sur les parcelles D.[Cadastre 1],D.[Cadastre 2] et sur les nouvelles parcelles [Cadastre 5] et [Cadastre 6] issues de la division des parcelles [Cadastre 3] et [Cadastre 4], suivant document d'arpentage dressé le 3 juin 2015.

Mme [N] conserve la propriété des nouvelles parcelles [Cadastre 7] et [Cadastre 8].

Cette vente a été réitérée suivant acte authentique dressé le 18 juin 2015 par Me [M], notaire à [Localité 3] (40).

L'acte sous seing privé du 7 mai 2015 fait expressément référence à une autorisation de voirie suivant arrêté municipal en date du 16 août 2013 dont il résulte que le Maire de [Localité 1] autorisait Mme [N] à créer un accès supplémentaire d'environ 10 mètres de long à la voie communale, passage destiné à la desserte du terrain à bâtir et de la grange vendue aux consorts [Z]-[U] pour être transformée en maison d'habitation.

Cette autorisation de voirie au profit de Mme [N] a été reprise par arrêté municipal en date du 5 août 2014 avec des réserves concernant le risque d'éboulement et de glissement de terrain.

Par arrêté en date du 18 septembre 2015, M. le Maire de [Localité 1] rapportait cette décision et interdisait la création d'un passage d'accès aux parcelles [Cadastre 1] et [Cadastre 2].

Par acte d'huissier en date du 18 novembre 2015, M. [Y] [U] a fait assigner Mme [I] [N] devant le tribunal de grande instance de Mont de Marsan afin de faire constater que le passage de la voie publique vers la parcelle D [Cadastre 6] lui appartenant, par la parcelle cadastrée D [Cadastre 8] appartenant à Mme [N] constitue une servitude de passage par destination du père de famille, pour obtenir la condamnation de cette dernière à laisser libre accès à la parcelle D.[Cadastre 6] propriété des consorts [U]-[Z], sur une largeur de 6 mètres sous astreinte et pour obtenir la condamnation de Mme [N] à lui payer diverses sommes à titre de dommages-intérêts.

Subsidiairement, M. [U] soutient dans son exploit introductif d'instance que la parcelle D.[Cadastre 6] est enclavée et que le fonds dont Mme [N] cadastré D.[Cadastre 8] lui doit servitude de passage.

Par jugement en date du 16 décembre 2015, le tribunal de grande instance de Mont de Marsan a constaté l'état d'enclave de la parcelle D.[Cadastre 6] appartenant à Melle [Z] et M. [U] et, sur le fondement de l'article 682 du code civil, a dit que cette parcelle bénéficie d'une servitude légale de passage vers la voie communale nº 2 sur une largeur de 6 mètres depuis le portail séparant cette parcelle de celle appartenant à Mme [N] cadastrée D.[Cadastre 8] jusqu'au portail situé en bordure de la voie communale, en passant au plus court sur la Cour gravillonnée séparant ces portails, a dit que Mme [N] doit laisser libre le passage ainsi déterminé sous astreinte de 250 € par infraction constatée, et a débouté M. [U] de sa demande de dommages-intérêts.

Mme [N] a été condamnée à payer à M. [U] une indemnité de 400 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à payer à Me GACHIE, conseil de M. [U], la somme de 1 200 € en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ainsi qu'aux dépens.

Suivant déclaration enregistrée au greffe de la Cour le 31 décembre 2015, Mme [N] a relevé appel de cette décision.

Moyens et prétentions des parties :

Dans ses dernières conclusions en date du 27 octobre 2017, Mme [I] [N] demande à la Cour, avant dire droit, d'ordonner la mise en cause par M. [U] de tous les propriétaires confrontant sa propriété afin de déterminer le passage le plus court et le moins dommageable pour accéder à sa parcelle et subsidiairement de réformer la décision déférée, de débouter M. [U] de ses demandes. Elle réclame 4.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle soutient qu'il n'existe pas en l'espèce de servitude par destination du père de famille, qu'elle n'a accordé aucune servitude conventionnelle, que le tracé de la servitude retenu par le premier juge pour cause d'enclave n'est pas conforme aux dispositions légales puisqu'il existe d'autres possibilités moins dommageables.

Dans ses dernières conclusions en date du 15 novembre 2016, M. [Y] [U] demande à la Cour, à titre principal, de réformer partiellement le jugement déféré, de constater que le passage de la voie publique vers la parcelle D [Cadastre 6] lui appartenant, par la parcelle D [Cadastre 8] appartenant à Mme [N], constitue une servitude par destination du père de famille, de condamner Mme [N] à laisser libre accès à sa parcelle D [Cadastre 6], sans délai et sous astreinte de 250 € par infraction constatée,de l'autoriser à faire réaliser sur la propriété de Mme [N] des travaux d'installation de sonnette et de pose de cailloux, de la condamner à lui payer 3.000 € de dommages intérêts pour trouble de jouissance de son habitation du 18 juin au 22 décembre 2015, 1.000 € pour préjudice moral, 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et 1.200 € sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridictionnelle.

M. [U] demande également à la Cour de constater que le bien immobilier vendu par Mme [N] est affecté d'un vice caché, de déclarer fondée son action estimatoire et condamner Mme [N] à lui payer la somme de 78.600 € et 1.000 € pour préjudice moral.

Il demande subsidiairement la confirmation du jugement déféré qui a retenu l'état d'enclave de sa parcelle et sollicite une mesure d'expertise pour évaluer les travaux nécessaires afin de remédier au vice caché ;il demande subsidiairement à la Cour d'ordonner l'appel en cause de tous les propriétaires confrontant sa propriété pour qu'il soit statué sur sa demande d'expertise judiciaire concernant l'assiette de la servitude légale de passage pour enclave.

L'ordonnance de clôture est en date du 10 novembre 2017.

SUR QUOI

A titre préalable, au vu des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile qui prévoit qu' « à peine d'irrecevabilité soulevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la Cour de nouvelles prétentions » il convient de constater que, pour la première fois en cause d'appel, et même après un premier jeu de conclusions du 4 mai 2016 qui ne le mentionnait pas, M. [U] a fait déposer, dans ses dernières conclusions du 15 novembre 2016, et cela à titre principal, des demandes fondées sur les dispositions des articles 1641 et suivants du code civil ayant pour objet la condamnation de Mme [N] à des dommages-intérêts en réparation d'un vice caché viciant l'acte de vente de ses parcelles et de sa grange.

De telles demandes ne tendent nullement aux mêmes fins que la demande initiale et que les autres demandes de M. [U] qui réclame un droit de passage sur la parcelle de M. [N] soit au titre de l'article 692 du code civil, par destination du père de famille, soit au titre de l'article 682 du même code, au titre de l'état d'enclave.

Il convient en conséquence de déclarer irrecevables les demandes de M. [U] sur ce nouveau fondement juridique.

Au fond,

Sur la demande fondée sur les articles 692 et suivants du code civil :

S'il est vrai qu'au terme des dispositions de l'article 692 du code civil, la destination du père de famille vaut titre à l'égard des servitudes continues et apparentes, il n'en demeure pas moins qu'il n' y a une telle destination que lorsqu'il est prouvé que les deux fonds actuellement divisés ont appartenu au même propriétaire, et que c'est par lui que les choses ont été mises dans l'état duquel résulte la servitude, ainsi que le rappelle l'article 693.

Or en l'espèce, la deuxième condition exigée pour la mise en 'uvre de ce texte n'est pas remplie ; en effet, il résulte de l'ensemble des pièces communes aux deux parties que :

le compromis de vente du 7 mai 2015 se réfère expressément à l'arrêté du maire de [Localité 1] en date du 16 août 2013 réitéré le 5 août 2014 autorisant Mme [N] à créer « un accès supplémentaire d'environ 10 mètres de long (voie communale n° 2), ce passage permettrait la desserte du terrain à bâtir et de la grange destinée à être transformée en maison d'habitation. »,

l'acte authentique de vente du 18 juin 2015, qui ne reprend pas cette rédaction,précise en page 9, que l'accès au terrain devra faire l'objet d'une demande de permission de voierie auprès de la mairie de [Localité 1],

cet acte notarié comporte la mention selon laquelle le terrain est grevé des servitudes d'utilité publique concernant l'aléa risque sismique et l'aléa mouvement de terrain,

par arrêté en date du 18 septembre 2015, M. le Maire de [Localité 1] a interdit la création de l'accès des parcelles vendues sur la voie communale n° 2 en considérant que l'aménagement d'un tel accès risquait de fragiliser les parcelles en surplomb, qu'il existait un risque de glissement de terrain et que les conditions qui avaient permis l'octroi d'une autorisation le 5 août 2014 n'étaient plus réunies,

M. [U] n'a pas fait de recours à l'encontre de cet arrêté.

Il résulte par conséquent de l'ensemble de ce qui précède que ce n'est pas par le fait de Mme [N], propriétaire des deux fonds divisés, que les choses ont été mises dans l'état duquel résulterait la servitude revendiquée par M. [U].

M. [U] doit être débouté de ses demandes sur ce fondement.

Sur la demande fondée sur l'article 682 du code civil :

Au terme des dispositions de l'article 682 du code civil, le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n'a sur la voie publique aucune issue, ou qu'une issue insuffisante, soit pour l'exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d'opérations de construction ou de lotissement, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d'une indemnité proportionnée au dommage qu'il peut occasionner.

En outre l'article 684 du code civil prévoit que si l'enclave résulte de la division d'un fonds par suite d'une vente, d'un échange, d'un partage ou de tout autre contrat, le passage ne peut être demandé que sur les terrains qui ont fait l'objet de ces actes et l'article 682 n'est applicable que dans l'hypothèse où un passage suffisant sur les fonds divisés ne peut pas être établi.

En l'espèce, il n'est pas contesté que, la vente du 18 juin 2015 porte sur les parcelles D.[Cadastre 1],D.[Cadastre 2] et sur les nouvelles parcelles [Cadastre 5] et [Cadastre 6], actuelle propriété [U]-[Z], elles-mêmes issues de la division des parcelles [Cadastre 3] et [Cadastre 4], propriété de Mme [N] suivant document d'arpentage dressé le 3 juin 2015.

Il est également établi par la lettre en date du 19 avril 2013 adressée au Maire de la commune de [Localité 1] par M. [O] géomètre-expert que l'autorisation donnée à Mme [N] de créer un accès supplémentaire à la voie communale n° 2 lui a été accordée pour permettre la desserte du terrain à bâtir et de la grange destinée à être transformée en habitation.

Le procès verbal de constat dressé par Me [G] huissier de justice le 2 octobre 2015 établit formellement que la propriété de M. [U] et Mme [Z] est enclavée comme ne disposant d'aucun accès à la voie publique ni au nord ni au sud ni à l'ouest et que du côté Est, la propriété de M. [U] n'a pas d'accès à la voie publique sauf à passer par le portail qui sépare le fonds [N] du fonds [U]-[Z] puis à traverser la cour de Mme [N].

De ce qui précède, il résulte que le fonds [N]-[Z] est enclavé et par application de l'article 684 du code civil, la servitude de passage doit s'exercer sur le fonds de Mme [N] selon les modalités fixées par le premier juge.

Il convient donc de débouter Mme [N] de l'ensemble de ses demandes et de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf à requalifier le fondement juridique de la décision, à savoir les dispositions combinées des articles 682 et 684 du code civil.

M. [U] ne rapporte ni la preuve de l'existence d'un préjudice spécifique de jouissance ni la preuve de la nécessité d'effectuer des travaux particuliers pour la desserte de sa propriété. Il doit être débouté de ses demandes.

L'aide juridictionnelle a été retirée à M. [U] par décision du 23 septembre 2016 ; la demande au titre des frais irrépétibles sur le fondement de la loi du 10 juillet 1991 sera rejetée.

Mme [N] qui succombe sera condamnée aux entiers dépens et à payer la somme de 2.000 € à M. [U] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Vu l'article 564 du code de procédure civile,

Déclare irrecevables les demandes présentées par M. [U] dans ses conclusions du 15 novembre 2016 sur le fondement des articles 1641 et suivants du code civil,

Déboute Mme [I] [N] de l'ensemble de ses demandes,

Déboute M. [U] de ses demandes de dommages-intérêts et de travaux,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 16 décembre 2015 par le tribunal de grande instance de Mont de Marsan, sauf en ce qui concerne les mentions relatives à l'aide juridictionnelle au bénéfice de M. [U],

Rejette la demande de M. [U] sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991,

Condamne Mme [N] aux entiers dépens et à payer à M. [U] la somme de 2.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Mme Marie-Florence BRENGARD, Président, et par Mme Julie FITTES-PUCHEU, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

Julie FITTES-PUCHEU Marie-Florence BRENGARD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 15/04811
Date de la décision : 20/02/2018

Références :

Cour d'appel de Pau 01, arrêt n°15/04811 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-02-20;15.04811 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award