AB/AM
Numéro 15/4824
COUR D'APPEL DE PAU
1ère Chambre
ARRÊT DU 14/12/2015
Dossier : 14/02773
Nature affaire :
Demande en garantie des vices cachés ou tendant à faire sanctionner un défaut de conformité
Affaire :
[H] [V]
C/
[Z] [F]
Grosse délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 14 décembre 2015, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 12 octobre 2015, devant :
Monsieur BILLAUD, magistrat chargé du rapport,
assisté de Madame VICENTE, greffier, présente à l'appel des causes,
Monsieur BILLAUD, en application des articles 786 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :
Madame PONS, Président
Monsieur CASTAGNE, Conseiller
Monsieur BILLAUD, Conseiller
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANTE :
Madame [H] [V]
née le [Date naissance 1] 1943 à [Localité 1]
de nationalité française
[Adresse 1]
[Adresse 1]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2014/004568 du 29/10/2014 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PAU)
représentée par Maître Alexa LAURIOL, avocat au barreau de PAU
assistée de Maître Mireille SAUGE, avocat au barreau de PAU
INTIME :
Monsieur [Z] [F]
né le [Date naissance 2] 1962 à [Localité 2]
de nationalité française
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représenté et assisté de Maître Dominique CHEVALLIER-FILLASTRE, avocat au barreau de TARBES
sur appel de la décision
en date du 24 AVRIL 2014
rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE TARBES
Faits et procédure :
Le 7 mai 2011, M. [Z] [F] a acquis de Mme [V] un véhicule d'occasion Alfa Roméo GT Sélective ayant parcouru 123 400 km pour le prix de 8 000 € TTC.
Le 9 mai 2011, ce véhicule tombait en panne après avoir parcouru 500 kms, cette panne moteur ayant pour origine la rupture de la courroie de distribution.
Dans le cadre d'une procédure de référé, par ordonnance en date du 20 mars 2012, M. [S] était désigné en qualité d'expert, il déposait son rapport le 20 juillet 2012.
Par acte d'huissier du 29 janvier 2013, M. [Z] [F] a fait assigner Mme [H] [V] devant le tribunal de grande instance de Tarbes afin d'obtenir la résolution de la vente contre restitution du prix de 8 000 € outre le paiement de la somme de 11 540,74 € à titre de dommages-intérêts pour ses frais.
Par jugement en date du 24 avril 2014, le tribunal de grande instance de Tarbes a prononcé la résolution de la vente, ordonné la restitution du véhicule contre restitution du prix de vente et condamné Mme [V] aux entiers dépens y compris les frais d'expertise.
Suivant déclaration reçue le 17 juillet 2014 au greffe de la Cour, Mme [V] a relevé appel de cette décision.
Moyens et prévention des parties :
Dans ses dernières conclusions en date du 9 octobre 2014, Mme [V] demande à la Cour d'infirmer le jugement déféré, de débouter M. [F] de toutes ses demandes en l'absence de vices cachés, et subsidiairement, de condamner M. [F] à lui payer une indemnité de 3 000 € pour compenser la dépréciation du véhicule et d'ordonner la compensation avec le prix à restituer, de dire que M. [F] sera tenu de rapatrier le véhicule à son domicile et de dire que les frais de gardiennage resteront à sa charge. Elle réclame 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions du 2 décembre 2014, M. [F] demande à la Cour de confirmer la décision entreprise sur le fondement de l'article 1644 du code civil et subsidiairement si la garantie des vices cachés n'était pas retenue, de dire que la responsabilité de Mme [V] est engagée pour manquement à son obligation de délivrance sur le fondement de l'article 1604 du code civil, de prononcer la résolution de la vente et la restitution du prix de 8 000 € contre restitution du véhicule, de condamner Mme [H] [V] aux entiers dépens y compris les frais d'expertise outre 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est en date du 1er septembre 2015.
SUR QUOI
Il est constant que le 7 mai 2011, Mme [V] a vendu à M. [F] le véhicule Alfa Roméo de type GT dont elle était propriétaire depuis le 12 janvier 2009 ce véhicule ayant parcouru 123 400 kms, moyennant le prix de vente négocié de 8 000 € au lieu de 9 000 €.
On doit également considérer comme constant, au vu du carnet d'entretien du véhicule, des factures fournies, des nombreux témoignages et des photographies figurant au dossier, que ce véhicule était en parfait état lors de la vente.
Deux jours après la vente et 500 kms parcourus, l'acquéreur est tombé en panne avec ce véhicule à cause de la rupture de la courroie de distribution.
La cause de la panne ne fait l'objet d'aucune discussion entre les parties ; elle est formellement établie par les deux expertises figurant au dossier, celle de M. [J] réalisée le 21 juin 2011 par l'expert de M. [F] et l'expertise judiciaire contradictoire de M. [S] qui précise que l'origine de cette rupture est le vieillissement du caoutchouc, que la casse moteur aurait pu être évitée si les préconisations du constructeur avaient été respectées, à savoir le remplacement de la courroie de distribution tous les 120 000 kms ou 5 ans, au premier des deux termes échu.
Cet expert précise qu'il n'y avait aucun signe avant-coureur permettant à M. [F] de se rendre compte que la courroie allait céder aussi rapidement.
Il dit que les défauts de carrosserie sur le véhicule sont purement esthétiques et n'entachent en rien son utilisation.
Il convient également de relever que M. [F] a adressé un dire à son expert M. [J] duquel il ressort expressément que des discussions ont eu lieu entre les parties avant de conclure la vente, que le prix était, initialement fixé à 9 000 €, qu'une offre de 8 000 € a été acceptée par M. [V] car, dit M. [F], « je déplorais l'état de la carrosserie et l'incertitude de la distribution ».
Par conséquent, il est établi que M. [F] a acquis le véhicule litigieux moyennant un rabais du prix de vente en considération de l'incertitude du changement de la courroie de distribution.
L'expertise judiciaire a par ailleurs démontré qu'en tout état de cause, M. [F] n'aurait pas eu le temps de faire changer la courroie litigieuse et que la panne aurait eu lieu compte tenu de sa vétusté, même si le véhiculé était resté entre les mains de Mme [V].
En effet, il est constant que le véhicule litigieux a été mis en circulation le 24 juin 2004 ; par conséquent, la courroie devait être changée avant le 24 juin 2009. La vente a eu lieu le 7 mai 2011 sans que cette opération mécanique essentielle ait été faite par Mme [V] qui y était tenue au titre de l'obligation d'entretien exigée par le constructeur.
En droit, le vendeur n'est pas tenu à garantie sur le fondement des vices cachés et de l'article 1641 du code civil lorsque l'acheteur a pu se convaincre lui-même du vice dont la chose était affectée.
Toutefois, la non-conformité de la chose vendue est un manquement à l'obligation de délivrance prévue par les dispositions de l'article 1604 du code civil.
Il y a lieu de considérer en droit que manque à son obligation de délivrance conforme, le vendeur d'une automobile qui était tenu à une obligation d'entretien prévoyant le changement de la courroie de distribution après 5 ans d'usage et qui n'y a pas procédé occasionnant pour l'acquéreur des réparations chiffrées par l'expert à 3 365,59 €.
La résolution de la vente pour vice caché n'est donc pas encourue.
Le jugement déféré sera infirmé ; le fondement juridique de l'action subsidiairement soutenu par M. [F], à savoir l'article 1604 du code civil, sera retenu.
Pour la mise en 'uvre de ce texte, il est constant que le juge dispose d'un pouvoir souverain d'appréciation pour fixer les modalités de réparation du préjudice résultant d'un tel défaut de conformité.
Il y a lieu de condamner Mme [V] à payer à M. [F] la somme de 3 365,59 € chiffrée par l'expert.
Mme [V] qui succombe au principal doit les entiers dépens en ce compris les frais et honoraires de l'expert [S] ainsi que la somme de 1 000 € à M. [F] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Infirme le jugement rendu le 24 avril 2014 par le tribunal de grande instance de Tarbes,
Condamne Mme [H] [V] à payer à M. [F] la somme de 3 365,59 € (trois mille trois cent soixante cinq euros et cinquante neuf centimes) avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
La condamne aux entiers dépens en ce compris les frais et honoraires de l'expert,
La condamne à payer à M. [F] la somme de 1 000 € (mille euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par M. Castagné, Conseiller, par suite de l'empêchement de Mme Pons, Président, et par Mme Vicente, Greffier, conformément aux dispositions de l'article 456 du code de procédure civile, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, POUR LE PRESIDENT EMPECHE,
Sandra VICENTE Patrick CASTAGNE