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14/12/2015 | FRANCE | N°14/02468

France | France, Cour d'appel de Pau, 1ère chambre, 14 décembre 2015, 14/02468


FP/AM



Numéro 15/4828





COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre







ARRET DU 14/12/2015







Dossier : 14/02468





Nature affaire :



Demande en revendication d'un bien mobilier















Affaire :



[H] [Z]



C/



[E] [Z]

[L] [S]



























Grosse délivrée le :



à :



















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R E T



prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 14 décembre 2015, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.







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FP/AM

Numéro 15/4828

COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRET DU 14/12/2015

Dossier : 14/02468

Nature affaire :

Demande en revendication d'un bien mobilier

Affaire :

[H] [Z]

C/

[E] [Z]

[L] [S]

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 14 décembre 2015, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 13 octobre 2015, devant :

Madame PONS, Président, magistrat chargé du rapport conformément à l'article 785 du code de procédure civile

Monsieur CASTAGNE, Conseiller

Madame NICOLAS, Conseiller

assistés de Madame VICENTE, Greffier, présente à l'appel des causes.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANT :

Monsieur [H] [Z]

né le [Date naissance 1] 1946 à [Localité 3] (Argentine)

de nationalité française

[Adresse 10]

[Adresse 7]

ARGENTINE

représenté par la SELARL LEXAVOUE, avocats au barreau de PAU

assisté du cabinet BOERNER & ASSOCIES, avocats au barreau de BORDEAUX

INTIMES :

Monsieur [E] [Z]

né le [Date naissance 2] 1978 à [Localité 2] (Argentine)

de nationalité française

[Adresse 1]

[Adresse 5]

représenté et assisté de Maître Teddy VERMOTE, avocat au barreau de BAYONNE

Monsieur [L] [S]

[Adresse 9]

[Adresse 2]

[Adresse 6]

assigné

sur appel de la décision

en date du 25 NOVEMBRE 2013

rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BAYONNE

Prétendant que son fils [E] [Z] lui a dérobé divers biens mobiliers dont un tableau intitulé 'la duchesse [Z] sur un cheval qui se cabre', son père M. [H] [Z], l'a, par acte d'huissier de justice en date du 21 juillet 2010, fait assigner, sur le fondement de l'article 2276 du code civil, devant le tribunal de grande instance de Bayonne pour obtenir, sous astreinte, la restitution de ces biens dont celle du tableau.

Il a également fait assigner devant cette même juridiction Me [S], commissaire-priseur, à qui le tableau avait été confié en vue de sa vente pour obtenir sa restitution, le tableau ayant été mis sous séquestre par ordonnance du juge des référés du tribunal de grande instance de Nanterre en date du 22 avril 2010.

Par jugement en date du 25 novembre 2013, le tribunal a :

- débouté M. [H] [Z] de l'ensemble de ses demandes,

- l'a condamné à payer à M. [E] [Z] la somme de 1 200 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté les autres demandes reconventionnelles.

Par déclaration électronique reçue au greffe de la Cour le 27 juin 2014, M. [H] [Z] a relevé appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 25 septembre 2014, il demande à la Cour :

- d'infirmer le jugement déféré,

- de constater que M. [E] [Z], est possesseur de mauvaise foi du tableau litigieux et des biens visés dans le certificat de changement de résidence de 2002, et qu'il ne saurait exciper à ce titre des dispositions de l'article 2276 du code civil,

- de condamner [E] [Z] à lui restituer le tableau représentant « la duchesse [Z] sur un cheval qui se cabre », dès le prononcé du 'jugement' à intervenir et ce sous astreinte de 500 € par jour de retard,

- de condamner M. [E] [Z] à lui restituer les biens dont la liste est annexée au certificat de changement de résidence de 2002 sous les mêmes conditions d'astreinte,

- de condamner M. [E] [Z] à lui payer la somme de 3 000 € à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et celle de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il soutient que si [E] [Z] entend invoquer la propriété du tableau de la duchesse [Z] à cheval, il doit prouver qu'il était bien visé dans l'inventaire dressé en 2002 lorsqu'il a quitté l'Argentine ce qu'il ne démontre pas.

L'appelant prétend que le tableau qui figure sur cet inventaire ne peut être celui qu'il revendique au regard des dimensions figurant à cet inventaire qui sont différentes de celles mesurées par Me [S].

Par ailleurs, il soutient qu'il a rapporté ce tableau à [Localité 1] postérieurement à 2002 quand il a repris possession de son immeuble sis [Adresse 3] et qu'il lui a été dérobé par son fils le 14 novembre 2009 lorsqu'il a procédé au déménagement de cet immeuble.

Il conteste avoir donné les autres biens figurant sur l'inventaire de 2002 et prétend qu'ils lui ont été volés par son fils et il déduit son absence d'intention libérale concernant ces biens de la plainte qu'il a déposée contre son fils dès le 27 janvier 2003.

Il estime que cette plainte ne visait pas le tableau de la princesse [Z] à cheval de sorte que tant l'ordonnance de non-lieu du 14 septembre 2004 que l'arrêt confirmatif de la chambre de l'instruction de Pau du 25 mars 2005 ne sauraient lui être opposés.

Il considère que dans la mesure où son fils savait pertinemment que ces biens ne lui appartenaient pas, il était de mauvaise foi lors de la prise de possession qui est donc équivoque.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 24 novembre 2014, M. [E] [Z] demande à la Cour au visa de l'article 2276 du code civil :

- de confirmer le jugement entrepris,

- d'ordonner à son profit la restitution du tableau,

- de condamner M. [H] [Z] à lui payer la somme de 5 000 € pour procédure abusive, celle de 10 000 € en réparation de son préjudice moral et celle de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il prétend avoir bénéficié d'un don manuel de M. [H] [Z] sur le tableau "La duchesse [Z] sur cheval qui se cabre" comme pour tous les meubles inventoriés lors du déménagement d'Argentine en France le 2 août 2002 et que M. [H] [Z] est de mauvaise foi et que la procédure initiée est abusive.

Il expose qu'en raison qu'il vivait en 2001-2002 avec son père en Argentine et qu'en raison de la grave crise économique qui a frappé ce pays, M. [H] [Z] a décidé de l'envoyer en France pour qu'il s'y installe et y vive.

Il soutient que pour qu'il puisse subvenir à ses besoins, son père lui a donné début 2002 différents biens meubles notamment le tableau 'de la duchesse [Z] sur un cheval qui se cabre' qui est resté depuis en sa possession.

Me [S], à qui la déclaration d'appel et les conclusions de l'appelant ont été signifiées, n'a pas constitué avocat.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 1er juillet 2015.

SUR CE :

Le possesseur qui prétend avoir reçu une chose en don manuel bénéficie d'une présomption et il appartient à la partie adverse de rapporter la preuve de l'absence d'un tel don ou de prouver que la possession dont se prévaut le détenteur de la chose ne réunit pas les conditions pour être efficace.

La bonne foi du possesseur s'apprécie lors de l'entrée effective en possession.

En l'espèce, il n'est pas contesté par les parties et il résulte des pièces produites par elles que M. [H] [Z] a vécu en Argentine où il a épousé Mme [T] [V].

De leur union est né le [Date naissance 2] 1978, à [Localité 2], [E] [Z].

M. [H] [Z] a déposé une demande de divorce pour faute en Argentine et que le 2 août 2002 son fils [E] a quitté ce pays pour fixer sa résidence en France.

Le 7 janvier 2003, [H] [Z] déposait une plainte avec constitution de partie civile auprès du doyen des juges d'instruction de Bayonne à l'encontre de son fils et de son épouse et de tous autres pour vol, recel et complicité de vol, en prétendant qu'ils avaient fait déménager un ensemble considérable de meubles, objets d'art et pièces d'orfèvrerie lui appartenant en propre ces meubles ayant été transportés d'Argentine en France.

Le 14 septembre 2014, une ordonnance de non-lieu était rendue aux termes de laquelle, le juge d'instruction relevait que si l'instruction a mis en évidence l'existence d'un lourd contentieux familial, il n'est pas établi que l'infraction de vol soit constituée contre [E] [Z] qui dit avoir bénéficié d'un don destiné à favoriser son installation, ni, à plus forte raison contre sa mère qui n'est intervenue en rien, le magistrat instructeur ajoutant, qu'en tout état de cause, ces derniers bénéficiaient d'une immunité familiale.

M. [H] [Z] ayant relevé appel de cette ordonnance, la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Pau l'a confirmée par arrêt du 25 mars 2005 en relevant que [E] [Z] n'a pas quitté l'Argentine clandestinement mais qu'il a, au contraire, fait une déclaration en ce sens au consulat de France à [Localité 2] le 2 août 2002, qu'il n'a pas cherché à dissimuler qu'il emportait des meubles puisqu'il a pris une entreprise de déménagement et en a fait un inventaire qui figure à la procédure, enfin, que ni sa mère ni lui, n'ont tenté de cacher qu'ils procédaient à la vente de certaines des pièces de mobilier puisqu'ils se sont adressés pour cela à la société Sotheby's, qui non seulement est connue pour son sérieux, mais, en outre, connaît bien la famille [Z] et son patrimoine notamment pour avoir fait l'inventaire des successions, ainsi que l'a précisé [H] [Z].

C'est sur cet inventaire joint au certificat de changement de résidence établi le 2 août 2002 par le consul général de France à [Localité 2], que se fonde [E] [Z] pour prétendre qu'il était en possession en suite du don manuel fait par son père, de tous les meubles y figurant dès cette date et notamment du tableau revendiqué par l'appelant (pièce 1 de l'intimé).

Figure effectivement sur cet inventaire la mention 'd'un portrait de femme à cheval (100 x 90 cm)'.

L'appelant prétend qu'il ne peut s'agir du tableau qu'il revendique puisqu'il l'a rapporté chez lui à [Localité 1] mais qu'il lui a été dérobé par son fils le 14 novembre 2009 lorsque celui-ci a déménagé illégalement des biens lui appartenant et qu'il n'a pas les mêmes dimensions que le tableau intitulé 'la duchesse [Z] à cheval'.

Me [S], commissaire-priseur, a mesuré le tableau litigieux présenté lors d'une vente de tableaux anciens du 9 décembre 2009 à Drouot-Richelieu en précisant que ses dimensions étaient les suivantes :

- sans cadre : H 80 x L 64 cm,

- avec cadre : H 108 x L 92 cm.

Ces dimensions se rapprochent des dimensions du tableau figurant sur l'inventaire annexé au certificat de changement de résidence du 2 août 2002.

D'ailleurs, dans l'inventaire du mobilier réalisé en 1998 produit par M. [H] [Z], le tableau est rubriqué 'un tableau peint à l'huile, représentant la duchesse [Z] à cheval d'un mètre sur soixante dix centimètres, au cadre doré', preuve que jusqu'à la mesure effectuée par Me [S], les dimensions du tableau avaient été estimées de façon approximative.

Par ailleurs, il résulte de la procédure pénale que les enquêteurs ont trouvé le tableau litigieux le 24 février 2004 dans l'appartement de [Adresse 8], comme le démontre la photographie annexée à la pièce D 58 du dossier d'instruction, preuve qu'il était donc à cette date en sa possession et qu'il faisait donc bien déjà l'objet de la plainte avec constitution de partie civile déposée par [H] [Z] (pièce 4 de l'intimé).

L'appelant ne peut valablement prétendre qu'il lui a été volé à son domicile le 14 novembre 2009, dès lors que le procès-verbal de Me [C], huissier de justice associé à Biarritz, établi à cette date, s'il démontre que ce jour là un déménagement du mobilier du [Adresse 4] est en cours, aucune des constatations faites par l'huissier de justice et notamment les photographies qui y sont annexées, ne démontre que le tableau litigieux faisait partie des meubles déménagés. Il apparaît en revanche que les objets déménagés ce jour là sont de peu de valeur.

D'ailleurs, l'appelant ne disconvient pas que la nouvelle plainte qu'il a déposée auprès du procureur de la République de Bayonne le 10 décembre 2009 pour vols, complicité et recel a été classée sans suite le 30 novembre 2012.

Il apparaît donc que le tableau 'la duchesse [Z] sur un cheval qui se cabre' comme d'ailleurs l'ensemble des meubles figurant à l'inventaire du 2 août 2002, étaient dès cette

date en possession de M. [E] [Z] et qu'il les a déménagés tout à fait régulièrement d'Argentine en France de sorte que sa mauvaise foi n'est pas établie et ne saurait se déduire du fait que cinq mois après ce transfert d'Argentine en France dans le domicile de M. [E] [Z], son père a déposé une plainte pour vol.

Par ailleurs, les procédures pénales diligentées par M. [H] [Z] contre son fils n'ont mis en évidence aucune infraction à son encontre.

La possession de M. [E] [Z] étant depuis le 2 août 2002 non équivoque, c'est à bon droit qu'il invoque les dispositions de l'article 2276 du code civil et il convient de confirmer le jugement déféré et d'ordonner la remise du 'la duchesse [Z] sur un cheval qui se cabre' à M. [E] [Z].

Il convient également de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. [E] [Z] de ses demandes de dommages-intérêts faute par lui d'établir un abus dans l'exercice de son action en justice, sa mauvaise foi n'étant pas suffisamment démontrée, ainsi que l'existence d'un préjudice moral.

Pour les mêmes motifs, il sera débouté des demandes de dommages-intérêts formées en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par défaut et en dernier ressort,

Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Bayonne en date du 25 novembre 2013,

Y ajoutant,

Ordonne la remise à M. [E] [Z] du tableau 'la duchesse [Z] sur un cheval qui se cabre',

Déboute M. [H] [Z] de ses demandes de dommages-intérêts,

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. [H] [Z] à payer à M. [E] [Z] la somme de 3 000 € (trois mille euros), rejette la demande de M. [H] [Z],

Condamne M. [H] [Z] aux dépens.

Le présent arrêt a été signé par M. Castagné, Conseiller, par suite de l'empêchement de Mme Pons, Président, et par Mme Vicente, Greffier, conformément aux dispositions de l'article 456 du code de procédure civile, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,POURLE PRESIDENT EMPECHE,

Sandra VICENTE Patrick CASTAGNE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 14/02468
Date de la décision : 14/12/2015

Références :

Cour d'appel de Pau 01, arrêt n°14/02468 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-12-14;14.02468 ?
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