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03/12/2015 | FRANCE | N°13/03722

France | France, Cour d'appel de Pau, Chambre sociale, 03 décembre 2015, 13/03722


SG/CD



Numéro 15/04687





COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale







ARRÊT DU 03/12/2015









Dossier : 13/03722





Nature affaire :



Demande d'annulation d'une décision d'un organisme















Affaire :



CAISSE D'ASSURANCE RETRAITE ET DE LA SANTÉ AU TRAVAIL D'AQUITAINE



C/



[Q] [L]


















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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R Ê T



Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 03 Décembre 2015, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de...

SG/CD

Numéro 15/04687

COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 03/12/2015

Dossier : 13/03722

Nature affaire :

Demande d'annulation d'une décision d'un organisme

Affaire :

CAISSE D'ASSURANCE RETRAITE ET DE LA SANTÉ AU TRAVAIL D'AQUITAINE

C/

[Q] [L]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 03 Décembre 2015, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 07 Octobre 2015, devant :

Madame THEATE, Président

Monsieur GAUTHIER, Conseiller

Madame COQUERELLE, Conseiller

assistés de Madame HAUGUEL, Greffière.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

CAISSE D'ASSURANCE RETRAITE ET DE LA SANTÉ AU TRAVAIL D'AQUITAINE

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Maître BARDET, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

Madame [Q] [L]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Maître ETCHEVERRY de la SCP ETCHEVERRY, avocat au barreau de BAYONNE

sur appel de la décision

en date du 30 AOÛT 2013

rendue par le TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SÉCURITÉ SOCIALE DE BAYONNE

RG numéro : 20100247

LES FAITS, LA PROCÉDURE :

Mme [L] est née le [Date naissance 1] 1947.

Son conjoint est décédé le [Date décès 1] 2003.

Une pension de réversion lui a été attribuée à compter du 1er juin 2006 pour un montant net mensuel de 131,21 euros.

À compter du 1er décembre 2007, elle a perçu sa retraite personnelle.

La pension de réversion a été portée à 139,56 euros à partir du 1er janvier 2008 compte tenu de ses ressources.

Le 19 octobre 2009, il lui a été adressé un questionnaire de contrôle des ressources sur lequel elle a mentionné notamment 2 retraites servies par la caisse des dépôts et consignations : CNRACL et RAFP.

Le 30 décembre 2009, la caisse lui a notifié d'une part, la modification du montant de sa retraite de réversion en raison de ses ressources à compter du 1er janvier 2007, en le fixant à compter du 1er décembre 2009 à la somme de 32,03 euros et d'autre part, un trop-perçu d'un montant de 3 058,04 euros au titre de la pension de réversion pour la période du 1er janvier 2007 au 31 novembre 2009.

Elle a contesté cette décision en saisissant le 15 février 2010 la commission de recours amiable qui, lors de sa séance du 16 mars 2010, a décidé de lui accorder une remise de 80 %, soit 2 420,81 euros, ramenant ainsi la créance de la caisse à 605,20 euros.

Mme [L] a répondu par courrier du 31 mars 2010 qu'elle n'était pas rétablie dans ses droits et qu'il n'avait pas été répondu au fondement juridique qu'elle soulevait, l'article R. 353-1-1 du code de la sécurité sociale modifié par l'article 4 du décret numéro 2007-56 du 12 janvier 2007 en vertu duquel « la pension de réversion n'est plus révisable 3 mois après la date à partir de laquelle le conjoint survivant est entré en jouissance de l'ensemble des avantages personnels de retraite de base et complémentaire ou à la date de son 60e anniversaire ».

Lors de sa séance du 13 avril 2010, la commission de recours amiable a considéré qu'au terme de l'article R. 815-22 du même code, il est tenu compte pour l'appréciation des ressources de tous les avantages vieillesse dont bénéficie l'assuré, de sorte que la pension servie par la caisse du régime spécial des fonctionnaires (CNRACL) doit être incluse aux ressources pour le calcul de la pension de réversion et a décidé de  « donner une suite partiellement favorable à la contestation et a ordonné une nouvelle étude des droits par les services administratifs, à savoir que le reliquat de trop-perçu réclamé soit 605,20 euros, soit annulé afin qu'elle bénéficie d'une remise totale de sa dette », mais a rejeté la contestation pour le surplus.

Considérant qu'elle n'était toujours pas rétablie dans ses droits Mme [L] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale le 26 juillet 2010.

Par jugement du 30 août 2013, auquel il conviendra de se reporter pour plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bayonne a ainsi statué :

- déclare Mme [L] recevable en son recours,

y faisant droit,

- infirme la décision de la commission de recours amiable de la CARSAT Aquitaine en ce qu'elle a confirmé la révision, à compter du 1er janvier 2008, du montant de la pension de réversion dont bénéficie Mme [L] du fait de son époux décédé,

- dit que la caisse d'assurance retraite et de santé au travail (CARSAT) Aquitaine, devra rétablir Mme [L] dans ses droits au bénéfice et pour l'entier montant de la pension de réversion qu'elle percevait antérieurement à sa révision à compter du 1er janvier 2008.

Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 16 octobre 2013 la CARSAT, représentée par son conseil, a interjeté appel du jugement.

DEMANDES ET MOYENS DES PARTIES :

La CARSAT, par conclusions écrites, déposées le 21 juillet 2015, reprises oralement à l'audience et auxquelles il convient de se référer, demande à la cour de :

Vu les articles L. 353-1, L. 355-3, R. 353-1 et R. 353-1-1 du code de la sécurité sociale,

- dire ses demandes recevables et bien-fondées et y faire droit,

- réformer le jugement entrepris,

- dire qu'au 1er mars 2008 les revenus de Mme [L] excédaient les plafonds lui permettant de percevoir la pension de réversion,

- dire que la révision de la pension de réversion servie au bénéfice de Mme [L] est fondée et régulière,

en conséquence :

- débouter Mme [L] de son recours,

- débouter Mme [L] de toute demande reconventionnelle.

La caisse fait valoir, en substance, que :

- il résulte des dispositions des articles L. 353-1, R. 353-1 et R. 353-1-1 du code de la sécurité sociale que le service de la pension de réversion est soumis à une condition de ressources, les revenus du bénéficiaire pouvant faire l'objet d'un contrôle, à tout moment, par les services de la caisse qui sert cet avantage ;

- la révision notifiée à Mme [L] en 2009 porte sur la révision de ses droits à compter de janvier 2008, et par référence à la modification de ses ressources à cette date ;

- le sens du délai de 3 mois fixé par l'article R. 353-1-1 n'est pas un délai d'instruction dans lequel la caisse est dans l'obligation d'agir, mais un délai permettant de cristalliser les ressources de l'assuré, et le fait que la révision soit intervenue postérieurement à l'expiration du délai de 3 mois est indifférent.

Mme [L], par conclusions écrites, déposées le 2 octobre 2015, reprises oralement à l'audience et auxquelles il convient de se référer, demande à la cour de :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 30 août 2013 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bayonne,

- condamner la CARSAT Aquitaine à lui régler la somme de 2 000 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens.

Mme [L] soutient que les dispositions de l'article R. 3 153-1-1 du code de la sécurité sociale sont claires et ne laissent place à aucune interprétation : il n'y a plus de révision possible à partir du 4e mois qui suit le départ en retraite ou à partir de l'âge légal de départ à la retraite ;

Elle a atteint son 60e anniversaire le 10 novembre 2007 ; elle perçoit l'ensemble de ses avantages retraite depuis le 1er décembre 2007 ; la CARSAT ne pouvait donc valablement opérer un contrôle et une révision à compter du 1er mars 2008.

Elle considère que, contrairement à ce que soutient la CARSAT, la circulaire du 30 avril 2007 sur laquelle elle se fonde, d'une part, n'autorise aucunement des révisions postérieures au délai de 3 mois puisqu'elle emploie le terme de « cristallisation des pensions » et non des ressources, et d'autre part, en tout état de cause, elle ne peut modifier ni la portée, ni le sens des textes et ne lie pas le juge.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

L'appel, interjeté dans les formes et délais prescrits par la loi, sera déclaré recevable en la forme.

Aux termes de l'article R. 353-1-1 (modifié par décret numéro 2007-56 du 12 janvier 2007) :

La pension de réversion est révisable en cas de variation dans le montant des ressources, calculé en application des dispositions de l'article R. 353-1, dans les conditions et selon les modalités fixées aux articles R. 815-20, R. 815-38, R. 815-39 et R. 815-42. La date de la dernière révision ne peut être postérieure :

a) A un délai de trois mois après la date à laquelle le conjoint survivant est entré en jouissance de l'ensemble des avantages personnels de retraite de base et complémentaire lorsqu'il peut prétendre à de tels avantages ;

b) A la date de son soixantième anniversaire, lorsqu'il ne peut pas prétendre à de tels avantages.

L'article R. 353-1-1, pose le principe de la « révisabilité » de la pension en cas de variation dans le montant des ressources.

Le renvoi de ce texte aux articles R. 815-20, R. 815-38, R. 815-39 et R. 815-42 est un renvoi aux conditions et modalités définies par ces textes, indépendamment du fait que ces textes sont relatifs à l'allocation de solidarité.

Toutefois, si le texte pose le principe d'une révision possible de la pension de réversion en cas de variation dans le montant des ressources, il pose aussi une limite à cette révision en disposant que la date de la dernière révision ne peut pas être postérieure soit au délai de 3 mois après la perception par l'intéressé de ses avantages personnels de retraite de base et complémentaire, soit à la date de son 60e anniversaire lorsqu'il ne peut pas prétendre à de tels avantages.

La notion de « dernière révision » peut signifier soit la révision qui vient après toutes les autres, soit la révision après laquelle il n'y en a pas d'autres, c'est-à-dire après laquelle il ne peut pas y en avoir d'autres.

Dans cette première acception, il peut y avoir révision de la pension de réversion dans les cas de variation dans le montant des ressources dans les conditions et modalités fixées par les textes de renvoi, aussi souvent qu'apparaîtront des variations dans le montant des ressources, la dernière révision n'étant alors que la dernière révision intervenue mais qui peut être suivie de nouvelles révisions.

Telle n'est cependant pas l'hypothèse de l'article R. 353-1-1 précité qui dispose « La date de la dernière révision ne peut être postérieure (') » qui fixe la date au-delà de laquelle plus aucune révision n'est possible, ainsi que cela résulte suffisamment de l'adjectif « postérieure » qui signifie qu'aucune révision ne peut intervenir après le délai fixé.

La position de la caisse qui considère que le délai de 3 mois visé par le texte est un délai de « cristallisation » des ressources, ne correspond ni à la lecture littérale de l'article R. 353-1-1, ni à une lecture imposée par sa compréhension ou son application effective et constitue dès lors une interprétation qui ne peut être suivie.

En effet, l'article R. 353-1-1 renvoie notamment à l'article R. 815-20 lequel dispose :

Les organismes ou services mentionnés à l'article L. 815-7 peuvent mettre en demeure, sous les sanctions prévues à l'article R. 815-49, toute personne, institution ou organisme de leur faire connaître dans un délai d'un mois le montant des pensions, retraites, rentes viagères ou allocations viagères autres que les avantages de vieillesse mentionnés à l'article L. 815-7, tels qu'ils sont définis à l'article R. 815-4, qu'il est tenu de servir à une personne bénéficiant ou ayant demandé le bénéfice de l'allocation de solidarité aux personnes âgées.

Il résulte de ce texte que les organismes ou services débiteurs d'un avantage de vieillesse de base résultant de dispositions législatives ou réglementaires peuvent mettre en demeure, sous la sanction d'une contravention de 4e classe (R. 815-49) toute personne, institution ou organisme de leur faire connaître dans un délai d'un mois le montant des avantages de vieillesse, autres que l'allocation de solidarité aux personnes âgées résultant de dispositions législatives ou réglementaires et l'allocation de solidarité aux personnes âgées qui ne relèvent d'aucun régime de base obligatoire d'assurance vieillesse, qu'ils sont tenus de servir.

Or la CARSAT (caisse d'assurance retraite et de la santé au travail), est un organisme de sécurité sociale qui intervient, sous l'égide de la caisse nationale d'assurance vieillesse et de la caisse nationale d'assurance maladie, auprès des salariés, des retraités et des entreprises au titre de la retraite, de l'aide sociale et de la gestion des risques professionnels qui a donc le pouvoir de mettre en demeure toute personne, institution ou organisme de lui faire connaître dans un délai d'un mois le montant des pensions, retraites, rentes viagères ou allocations viagères, telles que rappelées ci-dessus, qu'ils sont tenus de servir.

Ainsi, la caisse a les moyens de connaître dans le délai d'un mois le montant des avantages personnels de retraite de base et complémentaire, au titre du régime général ou autre, au bénéficiaire d'une pension de réversion.

Dès lors que ce bénéficiaire fait valoir ses droits à la retraite et perçoit l'ensemble de ses avantages personnels de retraite de base et complémentaire, dont la caisse peut avoir connaissance dans le délai d'un mois, alors la caisse ne peut procéder à la révision de la pension de réversion que dans le délai de 3 mois après la date d'entrée en jouissance de ses avantages par le conjoint survivant.

Et, à défaut pour le bénéficiaire de la pension de réversion de prétendre à des avantages personnels de retraite de base et complémentaire, la caisse ne peut procéder à la révision du montant de sa pension de réversion au-delà de l'âge de son 60e anniversaire.

Par conséquent, le délai de 3 mois visé dans l'article R. 353-1-1 n'est pas une période de « cristallisation » des ressources qui, comme le prétend la caisse, pourraient être prises en compte pour une révision de la pension de réversion à quelque moment que ce soit, y compris au-delà de ce délai de 3 mois. Au contraire, dès lors que la caisse peut avoir connaissance dans un délai d'un mois de la perception par le bénéficiaire d'une pension de réversion de ses avantages personnels de retraite de base et complémentaire, alors elle n'est plus recevable à procéder à la révision de cette pension au-delà du délai de 3 mois à compter de la date à laquelle le conjoint survivant est entré en jouissance de ces avantages.

En l'espèce, Mme [L] est entrée en jouissance de ses droits personnels de retraite de base et complémentaire au 1er décembre 2007, de sorte que la caisse ne pouvait procéder à la révision du montant de sa pension de réversion au-delà du 1er mars 2008.

Sur l'article 700 du code de procédure civile :

Aucun élément de l'espèce ne commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe,

REÇOIT l'appel formé le 16 octobre 2013 par la CARSAT à l'encontre du jugement rendu le 30 août 2013 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bayonne,

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

DIT n'y avoir l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Madame THEATE, Présidente, et par Madame HAUGUEL, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE,LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13/03722
Date de la décision : 03/12/2015

Références :

Cour d'appel de Pau 3S, arrêt n°13/03722 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-12-03;13.03722 ?
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