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04/06/2015 | FRANCE | N°14/01010

France | France, Cour d'appel de Pau, 1ère chambre, 04 juin 2015, 14/01010


AB/AM



Numéro 15/2310





COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre







ARRET DU 04/06/2015







Dossier : 14/01010





Nature affaire :



Autres demandes relatives à la vente















Affaire :



[W] [Y]

[L] [R] épouse [Y]





C/



[G] [O]

[H] [O]

























Grosse dé

livrée le :



à :



















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R E T



prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 04 juin 2015, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
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AB/AM

Numéro 15/2310

COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRET DU 04/06/2015

Dossier : 14/01010

Nature affaire :

Autres demandes relatives à la vente

Affaire :

[W] [Y]

[L] [R] épouse [Y]

C/

[G] [O]

[H] [O]

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 04 juin 2015, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 31 mars 2015, devant :

Monsieur BILLAUD, magistrat chargé du rapport,

assisté de Madame VICENTE, Greffier, présente à l'appel des causes,

Monsieur BILLAUD, en application des articles 786 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries, en présence de Monsieur [S] et en a rendu compte à la Cour composée de :

Madame PONS, Président

Monsieur CASTAGNE, Conseiller

Monsieur BILLAUD, Conseiller

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTS :

Monsieur [W] [Y]

né le [Date naissance 4] 1963 à [Localité 5]

de nationalité française

[Adresse 4]

[Localité 2]

Madame [L] [R] épouse [Y]

née le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 7]

de nationalité française

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentés par la SELARL LEXAVOUE, avocats au barreau de PAU

assistés de Maître René ESCAT, avocat au barreau de DAX

INTIMES :

Monsieur [G] [O]

né le [Date naissance 2] 1955 à [Localité 8]

de nationalité française

[Adresse 1]

[Localité 3]

Madame [H] [O]

née le [Date naissance 3] 1956 à [Localité 8]

de nationalité française

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentés et assistés de Maître Frédéric BELLEGARDE, avocat au barreau de PAU

sur appel de la décision

en date du 18 DECEMBRE 2013

rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PAU

Faits et procédure :

Suivant acte sous seing privé reçu par Me [T], notaire à Arzacq (64) le 30 janvier 2001, M. [I] [E] promettait de vendre à M. [W] [Y] et à Mme [L] [R], son épouse, la nue-propriété d'une maison d'habitation située à [Adresse 3] et la pleine propriété de différentes parcelles agricoles situées sur cette commune pour une contenance totale de 16 ha 4 a et 70 ca, sous la condition que le prix stipulé de 450 000 F ou 68 602,60 € soit déposé entre les mains du notaire, le délai de réitération de l'acte n'étant pas précisé, le prix étant payable à concurrence de 15 000 F le jour du compromis, 35 000 F le jour de l'acte authentique et le surplus 40 000 F converti en une rente viagère et annuelle de 3 200 F par mois.

M. [I] [E] est décédé le [Date décès 1] 2001 sans que l'acte authentique portant transfert de propriété soit établi.

Les consorts [Y] ont sollicité du notaire la transmission à leur profit de la propriété des biens immobiliers.

Par acte d'huissier en date du 18 mai 2012, les consorts [G] et [H] [O], venant aux droits de M. [I] [E], ont fait assigner M. et Mme [Y] devant le tribunal de grande instance de Pau afin de faire juger nul et de nul effet le compromis de vente en date du 30 janvier 2001 consenti par leur auteur, d'obtenir la condamnation des consorts [Y] à leur payer la somme de 10 000 € en raison du préjudice subi par la succession qui a dû immobiliser l'actif que constitue la propriété rurale faisant l'objet du compromis de vente.

Par jugement en date du 18 décembre 2013, le tribunal de grande instance de Pau a déclaré recevable l'action engagée par M. et Mme [O], a déclaré nul l'acte sous seing privé conclu le 30 janvier 2001 entre M. [I] [E] et les consorts [Y], a débouté les consorts [O] de leur demande en dommages-intérêts et débouté les consorts [Y] de l'intégralité de leurs demandes.

Suivant déclaration reçue au greffe de la Cour le 13 mars 2014, M. et Mme [Y] ont relevé appel de cette décision.

Moyens et prétentions des parties :

Dans leurs dernières conclusions en date du 20 février 2015, M. et Mme [Y] demandent à la Cour de réformer le jugement entrepris et de débouter purement et simplement les consorts [O] de l'intégralité de leurs demandes, à titre reconventionnel, au vu des articles 1583 et 1589 du code civil, de dire et juger que la vente conclue le 30 janvier 2001 est ferme et définitive et opposable à la succession [E], de renvoyer les parties devant le notaire instrumentaire pour sa réitération et de condamner solidairement les consorts [O] à leur verser 10 000 € à titre de dommages-intérêts en raison de leur préjudice, outre 3 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans leurs dernières conclusions en date du 23 juin 2014, M. et Mme [O] demandent à la Cour de confirmer le jugement déféré qui a déclaré nul et de nul effet le compromis de vente en date du 30 janvier 2001 ; ils demandent la condamnation des consorts [Y] à leur payer la somme de 10 000 € en réparation de leur préjudice et 3 500 € sur le fondement l'article 700 du code de procédure civile.

Ils précisent notamment que le décès d'[I] [E] est intervenu avant la levée des conditions et la réalisation de l'acte authentique, que par ailleurs le prix de cette cession était dépourvu de caractère sérieux, s'agissant d'une vente avec conversion de prix en rente viagère inférieure aux revenus nets de l'immeuble, le fermage perçu par M. [E] s'élevant à la somme de 1 829,39 € par an, ce qui doit entraîner l'annulation de la vente en application de l'article 1591 du code civil, qu'enfin, la prétention de M. et Mme [Y] de se rendre acquéreur d'une propriété rurale sans en payer le prix est la source d'un préjudice incontestable pour la succession.

L'ordonnance de clôture est en date du 27 février 2015.

SUR QUOI

Il est constant que suivant acte sous seing privé fait à Arzacq le 30 janvier 2001, M. [I] [E], propriétaire agriculteur demeurant à [Localité 6], a accepté de vendre à M. [W] [Y] et Mme [L] [R], son épouse, la nue-propriété portant sur une maison à usage d'habitation en état de totale vétusté avec jardin attenant située sur la commune de [Localité 4] et la pleine propriété sur un ensemble de parcelles rurales aux lieudits Gouaret et Lageule pour une contenance totale de 16 ha 4 a et 70 ca aux clauses et conditions suivantes :

- le vendeur s'engage à justifier de la propriété régulière des biens vendus et à fournir à cet effet tout titre, pièces et renseignements nécessaires au notaire chargé de la rédaction de l'acte authentique,

- l'acquéreur aura la propriété des biens vendus à compter du jour de la réitération du sous seing privé par acte authentique,

- le vendeur s'interdit pendant le temps qui précède l'acte authentique toute aliénation totale ou partielle des biens vendus, de le grever d'hypothèques ou d'une charge réelle quelconque ou de les louer,

- la vente sera régularisée et réitérée par acte authentique établi par Me [T], notaire à Arzacq, choisi d'un commun accord par les parties,

- l'établissement de cet acte ne pourra avoir lieu que si l'acquéreur a déposé entre les mains du vendeur ou du notaire le prix stipulé ou la fraction de prix payable comptant et éventuellement justifié de l'emprunt sollicité pour solder le prix d'acquisition,

- la mention suivante de la date à laquelle l'acte doit être régularisé fait défaut et n'a pas été complétée,

- la vente est consentie et acceptée moyennant le prix principal de 450 000 F dont 35 000 F sont payés ce jour par la comptabilité du notaire et 15 000 F seront payés comptant à la signature de l'acte authentique et à concurrence du surplus soit 410 000 F convertis en rente annuelle viagère de 3 200 F par mois.

Il convient de préciser, ainsi que l'indique cet acte, qu'à l'exception de la parcelle supportant la maison à usage d'habitation vétuste, les parcelles cédées sont déjà louées par le vendeur aux acquéreurs.

L'acte sous seing privé prévoit également des conditions suspensives dont certaines sont prescrites dans le seul intérêt de l'acquéreur ; toutefois, une de ces clauses précise qu'est une condition déterminante de la réitération de la vente par acte authentique, le fait que l'examen des titres ne fasse pas apparaître un vice quelconque affectant le droit de propriété du vendeur.

En raison du décès du vendeur, sa succession est ouverte conformément aux dispositions des articles 720 et suivants du code civil. L'article 724 de ce code précise que les héritiers désignés par la loi sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt.

Par ailleurs, il résulte des dispositions des articles 768 et suivants du code civil que les héritiers disposent d'un droit d'option à caractère personnel, leur permettant soit d'accepter la succession purement et simplement ou d'y renoncer, ou encore d'accepter la succession à concurrence de l'actif net.

L'article 1122 du code civil prévoit pour sa part qu'on est censé avoir stipulé pour soi et pour ses héritiers et ayants cause à moins que le contraire ne soit exprimé ou ne résulte de la nature de la convention ; en droit, en ce qui concerne la transmissibilité passive des conventions, et pour la mise en 'uvre des dispositions légales susvisées, on considère que les héritiers qui ont accepté purement et simplement la succession sont tenus par les conventions que leur auteur a passées, or, en l'état de la procédure, l'option exercée par les héritiers intimés n'est pas connue.

De même, s'il est vrai qu'aux termes des dispositions de l'article 1583 du code civil, la vente est parfaite entre les parties et que la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur dès qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée ni le prix payé, qu'aux termes des dispositions de l'article 1589 du même code la promesse de vente vaut vente s'il y a consentement réciproque des deux parties sur la chose et sur le prix, il n'en demeure pas moins vrai qu'en droit, ces dispositions, qui ont un caractère supplétif, ne donnent pas lieu à application, en ce qui concerne la question particulière de la réitération d'un compromis, si les parties ont entendu faire de la signature de l'acte authentique la condition même de leur engagement et que cette réitération du compromis par acte authentique est un élément constitutif de leur consentement.

De ce qui précède, il résulte notamment que les consorts [O] ont été saisis des biens, droits et actions de M. [I] [E] et que, sous réserve de l'exercice par eux de l'option de l'article 768 du code civil, ces droits et actions ont strictement la même étendue juridique que celle qui était conférée à M. [E] lui-même ; parmi ses droits et actions figure la possibilité de ne pas se présenter à la signature de l'acte authentique notamment si l'une des conditions essentielles de son consentement à la vente faisait défaut et ce, jusqu'à la date prévue pour la signature de cet acte authentique ; or, en l'espèce, aucune date ni aucun délai n'est spécifié dans la promesse de vente.

Dans le cas d'espèce, doit être considéré comme un élément déterminant du consentement du vendeur le fait que le paiement du prix, notamment la mise en place et le paiement d'une rente viagère, seulement le jour de l'acte authentique, devait prendre la suite des revenus que lui procurait la location des terres agricoles faisant l'objet de la vente.

En ce qui concerne les conditions particulières requises pour la validité du contrat spécifique de rente viagère, il est constant que tout contrat de rente viagère créé sur la tête d'une personne qui était morte au jour du contrat ne produit aucun effet, conformément à l'article 1974 du code civil.

En l'espèce, le jour du contrat ne peut être entendu que du jour de l'acte authentique puisque seule la comparution personnelle du crédirentier devant le notaire et sa signature personnelle pouvait assurer l'équilibre économique final de cette convention qui est un élément déterminant du consentement dans les contrats synallagmatiques, en particulier en cas de rentes viagères pour lesquelles il est constant que le prix de vente stipulé doit avoir un caractère sérieux.

C'est pourquoi, pour la mise en 'uvre des dispositions de l'article 1589 du code civil qui prévoit que la promesse de vente vaut vente, il y a lieu de considérer que lorsqu'une des parties a entendu faire de la signature de l'acte authentique la condition même de son engagement, cette promesse de vente est caduque faute de rédaction d'un acte authentique.

Il convient donc d'infirmer le jugement déféré qui a prononcé la nullité de l'acte sous seing privé conclu le 30 janvier 2001 alors que seule sa caducité est encourue.

Les autres dispositions de cette décision doivent être confirmées, en effet, il n'y a pas lieu de faire droit aux demandes de dommages-intérêts respectives des parties en l'absence de preuve d'un préjudice quelconque.

M. et Mme [Y] qui succombent doivent les entiers dépens et la somme de 2 000 € aux consorts [O] en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Infirme le jugement rendu le 18 décembre 2013 par le tribunal de grande instance de Pau en ce qu'il a déclaré nul l'acte sous-seing privé conclu le 30 janvier 2001 entre M. [I] [E] et les consorts [Y], et statuant à nouveau de ce chef.

Dit que cette promesse de vente sous seing privé du 30 janvier 2001 est caduque.

Confirme le jugement du 18 décembre 2013 pour le surplus.

Condamne M. et Mme [Y] à payer aux consorts [O] la somme de 2 000 € (deux mille euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Les condamne aux entiers dépens.

Le présent arrêt a été signé par Mme Pons, Président, et par Mme  Vicente, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,

Sandra VICENTEFrançoise PONS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 14/01010
Date de la décision : 04/06/2015

Références :

Cour d'appel de Pau 01, arrêt n°14/01010 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-06-04;14.01010 ?
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