La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/06/2015 | FRANCE | N°13/00521

France | France, Cour d'appel de Pau, 1ère chambre, 04 juin 2015, 13/00521


PC/AM



Numéro 15/2317





COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre



RENVOI CASSATION







ARRET DU 04/06/2015





Dossier : 13/00521





Nature affaire :



Demande en nullité d'un contrat tendant à la réalisation de travaux de construction













Affaire :



[Q] [T]

[K] [I]

[B]-[O] [C]

[D] [I] épouse [R]

[O] [I] épouse [A]



C/



[B] [O] [Y]
r>













Grosse délivrée le :



à :



















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R E T



prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 04 juin 2015, les parties en ayant été préalablement avisées dans...

PC/AM

Numéro 15/2317

COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre

RENVOI CASSATION

ARRET DU 04/06/2015

Dossier : 13/00521

Nature affaire :

Demande en nullité d'un contrat tendant à la réalisation de travaux de construction

Affaire :

[Q] [T]

[K] [I]

[B]-[O] [C]

[D] [I] épouse [R]

[O] [I] épouse [A]

C/

[B] [O] [Y]

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 04 juin 2015, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 24 février 2015, devant :

Monsieur CASTAGNE, Conseiller, faisant fonction de Président, chargé du rapport conformément à l'article 785 du code de procédure civile

Monsieur BILLAUD, Conseiller

Madame NICOLAS, Conseiller

en présence de Monsieur BOIRON, avocat général

assistés de Madame VICENTE, Greffier.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

DEMANDEURS :

Monsieur [Q] [T]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Monsieur [K] [I]

[Adresse 3]

[Localité 1]

Monsieur [B]-[O] [C]

[Adresse 7]

[Adresse 6]

[Localité 4]

Madame [D] [I] épouse [R]

[Adresse 5]

[Localité 3]

Madame [O] [I] épouse [A]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentés et assistés de Maître Jean BAGET, avocat au barreau de PAU

DEFENDEUR :

Monsieur [B] [O] [Y]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 2]

représenté par la SCP DUALE - LIGNEY - MADAR - DANGUY, avocats au barreau de PAU

assisté de Maître MALHERBE, avocat au barreau de BAYONNE

suite à l'arrêt de la COUR DE CASSATION

en date du 06 DECEMBRE 2011

Le 5 août 1983, la société Garage Lafontaine a conclu un marché de travaux avec le GIE Bati 2000, représenté par M. [B]-[O] [Y] pour la construction d'un bâtiment commercial.

Le GIE Bati 2000, d'une part, puis M. [P], M. [C], M. [K] [I], M. [O] [I], M. [T], M. [S] [F] et Mmes [Z] et [M] [F] (venant aux droits de M. [B]-[O] [F]), M. [X] et la société Bidegain, en leur qualité de membres du GIE, d'autre part, ont été condamnés à payer à la société Lafontaine la somme de 268 420,93 € au titre des désordres et malfaçons affectant la construction.

Dans le cadre d'un litige opposant la société Lafontaine au GIE, aux sous-traitants intervenus dans la construction, à leurs assureurs et à M. [Y], M. [T], M. [C], M. [K] [I], les consorts [F], ès qualités, Mmes [J], [O] et [D] [I] (venant aux droits de M. [O] [I]) sont intervenus volontairement à l'instance aux fins de voir constater qu'ils sont subrogés dans les droits de la société Lafontaine et d'obtenir la condamnation de M. [Y] à garantir le GIE Bati 2000 et ses membres des condamnations prononcées contre eux et à leur payer la somme de 47 142,87 €.

Par arrêt du 30 novembre 2009, la cour d'appel de Pau a, notamment, sur intervention volontaire de M. [T], de M. [K] [I], de M. [C], des consorts [F] et des consorts [I] (ès qualités d'héritiers de feu M. [O] [I]) condamné M. [Y] à leur payer la somme de 24 770,23 € et rejeté leur demande tendant à être relevés et garantis par M. [Y] des condamnations prononcées à leur encontre au profit de la société Garage Lafontaine.

Par arrêt du 6 décembre 2011, la chambre commerciale de la Cour de cassation a :

- cassé cet arrêt mais seulement en ce qu'il a condamné M. [Y] à payer aux consorts [T] et autres la seule somme de 24 770,23 € avec intérêts au taux légal à compter du 26 février 2007 et en ce qu'il a rejeté leur demande tendant à être garantis par M. [Y] des condamnations prononcées à leur encontre au profit de la société Lafontaine,

- renvoyé l'affaire devant la cour d'appel de Pau, autrement composée.

La cassation a été prononcée aux motifs :

- qu'en retenant que le surplus des demandes des consorts [T] et autres ne pouvait prospérer en considération des motifs de l'arrêt, sans répondre aux conclusions faisant valoir que les condamnations prononcées au profit du maître de l'ouvrage avaient été directement causées par les fautes commises par M. [Y] pour avoir engagé le GIE, dont il n'avait pas la qualité de représentant légal et après la dissolution de ce groupement, dans la conclusion d'un marché de travaux de construction et pour avoir exercé la maîtrise d'oeuvre relevant pour ce type de travaux du monopole des architectes, sans en avoir les qualifications ni être assuré, la Cour n'a pas répondu aux exigences des articles 455 et 458 du code de procédure civile,

- qu'en retenant la responsabilité de M. [Y], en qualité de maître d'oeuvre, pour le défaut de conception du portique et le mauvais choix des matériaux concernant le sol du hall d'exposition, en l'écartant s'agissant de l'inachèvement des huisseries et en décidant que le surplus des demandes ne pouvait prospérer en considération des motifs de l'arrêt, sans répondre aux conclusions imputant à M. [Y] les défauts de conception ayant affecté le système de chauffage-climatisation et le système sanitaire, tandis qu'elle constatait que le maître de l'ouvrage avait engagé des frais de réparation pour pallier soit à des inachèvements soit à des malfaçons notamment pour le système de chauffage-climatisation des bureaux, la Cour n'a pas satisfait aux exigences des articles 455 et 458.

Les consorts [T] et autres ont déposé le 8 février 2013 une déclaration de saisine sur renvoi de cassation.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du magistrat de la mise en état du 30 juin 2014.

L'affaire, initialement fixée au 30 septembre 2014, a, en raison d'un mouvement de protestation national des barreaux. été renvoyée, à la demande des parties, à l'audience du 24 février 2015, à laquelle le ministère public a déclaré s'en rapporter à la décision à intervenir.

Dans leurs dernières conclusions déposées le 9 janvier 2014, M. [T], M. [K] [I], M. [C] et Mmes [D] et [O] [I] demandent à la Cour, au visa de l'article 1382 du code civil :

- de constater qu'ils sont subrogés dans les droits de la société Garage Lafontaine contre M. [Y] et le GIE Bati 2000,

- de constater qu'ils ont réglé à la société Garage Lafontaine, depuis février 2007, la somme de 470 982 €, outre les frais et dépens,

- de dire que M. [Y], en sa qualité de maître d'oeuvre de la construction, a exercé illégalement la profession d'architecte, au surplus sans être assuré et qu'il a résulté de ses fautes professionnelles commises à cette occasion un préjudice pour la société Lafontaine d'un montant de 47 256,63 € pris en compte pour la seule somme de 24 770,23 €,

- de dire que M. [Y], en sa qualité de gérant de fait du GIE dissous, a exercé illégalement et de mauvaise foi cette fonction, qu'il a résulté de cette fonction illicite l'engagement du GIE Bati 2000 dissous dans un contrat dont la mauvaise exécution a entraîné la condamnation du GIE à payer à la société Lafontaine la somme de 470 982 € puis la condamnation solidaire d'avec lui de ses membres,

- de condamner M. [Y] à relever et garantir les membres du GIE subrogés dans les droits de la société Lafontaine :

$gt; des conséquences de ses fautes professionnelles, soit la somme de 47 256,63 € déduction faite de celle de 24 770,23 € à laquelle il a déjà été condamné,

$gt; des conséquences de la faute ayant consisté à exercer illicitement l'activité de dirigeant de fait d'un GIE dissous en vertu de laquelle le GIE a été engagé dans un contrat ayant abouti à sa condamnation à payer à la société Lafontaine la somme de 470 982 €,

$gt; augmentées des intérêts au taux légal à compter du 30 novembre 2009,

- de dire qu'outre l'exercice illégal de la profession d'architecte et de l'activité de dirigeant de fait, M. [Y] a agi constamment de mauvaise foi, dans la seule perspective de leur faire supporter les conséquences de ses fautes et de le condamner en conséquence à leur payer la somme de 1000 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice moral,

- de condamner M. [Y] à leur payer la somme de 20 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Exposant qu'il y a lieu d'apprécier la responsabilité de M. [Y] en tant que maître d'oeuvre et sa responsabilité en tant que dirigeant de fait du GIE, ils soutiennent en substance :

- que doit être imputé à M. [Y] le coût de reprise des désordres résultant des défauts de conception ayant affecté le système de chauffage-climatisation et les installations sanitaires,

- que de manière plus générale, M. [Y] doit être condamné à les garantir de la totalité des sommes mises à leur charge, en qualité de membres du GIE Bati 2000, au profit de la société Lafontaine, en raison des fautes par lui commises ayant consisté :

$gt; d'une part, à avoir assumé, sans avoir la qualité d'architecte, la maîtrise d'oeuvre d'un chantier qui exigeait l'intervention d'un architecte et sans avoir souscrit une assurance de responsabilité professionnelle correspondante,

$gt; d'autre part, à avoir créé l'apparence trompeuse d'un pouvoir de représentation d'un GIE pourtant dissous, tant lors de la conclusion du contrat avec la société Lafontaine que dans la gestion de la procédure engagée par cette société, ayant abouti à la condamnation du GIE au paiement d'une somme de 1 760 725,95 F par un jugement dont il n'a pas relevé appel et qui a servi de support à l'action en responsabilité solidaire engagée ultérieurement par la société Lafontaine contre les membres du GIE,

- que ces fautes leur ont causé un préjudice certain, consistant dans leur condamnation à indemniser la société Lafontaine, laquelle ne serait jamais intervenue si M. [Y] avait eu la qualité d'architecte et avait été titulaire de l'assurance obligatoire et s'il n'avait pas signé un marché de travaux pour le compte du GIE, dont l'inexécution a eu pour conséquence la condamnation du groupement puis celle de ses membres.

Dans ses dernières conclusions déposées le 12 décembre 2013, M. [Y] conclut au débouté des consorts [T] et autres et sollicite leur condamnation à lui payer la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Il expose pour l'essentiel :

- qu'il n'a jamais eu un rapport contractuel direct avec la société Lafontaine et qu'il n'a pas assuré la maîtrise d'oeuvre des travaux, laquelle était assumée par les membres du GIE intervenant sur le chantier, chacun pour leur propre lot,

- qu'il est intervenu en qualité de sous-traitant du GIE et que sa mission était cantonnée à la réalisation du projet de construction et à la constitution du dossier de permis de construire et des plans d'exécution et qu'à ce titre l'expertise judiciaire n'a mis en évidence aucun désordre susceptible d'engager sa responsabilité de concepteur,

- que les demandes des consorts [T] et autres se heurtent à l'autorité de chose jugée tant par l'arrêt du 30 novembre 2009 en ce qu'il a déjà apprécié sa responsabilité que par les autres décisions intervenues antérieurement,

- qu'il verse aux débats les éléments justificatifs de sa qualité d'agréé en architecture et de la souscription d'une assurance professionnelle,

- que justifiant de son contrat de maîtrise d'oeuvre et de sa qualité de maître d'oeuvre légalement assuré, il ne peut être taxé de direction de fait, élément contradictoire,

- que le GIE Bati 2000 a, pour les besoins du chantier Lafontaine, continué à fonctionner postérieurement à sa dissolution et que certains de ses membres, dont M. [P], administrateur, et M. [C], commissaire de gestion, ont réalisé des travaux sur le chantier.

MOTIFS

I - Sur la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de chose jugée par l'arrêt du 30 novembre 2009 et les décisions antérieures :

Dès lors que l'arrêt du 30 novembre 2009 a été cassé en ce qu'il a condamné M. [Y] à payer aux consorts [T] et autres la seule somme de 24 770,23 € avec intérêts au taux légal à compter du 26 février 2007 et en ce qu'il a rejeté leur demande tendant à être garantis par M. [Y] des condamnations prononcées à leur encontre au profit de la société Lafontaine, aucune autorité de chose jugée tirée de cette décision ne peut être opposée aux demandes des consorts [T] et autres en ce qu'elles tendent à obtenir la condamnation de M. [Y] au paiement des sommes dont ils ont été déboutés par l'arrêt du 30 novembre 2009.

Par ailleurs, aucune des décisions intervenues antérieurement à l'arrêt du 30 novembre 2009 dont M. [Y] verse copie aux débats n'est revêtue, au sens de la triple identité d'objet, de cause et de parties imposée par l'article 1351 du code civil, d'une autorité de chose jugée de nature à faire déclarer irrecevable, sans examen au fond, les demandes des consorts [T] et autres, objets de la présente instance.

La fin de non-recevoir soulevée par M. [Y] sera donc rejetée.

II - Sur les demandes des consorts [T] et autres :

1 - Sur la demande en garantie formée au titre des désordres affectant l'installation de chauffage-climatisation :

Les consorts [T] et autres sollicitent de ce chef la condamnation de M. [Y] à leur payer la somme de 22 486 € au titre du coût de réfection des désordres affectant l'installation de chauffage-climatisation qui équipait le local de la société Lafontaine.

M. [Y] s'oppose à cette demande en soutenant que ces désordres résultent d'erreurs d'exécution des entreprises intervenues sur le chantier et non d'une erreur de conception et en exposant par ailleurs qu'il n'assurait pas la maîtrise d'oeuvre d'exécution des travaux.

Il apparaît cependant :

- que la Cour de cassation a, dans son arrêt du 6 décembre 2011, rejeté le pourvoi dirigé par M. [Y] contre l'arrêt du 30 novembre 2009 en considérant qu'après avoir relevé que

M. [Y] était le seul à pouvoir assurer le rôle de maître d'oeuvre au sein du GIE, qu'il avait dressé, le 18 octobre 1984, une liste d'anomalies avec M. Lafontaine et que son rôle central ressortait clairement d'une lettre du 13 novembre 1984 adressée à la société Lafontaine, la cour d'appel a pu, après avoir analysé les documents qui étaient dans le débat, en déduire que M. [Y] avait assuré, dans le cadre de sa collaboration avec le GIE, la maîtrise d'oeuvre du chantier,

- qu'à défaut de réception des travaux, la responsabilité du maître d'oeuvre, de conception et/ou d'exécution, ne peut être retenue que sur la preuve d'une faute de sa part,

- qu'en l'état des pièces versées aux débats et notamment du rapport d'expertise de M. [E] qui, en raison du remplacement de l'installation antérieurement à ses opérations, n'a pu faire aucune constatation de ce chef et à défaut d'autre élément de preuve, aucun élément du dossier n'établit que les désordres ayant affecté l'installation de chauffage-climatisation sont imputables à une erreur de conception commise par M. [Y] et/ou à un défaut de surveillance des travaux de mise en oeuvre de cette installation, toutes erreurs qui ne peuvent se déduire de la seule existence des dysfonctionnements de l'installation.

Les consorts [T] et autres seront donc déboutés de leur appel en garantie de ce chef, en ce qu'il est fondé sur un manquement de M [Y] à ses obligations de maître d'oeuvre.

2 - Sur la demande en garantie des sommes versées à la société Lafontaine :

Les consorts [T] et autres font grief à M. [Y] :

- d'une part, d'avoir assumé une mission de maîtrise d'oeuvre nécessitant une qualification d'architecte qu'il ne détenait pas et sans avoir souscrit une assurance garantissant sa responsabilité personnelle,

- d'autre part, d'avoir représenté le GIE dans la conclusion du marché de travaux alors qu'il n'avait pas la qualité de représentant légal de ce groupement qui était par ailleurs dissous à la date de conclusion du marché,

Il y a lieu, s'agissant de premier grief, de considérer :

- qu'il est constant et non contesté que le projet immobilier litigieux nécessitait l'intervention d'un architecte ou d'un agréé en architecture pour établir le dossier de demande de permis de construire,

- que si M. [Y] justifie avoir déposé dans le délai prévu par la loi du 3 janvier 1977 une demande d'inscription auprès du conseil régional de l'ordre des architectes en qualité d'agréé en architecture (pièces n° 24 et 25), il ne justifie cependant pas de son inscription effective en cette qualité, étant observé :

$gt; que sur les formulaires de demande de permis de construire afférents au projet litigieux (pièces n° 3 et 4 produites par les consorts [T] et autres), il a apposé un cachet faisant seulement état de sa qualité de 'maître d'oeuvre' et que la rubrique déterminant la qualité de l'auteur du projet architectural (architecte, agréé en architecture, maître d'oeuvre indépendant, demandeur ou autre) n'est pas renseignée,

$gt; que la police d'assurance dont il justifie (pièces n° 3 et 27) de la souscription auprès de la Compagnie Mutuelle Parisienne de Garantie est intitulée 'police de base des responsabilités professionnelles des maîtres d'oeuvre, ingénieurs-conseils et techniciens du bâtiment' et ne fait aucune référence à son titre professionnel.

S'agissant du deuxième grief, il y a lieu de considérer :

- que M. [Y] a signé le marché de travaux en qualité de représentant d'un GIE dissous à la date de la conclusion de la convention, dont il n'était ni membre ni administrateur et sans justifier d'un mandat spécial régulièrement délivré par les organes légaux de cette structure,

- que la circonstance que le marché de travaux a été déclaré opposable au GIE est sans incidence dès lors que cette opposabilité - au profit des tiers avec lesquels M. [Y] a contracté - n'est fondée que sur l'apparence de régularité du pouvoir de représentation dont se prévalait M. [Y] mais qu'elle n'interdit pas au GIE ou à ses membres d'exciper de ce défaut de pouvoir, dans leurs relations avec M. [Y],

- que la seule circonstance que deux des membres du GIE (MM. [P] et [C]) sont personnellement intervenus dans l'opération de construction est insuffisante à caractériser une ratification a posteriori, non équivoque, du défaut de pouvoir originel de

M. [Y] par le GIE, opposable aux membres de cette structure qui ne sont pas intervenus dans la construction et dont il n'est pas établi qu'ils ont personnellement donné leur accord à la passation du marché, alors même que la personnalité morale du GIE ne subsistait que pour les besoins de sa dissolution et non pour permettre la conclusion de nouveaux contrats.

Les fautes reprochées à M. [Y] sont ainsi caractérisées et sont de nature à engager sa responsabilité envers les consorts [T] et autres sur le fondement de l'article 1383 du code civil.

Le préjudice en résultant pour les consorts [T] et autres consiste dans le montant des sommes qu'ils ont été condamnés, en qualité de membres du GIE Bati 2000, à verser à la société Lafontaine à concurrence d'un montant de 470 932 € dont il n'est pas contesté qu'il couvre intégralement le coût des travaux de reprise, les moins-values irréductibles, les autres chefs de préjudice et les frais engagés par la société Lafontaine dont les droits ont été remplis par ces versements (cf. page 23 de l'arrêt du 30 novembre 2009).

En effet, le préjudice résultant, pour les membres du GIE, de la signature par M. [Y] d'un marché de travaux engageant, à l'égard des tiers et notamment du maître d'ouvrage, la responsabilité personnelle et illimitée des membres du GIE, sans que M. [Y] ait eu pouvoir régulier de représentation de cette structure, qui plus est dissoute au moment de la conclusion du contrat litigieux, consiste :

- non seulement dans les sommes qu'ils ont été conduits à régler au maître d'ouvrage en réparation des manquements personnels de M. [Y] à ses obligations de maître d'oeuvre,

- mais également dans les sommes qu'ils ont dû acquitter au titre de la réparation des désordres imputables aux entreprises intervenues sur le chantier à laquelle ils n'auraient jamais été astreints de contribuer si M. [Y] n'avait pas engagé le GIE à l'égard de la société Lafontaine en créant l'apparence - trompeuse - d'un pouvoir de représentation de celui-ci.

Dès lors :

- d'une part, que M. [Y] a déjà été condamné à payer aux consorts [T], par les dispositions non censurées de l'arrêt du 30 novembre 2009, la somme de 24 770,23 € au titre de la part de préjudice résultant de ses propres manquements à ses obligations de maître d'oeuvre,

- d'autre part, que la somme de 470 932 € versée par les consorts [T] et autres a rempli la société Lafontaine de l'intégralité de ses droits,

il convient de condamner M. [Y] à payer aux consorts [T] et autres la somme de 446 161,77 €, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 30 novembre 2009.

III - Sur la demande en dommages-intérêts complémentaires :

L'importance même et la gravité des fautes commises par M. [Y] en termes de conséquences financières et procédurales pour les consorts [T] et autres justifient l'octroi à ceux-ci d'une indemnité complémentaire globale de 15 000 € en réparation de leur préjudice moral incontestable.

IV - Sur les demandes accessoires :

L'équité commande d'allouer aux consorts [T] et autres, en application de l'article 700 du code de procédure civile la somme globale de 5 000 € au titre des frais irrépétibles par eux exposés dans le cadre de leur intervention volontaire en cause d'appel et de la procédure sur renvoi de cassation.

M. [Y] sera condamné aux entiers dépens de la présente instance.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Après en avoir délibéré, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

Vu le jugement du tribunal de grande instance de Bayonne en date du 18 février 1997,

Vu l'arrêt de cette Cour en date du 30 novembre 2009,

Vu l'arrêt de la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation en date du 6 décembre 2011,

Rejette les fins de non-recevoir soulevées par M. [Y] sur le fondement de l'article 1351 du code civil.

Condamne M. [Y] à payer à M. [Q] [T], M. [K] [I], M. [B]-[O] [C] et Mmes [D] et [O] [I], ès qualités d'ayant droit de feu M. [O] [I], les sommes de :

- 446 161,77 € (quarante quatre mille cent soixante et un euros et soixante dix sept centimes) augmentée des intérêts au taux légal à compter du 30 novembre 2009,

- 15 000 € (quinze mille euros) à titre de dommages-intérêts complémentaires,

- 5 000 € (cinq mille euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Déboute M. [Q] [T], M. [K] [I], M. [B]-[O] [C] et Mmes [D] et [O] [I], ès qualités d'ayant droit de feu M. [O] [I], de leur demande distincte en paiement de la somme de 22 486,40 € (vingt deux mille quatre cent quatre vingt six euros et quarante centimes).

Condamne M. [Y] à payer aux consorts [T] et autres, en application de l'article 700 du code de procédure civile, la somme globale de 5 000 € (cinq mille euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne M. [Y] aux entiers dépens.

Le présent arrêt a été signé par M. Castagné, Conseiller, faisant fonction de Président, et par Mme Vicente, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,

Sandra VICENTE Patrick CASTAGNE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 13/00521
Date de la décision : 04/06/2015

Références :

Cour d'appel de Pau 01, arrêt n°13/00521 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-06-04;13.00521 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award