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13/02/2014 | FRANCE | N°12/00732

France | France, Cour d'appel de Pau, Chambre sociale, 13 février 2014, 12/00732


RC/CD



Numéro 14/00603





COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale







ARRÊT DU 13/02/2014









Dossier : 12/00732





Nature affaire :



Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution















Affaire :



[J] [E]-

[L]



C/



Société ADREXO







































RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R Ê T



Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 13 Février 2014, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du C...

RC/CD

Numéro 14/00603

COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 13/02/2014

Dossier : 12/00732

Nature affaire :

Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution

Affaire :

[J] [E]-

[L]

C/

Société ADREXO

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 13 Février 2014, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 16 Décembre 2013, devant :

Monsieur CHELLE, Président

Madame PAGE, Conseiller

Monsieur GAUTHIER, Conseiller

assistés de Madame HAUGUEL, Greffière.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANT :

Monsieur [J] [E]-[L]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par la SELARL ARAEZ/CAZAURAN/BONNEMASON CARRERE, avocats au barreau de PAU

INTIMÉE :

Société ADREXO

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par Maître MARCHESSEAU LUCAS, avocat au barreau de PAU

sur appel de la décision

en date du 06 FÉVRIER 2012

rendue par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE PAU

RG numéro : F10/00096

FAITS ET PROCÉDURE

M. [E] [L] a été engagé par la société Kicible le 7 février 2005 en qualité d'attaché commercial, statut agent de maîtrise. En février 2007, du fait d'un rapprochement de cette société avec la société Adrexo, les contrats de travail ont été transférés à la société Adrexo Sud-Ouest, puis à la société Adrexo.

M. [E] [L] a été licencié le 5 mars 2009, après convocation à un entretien préalable fixé le 18 février 2009.

Par requête en date du 18 février 2010, M. [E] [L] a saisi le Conseil des Prud'hommes de Pau aux fins de contester son licenciement et obtenir la condamnation de la société Adrexo à lui payer des dommages et intérêts et diverses indemnités, ainsi qu'à requalifier son statut d'agent de maîtrise en statut cadre.

Par jugement en date du 6 février 2012, auquel il y a lieu de renvoyer pour plus ample exposé des faits et des prétentions initiales des parties, le Conseil de Prud'hommes de Pau a ainsi statué :

· dit que le licenciement de M. [E] [L] repose sur une cause réelle et sérieuse,

· dit que M. [E] [L] avait une position cadre niveau 3.1 depuis le mois d'avril 2008,

· condamne la société Adrexo à payer à M. [J] [E] [L] les sommes suivantes :

- 3.674 € au titre de rappel de salaire sur la position cadre niveau 3.1,

- 600 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

· déboute les parties du surplus de leurs demandes,

· laisse à la charge de chaque partie les dépens par elles exposés.

Par lettre recommandée avec avis de réception de son conseil mentionnant la date d'expédition du 20 février 2012 et reçue au greffe de la Cour le 22 février suivant, M. [E] [L] a interjeté appel de la décision.

L'affaire a été fixée à l'audience du 16 décembre 2013 pour laquelle les parties ont été convoquées avec proposition d'un calendrier de procédure.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions écrites déposées le 27 septembre 2013 et reprises oralement, auxquelles il convient de se référer pour le détail de l'argumentation, M. [J] [E] [L] demande à la Cour de :

- dire et juger que sa requête est parfaitement fondée et recevable,

- infirmer le jugement du 6 février 2012 en ce qu'il dit et juge que le licenciement intervenu en date du 5 mars 2009 s'analyse en un licenciement pour cause réelle et sérieuse en déboutant le salarié de l'ensemble de ses demandes afférentes à la requalification en statut cadre et à la rupture abusive du contrat avec toutes conséquences de droit ;

Par conséquent, statuant de nouveau :

- voir condamner l'employeur au paiement de la somme de 22.500 € d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse correspondant à dix mois de salaire,

- voir condamner la société Adrexo Sud-Ouest au paiement de la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,

- voir condamner, sur la base d'une requalification du statut du salarié en cadre, niveau 3.2, la société Adrexo Sud-Ouest au paiement de la somme de 18.198 € à titre de rappels des salaires,

- voir ordonner la communication sous astreinte de 100 € par jour de retard de bulletin de paie rectificatif à compter du prononcé du jugement à intervenir,

- voir condamner la société Adrexo Sud-Ouest au paiement de la somme de 2.500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- voir ordonner la communication des bulletins de paie sous astreinte de 100 € par jour de retard.

M. [E] [L] soutient :

Sur le licenciement, qu'il lui est reproché d'avoir refusé une affectation géographique à [Localité 4], alors que l'avertissement du 27 mai 2008 lui reprochait déjà de refuser toute affectation sur le périmètre géographique de [Localité 4] ; que les avertissements des 27 mai et 24 juillet 2008, ainsi que la lettre de licenciement du 5 mars 2009 sanctionnent strictement les mêmes faits, à savoir le refus pour le salarié d'être affecté sur l'agence de [Localité 4] ; que l'employeur ne pouvait sanctionner ces mêmes faits une troisième fois ; que le grief est d'autant plus mal fondé que le contrat de travail et ses avenants successifs précisent que le lieu de travail est situé à [Localité 3] dans les Pyrénées-Atlantiques ; qu'une telle modification est une modification du contrat de travail et non un simple changement des conditions de travail ; que l'employeur ne pouvait passer outre le refus du salarié ; que le contrat de travail prévoit la seule faculté de confier au salarié des missions ponctuelles sur d'autres zones géographiques ; sur la prétendue non atteinte des objectifs, qu'aucun justificatif n'est fourni par l'employeur ; que ce grief est par ailleurs parfaitement mal fondé ; que le salarié a toujours contesté cette non atteinte des objectifs ; qu'il a déjà été sanctionné pour une prétendue non atteinte des objectifs en date du 24 juillet 2008 ; que la règle non bis in idem est donc manifestement applicable en l'espèce ; sur la prétendue insubordination du salarié, que la lettre de licenciement ne précise strictement aucun point relatif à cette insubordination ;

Sur la requalification du statut juridique du salarié, M. [E] [L] soutient que le statut de responsable commercial grand compte a été reconnu par l'employeur lui-même et par les fonctions qui lui étaient dévolues ; que ce statut se trouve matérialisé par les bulletins de paie à partir d'avril 2008, avec une rémunération scindée en 6 postes et non plus 4 ; que ce statut lui est reconnu par la convention collective nationale de la distribution directe ; qu'il a toujours été présenté comme responsable au sein des agences de [Localité 5] et [Localité 4] ; qu'en le rétrogradant à un poste de A.T.C. suite à une promotion en qualité de RCGC, l'employeur a prononcé une sanction disciplinaire déguisée sans respecter la procédure disciplinaire ; qu'il exerçait en réalité les fonctions de RCGC ; sur les conséquences financières, que la perte est estimée à 18.198 € sur 27 mois ; qu'il subit un préjudice moral.

Par conclusions écrites déposées le 25 octobre 2013 et reprises oralement, auxquelles il convient de se référer pour le détail de l'argumentation, la société Adrexo demande à la Cour de :

Sur le licenciement :

- dire et juger que le licenciement de M. [E] [L] était parfaitement fondé sur une cause réelle et sérieuse en raison de son refus d'accepter une mutation conforme à sa clause de mobilité ;

En conséquence,

- confirmer le jugement du 6 février 2012 en ce qu'il a jugé que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse et a débouté M. [E] [L] de ses demandes indemnitaires ;

Sur la requalification de son statut :

- dire et juger que M. [E] [L] ne saurait prétendre au statut de responsable Commercial Grand Compte ;

En conséquence,

- réformer le jugement du 6 février 2012 en ce qu'il a reconnu à M. [E] [L] le statut de Responsable Commercial Grand Compte position 3.1 de la Convention Collective,

- débouter M. [E] [L] de ses demandes de rappel de salaire ;

Subsidiairement,

Si la Cour faisait droit à la demande de requalification du statut en responsable Commercial Grand Compte position 3.1,

- réformer le jugement en ce qu'il a octroyé à M. [E] [L] un rappel de salaire de 3.674 € bruts,

- constater que M. [E] [L] ne saurait prétendre à un rappel de salaire total supérieur à 2.672 € bruts ;

En tout état de cause,

- condamner M. [E] [L] à la somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

- le débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions.

La société intimée fait notamment valoir que le rapprochement des sociétés Adrexo et Kicible le 21 août 2006 a donné naissance à la société Adrexo Sud-Ouest, qui a repris les contrats de travail, dont celui de M. [E] [L], mais qu'à compter du 13 octobre 2008, la société Adrexo Sud-Ouest a été mise en location-gérance et que l'ensemble des contrats de travail ont été transféré à la société Adrexo, de sorte qu'il convient de rectifier le jugement du Conseil de Prud'hommes rendu contre la société Adrexo Sud-Ouest.

Sur le licenciement, la société Adrexo fait valoir que les avertissements des 27 mai et 24 juillet 2008 n'ont absolument aucun rapport avec le licenciement prononcé le 5 mars 2009 ; que l'avertissement du 27 mai 2008 sanctionnait le non-respect des procédures de règlement en vigueur dans l'entreprise, et celui du 24 juillet 2008 la non atteinte des objectifs contractuels ; que la lettre du 29 octobre 2008 ne constituait pas une sanction mais une mise en demeure de respecter ses obligations contractuelles et de prendre en charge le périmètre de [Localité 4] ; que son licenciement est notifié en raison de son insubordination consécutive à son refus persistant de travailler sur le centre de [Localité 4] et non pas sur les motifs des précédents avertissements ; la société rappelle les termes du contrat de travail. L'employeur soutient qu'il contient bien une clause de mobilité au sens de la jurisprudence qui la définit comme étant une clause par laquelle le salarié accepte par avance toute mutation que rend nécessaire la bonne marche de l'entreprise ; qu'en refusant de prendre en charge le secteur de [Localité 4], le salarié a fait preuve d'insubordination et a manqué à ses obligations contractuelles ; qu'il reconnaît dans ses différents courriers qu'il travaillait sur le centre de [Localité 4] et précise à plusieurs reprises qu'il avait accepté cette mutation dans la perspective d'être promu au poste de RCGC ; qu'il a d'ailleurs cessé de travailler sur [Localité 4] lorsqu'il a su qu'il ne bénéficierait pas de cette promotion ; que cette insubordination justifiait parfaitement un licenciement pour cause réelle et sérieuse ; que le licenciement n'a jamais été fondé sur les mauvais résultats du salarié. Que la lettre de licenciement, commence par rappeler l'historique des relations contractuelles entre les parties ; explique les raisons qui ont conduit à l'abandon de la promotion de M. [E] [L] au poste de RCGC ; finit par énoncer le motif du licenciement.

Sur les demandes relatives à la requalification de son statut juridique, la société Adrexo fait valoir que, effectivement, une promotion avait été envisagée début 2008 ; que cette promotion n'a jamais abouti compte tenu des manquements contractuels de M. [E] [L] qui ne respectait pas les procédures de règlements, et laissait ses prestations de vente se dégrader ; que ces faits avaient d'ailleurs fait l'objet d'avertissements et ont eu pour effet de remettre en cause les projets qui avaient été envisagés ; que ses bulletins de salaire n'ont jamais mentionné le statut de Responsable Commercial Grand Compte qu'il revendique, mais celui d'Attaché Commercial ; que si effectivement, il a perçu en avril 2008, et uniquement sur ce mois-ci, une prime sur la marge, il ne s'agit que d'une erreur qui n'a jamais été renouvelée.

La Cour se réfère expressément aux conclusions visées ci-dessus pour un plus ample exposé des moyens de fait et de droit développés par les parties.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L'appel, interjeté dans les formes et délais prescrits par la loi, est recevable en la forme.

Sur l'identité de l'employeur :

L'employeur fait valoir que le rapprochement des sociétés Adrexo et Kicible le 21 août 2006 a donné naissance à la société Adrexo Sud-Ouest, qui a repris les contrats de travail, dont celui de M. [E] [L], mais qu'à compter du 13 octobre 2008, la société Adrexo Sud-Ouest a été mise en location-gérance et que l'ensemble des contrats de travail ont été transféré à la société Adrexo, société par actions simplifiée dont le siège est à Aix-en-Provence, de sorte qu'il convient de rectifier le jugement du Conseil de Prud'hommes rendu contre la société Adrexo Sud-Ouest.

Le salarié appelant n'élève aucune objection sur ce point, que le Conseil de Prud'hommes a omis de prendre en considération.

Il convient en conséquence de faire droit à cette demande et, rectifiant en ce sens le jugement du Conseil de Prud'hommes, de dire que l'employeur de M. [E] [L] est la société Adrexo et non la société Adrexo Sud-Ouest.

Sur le licenciement :

M. [E] [L] a été licencié pour cause réelle et sérieuse.

En application des dispositions de l'article L. 1235-1 du code du travail le juge apprécie le caractère réel et sérieux des motifs invoqués dans la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige et sert de cadre strict à son contrôle, et forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties.

En l'espèce, la lettre de licenciement du 5 mars 2009 (pièce n° 16 du salarié et 18 de l'employeur) rappelle d'abord l'historique des relations avec le salarié depuis le 7 février 2005, son affectation aux secteurs d'activité de [Localité 2] et [Localité 5], puis en sus celui de [Localité 4], rappelle également deux avertissements notifiés au salarié les 27 mai et 24 juillet 2008. La lettre rappelle ensuite que le salarié a été « affecté géographiquement sur le poste de [Localité 4] », mais aussi un projet de promotion du salarié en qualité de Responsable Commercial Grand Compte (RCGC), projet abandonné en raison de « résultats négatifs et particulièrement insuffisants », ainsi que son rattachement au secteur d'activité couvrant les agences de [Localité 5] et [Localité 4].

Puis, la lettre énonce un motif ainsi rédigé :

« Ainsi, vous n'êtes pas fondé aujourd'hui, à remettre en cause votre affectation géographique. Votre refus persistant de poursuivre votre activité professionnelle révèle une volonté manifeste d'insubordination qui ne peut être justifiée par aucune de vos affirmations.

Votre comportement et vos manques de résultats causent des troubles importants et gravement préjudiciables à notre société.

De ce fait, nous sommes amenés à vous licencier pour cause réelle et sérieuse, pour insubordination, et manquement à vos obligations contractuelles. ».

Il ressort de cette lettre, nonobstant la forme de sa rédaction, quelque peu complexe, que le motif de licenciement en est limité à l'insubordination résultant, selon l'employeur, du refus du salarié de prendre en charge le secteur de [Localité 4], les autres considérations ne représentant que des rappels, notamment le manque de résultat, lequel n'est d'ailleurs pas détaillé dans des conditions qui permettraient d'en faire un grief utile pour le licenciement.

Ainsi, les considérations de M. [E] [L] sur le fait que la lettre de licenciement serait fondée sur les mêmes griefs que ceux précédemment sanctionnés par les deux avertissements ne sont pas pertinentes, les allusions aux faits des avertissements précédents n'étant que des rappels.

De fait, l'avertissement du 27 mai 2008 (pièce n° 6 de l'employeur) est sans lien avec le licenciement, puisqu'il sanctionne le non-respect des procédures de règlement en vigueur dans l'entreprise. L'avertissement du 24 juillet 2008 (pièce n° 7 de l'employeur) sanctionne le défaut d'atteinte des objectifs contractuels. Ces deux avertissements n'ont pas fait l'objet de contestations par le salarié.

Le moyen de contestation tiré de la règle non bis in idem doit donc être écarté.

De même, la discussion sur les objectifs du salarié n'est pas davantage pertinente, aucun grief n'en étant tiré pour le licenciement.

Contrairement à ce que soutient le salarié, l'attitude d'insubordination qui lui est reprochée est tout à fait précisée par la lettre de licenciement, puisqu'il en résulte, comme analysé supra, que l'employeur lui reproche un refus persistant d'affectation géographique, plus précisément de prendre en charge le secteur de [Localité 4] en sus du secteur qui lui était attribué. Il ressort du compte rendu d'entretien rédigé par le représentant du personnel présent (pièce n° 15 du salarié) que le seul motif de licenciement évoqué lors de cet entretien est bien le refus de travailler sur [Localité 4].

Sur ce point précis, le salarié soutient que son lieu de travail est situé à [Localité 3] dans les Pyrénées-Atlantiques, et que le grief tiré de son refus d'être affecté sur les agences de [Localité 4] et [Localité 5] est mal fondé ; que l'employeur ne pouvait imposer une modification du lieu de travail et passer outre son refus d'être affecté à ces agences.

La société Adrexo invoque alors les termes du contrat de travail, pour considérer qu'il comporte une clause de mobilité qui lui permettait d'imposer à M. [E] [L] de prendre en charge le secteur de [Localité 4] en sus de son secteur de [Localité 5].

Le contrat de travail de M. [E] [L] (pièce n° 1 de l'employeur) contient une clause ainsi libellée en page 3 :

« LIEU DE TRAVAIL : Vous exercez vos fonctions à l'agence de la société située [Adresse 2], sans que cette affectation puisse être considérée comme un élément essentiel du contrat de travail. Vous acceptez en outre par avance toute modification de votre lieu de travail qui pourrait être justifiée par les besoins de l'entreprise, sans que cela puisse être considéré comme une modification de votre contrat de travail.

MOBILITE INTERNE : Compte tenu de ce qui précède et afin d'assurer le bon fonctionnement de l'entreprise, la direction de Kicible se réserve la possibilité de vous muter sur une autre société du Groupe ou sur un autre de ses sites. ».

Le salarié ne conteste pas la licéité de cette clause, et se borne à soutenir que son employeur devait recueillir préalablement son accord.

Pour autant, c'est à bon droit qu'en l'espèce la société Adrexo peut soutenir qu'elle pouvait unilatéralement étendre le secteur d'activité de M. [E] [L] au secteur limitrophe de [Localité 4].

Au surplus, il apparaît que le tableau d'objectifs de M. [E] [L] pour 2008 (pièce n° 5 de l'employeur) incluait la zone de [Localité 4]. Il ressort de cette même pièce que le salarié a signé l'avenant à son contrat de travail traitant de sa rémunération et de ses objectifs pour 2008 avec la mention « Bon pour accord, reçu en main propre le 20/02/2008 ». Or, il est établi, notamment par un message électronique du 20 octobre 2008 (pièce n° 4 de l'employeur), que les parties considéraient comme acquis que la zone d'activité du salarié incluait celle de [Localité 4].

Ainsi, M. [E] [L] est malvenu à soutenir aujourd'hui que l'employeur n'aurait pas pu lui affecter la zone de [Localité 4], ni qu'il aurait été fondé à refuser de travailler sur cette zone, ni même qu'il aurait refusé de le faire durant l'année 2008.

Il en résulte que c'est à juste titre que le Conseil de Prud'hommes, dont le jugement sera confirmé sur ce point, a pu estimer que M. [E] [L], en refusant finalement malgré mise en demeure d'inclure la zone de Saint-Gaudens dans son secteur d'activité, avait commis une faute vis-à-vis de son employeur et fait preuve d'insubordination, ce qui justifiait son licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Sur le statut de M. [E] [L] et sa requalification :

M. [E] [L] demande de condamner la société Adrexo, sur la base d'une requalification de son statut en cadre, niveau 3.2, au paiement de la somme de 18.198 € à titre de rappels des salaires.

Il soutient que le statut de Responsable Commercial Grand Compte lui a été reconnu par l'employeur lui-même et par les fonctions qui lui étaient dévolues ; que ce statut se trouve matérialisé par les bulletins de paie à partir d'avril 2008, avec une rémunération scindée en 6 postes et non plus 4.

Le statut de Responsable Commercial Grand Compte (RCGC) est prévu par la convention collective nationale de la distribution directe, dont l'applicabilité n'est pas contestée.

La société Adrexo reconnaît qu'une promotion de M. [E] [L] en ce sens avait bien été envisagée au début de l'année 2008, mais fait valoir que ce projet n'a jamais abouti compte tenu des manquements contractuels du salarié, qui ne respectait pas les procédures de règlements et laissait ses prestations de vente se dégrader. L'employeur observe que le salarié a fait l'objet d'avertissements pour ces raisons, et soutient d'ailleurs, que c'est l'abandon du projet de promotion qui a entraîné le retrait du salarié de la zone de [Localité 4] sur laquelle il avait pourtant commencé à travailler.

Il incombe au salarié de rapporter la preuve qu'il exerçait réellement dans l'entreprise les fonctions correspondant à la qualification professionnelle revendiquée.

Les définitions des classifications résultent de l'annexe I de la convention collective nationale du 9 février 2004.

Le niveau 3 est relatif aux cadres :

Le niveau 3.1 correspond à un « cadre diplômé ou cadre acquérant cette qualité en raison notamment de son expérience. Il participe à l'organisation et au fonctionnement d'un service. S'il a été nommé cadre en raison de son expérience, il peut aussi diriger une équipe ou un service. ».

Niveau 3.2 correspond à un « cadre justifiant d'une très bonne maîtrise des connaissances et des techniques nécessaire à l'exercice de sa fonction. ».

M. [E] [L] ne produit aucun élément justifiant de la réalité du contenu des fonctions exercées pour démontrer qu'elles auraient été conformes à ces définitions, et se limite à procéder par affirmations, non étayées, de ce qu'il aurait possédé « les compétences techniques, administratives, juridiques et commerciales nécessaires », ainsi que « une autonomie complète dans la prise de décision et dans la gestion et la coordination de l'activité des collaborateurs. ». Il ne précise même pas en quoi consistait les fonctions qu'il exerçait, ni la façon dont il les exerçait, ni s'il avait à travailler en équipe.

Les attestations élogieuses quoique non circonstanciées et ne décrivant aucunement ses fonctions, que produit M. [E] [L] (ses pièces 12 à 14) ne peuvent pallier le défaut de preuve des fonctions réellement exercées.

Son contrat de travail et les avenants, ainsi que ses bulletins de salaire, ont toujours porté la mention « attaché commercial » statut agent de maîtrise, et jamais la fonction de cadre RCGC.

Si, une seule fois, une rémunération inhabituelle apparaît sur le bulletin de paie d'avril 2008, en l'espèce, une prime sur la marge, l'employeur peut soutenir sans être démenti qu'il s'agissait d'une erreur de son service central de paie, qui ne s'est pas renouvelée sans que le salarié n'en revendique le versement pour les mois suivants.

Dans ces conditions, c'est à tort que le Conseil de Prud'hommes a estimé que M. [E] [L] avait une position cadre niveau 3.1 à partir d'avril 2008, et son jugement sera infirmé de ce chef.

M. [E] [L] sera débouté de ses demandes de requalification de son statut et de rappel de salaire afférent.

Sur les autres demandes :

M. [E] [L], dont toutes les demandes sont rejetées, n'avait pas vocation à se voir allouer en première instance une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et le jugement sera également infirmé sur ce point. De même, il devra supporter les entiers dépens de la décision de première instance.

Partie tenue aux dépens d'appel, M. [E] [L], appelant et qui succombe en toutes ses demandes, paiera à la société Adrexo la somme de 750 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en compensation de ses frais irrépétibles en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud'homale et en dernier ressort,

Déclare l'appel recevable en la forme,

Rectifiant en ce sens le jugement du Conseil de Prud'hommes, dit que l'employeur de M. [J] [E] [L] est la société Adrexo, société par actions simplifiée dont le siège est à Aix-en-Provence, et non la société Adrexo Sud-Ouest,

Confirme le jugement rendu entre les parties par le Conseil de Prud'hommes de Pau en date du 6 février 2012 en ce qu'il a dit que le licenciement de M. [J] [E] [L] reposait sur une cause réelle et sérieuse, et débouté le salarié de ses demandes afférentes,

L'infirmant pour le surplus, et statuant à nouveau,

Déboute M. [J] [E] [L] de ses demandes de requalification de son statut et de rappel de salaire afférent,

Dit n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du code de procédure civile en première instance,

Dit que les dépens de première instance seront intégralement à la charge de M. [J] [E] [L],

Y ajoutant,

Condamne M. [J] [E] [L] à payer à la société Adrexo la somme de 750 € en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

Condamne M. [J] [E] [L] aux dépens d'appel.

Arrêt signé par Monsieur CHELLE, Président, et par Madame HAUGUEL, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE,LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12/00732
Date de la décision : 13/02/2014

Références :

Cour d'appel de Pau 3S, arrêt n°12/00732 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-02-13;12.00732 ?
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