FP/AM
Numéro 13/4840
COUR D'APPEL DE PAU
1ère Chambre
ARRET DU 19/12/2013
Dossier : 12/02456
Nature affaire :
Demande en réparation des dommages causés par l'activité des auxiliaires de justice
Affaire :
SARL VINTAGES
C/
SARL AUDITEC AQUITAINE
[I] [Q]
Grosse délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R E T
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 19 décembre 2013, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 01 octobre 2013, devant :
Madame PONS, Président, magistrat chargé du rapport conformément à l'article 785 du code de procédure civile
Monsieur CASTAGNE, Conseiller
Madame BENEIX, Conseiller
assistés de Madame PEYRON, Greffier, présente à l'appel des causes.
Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.
Le ministère public a eu connaissance de la procédure le 10 décembre 2012.
dans l'affaire opposant :
APPELANTE :
SARL VINTAGES
[Adresse 2]
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par son gérant, Monsieur [X] [S], domicilié en cette qualité audit siège social
représentée par l'AARPI PIAULT - LACRAMPE-CARRAZE, avocats à la Cour
assistée de Maître Jean-Jacques LE PEN, avocat au barreau de PARIS
INTIMES :
SARL AUDITEC AQUITAINE
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 1]
représentée par son gérant en exercice, domicilié en cette qualité audit siège
Monsieur [I] [Q]
né le [Date naissance 1] 1951 à [Localité 3] (Angleterre)
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 1]
représentés par Maître Nicolas LACOMME, avocat au barreau de DAX
assistés de Maître François MASSOT, avocat au barreau de PARIS
sur appel de la décision
en date du 27 JUIN 2012
rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE DAX
La SARL Vintages exerce une activité de négociant en vins à [Localité 2] (Gironde).
La société Auditec Aquitaine, représentée par son associé M. [Q], a été désignée en qualité de commissaire aux comptes par une assemble générale en date du 27 juin 2000.
Il a été mis fin à sa mission par décision du 29 décembre 2007.
En 2007, la société Vintages a fait l'objet d'une vérification de comptabilité pour la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006 pour l'ensemble des déclarations et, pour la TVA, du 1er janvier 2004 au 31 août 2007, contrôle aboutissant à des redressements tant en matière d'impôts sur les sociétés qu'en matière de TVA.
Elle a été mise en demeure de régler la somme de 368 282 € ramenée à la somme de 360 231 € après compensation avec une créance existant à son profit.
La société Vintages, par acte en date du 20 décembre 2010, a fait assigner la SARL Auditec Aquitaine et M. [Q] en responsabilité sur le fondement des articles L. 822-17, L. 822-18, L. 822-10, L. 225-254 et L. 110-4 du code de commerce et de l'article 10 du code de déontologie des commissaires aux comptes, devant le tribunal de grande instance de Dax en arguant de ce que M. [Q], agissant pour le compte de la société Auditec, s'est livré à des travaux de comptabilité outrepassant le mandat qui lui avait été confié limité à la vérification de la régularité et de la sincérité des comptes, s'est immiscé dans sa gestion et a commis dans les diligences comptables des erreurs qui ont directement contribué au redressement fiscal qui lui a été notifié et dont elle lui impute la responsabilité à hauteur de la somme de 167 833 €.
Par jugement en date du 27 juin 2012, le tribunal a :
- débouté la SARL Vintages de l'ensemble de ses demandes,
- condamné la SARL Vintages à payer à la SARL Auditec Aquitaine la somme de 7 352,56 €, représentant le solde d'une facture d'honoraires,
- condamné la SARL Vintages à payer à la SARL Auditec Aquitaine la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté la SARL Auditec Aquitaine du surplus de ses demandes,
- condamné la SARL Vintages aux dépens.
Par déclaration reçue au greffe de la Cour le 12 juillet 2012, la SARL Vintages a relevé appel de cette décision.
Dans ses dernières écritures déposées le 29 août 2013, elle demande à la Cour au visa des articles L. 823-10 alinéa 1, L. 225-254 du code de commerce, et L. 110-4 du code de
commerce, de l'article 10 du code de déontologie des commissaire aux comptes, des articles L. 822-17, L. 822-18 du code de commerce,
' de déclarer recevable et bien fondé l'appel interjeté par elle à l'encontre du jugement prononcé le 27 juin 2012 par le tribunal de grande instance de Dax,
' de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré son action recevable,
' de réformer la décision entreprise pour le surplus,
' qu'il soit dit et jugé que M. [I] [Q], agissant en qualité de commissaire aux comptes pour le compte de la société Auditec, commissaire aux comptes titulaire de la société Vintages, a outrepassé son mandat en s'immisçant dans la gestion de la société Vintages et en intervenant dans l'établissement de sa comptabilité,
' qu'il soit dit et jugé que M. [I] [Q] a par ailleurs commis des erreurs dans les diligences comptables réalisées pour la société Vintages qui ont directement contribué au redressement fiscal de la société Vintages notifié pour une somme de 368 282 €,
' qu'il soit dit et jugé que M. [I] [Q], agissant en qualité de commissaire aux comptes pour le compte de la société Auditec, commissaire aux comptes de la société Vintages, a commis des fautes dans l'accomplissement de sa mission de vérification de la régularité de la sincérité des comptes certifiés,
' qu'il soit dit et jugé que les contrôles de comptabilité ont mis en évidence la responsabilité de M. [I] [Q] du fait de ses erreurs pour une somme de 167 833 €.
En conséquence elle sollicite :
' la condamnation 'conjointe et solidaire' de M. [I] [Q] et de la société Auditec à lui régler la somme de 167 833 € en principal avec intérêts à compter du 15 octobre 2010, date de la mise en demeure adressée à M. [I] [Q],
' la condamnation 'conjointe et solidaire' de M. [I] [Q] et de la société Auditec à lui régler la somme de 75 000 €, sauf à parfaire, au titre des préjudices complémentaires subis,
' le débouté de M. [I] [Q] et de la société Auditec de leur demande reconventionnelle,
' la condamnation de M. [I] [Q] et la société Auditec solidairement à verser à la société Vintages une somme de 6 000 € au titre des frais irrépétibles de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans leurs dernières conclusions remises et notifiées le 30 août 2013, les intimés demandent à la Cour au visa des articles L. 822-18 et 225-244 du code de commerce :
- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré recevable l'action de la société Vintages à l'encontre de ses anciens commissaires aux comptes,
- de la dire irrecevable car prescrite,
- de confirmer le jugement entrepris dans toutes ses autres dispositions,
- de condamner la société Vintages au paiement d'une somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
M. le Procureur Général à qui l'affaire a été communiquée a déclaré s'en rapporter.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 2 septembre 2013.
SUR CE :
Sur la recevabilité de l'action
Attendu que les intimés opposent la prescription de l'action intentée à leur encontre par la société Vintages en invoquant les dispositions de l'article L. 822-18 du code de commerce aux termes desquelles, en matière de recherche de responsabilité civile des commissaires aux comptes, l'action doit être engagée dans un délai de trois ans à compter du fait dommageable ou, s'il a été dissimulé, de sa révélation ;
Que d'après eux, en l'espèce, la société Auditec Aquitaine a établi le 4 juin 2007 son dernier rapport de certification sur l'exercice clos le 31 décembre 2006.
Que la prescription est donc intervenue le 4 juin 2010 alors que l'assignation a été délivrée le 20 décembre 2010 ;
Qu'en l'absence de toute dissimulation démontrée, le point de départ du délai ne peut être retardé ;
Que l'action en référé introduite par la société Vintages le 30 décembre 2009 pour obtenir la communication de certains documents mais qui ne mettait pas en cause la responsabilité du commissaire aux comptes ne peut être interruptive de prescription et qu'à tout le moins les exercices antérieurs seraient prescrits ;
Attendu que pour s'opposer à ce moyen, l'appelante fait la distinction entre les fautes commises par le commissaire aux comptes dans le cadre de sa mission et les fautes commises hors mission ;
Que s'agissant des premières elle invoque la dissimulation de ces fautes par le commissaire aux comptes de nature à faire obstacle à la prescription et estime qu'elle a été interrompue par l'assignation en référé du 30 décembre 2009 tendant à obtenir la communication du dossier, des feuilles de travail et du rapport de contrôle établis par lui ;
Que la proposition de redressement qui lui a permis de découvrir les négligences du commissaires aux comptes étant en date du18 décembre 2007, la prescription a été interrompue par cette assignation ;
Que s'agissant des secondes, l'appelante estime qu'elles sont soumises à la prescription de droit commun de l'article L. 110-4 du code de commerce de 10 ans ;
Qu'elle prétend en effet que l'immixtion de la société Auditec et de M. [Q] dans sa gestion était permanente et que les actes hors mission entachés d'erreur réalisés par le commissaire aux comptes, n'ont été portés à sa connaissance qu'au moment de la notification du redressement fiscal ;
Attendu que conformément à l'article L. 822-17 du code de commerce les commissaires aux comptes sont responsables, tant à l'égard de la personne ou de l'entité que des tiers, des conséquences dommageables des fautes et négligences par eux commises dans l'exercice de leurs fonctions.
Que par ailleurs, en application des dispositions combinées des articles L. 225-254 et L. 822-18 de ce même code en matière de recherche de responsabilité civile des commissaires aux comptes, l'action doit être engagée dans un délai de trois ans à compter du fait dommageable ou, s'il a été dissimulé, de sa révélation ;
Qu'en revanche, les obligations résultant des interventions définies par convention se prescrivent conformément au délai de prescription de l'article L. 110-4 du code de commerce ;
Attendu qu'en l'espèce, il résulte de la proposition de rectification adressée le 18 décembre 2007 par l'administration fiscale à la SAS Vintages que celle-ci lui reproche sur la période de vérification de comptabilité,1er janvier 2004 au 31 décembre 2006 pour l'ensemble des opérations étendue jusqu'au 31 août 2007 en matière de TVA, des faits de récupération prématurée de TVA et de déductions de TVA non justifiées ayant entraîné à l'issue du contrôle des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés ainsi que des contributions additionnelles à cet impôt et des rappels de TVA ;
Qu'il est relevé par le signataire de cette proposition, le caractère répétitif de ces manquements, l'importance des majorations constatées, la nature même du procédé utilisé par une déduction au moment du règlement de la facture pro-format comme de la réception de la facture définitive démontrant l'intention délibérée de l'entreprise d'éluder une partie importante de la TVA à payer ;
Attendu que dès lors, le défaut de révélation des irrégularités en matière de déclaration de TVA ayant entraîné le redressement fiscal, est le fait dommageable qui pourrait être reproché au commissaire aux comptes ;
Attendu qu'il résulte des pièces produites par les intimés que le commissaire aux comptes a établi, pendant la durée de son mandat, six rapports généraux (pièces 2 à 7) pour les exercices clos les 31 décembre 2001 signé le 10 juin 2002, 31 décembre 2002 signé le 6 juin 2003, 31 décembre 2003 signé le 17 mai 2004, 31 décembre 2004 signé le 6 juin 2005, 31 décembre 2005 signé le 31 mai 2006 et 31 décembre 2006 signé le 4 juin 2007;
Attendu que la société Auditec ayant été déchargée de son mandat en décembre 2007, il est démontré que pour l'exercice clos le 31 décembre 2007, c'est le nouveau commissaire aux comptes, la société Goriou Faro et associés qui l'a rédigé le 13 juin 2008 ;
Attendu que le dernier rapport général de la SARL Auditec signé par M. [Q] relatif à l'exercice 2006, est en date du 4 juin 2007 ;
Attendu qu'il ne peut donc valablement lui être reproché un défaut de révélation des irrégularités en matière de déclarations de TVA pour l'exercice 2007 ;
Attendu que pour les exercices antérieurs, c'est le rapport général qui aurait dû contenir la révélation des irrégularités ou des informations légalement dues, le point de départ du délai de prescription prévu par les articles L. 225-254 et L. 822-18 du code de commerce étant la date de ce rapport, sauf si le fait dommageable a été dissimulé ;
Attendu que la dissimulation implique la volonté du commissaire aux comptes de cacher des faits dont il a eu connaissance par la certification des comptes ;
Attendu que même si dans ses feuilles de travail la société Auditec a noté des mouvements de fonds importants non justifiés économiquement et l'insuffisance de sensibilisation de la direction à la prise en compte des textes légaux et réglementaires, cette volonté de dissimulation à la société Vintages du défaut de révélation des irrégularités en matière de déclaration de TVA, ne peut résulter de la simple abstention dans les rapports aux assemblées générales, de l'absence de réserve dans l'approbation des comptes ou d'une absence d'information à la direction de la société ;
Qu'en effet, le commissaire aux comptes n'a aucune obligation de conseil vis-à-vis de la société contrôlée si celle-ci ne remplit pas les obligations qui pèsent sur elle en matière de TVA et ce d'autant que l'intention délibérée de la société Vintages d'éluder une partie importante de la TVA à payer résulte des conclusions de l'administration fiscale ;
Attendu que dès lors l'appelante ne démontre aucune dissimulation du commissaire aux comptes ;
Attendu que par assignation en date du 30 décembre 2009, la SARL Vintages a fait assigner la SARL Auditec et M. [Q] devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Dax pour obtenir sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile divers documents dont le dossier, les feuilles de travail et de rapport de contrôle établis dans le cadre de la prestation de commissariat aux comptes en faisant valoir qu'elle entendait engager leur responsabilité ;
Qu'il a été fait droit à sa demande par ordonnance de référé en date du 23 mars 2010 ;
Attendu que cette assignation est donc l'acte interruptif de la prescription ;
Qu'en l'absence de dissimulation de la part du commissaire aux comptes, l'appelante ne saurait rechercher sa responsabilité pour des faits commis à l'occasion de sa mission légale au-delà du 30 décembre 2006 ;
Que sa mission ayant pris fin le 29 décembre 2007, seul peut être poursuivi le défaut de révélation des irrégularités en matière de TVA pour l'exercice clôturé le 31 décembre 2006 certifié le 4 juin 2007 ;
Attendu que s'agissant des faits commis en dehors de son mandat légal, l'appelante invoque, s'agissant de leur prescription, le seul fondement de l'article L. 110-4 du code de commerce dont le délai n'était pas acquis lors de l'assignation introductive d'instance en application des dispositions de l'article 26 de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile ;
Attendu que dès lors, c'est à bon droit que le premier juge a déclaré recevable l'action de la société Vintages ;
Sur la responsabilité du commissaire aux comptes
Attendu que s'agissant du défaut de révélation des irrégularités en matière de déclaration de TVA pour l'année 2006 la responsabilité du commissaire aux comptes doit être appréciée dans le cadre de sa mission de certification qui consiste, selon les articles L. 823-9 et L. 823-10 du code de commerce, à certifier, en justifiant les appréciations portées, que les comptes sont réguliers et sincères et donnent une image fidèle du résultat des opérations de l'exercice écoulé ainsi que de la situation financière et du patrimoine de la personne contrôlée à la fin de l'exercice, et de sa mission permanente consistant à vérifier les valeurs et documents comptables de cette personne, et de contrôler la conformité de sa comptabilité aux règles en vigueur ;
Attendu qu'en revanche, le commissaire aux comptes n'a pas à se substituer à la personne contrôlée pour établir les comptes eux-mêmes, tout cumul entre les fonctions d'expert comptable et de commissaire aux comptes à l'égard de la même personne étant même prohibé, et toute immixtion dans la gestion lui étant interdite ;
Qu'il n'est pas non plus tenu de vérifier de façon exhaustive l'exactitude de l'intégralité de la comptabilité mais est autorisé à procéder par sondages ;
Attendu qu'au regard des normes d'exercice professionnel définies par la pratique le commissaire aux comptes doit avoir une connaissance globale de l'entreprise lui permettant d'orienter sa mission et d'appréhender les domaines et les systèmes significatifs ;
Qu'il doit avoir une approche lui permettant d'identifier les risques pouvant avoir une incidence significative sur les comptes ;
Que les irrégularités en matière de déclaration de TVA sont de nature à fausser de manière importante les résultats d'une société dont les comptes ne donneront pas alors une image fidèle de sa situation financière ;
Attendu qu'en l'espèce, il résulte de la proposition de rectification émanant de l'administration fiscale pour la période du 1er février 2006 au 31 décembre 2006, des déductions de TVA non justifiées, des récupérations prématurées de TVA entraînant pour l'exercice clos au 31 décembre 2006 la nécessité de reverser un excédent de TVA égal à 47 865 € ;
Qu'en s'abstenant de verser au Trésor public ou en récupérant indûment la TVA, la société a réalisé un profit égal au montant des rectifications de TVA nette ;
Attendu que l'administration fiscale souligne le caractère répétitif des manquements de la société de sorte que si le commissaire aux comptes avait mis en place un contrôle minimum, il aurait nécessairement constaté que l'entité vérifiée avait bien rempli ses obligations au regard de la législation fiscale applicable, ce qu'il ne démontre pas avoir fait ;
Attendu que cette insuffisance de contrôle du commissaire aux comptes a faussé de manière importante les résultats de la société Vintages puisque ses comptes ne donnent pas une image fidèle de sa situation financière ce qui a eu pour conséquence un redressement fiscal ;
Attendu qu'il est également établi par les pièces produites par l'appelante qui ne sont pas contredites par les intimés que pendant toute la durée de sa mission, la société Auditec s'est immiscée dans la gestion de la société Vintages contrairement aux dispositions de l'article L. 823-10 du code de commerce et l'article 10 du code de déontologie ;
Qu'ainsi, elle a établi le bilan arrêté au 31 décembre 2000 (pièce 44), procédé à la rédaction d'un contrat de travail d'une attachée commerciale (pièces 8 et 9), établi des déclarations Organic (pièces 45 et 46), établi des calculs en matière de TVA ou de taxes professionnelles (pièces 48, 59, 60, 61, 64) sans pour autant établir les déclarations de TVA ;
Qu'il a encore été adressé à la SAS Vintages en cours de mandat, le 10 décembre 2001, un courrier relatif à un entretien avec les services fiscaux sur la situation pour la régularisation TVA signé [I] [Q], expert-comptable (pièce 59) ;
Que plus particulièrement, pendant la période objet du contrôle de comptabilité, 1er février 2006 au 31 décembre 2006, la société Auditec a procédé au calcul de la TVA pour certains clients (pièces 7 à 7 quater) et à la transformation de la SAS en SARL et établi un projet de cession de parts (pièces 12 et 13) ;
Attendu que pour autant, dans le rapport général établi par le commissaire aux comptes pour l'exercice 2006, ne figure aucune réserve ou observation sur la sincérité et la concordance avec les comptes annuels des informations données dans le rapport de gestion et dans les documents établis sur la situation financière et les comptes annuels alors qu'au regard de son immixtion dans la gestion de la société Vintages et notamment des tâches qu'il a accomplies s'agissant du calcul de la TVA, le commissaire aux comptes connaissait nécessairement les graves manquements relevés en matière de TVA par l'administration fiscale ;
Attendu que dès lors la société Auditec a certifié les comptes 2006 alors qu'elle ne pouvait ignorer que ceux-ci étaient inexacts au regard des irrégularités commises en matière de TVA ;
Attendu que s'agissant des actes d'immixtion dans la gestion de la société Vintages, celle-ci reproche aux intimés de s'être comportés comme un expert-comptable en intervenant dans la tenue de sa comptabilité et de ne pas avoir attiré son attention sur la nécessité impérative d'obtenir à bref délai les factures manquantes de façon à justifier de la déductibilité de la TVA, erreur qui impacte non seulement la TVA mais également l'impôt sur les sociétés ;
Attendu que les actes d'immixtion sont avérés et que le commissaire aux comptes a contrevenu à l'interdiction qui lui est faite de s'immiscer dans la gestion de la société ;
Attendu que néanmoins, il convient pour l'appelante d'établir que ces actes sont en relation directe et certaine avec le préjudice résultant du montant du redressement fiscal qu'elle impute au commissaire aux comptes soit la somme de 167 833 € en se fondant sur une note en date du 29 juillet 2009 de M. [G], expert-comptable mandaté par elle, et un courrier de ce même expert-comptable en date du 5 mai 2011, se décomposant ainsi :
- 41 686 € au titre de la TVA sur factures à établir non prises en compte pour cause de prescription,
- 41 590 € au titre de la TVA déductible sur factures achats Leclerc Achères non prises en compte pour cause de prescription,
- 33 956 € en matière de redressement en matière d'impôt sur les sociétés pour factures Leclerc Achères passées en factures non parvenues le 31 janvier 2006 non prises en compte en déduction pour cause de prescription,
- pénalités : 50 701 € ;
Attendu qu'ainsi, l'appelante estime que n'a pas été pris en compte lors du redressement fiscal la somme de 41 686 € au titre d'un crédit de TVA collectée figurant au bilan au 31 décembre 2003 et qui d'après elle aurait dû être déduite du redressement ;
Attendu que néanmoins, elle n'établit pas le lien de causalité entre les fautes qu'elle impute au commissaire aux comptes, dans le cadre de sa mission et hors mission, et cette absence de prise en compte lors de la vérification fiscale ;
Qu'à cet égard, le message électronique de M. [G] en date du 28 janvier 2013 qui suggère qu'il y aurait pu y avoir prescription est trop imprécis pour établir une telle preuve ;
Attendu que la société Vintages se fondant toujours sur la note de M. [G], estime encore que n'ont pu être prises en compte en raison de la prescription deux factures « Achères » ce qui aurait entraîné un redressement de 41 590 € en matière de TVA et de 33 856 € en matière d'impôt sur les sociétés ;
Attendu cependant qu'il résulte de la proposition de rectification que c'est parce que la société Vintages n'a pas présenté de factures justificatives qu'elle a fait l'objet du redressement ;
Attendu que comme le soutiennent les intimés, la société contrôlée a fait preuve de négligence en ne comptabilisant pas à temps les factures qui lui auraient permis d'éviter le redressement opéré, factures qu'elle n'a pas davantage produites pendant le contrôle fiscal ce qui est la raison du rejet de la provision générant le rappel d'impôt et de la TVA déductible ;
Attendu qu'hormis les comptes annuels de l'exercice clos le 31 décembre 2000 qui n'est pas concerné par la période de vérification fiscale, il n'est pas établi que la société Auditec a, pour les années postérieures ayant fait l'objet de la vérification de comptabilité, établi les comptes annuels ou les déclarations de TVA ;
Qu'elle n'était donc tenue à aucune obligation de conseil à l'égard de la société Vintages ;
Qu'il n'existe donc aucun lien entre l'immixtion commise par le commissaire aux comptes et le montant du redressement fiscal qui lui est imputé
Attendu qu'encore, l'administration fiscale a relevé l'intention délibérée de la société Vintages d'éluder ses obligations en matière de TVA en soulignant le caractère répétitif des manquements, l'importance des majorations constatées, la nature du procédé utilisé à savoir une majoration de la TVA par une déduction au moment du règlement de la facture pro-format comme de la réception de la facture définitive ;
Attendu que dès lors les irrégularités commises par la société Vintages en matière de déclaration de TVA ne pouvaient pas être réparées ou limitées dans leurs effets par un contrôle adéquat du commissaire aux comptes dans sa mission de commissaire aux comptes ni par un prétendu manquement à une obligation de conseil à son égard, de sorte que les fautes commises par elle sont à l'origine exclusive du préjudice qu'elle allègue et anéantissent celles de M. [Q] et de la société Auditec ;
Attendu qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société Vintages de sa demande ;
Sur la demande en paiement d'honoraires
Attendu que la société Auditec sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la société Vintages à lui payer la somme de 7 352,56 €, représentant le solde d'une facture d'honoraires de 12 152,56 € en date du 9 juin 2009 ;
Attendu que la société Auditec produit cette facture (pièce 14) qui correspond HT à un forfait d'honoraires pour l'établissement de documents de synthèse au 31 décembre 2008 pour 10 000 € outre la somme de 161 € au titre de la police d'assurance contrôle fiscal et social ;
Attendu qu'il n'est pas contesté par la société Vintages qu'après achèvement de sa mission de commissaire aux comptes, elle a mandaté la société Auditec pour l'assister au cours des opérations de contrôle fiscal et que celle-ci a exécuté cette mission ;
Qu'elle ne conteste pas cette facture mais justifie son non-paiement « du fait de l'absence de remboursement des honoraires facturés pour le contrôle fiscal soit 5 740,80 € » dans la mesure où elle a souscrit depuis 2003 une police d'assurance « contrôle fiscal et social » ;
Attendu que la société Auditec a fourni une nouvelle facture en date du 4 juillet 2011 dont a été déduite la somme de 4 800 € correspondant aux honoraires HT réclamés par la société Auditec au titre de l'assistance fournie durant le contrôle fiscal ;
Attendu que c'est donc à bon droit que le premier juge a retenu que la société Vintages restait devoir à la société Auditec la somme de 7 352,56 € ;
Que faute par elle de justifier du paiement de cette somme, il convient de confirmer le jugement de ce chef ;
PAR CES MOTIFS :
La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Dax en date du 27 juin 2012,
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes présentées par chacune des parties sur ce fondement,
Condamne la société Vintages aux dépens.
Le présent arrêt a été signé par Mme Pons, Président, et par Mme Peyron, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER,LE PRESIDENT,
Mireille PEYRONFrançoise PONS