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12/12/2013 | FRANCE | N°12/00813

France | France, Cour d'appel de Pau, Chambre sociale, 12 décembre 2013, 12/00813


NR/SB



Numéro 13/04719





COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale







ARRÊT DU 12/12/2013









Dossier : 12/00813





Nature affaire :



Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution















Affaire :



ASSOCIATION SAINT JEAN LE BAPTISTE



C/



[Z] [R]












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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R Ê T



Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 12 Décembre 2013, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'a...

NR/SB

Numéro 13/04719

COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 12/12/2013

Dossier : 12/00813

Nature affaire :

Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution

Affaire :

ASSOCIATION SAINT JEAN LE BAPTISTE

C/

[Z] [R]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 12 Décembre 2013, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 24 Octobre 2013, devant :

Monsieur CHELLE, Président

Madame ROBERT, Conseiller

Madame PAGE, Conseiller

assistés de Madame HAUGUEL, Greffière.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

ASSOCIATION SAINT JEAN LE BAPTISTE, représentée par la Présidente, Mme [S] [U]

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Maître LARROZE, avocat au barreau de TARBES

INTIMÉE :

Madame [Z] [R]

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Maître MALTERRE, avocat au barreau de PAU

sur appel de la décision

en date du 20 FEVRIER 2012

rendue par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE TARBES

RG numéro : F11/00375

Madame [Z] [R] est engagée par l'ASSOCIATION SAINT JEAN LE BAPTISTE à partir du 6 juin 1994 en qualité d'infirmière diplômée d'État par contrat de travail à durée déterminée puis à durée indéterminée à compter du 1er janvier 1999.

Par lettre en date du 12 novembre 2009, Madame [Z] [R] dénonce auprès du directeur de l'établissement un comportement agressif de M. [C], responsable technique, et une agression physique subie de la part de ce dernier le 9 novembre 2009, sollicitant son intervention pour que cesse ce harcèlement.

Par lettre du 26 novembre 2009, l'employeur signale avoir informé le 17 novembre de cette ' situation préoccupante ' la médecine du travail qu'il lui propose de la rencontrer.

Le 19 mai 2010, Madame [Z] [R], invoquant les dispositions légales sur le harcèlement, demande à l'employeur d'organiser une médiation, subissant depuis plus d'un an des moqueries et agressions verbales outre l'agression physique du 9 novembre 2009.

L'employeur en saisit Monsieur [G], chargé de prévention à l'ASMT, lequel, par courriel du 20 mai, propose d'élaborer un plan d'intervention.

Par courrier du 11 juin adressé à Madame [Z] [R], l'employeur l'informe qu'un plan d'intervention est en cours d'élaboration avec Monsieur [G], chargé de prévention à l'ASMT et que toutes les actions seront mises en oeuvre afin de retrouver la sérénité au sein de l'établissement.

Par lettre du 25 juin 2010, Madame [Z] [R] rappelle que la situation est urgente, obligée de patienter et de travailler dans des conditions stressantes devant l'incapacité de l'employeur à régler directement ce problème.

Par lettre du 26 juillet 2010, Madame [Z] [R] dénonce auprès de l'inspection du travail le harcèlement qu'elle subit au sein de l'entreprise depuis plusieurs mois.

Le 28 juillet 2010, Monsieur [G] écrit à l'ASSOCIATION SAINT JEAN LE BAPTISTE qu'il n'est pas de sa capacité de gérer et solutionner ces relations conflictuelles relevant de relations interpersonnelles dégradées plus que de questionnement sur l'impact de l'organisation du travail.

Madame [Z] [R] est en arrêt maladie à compter du 14 juin.

Lors de la visite de reprise de Madame [Z] [R] le 8 novembre 2010, le médecin du travail constate que cette dernière ne peut reprendre son poste de travail et qu'une étude du poste et des conditions de travail dans l'entreprise sera menée dans l'attente de la deuxième visite de reprise.

Une étude de poste et des conditions de travail dans l'entreprise est réalisée le 15 novembre 2010.

Lors de la deuxième visite le 22 novembre 2010, la médecine du travail déclare Madame [Z] [R] inapte à son poste de travail dans cette entreprise, aucun reclassement n'est envisageable.

Par lettre du 25 novembre 2010, l'ASSOCIATION SAINT JEAN LE BAPTISTE propose à la médecine du travail la possibilité de transformer le poste de travail de Madame [Z] [R] ou d'aménager son temps de travail.

Par lettre du 25 novembre 2010, la médecine du travail confirme que tout reclassement dans l'entreprise est impossible et que les aptitudes restantes sont les suivantes : « tout poste de travail dans une autre entreprise ».

Après convocation à l'entretien préalable, l'ASSOCIATION SAINT JEAN LE BAPTISTE notifie à Madame [Z] [R] son licenciement par lettre du 20 décembre 2010 pour inaptitude et impossibilité de reclassement au sein de l'entreprise.

Le 30 septembre 2011, Madame [Z] [R] dépose une requête auprès du conseil de prud'hommes de Tarbes aux fins de voir prononcer la nullité de son licenciement, conséquence du harcèlement subi de la part de son collègue Monsieur [C].

Par jugement en date du 20 février 2012, le conseil de prud'hommes de Tarbes :

dit que le licenciement de Madame [Z] [R] est nul suite au harcèlement moral

condamne l'ASSOCIATION SAINT JEAN LE BAPTISTE à verser à Madame [Z] [R] :

5.447,44 € au titre du préavis

544,74 € au titre des congés payés sur préavis

60.000 € à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi

1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

déboute l'ASSOCIATION SAINT JEAN LE BAPTISTE de ses demandes reconventionnelles et la condamne aux dépens.

L'ASSOCIATION SAINT JEAN LE BAPTISTE interjette appel par lettre recommandée en date du 27 février 2012 du jugement qui lui est notifié le 21 février 2012.

L'ASSOCIATION SAINT JEAN LE BAPTISTE demande à la Cour de :

réformer en toutes ses dispositions le jugement frappé d'appel

dire que l'ASSOCIATION SAINT JEAN LE BAPTISTE a rempli l'obligation de sécurité pesant sur elle et qu' il n'y a pas lieu d'annuler le licenciement pour inaptitude notifié à Madame [Z] [R]

débouter Madame [Z] [R] de l'ensemble de ses demandes

la condamner au paiement d'une somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

la condamner aux dépens.

Dans des conclusions écrites, déposées le 1er octobre 2013 et reprises oralement l'ASSOCIATION SAINT JEAN LE BAPTISTE soutient que ce n'est que par son courrier du 12 novembre 2009 que Madame [Z] [R] a dénoncé le comportement agressif et insultant de Monsieur [C] à son égard, elle a alors immédiatement réagi en convoquant ce dernier, en réalisant une enquête interne et parallèlement en saisissant le médecin du travail et en invitant la salariée à prendre rendez-vous avec ce service.

Elle précise qu'au mois de décembre 2008 (soit un an auparavant) Madame [Z] [R] s'est plaint de ce que Monsieur [C] avait modifié sa feuille de pointage horaire mais cet incident avait été réglé et elle conteste qu'à cette date Madame [Z] [R] ait énoncé une quelconque difficulté ou souffrance morale.

Dans son courrier du 19 mai 2010, Madame [Z] [R] confirme s'être présentée à la médecine du travail qui l'a orientée vers une psychologue concluant « cette dernière n'a rien décelé de particulier ».

Entre novembre et mai 2010, aucun fait nouveau n'a été signalé par Madame [Z] [R] à la direction et ce jusqu'au 3 mai 2010 lorsque Madame [Z] [R] a accusé M. [C] de fouiller le bureau de gestionnaires en son absence.

L'ASSOCIATION SAINT JEAN LE BAPTISTE a sollicité de la médecine du travail des mesures d'investigation supplémentaires ; Madame [Z] [R] a été informée que Monsieur [G], chargé de prévention des risques professionnels, était chargé d'élaborer un plan d'intervention.

Madame [Z] [R] est alors partie en arrêt de travail le 14 juin 2010.

L'ASSOCIATION SAINT JEAN LE BAPTISTE soutient avoir pris les mesures qui s'imposaient dans le cadre d'une dénonciation de harcèlement moral et précise qu'en l'état des enquêtes menées, il est apparu qu'il y avait également de la part de Madame [Z] [R] des agissements discutables, Monsieur [C] se sentant également harcelé par sa collègue.

Les faits de harcèlement ne sont pas établis par la salariée et il n'est pas établi que l'inaptitude soit consécutive à des actes de harcèlement.

Madame [Z] [R] demande à la Cour de :

dire que le licenciement dont elle a fait l'objet, suite au harcèlement moral dont elle a été victime, doit être déclaré nul

condamner l'ASSOCIATION SAINT JEAN LE BAPTISTE au paiement des sommes suivantes :

5.447,44 € au titre du préavis

544,74 € au titre des congés payés sur préavis

60.000 € à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi

4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

condamner l'ASSOCIATION SAINT JEAN LE BAPTISTE aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Dans des conclusions écrites déposées le 14 octobre 2013 et reprises oralement, Madame [Z] [R] expose avoir été accusée de tricherie après un contrôle exercé par Monsieur [C] qui n'avait pas lieu d'être ce dont elle a informé le directeur qui n'a donné aucune suite.

Les mois suivants, elle a subi moqueries et paroles humiliantes jusqu'au 9 novembre 2009 lorsque Monsieur [C] l'a bousculée volontairement puis l'a injuriée.

Une mesure va être confiée à la médecine du travail sans que Monsieur [C] ne fasse l'objet de la moindre convocation ni de la moindre sanction.

Elle a alors continué ses activités dans des conditions particulièrement stressantes ce dont elle a informé le directeur.

Enfin, le 3 mai 2010, elle a constaté que Monsieur [C] photocopiait des horaires de pointage continuant donc à exercer une surveillance ce dont elle a informé le gestionnaire qui a protesté auprès de la direction sur cette façon de faire.

M. [C] l'a alors désignée, dans une note portée à la connaissance du personnel, comme une personne pouvant mettre en cause le fonctionnement de l'entreprise.

Elle soutient avoir été dans un état de stress extrêmement important, en permanence confrontée à Monsieur [C] qui s'est comporté comme s'il était son supérieur hiérarchique et continuait ses moqueries et paroles blessantes.

Ces conditions de travail ont eu des répercussions extrêmement importantes sur son état de santé.

Alors qu'elle multipliait ses alertes auprès de l'ASSOCIATION SAINT JEAN LE BAPTISTE, la seule mesure prise a été de la diriger vers la médecine du travail sans qu'aucune disposition ne soit prise pour faire cesser les agissements de M. [C] qui n'a subi aucune sanction à ce titre.

En conséquence, l'ASSOCIATION SAINT JEAN LE BAPTISTE sur laquelle pesait l'obligation d'assurer la sécurité et la santé au travail de Madame [Z] [R], n'a assumé aucune initiative pour mettre un terme aux agissements de M. [C].

Le licenciement qui est la conséquence de ces faits de harcèlement moral sera déclaré nul.

SUR QUOI

Sur la nullité du licenciement :

Madame [R] soutient que son licenciement prononcé pour inaptitude et causé par le harcèlement moral subi au sein de l'entreprise est nul.

Conformément aux dispositions de l'article L 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

­

Conformément aux dispositions de l'article L1154-1 du code du travail, lorsque survient un litige, il appartient à la victime d'établir des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement.

­­­­­­­Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Le 12 novembre 2009, Madame [Z] [R] dénonce auprès de son employeur le harcèlement qu'elle subit de la part de M. [C], responsable technique, lequel fait preuve d'un comportement agressif, insultant, la rabaissant devant les patients ou les collègues outre une agression physique subie le 9 novembre 2009 lorsque Monsieur [C] l'a bousculée à deux reprises en salle de soins alors qu'elle s'entretenait avec une collègue infirmière.

Le 19 mai 2010, Madame [Z] [R], réitérant sa dénonciation de harcèlement, sollicite une médiation et liste auprès de l'employeur les faits dont elle a été victime :

- la modification des fiches de pointage par Monsieur [C] alors qu'il n'y a aucun lien de subordination, ce qui a eu pour conséquence une violente altercation avec ce dernier

- des moqueries et agressions verbales depuis plus d'un an

- l'agression physique du 9 novembre 2009.

- avoir consulté une psychologue de la médecine du travail qui n'a rien décelé de particulier

- avoir été dénoncée , en mai, dans une note rédigée à la suite d'une réunion de l'ensemble du personnel à l'initiative de M. [D] [C], note que ce dernier voulait faire circuler mais qui a été interceptée par la direction.

Dans le courrier adressé à l'inspection du travail le 26 juillet 2010, Madame [Z] [R] dénonce les mêmes faits.

Il est évident que le courrier adressé le 15 décembre 2008 dans lequel Madame [Z] [R] reprend les heures effectuées depuis le 1er décembre, en réponse à une demande de l'employeur et conteste des ratures et modifications effectuées sur ses feuilles de pointage par ' une personne ' ne saurait constituer une dénonciation auprès de l'employeur du harcèlement moral dont elle ne se plaindra que 11 mois plus tard.

Madame [Z] [R] produit à l'appui de ses affirmations :

' un récapitulatif rédigé par le médecin du travail qui établit que :

le 12 novembre Madame [Z] [R] adresse à la médecine du travail copie du courrier de dénonciation de harcèlement

le 17 novembre une rencontre intervient entre la médecine du travail et le directeur de l'établissement qui sollicite un conseil dans la gestion de ce conflit entre deux salariés qu'il a reçus lors d'un entretien.

Il est proposé une rencontre par la médecine du travail des deux personnes concernées

la médecine du travail rencontre le 10 décembre 2009 Madame [Z] [R] qu'elle oriente vers une psychologue clinicienne

le 26 janvier 2010 : rencontre avec la psychologue du travail

le 26 avril 2010 demande de la médecine du travail auprès de M. [G] pour procéder à une analyse des risques psychosociaux

le 3 mai 2010 : rencontre avec Monsieur.

le 11 mai 2010 : nouvel épisode conflictuel signalé par la direction de l'ASSOCIATION SAINT JEAN LE BAPTISTE

arrêt maladie de Madame [Z] [R] depuis mi-juin

le 26 juillet 2010 : après discussion avec Monsieur [G] il est conclu par la médecine du travail qu'il s'agit d'un problème interpersonnel à résoudre en interne, échange téléphonique avec la direction de l'établissement

le 17 août 2010 : interrogations de la direction sur l'évolution de la situation et sur ce qu'il aurait fallu faire pour éviter cette situation difficile

visite de reprise etc...

' le contenu de la lettre d'observation transmise par l'inspection du travail à l'employeur le 6 octobre 2010 dans laquelle l'administration considère que les mesures prises par l'employeur ne lui apparaissent pas pertinentes et appropriées à la situation évoquée, le recours aux services de la médecine du travail si elle est nécessaire n'étant pas suffisante dans la mesure où seul l'employeur a le pouvoir disciplinaire et d'organisation du travail.

Le surplus est un rappel des dispositions légales sur l'obligation de sécurité de résultat en matière de harcèlement moral, l'obligation de prendre toutes dispositions de prévention, d'exercer son pouvoir disciplinaire pour sanctionner les agissements de harcèlement moral.....

Il résulte des pièces et attestations produites que :

- fin 2008 alors que Monsieur [C] avait pris l'initiative de corriger la fiche horaire de Madame [Z] [R], l'employeur convoque ce dernier pour lui signifier que le contrôle des horaires n'est pas de sa responsabilité, consigne que Monsieur [C] s'engage à suivre.

Madame [V], qui était alors cadre infirmier dans l'entreprise, expose que cet incident est survenu dans un contexte de doute sur l'exactitude formelle des pointages de certains membres de l'équipe.

- Sur « l'agression physique du 9 novembre 2009 », Madame [V], cadre infirmier, atteste :

avoir été informée par Madame [Z] [R] d'une bousculade violente du fait de Monsieur [C],

avoir alors convoqué Madame [L], infirmière soignante présente lors des faits qui lui confirma que Monsieur [C] avait effectivement heurté Madame [Z] [R] en passant alors qu'il évacuait des sacs

ne pas avoir perçu ce geste comme un comportement brutal, au travers de ces déclarations

avoir été reçue par le directeur pour lui fournir toutes les informations dont elle disposait sur cet incident.

Pour sa part, M. [C] atteste que Madame [Z] [R] s'est opposée à son passage alors qu'il portait dans chaque main un bidon de 10 litres, cette attitude s'analysant pour sa part en une provocation considérant que son geste était sans violence.

Il précise avoir été convoqué par la direction qui lui a demandé d'éviter les contacts avec Madame [Z] [R], lesquels ne pouvaient être que ponctuels et professionnels compte tenu de leurs fonctions respectives.

- Le 3 mai 2010, alors que Monsieur [C] effectuait des photocopies de relevés d'heures pour les personnes dont il était responsable dans le bureau du gestionnaire (ce dernier absent), tâche qui est confirmée par Madame [F] dans son attestation, Madame [Z] [R] est entrée dans le bureau.

Madame [Z] [R] considérant que Monsieur [C] « continuait à exercer une surveillance » a informé le gestionnaire de la présence de Monsieur [C] dans son bureau, lequel en a informé la direction.

Le lendemain, Monsieur [C] est convoqué dans le bureau du directeur afin de fournir des explications sur la fouille du bureau du gestionnaire en son absence.

Monsieur [C] atteste avoir été profondément meurtri par cette accusation et avoir de colère préparé une note relatant les faits exacts qu'il souhaitait diffuser, diffusion à laquelle il a renoncé à la suite de sa convocation par le directeur.

Madame [V] atteste avoir effectivement vu une note manuscrite de M. [C] dans laquelle ce dernier indiquait avoir été injustement accusé de fouiller le bureau du gestionnaire de l'établissement par Madame [Z] [R] ; elle précise avoir remis cette note au directeur, note qui, à sa connaissance, n'a fait l'objet d'aucune diffusion.

Elle précise que cette remise en cause de sa franchise semblait affecter Monsieur [C].

L'examen attentif de ces trois incidents décalés dans le temps, décembre 2008, novembre 2009 et mai 2010 tels que rapportés par les intéressés et témoins démontre exclusivement des relations conflictuelles entre deux salariés de l'entreprise sans lien hiérarchique, sans fonctions communes dans la mesure où :

- fin décembre 2008, si M. [C] (par ailleurs non dénommé dans le courrier de Mme [R]) a effectivement outrepassé ses pouvoirs en procédant à des rectifications de fiche horaires, il a été immédiatement rappelé à l'ordre par l'employeur

- le 9 novembre 2009, ces deux salariés se bousculent, chacun en imputant la responsabilité à l'autre, le seul témoignage produit ne permettant pas d'en connaître l'origine.

Madame [V] a immédiatement entendu le seul témoin des faits puis l'employeur a convoqué les deux protagonistes les engageant à des contacts ponctuels et strictement professionnels

- Le 3 mai 2010, alors que M. [C] effectuait une tâche relevant de sa compétence, Madame [Z] [R] l'a mis en cause auprès du gestionnaire qui l'a alors soupçonné de s'être livré à une fouille de son bureau.

L'employeur a convoqué M. [C] qui a dû s'en expliquer précisant que ces provocations l'ont profondément affecté et qu'il a été meurtri par cette accusation.

Si effectivement ce dernier a rédigé une note aux fins de diffusion pour relater les faits exacts et mettre un terme à la fausse accusation dont il avait été victime, il apparaît que cette note a été remise à la direction sans être diffusée, Madame [Z] [R] étant dans l'incapacité de la produire aux débats.

À l'examen de ces trois incidents qui ne permettent pas d'établir un quelconque fait de harcèlement, l'employeur s'est immédiatement rapproché de Madame [V], cadre infirmier et a systématiquement reçu les protagonistes après enquête.

Il ne peut être fait grief à l'employeur de ne pas avoir sanctionné ou licencié Monsieur [C] au regard de ces seuls éléments.

Enfin, Madame [Z] [R] qui soutient avoir été victime depuis 2008 (soit sur 2 années) d'un comportement agressif, d'insultes et d'avoir été rabaissée devant le personnel soignant et les patients du fait de Monsieur [C] ne produit aucune pièce à l'appui de ces affirmations.

En conséquence, il existait entre Madame [Z] [R] et M. [C] des relations conflictuelles, qui ne peuvent cependant revêtir le caractère d'un harcèlement, chacun se déclarant victime de l'autre sans cependant qu'aucun élément objectif ne permette de distinguer l'imputabilité de la situation à l'un ou l'autre salarié ; l'employeur a pris les mesures nécessaires pour apaiser une situation difficilement gérable alors de plus que la psychologue avec laquelle Madame [Z] [R] s'est entretenue, sur les conseils de la médecine du travail, que l'employeur avait saisi de cette difficulté, concluait le 26 janvier 2010, ainsi que l'écrit Madame [Z] [R] à l'employeur « elle n'a rien décelé de particulier » .

Enfin, si les médecins consultés par Madame [Z] [R] constatent un état anxio-dépressif réactionnel, ils ne peuvent en imputer la responsabilité à un harcèlement moral dont ils n'ont pu être témoins à titre personnel.

En conséquence, le jugement sera infirmé en toutes ses dispositions ; Madame [Z] [R] sera déboutée de sa demande en nullité du licenciement dès lors qu'il n'est pas établi que son inaptitude à l'origine du licenciement est la conséquence de faits de harcèlement moral.

Sur les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile :

L'équité et la situation économique des parties ne commandent pas de faire droit à la demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud'homale et en dernier ressort,

Reçoit l'appel formé par l'ASSOCIATION SAINT JEAN LE BAPTISTE le 27 février 2012.

Infirme le jugement du conseil de prud'hommes de Tarbes en date du 20 février 2012 en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau,

Déboute Madame [Z] [R] de sa demande en nullité de son licenciement.

Déboute Madame [Z] [R] de ses demandes en paiement des indemnités de rupture et de dommages et intérêts.

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne Madame [Z] [R] aux dépens.

Arrêt signé par Monsieur CHELLE, Président, et par Madame HAUGUEL, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE,LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12/00813
Date de la décision : 12/12/2013

Références :

Cour d'appel de Pau 3S, arrêt n°12/00813 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-12-12;12.00813 ?
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