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19/09/2013 | FRANCE | N°12/02250

France | France, Cour d'appel de Pau, Chambre sociale, 19 septembre 2013, 12/02250


SG/CD



Numéro 13/03497





COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale







ARRÊT DU 19/09/2013









Dossier : 12/02250





Nature affaire :



Demande formée par le bailleur ou le preneur relative à la poursuite ou au renouvellement du bail















Affaire :



[M] [B]



C/



[D] [S],



[A] [T] épouse [S]












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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R Ê T



Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 19 Septembre 2013, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 4...

SG/CD

Numéro 13/03497

COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 19/09/2013

Dossier : 12/02250

Nature affaire :

Demande formée par le bailleur ou le preneur relative à la poursuite ou au renouvellement du bail

Affaire :

[M] [B]

C/

[D] [S],

[A] [T] épouse [S]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 19 Septembre 2013, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 03 Juin 2013, devant :

Monsieur CHELLE, Président

Madame ROBERT, Conseiller

Monsieur GAUTHIER, Conseiller

assistés de Madame HAUGUEL, Greffière.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANT :

Monsieur [M] [B]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représenté par la SCP ETCHEVERRY & DELPECH, avocats au barreau de BAYONNE

INTIMÉS :

Monsieur [D] [S]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 1] (ESPAGNE)

Madame [A] [T] épouse [S]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 1] (ESPAGNE)

Représentés par Maître MARBOT, avocat au barreau de PAU substitué par Maître MARCEL, collaborateur de Maître MARBOT, avocat au barreau de PAU

sur appel de la décision

en date du 08 JUIN 2012

rendue par le TRIBUNAL PARITAIRE DES BAUX RURAUX DE BAYONNE

LES FAITS, LA PROCÉDURE :

Selon l'attestation notariée du 15 mai 2013 ([Q] [G] et [U] [W], notaires associés) Madame [A] [T] épouse [S] a recueilli dans la succession de son père, Monsieur [N] [V] [T], décédé en Espagne le [Date décès 1] 1963, un bien rural connu sous le nom de «  [Adresse 1] », situé à [Localité 2] consistant en une maison et des terres d'une surface totale de 16 hectares 62 ares 57 centiares.

Le 6 mars 1965, Monsieur [L] [Y] est devenu fermier d'une partie du bien rural de Madame [A] [T] épouse [S], pour la surface totale de 15 hectares 56 ares 54 centiares, dont 15 hectares 32 ares 12 centiares de terres de diverses natures.

Le 1er avril 1986, il a pris sa retraite et a cédé son bail à sa fille, Madame [R] épouse [B].

N'ayant pas obtenu l'autorisation du bailleur de céder son bail à son fils, Monsieur [M] [B], Madame [R] épouse [B] a obtenu cette autorisation du Tribunal Paritaire des Baux Ruraux de Biarritz par jugement du 2 avril 2007, confirmé par arrêt de la Cour d'Appel de Pau du 18 février 2008.

Par acte extrajudiciaire du 27 septembre 2011, Monsieur [D] [S] a fait délivrer à Monsieur [M] [B] un congé pour reprise pour exploitation par descendants, avec effet au 31 mars 2013.

Par requête du 25 octobre 2011, Monsieur [M] [B] a saisi le Tribunal Paritaire des Baux Ruraux de Bayonne pour que soit prononcée la nullité du congé de bail qui lui a été signifié le 27 septembre 2011.

À défaut de conciliation le 9 décembre 2011, l'affaire a été renvoyée à l'audience de jugement, à laquelle Madame [A] [T] épouse [S] est intervenue volontairement.

Par jugement du 8 juin 2012, le Tribunal Paritaire des Baux Ruraux de Bayonne, auquel il conviendra de se reporter pour plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties :

- a débouté Monsieur [M] [B] de ses demandes,

- a validé le congé délivré,

- a dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- a condamné Monsieur [M] [B] aux dépens.

Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 26 juin 2012, Monsieur [M] [B], représenté par son conseil, a interjeté appel du jugement.

La contribution pour l'aide juridique prévue par l'article 1635 bis Q du code général des impôts a été régulièrement acquittée par timbre fiscal dématérialisé de 35 €, numéro 1265 3880 1651 5991 du 26 juin 2012.

DEMANDES ET MOYENS DES PARTIES :

Monsieur [M] [B], par conclusions écrites, déposées le 27 mai 2013, reprises oralement à l'audience et auxquelles il convient de se référer, demande à la Cour de :

- déclarer recevable et fondé son appel,

- réformer le jugement contesté,

- annuler le congé qui lui a été signifié le 27 septembre 2011 par Monsieur [D] [S] suivant exploit de Maître [C], huissier,

- condamner Monsieur [D] [S] et Madame [A] [T] épouse [S], son épouse, à lui régler une indemnité de 3.500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en raison des honoraires de procédure qu'il a exposés en première instance puis en appel,

- condamner Monsieur [D] [S] et Madame [A] [T] épouse [S] en tous les frais et entiers dépens.

Monsieur [M] [B] expose, en substance, qu'il est âgé de 41 ans, qu'il exploite, outre la propriété affermée, quelques parcelles de terre familiales d'une superficie de 8 hectares, pour l'élevage d'un troupeau de 320 brebis et que l'amputation des terres résultant du congé va déséquilibrer son exploitation et l'obliger à vendre son troupeau et quitter la profession pour trouver une activité de substitution.

Il soutient que le congé doit être annulé aux motifs que : le congé a été signifié par une personne qui n'avait pas qualité pour le délivrer puisque la propriété louée est un bien propre de l'épouse et que son intervention volontaire à l'instance est sans influence sur la validité du congé ; l'échéance du congé est irrégulière car la cession du droit au bail constitue la continuation du bail antérieur sans effet novatoire, de sorte que la cession du bail du 1er avril 1986 ne constitue pas un nouveau bail, et alors que le bail initial a été conclu le 6 mars 1965 pour arriver à échéance le 6 mars 2019 de sorte que le congé du 27 septembre 2011 est tardif pour un bail renouvelé en 2010. Il fait valoir que si la cession de bail constituait un bail nouveau, alors en application de l'arrêt de la Cour d'Appel du 18 février 2008 le bail viendrait à expiration le 1er avril 2016, et le congé serait encore tardif.

Il soutient également que le bénéficiaire de la reprise ne remplit pas les conditions prévues aux articles L. 411-58 à L. 411-63 et L. 411-67 du code rural car : à la date d'effet du congé, soit au 31 mars 2013, le bailleur n'est pas en règle avec la législation relative au contrôle des structures ; il ne justifie pas de la capacité ou d'expérience professionnelle acquise au cours des 15 années précédant la reprise par le bénéficiaire de la reprise qui ne justifie pas non plus de son intention d'occuper lui-même les bâtiments d'habitation ni de ce qu'il possède le cheptel et le matériel nécessaire pour exploiter la propriété louée, ou des moyens de les acquérir.

Les époux [S], par conclusions écrites, déposées le 31 mai 2013, reprises oralement à l'audience et auxquelles il convient de se référer, demande à la Cour de :

Vu les articles L. 331-2 et L. 411-46 et suivants du code rural et 1421 du code civil,

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

- par voie de conséquence, valider le congé signifié le 27 septembre 2011 par Monsieur [D] [S] à Monsieur [M] [B],

- ordonner l'expulsion de Monsieur [M] [B] ainsi que de tout occupant de son chef du bien rural qu'il occupe à [Adresse 2],

- condamner Monsieur [M] [B] à leur payer une somme de 4.500 €  au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Monsieur [M] [B] aux entiers dépens.

Les époux [S] exposent que, de nationalité espagnole et résidant en Espagne, ils entendent reprendre l'exploitation donnée à bail afin d'en confier la mise en valeur à leur fils, agriculteur et installé sur des terres qu'il détient par bail en Espagne depuis 1995.

Ils soutiennent que le congé est régulier, Monsieur [D] [S] ayant qualité pour délivrer ce congé. Ils font valoir que selon la coutume en Espagne Monsieur [D] [S] administre seul les biens des deux époux, et est le seul interlocuteur de Monsieur [M] [B] ; qu'en droit civil espagnol, pour les mariages célébrés avant 1983, et en l'absence de contrat préalable, c'est le régime de la communauté des biens qui s'applique, de sorte qu'ayant contracté mariage en 1962, sans contrat préalable, la propriété rurale reçue par l'épouse est devenue un bien commun des époux ; qu'en tout état de cause par son intervention volontaire à l'instance l'épouse a validé le congé.

Ils soutiennent également que le bail, vieux de plus de 70 ans, a été reconduit tacitement le 1er avril de chaque période de 9 ans ; au 1er avril 1986, Monsieur [L] [Y], lors de la cession du bail à sa fille, a conservé, pour son usage personnel, à titre d'habitation le corps de ferme, de sorte que c'est un nouveau bail rural verbal qui a été consenti, renouvelé en 1995, puis 2004 et venant à échéance le 31 mars 2013 ; que l'opération dont il s'agit, constitue la reprise d'un bien de famille entrant dans le champ d'application de l'article L. 331-2-II du code rural, qui n'est pas soumise à l'autorisation d'exploiter mais à une simple déclaration souscrite par le bénéficiaire dans le mois qui suit le départ effectif de l'ancien exploitant, sous conditions qui sont en l'espèce réunies ; qu'il justifie de son expérience agricole.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

L'appel, interjeté dans les formes et délais prescrits par la loi, sera déclaré recevable en la forme.

Le 27 septembre 2011 a été signifié à Monsieur [M] [B] un congé du bail consenti le 1er avril 1986, concernant une exploitation agricole sise à [Adresse 2] comprenant bâtiments et terres de diverses natures d'une contenance totale de 15 ha 32 ares 12 centiares, à effet du 31 mars 2013, pour reprise pour exploitation par descendant au profit de [J] [H] [S] [T], à la requête de Monsieur [D] [S].

Concernant les conditions de forme du congé :

Aux termes de l'article L. 411-47 du code rural, le propriétaire qui entend s'opposer au renouvellement doit notifier congé au preneur, dix-huit mois au moins avant l'expiration du bail, par acte extrajudiciaire.

A peine de nullité, le congé doit :

- mentionner expressément les motifs allégués par le bailleur ;

- indiquer, en cas de congé pour reprise, les nom, prénom, âge, domicile et profession du bénéficiaire ou des bénéficiaires devant exploiter conjointement le bien loué et, éventuellement, pour le cas d'empêchement, d'un bénéficiaire subsidiaire, ainsi que l'habitation ou éventuellement les habitations que devront occuper après la reprise le ou les bénéficiaires du bien repris ;

- reproduire les termes de l'alinéa 1er de l'article L. 411-54.

La nullité ne sera toutefois pas prononcée si l'omission ou l'inexactitude constatée ne sont pas de nature à induire le preneur en erreur.

S'agissant de la qualité de l'auteur du congé :

Il ressort de l'attestation notariée du 15 mai 2013 ([Q] [G] et [U] [W], notaires associés) que Madame [A] [T] épouse [S] a recueilli dans la succession de son père, Monsieur [N] [V] [T], décédé en Espagne le [Date décès 1] 1963, un bien rural connu sous le nom de «  [Adresse 1] », situé à [Localité 2] consistant en une maison et des terres d'une surface totale de 16 hectares 62 ares 57 centiares.

Il résulte de cette attestation, ainsi que de l'acte notarié du 29 juin 1984 ([X] [I] et [F] [P], notaires associés à [Localité 4], Pyrénées-Atlantiques), que ce bien constitue un bien propre de Madame [A] [T] épouse [S].

Les époux [S] soutiennent que du fait qu'ils ont contracté mariage en 1962, et en l'absence de contrat préalable, depuis 1983, en droit civil espagnol, le régime de la communauté des biens s'applique, de sorte que cette propriété rurale reçue par l'épouse est devenue un bien commun des époux.

Il convient cependant de relever que l'acte notarié du 29 juin 1984 reçu par [X] [I] et [F] [P], notaires associés à [Localité 4], portait sur un échange entre Madame [A] [T] épouse [S] et Monsieur [L] [Y], que les biens qu'elle a cédés avaient été recueillis dans la succession de son père en même temps que les biens donnés à bail objet du présent litige, qu'ils constituaient un bien propre, sans aucune mention relative à la transmission de ces biens dans la communauté des époux et sans que le mari, Monsieur [D] [S], ait été appelé.

En tout état de cause, et ainsi que l'a retenu le premier juge, indépendamment de la question de la nature, de bien propre ou de bien commun, du bien donné à bail, Madame [A] [T] épouse [S] est volontairement intervenue à l'instance en s'associant aux prétentions de son époux, validant par là même le congé litigieux. Cette ratification du congé, valant validation de celui-ci, par Madame [A] [T] épouse [S] fait également l'objet d'une confirmation qu'elle a établie en date du 24 janvier 2012.

Ce moyen sera donc rejeté.

S'agissant de l'échéance du congé :

Il n'est pas contesté que le 1er avril 1986, Monsieur [L] [B] a pris sa retraite et a cédé son bail à sa fille, Madame [R] épouse [B], mère de Monsieur [M] [B].

En revanche, les parties s'opposent sur les conséquences de cette cession, Monsieur [M] [B] soutenant qu'il s'agissait de la continuation du même bail, la date de la cession étant donc distincte de la date de prise d'effet du bail, les époux [S] soutenant au contraire qu'à la date de la cession un nouveau bail s'est substitué au bail initial.

Monsieur [M] [B] soutient en effet que l'échéance du congé est irrégulière, car la cession du droit au bail constitue la continuation du bail antérieur sans effet novatoire, de sorte que la cession du bail du 1er avril 1986 ne constitue pas un nouveau bail, mais la continuation du bail initial conclu le 6 mars 1965 et arrivant à échéance le 6 mars 2019, qu'ainsi le congé du 27 septembre 2011 est tardif pour un bail renouvelé en 2010.

Les époux [S] soutiennent donc au contraire, que le bail s'est renouvelé tous les 9 ans à compter du 1er avril 1986, date d'un nouveau bail du fait de la modification substantielle du bail initial duquel la maison d'habitation a été soustraite par Monsieur [L] [B] pour son usage personnel dont il a personnellement acquitté le loyer et les diverses charges, de sorte que le congé a été valablement donné pour l'échéance du 31 mars 2013.

Le fait que Monsieur [L] [B] a été affilié en qualité de chef d'exploitation depuis le 6 mars 1965, selon l'attestation délivrée le 15 juillet 1986 par la Caisse de Mutualité Sociale Agricole des Pyrénées-Atlantiques, n'est pas de nature à constituer cette date comme date de la conclusion du bail verbal, pas plus que la déclaration d'assujettissement établie le 29 juillet 1965.

Le bulletin de mutation de parcelles entre Monsieur [L] [B], en qualité de cédant, et Madame [R] [B], en qualité de preneur, établi le 8 juillet 1986, faisant état de la date du 1er avril 1986 comme date exacte du changement, n'est pas non plus de nature à constituer cette dernière date comme date de conclusion du bail, puisqu'il s'agit de la date de la cession du bail dont la durée ne se trouve pas modifiée du seul fait de la cession.

Le fait que Monsieur [L] [B] a continué à habiter la maison d'habitation, appelée « [Adresse 2] », ou selon une autre orthographe «  [Adresse 1] », située sur les terres louées, n'est pas suffisant pour impliquer un changement de bail, alors précisément que le congé litigieux du 27 septembre 2011 porte expressément mention que Monsieur [D] [S] est « devenu titulaire du bail rural verbal consenti le 1er avril 1986 à Madame [B] [R] concernant une exploitation agricole sise à [Adresse 2] comprenant bâtiments et terres de diverses natures d'une contenance totale de 15 hectares 32 ares 12 centiares », reconnaissant ainsi que cette maison d'habitation est restée dans le bail.

Mais surtout, en vertu de l'arrêt de la Cour d'Appel du 18 février 2008, décision définitive dont les dispositions l'emportent sur le jugement du 2 avril 2007 du Tribunal Paritaire des Baux Ruraux de BIARRITZ, il a été jugé que l'exploitation comprend, outre des parcelles d'une contenance totale de 15 hectares 32 ares 12 centiares, une bergerie et une maison d'habitation et que Madame [R] [B] est preneuse selon la convention verbale du 1er avril 1986, de sorte qu'il y a lieu de dire que cette date doit être considérée comme la date à partir de laquelle le contrat s'est renouvelée tous les 9 ans, pour arriver par conséquent à échéance le 31 mars 2013.

S'agissant de la régularité formelle du congé :

Ainsi que l'a relevé le premier juge, le congé du 27 septembre 2011 est conforme aux dispositions de l'article L. 411-47 du code rural en ce qu'il respecte le délai de prévenance, qu'il mentionne le nom et l'adresse du bénéficiaire de la reprise et en ce qu'il reproduit les termes de l'alinéa 1er de l'article L. 411-54 du même code.

Par conséquent, au vu de l'ensemble de ces éléments, le congé sera dit régulier en la forme.

Concernant les conditions de fond du congé :

Monsieur [M] [B] soutient en premier lieu que la reprise ne peut bénéficier au fils de la bailleresse au motif que la reprise est subordonnée au respect par le bénéficiaire des dispositions concernant le contrôle des structures des exploitations agricoles, alors que par deux décisions du 30 mai 2007, toujours en vigueur, le Préfet des Pyrénées-Atlantiques a déjà refusé l'autorisation d'exploiter à ce même candidat et à sa s'ur [Z] au motif que les terres agricoles objet de la demande étaient exploitées par bail.

Les époux [S] répliquent que si l'autorisation d'exploiter ne pouvait être donnée à Monsieur [H] [S] en raison du fait qu'un bail était en cours de validité, sa demande étant prématurée et ne pouvant prospérer, en revanche la situation est devenue différente du fait que le bail est caduc.

Il ressort des pièces versées aux débats que par deux décisions, notifiées le 30 mai 2007, le Préfet des Pyrénées-Atlantiques a refusé l'autorisation d'exploiter à Monsieur [S] [J] [H] et Madame [S]-[T] [V] [J] au motif que la demande d'autorisation porte sur des terres exploitées par bail par Monsieur [M] [B].

Mais, alors qu'il n'est pas contesté que ces deux décisions n'ont pas fait l'objet de recours, il ne peut être sérieusement soutenu que ces deux décisions ne leur seraient pas opposables au motif que le bail visé dans celles-là serait caduc, alors que cette « caducité » ne pourrait résulter que d'une décision judiciaire validant le congé litigieux. Or, la décision du premier juge qui a validé le congé fait l'objet du présent appel, et n'est donc pas définitive.

En outre, la décision de refus est intervenue en cours de bail, alors que la Cour est amenée à se prononcer sur un congé pour reprise des conditions de fond qui doivent être appréciées pour la date à laquelle le congé a été donné, de sorte que ces décisions de refus ne peuvent, en elles-mêmes et à elles seules, faire obstacle à l'examen de ces conditions de fond.

Mais surtout, du fait du congé pour reprise au profit d'un descendant, il s'agit d'une opération familiale qui relève des dispositions de l'article L. 331-2-II du code rural.

En effet, les époux [S] soutiennent qu'en l'espèce, l'opération dont il s'agit constitue la reprise d'un bien de famille qui entre dans le champ d'application de l'article L. 331-2-II du code rural qui n'est pas soumis à l'autorisation d'exploiter mais à une simple déclaration souscrite par le bénéficiaire dans le mois qui suit le départ effectif de l'ancien exploitant sous réserve de remplir les conditions légales exigées.

Aux termes de l'article L. 331-2-II du code rural, par dérogation au I (qui définit les opérations soumises à autorisation préalable), est soumise à déclaration préalable la mise en valeur d'un bien agricole reçu par donation, location, vente ou succession d'un parent ou allié jusqu'au troisième degré inclus lorsque les conditions suivantes sont remplies :

1° Le déclarant satisfait aux conditions de capacité ou d'expérience professionnelle mentionnée au 3° du I ;

2° Les biens sont libres de location au jour de la déclaration ;

3° Les biens sont détenus par ce parent ou allié depuis neuf ans au moins.

Pour l'application des présentes dispositions, sont assimilées aux biens qu'elles représentent les parts d'une société constituée entre les membres d'une même famille.

Les opérations réalisées par la société d'aménagement foncier et d'établissement rural autres que celles prévues au 7° du I sont également soumises à déclaration préalable.

Il résulte des dispositions de l'article R. 331-1 du code du travail, que le candidat à l'installation doit justifier, à la date de l'opération, soit de la possession d'un diplôme ou certificat d'un niveau reconnu équivalent au Brevet d'Études Professionnelles Agricoles (BEPA) ou au Brevet Professionnel Agricole (BPA), soit de cinq ans minimum d'expérience professionnelle acquise, au cours des 15 années précédant la date effective de l'opération en cause, sur une surface au moins égale à la moitié de l'unité de référence définie à l'article L. 312-5 en qualité d'exploitant, d'aide familiale, d'associé d'exploitation, de salarié agricole ou de collaborateur d'exploitation au sens de ce dernier texte.

S'agissant des conditions de capacité professionnelle :

Les époux [S] produisent la traduction en français (réalisée par un traducteur inscrit sur la liste de la Cour d'Appel de PAU, Madame [K] [O] [E]) de deux documents à l'en-tête de « ITG formation agraire - instituts techniques et de gestion de Navarre », délivrés à Monsieur [J] [H] [S]-[T], dont l'un, en date du 7 avril 1995, fait état du suivi d'un cours d'élevage d'une durée de 2000 heures, l'autre, en date du 6 juin 1995, du suivi d'un cours d'élaboration du fromage de 300 heures, cours organisés par la section de formation agraire des instituts techniques de gestion qui se sont déroulés dans la ville de [Localité 3].

Mais, il s'agit-là d'attestations de suivis de cours, non de certificats spécifiant le niveau atteint et reconnu, et les époux [S] ne produisent aucun élément de nature à démontrer que ces formations sont équivalentes au Brevet d'Études Professionnelles Agricoles (BEPA) ou au Brevet Professionnel Agricole (BPA), ou correspondraient et seraient identiques ou équivalents à l'un des diplômes, titres ou certificats définis dans la liste arrêtée par le Ministre de l'Agriculture reconnus au moins équivalents à l'un de ces deux diplômes, en application des dispositions du dernier alinéa de l'article R. 331-1 du code rural.

Par conséquent, il y a lieu de constater que les époux [S] ne démontrent pas que le bénéficiaire de la reprise justifie de la possession d'un diplôme ou d'un certificat d'un niveau reconnu équivalent aux diplômes exigés.

S'agissant de l'expérience professionnelle :

Les personnes qui ne satisfont pas à la condition de capacité professionnelle doivent justifier de cinq ans minimum d'expérience professionnelle acquise au cours des 15 années précédant la date effective de l'opération, ladite date étant constituée par la date pour laquelle le congé a été donné, soit en l'espèce pour le 31 mars 2013.

Les époux [S] produisent la traduction en français (réalisée par un traducteur inscrit sur la liste de la Cour d'Appel de PAU, Madame [K] [O] [E]) de deux documents émanant du « ministère du travail et des Affaires Sociales - trésorerie générale de la sécurité sociale », qui concernent Monsieur [J] [H] [S]-[T], et qui portent mention du nombre de jours de travail au titre du régime agricole. L'un de ces documents concerne les renseignements informatisés en date du 25 avril 2006 (pièce 26), l'autre concerne des renseignements informatisés en date du 25 avril 08 (pièce 15).

Le document concernant les renseignements informatisés en date du 25 avril 2006 (pièce 26), comporte les mentions suivantes :

Régime

Code compte cotisation

Nom entreprise

Date d'entrée

Date effet

Date sortie

CT

CTP %

GC

Jours

Agricole

CP 31C propre

NAVARRE

01.12.95

01.12.95

31.03.98

000

00,0

23

852

Agricole

CP 31C propre

NAVARRE

01.10.04

01.10.04

0001

00,0

23

547

Il est également indiqué :

« jour de travail au total : 5557 »; « jour de pluri emploi ou de pluriactivité : 563 » ; « total jour : 4994 » ; « 13 ans 8 mois 3 jours ».

Le document concernant les renseignements informatisés en date du 25 avril 2008 (pièce 15), comporte les mentions suivantes :

Régime

Code compte cotisation

Nom entreprise

Date d'entrée

Date effet

Date sortie

CT

CTP %

GC

Agricole

CP 31C propre

NAVARRE

01.12.95

01.12.95

31.03.98

000

00,0

23

Agricole

CP 31C propre

NAVARRE

01.10.04

01.10.04

01.10.04

001

00,0

23

Il est également indiqué : « renseignements informatisés en date du 25.04.08 ; 15 ans 8 mois ».

Enfin, chacun des documents comporte, dans un encadré, la mention suivante : « il est rappelé que quand les dates d'entrée et d'effet ne coïncident pas, il faudra tenir compte de cette dernière date pour déterminer le nombre de jours de travail pour calculer les droits aux prestations de la sécurité sociale ».

Il ressort de ces documents :

- que la durée de 13 ans 8 mois 3 jours qui figure sur le document du 25 avril 2006, ne peut pas correspondre à la durée d'un emploi agricole puisque les durées se rapportant au régime agricole sont expressément dénombrées en 852 jours pour la période du 1er décembre 1995 au 31 mars 1998 et 547 jours à compter du 1er octobre 2004, soit jusqu'au 25 avril 2006 ;

- que la durée de 15 ans 8 mois qui figure sur le document du 25 avril 2008, ne peut pas correspondre à la durée d'un emploi agricole puisque les durées se rapportant au régime agricole sont celles qui figurent sur le précédent document du 25 avril 2006 ;

- qu'ainsi, ces durées (13 ans 8 mois 3 jours et 15 ans 8 mois) sont les durées totales de cotisations qui recouvrent plusieurs activités, étant précisé qu'il n'est pas contesté qu'en dehors d'une activité agricole Monsieur [J] [H] [S]-[T] exerce également une activité salariée dans une entreprise industrielle.

Ainsi qu'il a été dit précédemment, la durée de cinq ans minimum d'expérience professionnelle doit avoir été acquise au cours des 15 années précédant la date effective de l'opération, soit en l'espèce pour le 31 mars 2013, soit pendant la période du 31 mars 1998 au 31 mars 2013.

Par conséquent, la période d'activité du 1er décembre 1995 au 31 mars 1998 ne peut être prise en compte pour apprécier la durée d'expérience professionnelle.

Le candidat à la reprise a manifestement cessé toute activité agricole entre le 1er avril 1998 et le 30 septembre 2004, puisque sur les documents produits il n'est pris en compte au titre du régime agricole, après le 31 mars 1998, qu'à compter du 1er octobre 2004, et ne justifie pas relever de ce régime au-delà du 25 avril 2008, date du dernier relevé des renseignements le concernant, produit aux débats, aucun justificatif n'étant produit pour la période postérieure à cette dernière date.

Or, du 1er octobre 2004 au 25 avril 2008, il s'est écoulé moins de cinq ans, de sorte qu'il convient de constater que les époux [S] ne démontrent pas que le bénéficiaire de la reprise justifie de cinq ans minimum d'expérience professionnelle acquise au cours des 15 années précédant la date effective de l'opération.

Par conséquent, il convient de constater qu'il n'est pas justifié que le bénéficiaire de la reprise remplissait l'une des deux premières conditions alternatives requises, s'agissant des conditions de capacité professionnelle ou d'expérience professionnelle.

En outre, aucun élément n'est produit de nature à démontrer la réalité de l'engagement du reprenant de se consacrer personnellement à l'exploitation du bien repris, d'occuper lui-même les bâtiments d'habitation du bien repris ou une habitation située à proximité du fonds et en permettant l'exploitation directe, ni aucun élément de nature à justifier qu'il possède le cheptel et le matériel nécessaire, ou à défaut, les moyens de les acquérir, conformément aux dispositions de l'article L. 411-59 du code rural.

Par conséquent, au vu de l'ensemble de ces éléments, le congé sera annulé.

Le jugement du Tribunal Paritaire des Baux Ruraux de BAYONNE du 8 juin 2012 sera donc infirmé en toutes ses dispositions.

Sur les articles 696 et 700 du code de procédure civile :

Les époux [S], partie perdante, seront condamnés aux entiers dépens et à payer à Monsieur [M] [B] la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

REÇOIT l'appel formé le 26 juin 2012 par Monsieur [M] [B] à l'encontre du jugement rendu le 8 juin 2012 par le Tribunal Paritaire des Baux Ruraux de BAYONNE du 8 juin 2012, et l'appel incident formé par les époux [S],

INFIRME ledit jugement en toutes ses dispositions,

STATUANT à nouveau et y ajoutant,

ANNULE le congé signifié le 27 septembre 2011 à Monsieur [M] [B] par Monsieur [D] [S] suivant exploit de Maître [C], huissier,

CONDAMNE in solidum Monsieur [D] [S] et Madame [A] [T] épouse [S] à payer à Monsieur [M] [B] la somme de 1.500 € (mille cinq cents euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE in solidum Monsieur [D] [S] et Madame [A] [T] épouse [S] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Arrêt signé par Madame ROBERT, Conseiller, suite à l'empêchement de Monsieur CHELLE, Président, et par Madame HAUGUEL, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE,Pour LE PRÉSIDENT empêché


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12/02250
Date de la décision : 19/09/2013

Références :

Cour d'appel de Pau 3S, arrêt n°12/02250 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-09-19;12.02250 ?
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