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27/02/2013 | FRANCE | N°11/03965

France | France, Cour d'appel de Pau, 1ère chambre, 27 février 2013, 11/03965


FA/AM



Numéro 13/831





COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre







ARRET DU 27/02/2013







Dossier : 11/03965





Nature affaire :



Demande en paiement du prix formée par le constructeur contre le maître de l'ouvrage ou son garant















Affaire :



[S] [J]



C/



LE PACT-HD DU PAYS BASQUE



















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Grosse délivrée le :

à :



















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R E T



prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 27 février 2013, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième a...

FA/AM

Numéro 13/831

COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRET DU 27/02/2013

Dossier : 11/03965

Nature affaire :

Demande en paiement du prix formée par le constructeur contre le maître de l'ouvrage ou son garant

Affaire :

[S] [J]

C/

LE PACT-HD DU PAYS BASQUE

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 27 février 2013, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 13 novembre 2012, devant :

Monsieur CASTAGNE, Conseiller, faisant fonction de Président

Monsieur AUGEY, Conseiller, magistrat chargé du rapport conformément à l'article 785 du code de procédure civile

Madame BENEIX, Conseiller

assistés de Madame PEYRON, Greffier, présente à l'appel des causes.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANT :

Monsieur [S] [J]

né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 9]

de nationalité française

[Adresse 6]

[Localité 3]

représenté par la SCP MARBOT - CREPIN, avocats à la Cour

assisté de Maître RIBETON, avocat au barreau de BAYONNE

INTIME :

LE PACT-HD DU PAYS BASQUE

[Adresse 4]

[Localité 2]

agissant poursuites et diligences en la personne de son président en exercice domicilié en cette qualité audit siège

représenté par la SCP DUALE - LIGNEY, avocats à la Cour

assisté de Maître Anne-Marie BONNET GESTAS, avocat au barreau de BAYONNE

sur appel de la décision

en date du 10 OCTOBRE 2011

rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BAYONNE

M. [J], s'est adressé au Pact-HD du Pays Basque dans le but de l'aménagement d'un logement locatif dans la dépendance de son immeuble, avec la perspective d'obtention d'une subvention de l'Agence Nationale de l'Amélioration de l'Habitat (Anah).

Il a signé le 16 mars 2007 avec le Pact-HD du Pays Basque un contrat de maîtrise d'oeuvre et d'assistance à maîtrise d'ouvrage. Le montant des travaux a été fixé à 156 810,62 €.

Le contrat de maîtrise d'oeuvre a été résilié dans le courant de l'année 2008, et les parties s'opposent sur l'imputabilité de la rupture.

Par acte d'huissier du 1er octobre 2009, le Pact-HD du Pays Basque a fait assigner M. [J] afin de condamnation au paiement de la somme principale de 8 209,22 € augmentée des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 30 juin 2009, représentant le montant des factures restées impayées.

Par jugement du 10 octobre 2011, le tribunal de grande instance de Bayonne a fait droit à la demande, et condamné M. [J] au paiement de la somme principale de 8 209,22 €, ainsi qu'une indemnité de 1 500 € pour frais irrépétibles.

Par déclaration au greffe du 7 novembre 2011, M. [J] relevé appel de ce jugement.

Dans ses écritures du 17 avril 2012, il a conclu à la réformation de cette décision en demandant à la Cour de prononcer la nullité du contrat souscrit le 16 mars 2007, et à titre subsidiaire, il a sollicité sa résolution aux torts de l'intimé.

Il a d'autre part conclu à la fixation de la date de réception des travaux effectués au 27 novembre 2008, assortie de nombreuses réserves, et il a sollicité à titre provisoire une somme de 54 127 € au titre des travaux de reprise, ainsi que la mise en oeuvre d'une mesure d'expertise ayant pour objet de décrire les désordres affectant l'immeuble, d'en évaluer le coût, et de fournir tous les éléments permettant de caractériser la responsabilité de l'intimé.

Il soutient en premier lieu que les travaux étant d'un montant de 93 663 € HT, il n'était pas nécessaire de souscrire un contrat de mission de maîtrise d'oeuvre externe complète auprès de l'Anah, puisque cela concerne exclusivement les chantiers d'un montant de plus de 100 000 € HT.

Il estime donc qu'il a été induit sciemment en erreur par le Pact-HD du Pays Basque qui lui avait affirmé qu'il était nécessaire de faire assurer la conduite des travaux par une maîtrise d''uvre externe.

Il ajoute que la cause essentielle du contrat réside dans le fait que ce type d'opération permet de bénéficier de subventions de la part de l'Agence Nationale de l'Amélioration de l'Habitat et qu'il s'agit donc d'une condition déterminante de passation de cette convention, puisque les travaux qu'il projetait auraient pu faire l'objet d'une prise en charge égale à environ 40 % du montant de ses investissements.

Il soutient par ailleurs qu'aucune précision ne lui a été donnée sur le montant des subventions dont il pourrait effectivement bénéficier, et que, jusqu'au 7 février 2008, il a été tenu dans l'ignorance de ce que l'Anah ne subventionnait pas des opérations portant sur des immeubles soumis à des loyers très sociaux, et il fait observer au surplus que la commission locale d'amélioration de l'habitat a limité à 15 000 € le montant maximum de la subvention susceptible de lui être attribuée.

Il ajoute que c'est le Pact-HD du Pays Basque qui a résilié unilatéralement le contrat puisqu'il a abandonné le chantier sans préavis à la fin du mois de juin 2008, et qu'il lui a adressé un courrier recommandé le 27 novembre suivant pour dénoncer la convention en fixant unilatéralement son terme au 24 juin 2008.

Il fait observer à cet égard qu'environ 69 % du montant des travaux avait été effectué, ainsi qu'en justifient 10 comptes-rendus de chantier adressés au Pact-HD du Pays Basque, et que dès lors il n'était nullement dans son intention de renoncer ou d'abandonner cette opération, puisque au contraire, il a continué à entreprendre des démarches pour pouvoir percevoir les subventions lui permettant d'achever son projet.

Il a contesté en outre devoir la somme sollicitée par le Pact-HD du Pays Basque en émettant des critiques sur le taux de TVA, l'assiette de la créance, ainsi que les conditions de réalisation du contrat, puisque, aux termes de la convention les plans projets détaillés n'ayant pas été exécutés, les montants affectés à cette tâche ne sont pas dus selon lui, et ce d'autant que le délai entre la signature du contrat et l'envoi du dossier de subvention soit 12 mois n'a pas été respecté, et que les retards se sont accumulés dès le début de l'exécution du projet.

Il ajoute que les travaux réalisés sont entachés de très nombreuses malfaçons, que l'ouvrage n'est pas conforme à l'usage attendu, qu'il comporte des erreurs de métrés, que les normes relatives à l'accessibilité pour les personnes handicapées n'ont pas été respectées, et que de très nombreuses réserves ont été adressées par écrit au Pact-HD du Pays Basque qui n'en a pas tenu compte.

Dans ses dernières écritures du 7 mars 2012, l'association Pact-HD du Pays Basque a conclu à la confirmation du jugement ainsi qu'à la condamnation de M. [J] au paiement de la somme de 3 000 € à titre de dommages-intérêts, et d'une indemnité de 4 000 € pour frais irrépétibles.

Le Pact-HD du Pays Basque expose que le montant des travaux prévus s'élevait à 156 810,62 € et que sa rémunération au titre de la maîtrise d'oeuvre complète est calculée HT sur le montant total HT des travaux, la mission d'assistance à maîtrise d'ouvrage s'élevant forfaitairement à 600 € HT.

Il déclare qu'en fonction de l'avancement du chantier, il a émis plusieurs factures constituant des demandes d'acomptes ainsi que des avoirs, et qu'au mois de juin 2008, après la 10ème réunion de chantier, M. [J] a résilié le contrat de maîtrise d'oeuvre au motif que les subventions sollicitées de l'Anah n'avaient pas été obtenues.

Le Pact-HD du Pays Basque fait valoir que M. [J] ne rapporte pas la preuve de l'abandon du chantier au mois de juin 2008, et qu'au contraire il résulte de son courrier du 3 août 2008 que c'est lui qui a demandé au maître d'oeuvre de mettre fin au contrat, et qu'en outre, il avait été informé par un courrier électronique du 21 avril 2008 de l'absence de financement pour l'année 2008 des dossiers portant sur l'aménagement des logements par changement de destination.

Le Pact-HD du Pays Basque estime donc que M. [J] a été valablement informé et en temps utile du refus de subventions, et que pour autant il a poursuivi l'exécution des travaux, alors que le Pact-HD du Pays Basque de son côté n'a commis aucune faute dans l'exécution de cette convention.

Le Pact-HD du Pays Basque ajoute que sa créance est parfaitement justifiée ; que le taux de TVA applicable est bien de 19,6 %, que les travaux ont été exécutés, et que les retards pris dans l'exécution du projet ne peuvent lui être imputés, et qu'il appartenait à M. [J] lorsqu'il a reçu la notification du rejet de subventions le 20 novembre 2008 de former tous recours utiles auprès du président du conseil général des Pyrénées-Atlantiques.

Pour ce qui est des désordres, le Pact-HD du Pays Basque fait valoir qu'après la résiliation unilatérale du contrat par M. [J], il a poursuivi l'exécution de l'ouvrage directement avec les entreprises exécutantes, alors que la réception de fait est intervenue au mois de juin 2008 et que M. [J] n'a formulé à ce moment-là aucune critique ni réserve sur les prétendues malfaçons et inachèvements dont il se prévaut.

Le 5 octobre 2012 M. [J] a déposé de nouvelles conclusions tendant aux mêmes fins que celle ayant fait l'objet de ses conclusions du 17 avril 2012.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 08 octobre 2012.

Par courrier reçu le 9 octobre 2012, le conseil du Pact-HD du Pays Basque a demandé à la Cour de rejeter ces conclusions de 52 pages, ainsi que deux pièces comme tardives, puisqu'elle n'a pas eu la possibilité d'y répondre utilement dans le délai de trois jours précédant l'ordonnance de clôture.

Par courrier du 30 octobre 2012, le conseil de M. [J] a indiqué que ces conclusions ne sont pas de nature à modifier celles déposées antérieurement, et qu'en outre de nouvelles pièces lui avaient été adressées le 27 juillet 2012 et qu'il n'a pu obtenir que très récemment le procès-verbal de la commission locale d'aménagement de l'habitat, et il estime donc que ces conclusions et pièces sont parfaitement recevables.

Motifs de l'arrêt

Les parties ont été avisées par un bulletin de fixation du 4 juin 2012 que la date de clôture serait fixée au 8 octobre suivant.

L'association Pact-HD du Pays Basque a conclu le 7 mars 2012, et M. [J] a déposé des conclusions le 17 avril suivant.

Il a donc disposé d'un délai très largement suffisant depuis la date du bulletin de fixation pour déposer de nouvelles conclusions.

Or, celles-ci d'une contenance de 52 pages ainsi que deux pièces ont été déposées le 5 octobre 2012, c'est-à-dire trois jours avant l'ordonnance de clôture, précision étant faite qu'il n'est pas contesté que le 5 octobre est un vendredi et le 8 octobre un lundi.

Le Pact-HD du Pays Basque s'est donc trouvé dans l'impossibilité de pouvoir en prendre connaissance et y répliquer en temps utile.

Les règles de loyauté du débat et de respect du principe du débat contradictoire n'ont donc pas été respectées.

Ces conclusions ainsi que les pièces déposées concomitamment portant le numéro 155 et 156 seront donc écartées des débats.

1) sur les demandes présentées par M. [J] :

a) la demande en annulation pour dol de la convention du 16 mars 2007 :

Il convient en premier lieu de rappeler que l'existence d'un dol, c'est-à-dire de man'uvres ou de réticences dolosives imputées au Pact-HD du Pays Basque s'apprécie à la date de souscription de la convention et dès lors, les faits postérieurs au 16 mars 2007 s'inscrivent dans le cadre de l'exécution du contrat et ne peuvent pas être pris en compte.

M. [J] soutient que son consentement a été vicié à la date de signature de contrat en invoquant deux moyens :

- l'exigence d'une maîtrise d'oeuvre externe complète :

M. [J] soutient que son cocontractant lui a fait croire qu'il était obligatoire de souscrire un contrat de maîtrise d'oeuvre externe complète, au motif que les règles de l'Anah imposent cette exigence pour pouvoir bénéficier des subventions lorsque le montant des travaux est supérieur à 100 000 € HT.

M. [J] fait valoir qu'il résulte du tableau d'analyse établi par le Pact-HD du Pays Basque le 24 septembre 2007 que le montant des travaux était de 93 663 € HT, et que de ce fait, il n'était pas obligatoire de recourir aux services d'un maître d'oeuvre.

Or, il ressort du tableau d'analyse postérieur du 24 janvier 2008 que le montant des travaux subventionnables a été fixé à la somme de 103 840,17 € HT, ce qu'a d'ailleurs lui-même relevé M. [J] dans ses écritures.

En conséquence, ce grief n'est pas établi.

- les conditions d'attribution des subventions :

M. [J] soutient que dès la souscription de la convention, le Pact-HD du Pays Basque savait que son projet ne serait pas éligible au versement de subventions, et qu'il lui a sciemment dissimulé ce fait.

Or, M. [J] ne rapporte pas la moindre preuve à cet égard, en se bornant à affirmer que le Pact-HD du Pays Basque ne pouvait ignorer que l'Anah refuserait de subventionner son projet.

D'ailleurs, les pièces versées aux débats démontrent que l'Anah accepte de subventionner ces types d'opérations à hauteur de 50 % ou 65 % du montant des travaux suivant qu'il s'agit de logements conventionnés ou bien de logements conventionnés sociaux.

L'appelant n'établit donc pas l'existence de man'uvres ou de réticences dolosives au moment de la signature du contrat de nature à l'induire en erreur sur l'obtention de subventions.

En conséquence, M. [J] sera débouté des fins de sa demande en annulation de la convention.

b) sur la demande en résiliation de la convention en raison des fautes commises lors de l'exécution du contrat :

Il fonde cette demande sur les dispositions de l'article 1147 du code civil.

Il lui appartient donc de rapporter la preuve de fautes graves commises par son cocontractant , d'une gravité telle qu'elles justifient la résiliation de la convention aux torts exclusifs de celui-ci.

M. [J] soutient que l'obtention de subventions constituait une cause essentielle de la convention, et que le Pact-HD du Pays Basque a totalement manqué à ses obligations à ce titre.

La convention du 16 mars 2007 comporte un volet dénommé « assistance à la constitution des demandes et des règlements de subventions » mettant donc à la charge du Pact-HD du Pays Basque une mission dont les termes sont définis dans la convention de suivi - animation passée entre le syndicat mixte Baxe Nafarroa et le Pact-HD du Pays Basque qui met à la charge de celui-ci une mission d'accompagnement consistant à assurer la recevabilité des dossiers de financement et le dépôt auprès des services instructeurs des demandes de subventions, d'assurer le lien entre le terrain et l'administration en participant aux commissions locales d'amélioration de l'habitat, l'envoi des demandes de paiement après vérification des factures et des conditions requises pour l'octroi de subventions, ainsi qu'une mission de suivi et d'évaluation de l'opération.

L'intimé a d'ailleurs établi des études dénommées « d'impact économique » permettant d'évaluer le montant des subventions susceptibles d'être obtenues par M. [J] en fonction du montant et de la nature des travaux subventionnables.

D'autre part, le Pact-HD du Pays Basque a transmis le dossier de M. [J] à l'Anah le 8 février 2008.

L'appelant soutient que le Pact-HD du Pays Basque a commis de nombreuses fautes qui sont les suivantes :

- il ne s'est pas assuré de la recevabilité du dossier :

M. [J] fait valoir que ces conditions n'ont pas été vérifiés lors du dépôt du dossier le 8 février 2008, puisque dans le courrier du Pact-HD du Pays Basque du 7 novembre 2008 lui annonçant que sa demande de subvention était rejetée, le motif était que le projet consistait dans « un changement de destination qui n'a pas été retenu et qui n'est donc pas éligible aux subventions ».

Il résulte de l'article 5 du contrat de suivi-animation précité que le Pact-HD du Pays Basque doit s'assurer de la recevabilité du dossier au moment de sa présentation, ce qui n'a effectivement pas été le cas en l'espèce.

- le Pact-HD du Pays Basque lui a fait souscrire les marchés de travaux avant que l'Anah n'autorise le démarrage desdits travaux :

Ce fait est établi par un courrier électronique adressé le 26 février 2008 à M. [J] par le Pact-HD du Pays Basque dans lequel il lui est demandé de signer les contrats avec l'ensemble des corps de métiers retenus.

Les contrats correspondants ont également été versés aux débats et ils ne contiennent aucune clause suspensive relative à l'obtention de subventions.

De ce fait, M. [J] se trouvait engagé juridiquement vis-à-vis de l'ensemble des fournisseurs.

Il soutient donc à juste titre qu'il ne pouvait alors qu'être conforté dans l'idée que son projet serait éligible aux subventions, et d'ailleurs dans un autre courrier électronique du 13 février 2008, le Pact-HD du Pays Basque lui indiquait « en ce qui concerne l'Anah, a priori la commission de février a été reportée à avril. Cela laisse présager que votre dossier ne sera pas instruit pour cette commission. L'information est au conditionnel, je vous en dirai plus dès que j'aurai des confirmations. Il faudra peut-être envisager de démarrer les travaux avant le passage en commission (sans confirmation du montant alloué) dès que vous aurez reçu l'accord de principe de l'Anah ».

Dans l'autre courrier électronique du 28 février 2008, le Pact-HD du Pays Basque lui indiquait « qu'a priori, votre dossier passera en avis préalable à la prochaine commission d'avril (suite à la visite d'hier sur le site n'émettant pas d'objection sur votre dossier d'autant plus que le loyer pratiqué sera un loyer conventionné et sera normalement financé à la commission suivante) ».

L'intimé soutient que M. [J] a commis une faute d'imprudence en engageant les travaux sans avoir obtenu l'accord formel de l'Anah sur l'attribution de subventions.

Or, c'est bien le Pact-HD du Pays Basque qui l'a incité à commencer les travaux, et il lui a fait signer les marchés correspondants en toute connaissance de cause, alors qu'il n'ignorait pas que le dossier de demande de subvention n'avait toujours pas été examiné par la Commission Locale d'Amélioration de l'Habitat (Clah).

- le Pact-HD du Pays Basque lui a toujours laissé croire que son dossier de demande de subvention serait accepté :

Il résulte des pièces versées aux débats que le 25 novembre 2007, M. [J] a demandé au Pact-HD du Pays Basque de préciser le « timing prévisionnel » de l'opération, et cet organisme lui a répondu « votre dossier étant subventionné par l'Anah, il doit passer en commission pour valider le montant exact des aides qui vous sera alloué ».

Le 26 février 2008, M. [J] a adressé un courrier électronique au Pact-HD du Pays Basque dans lequel il demandait s'il était possible de démarrer les travaux à la réception de l'accord de l'Anah, et « s'il existe une chance que le dossier ne soit pas accepté ».

Dans le courrier en réponse du 28 février 2008, le Pact-HD du Pays Basque lui a répondu qu'il pourrait démarrer les travaux « dès réception de l'accusé de l'Anah », en lui précisant que « votre dossier passera en avis préalable à la prochaine commission d'avril (suite à la visite d'hiver sur le site n'émettant pas d'objection sur votre dossier d'autant plus que le loyer pratiqué sera un loyer conventionné) ».

Il résulte manifestement de ces correspondances du Pact-HD du Pays Basque que l'Anah lui accordera des subventions pour financer ce projet.

L'accord de l'Anah sur le début des travaux a été donné le 11 mars 2008, mais aucune décision officielle n'avait été encore prise sur l'attribution de la subvention.

Le 28 mars 2008 M. [J] a adressé un nouveau courrier au Pact-HD du Pays Basque dans lequel il s'inquiétait encore de la question relative à l'attribution de la subvention.

Cela démontre donc que contrairement à ce que soutient le Pact-HD du Pays Basque, M. [J] n'a pas fait preuve d'imprudence en engageant les travaux, puisque d'une part, les marchés avaient été signés avec l'accord du Pact-HD du Pays Basque, que l'Anah avait donné son accord pour le démarrage du chantier, et qu'à ce stade le Pact-HD du Pays Basque ne lui a laissé entendre à aucun moment que son dossier de demande de subvention serait susceptible d'essuyer un refus.

D'ailleurs, dans le courrier électronique en réponse du 31 mars 2008, cet organisme lui indiquait « qu'il faut effectivement attendre le passage en commission pour connaître le montant exact de la subvention, commission locale qui dépend du conseil général. Votre dossier, à partir du moment où vous avez reçu l'accord pour démarrer les travaux ne sera pas rejeté, la subvention peut être éventuellement modulée en cas de modification du mode de calcul ou reportée en cas d'enveloppe financière épuisée ».

Cependant, dans un nouveau courrier électronique du 21 avril 2008, le Pact-HD du Pays Basque a fait connaître à M. [J] que « sous réserve de confirmation de l'Anah, il aurait été décidé que pour l'année 2008 que les dossiers portant sur l'aménagement de logements par changement de destination ne seraient pas financés. Il en résulterait que votre dossier, malgré la visite préalable effectuée par l'Anah et sa validation, ne puisse être financé, suite aux nouvelles dispositions prises dans le but de rentrer dans l'enveloppe budgétaire 2008. A ce jour, nous n'avons pas de confirmation de ces dispositions, mais nous vous tiendrons informé dès que possible ».

Il convient de relever que ces informations sont données par le Pact-HD du Pays Basque au conditionnel, et qu'il n'existe donc aucune certitude avérée sur le refus d'attribution de subventions à M. [J].

Aucune autre information officielle ne va être communiquée par le Pact-HD du Pays Basque à M. [J] jusqu'au courrier du 27 novembre 2008 par lequel cet organisme l'informe officiellement de ce que « lors de la dernière commission Anah du 7 novembre 2008, votre projet étant un changement de destination n'a pas été retenu et n'est donc pas éligible aux subventions ».

Or, il ressort des pièces du dossier dont l'authenticité et la teneur n'ont pas été contestées par le Pact-HD du Pays Basque que deux séances de la Commission Locale d'Amélioration de l'Habitat (Clah) se sont tenues les 25 avril et 15 mai 2008 dont il ressort que les projets comportant des « transformations d'usage » seront exclus pour l'année 2008.

Cela signifie donc que le projet de M. [J] ne pourra pas donner lieu à l'attribution d'une subvention.

Il s'agit de décisions officielles d'un organisme auquel participait un représentant du Pact-HD du Pays Basque ainsi qu'il ressort de la liste des participants mentionnés aux deux procès-verbaux.

Or, le Pact-HD du Pays Basque ne démontre pas avoir porté en temps utile à la connaissance de M. [J] le contenu de ces deux délibérations qui auraient eu pour effet de l'informer clairement du refus de l'Anah de subventionner son projet, et d'ailleurs, les conclusions du Pact-HD du Pays Basque ne comportent pas la moindre observation ou commentaire à ce sujet.

Il résulte de ce qui précède que le Pact-HD du Pays Basque a manqué à l'une de ses obligations essentielles d'information et de conseil, en incitant M. [J] à engager et à poursuivre l'exécution des travaux, en lui laissant croire qu'il bénéficierait des subventions de l'Anah, et en s'abstenant sans aucun motif légitime de l'informer en temps utile de la décision de rejet de sa demande, alors qu'il s'agissait d'une condition essentielle de son engagement.

Il convient en conséquence de réformer le jugement du 10 octobre 2011 et de prononcer la résolution du contrat aux torts exclusifs du Pact-HD du Pays Basque, en application des dispositions de l'article 1184 du code civil.

c) sur les conséquences de la résolution du contrat :

La résolution du contrat a pour première conséquence de remettre les parties en l'état dans lequel elles se trouveraient si la convention n'avait pas été conclue.

C'est donc à bon droit que M. [J] sollicite à ce titre la restitution de la somme de 6 078 € correspondant au montant justifié et non contesté des factures déjà réglées au Pact-HD du Pays Basque au titre de l'exécution de ce contrat.

Il a fait valoir d'autre part dans ses écritures que le dossier de demande de subvention n'a été déposé par le Pact-HD du Pays Basque qu'au mois de février 2008, alors que la convention avait été conclue en mars 2007, et que le retard pris dans le dépôt de ce dossier a eu également pour effet de le priver d'une subvention qu'il estime à 40 000 €, au motif que les rejets de demande de subvention de ces projets n'ont pris effet qu'à compter du 1er janvier 2008 et que le Pact-HD du Pays Basque aurait pu présenter son dossier avant la fin de l'année 2007.

L'intimé n'a fourni aucun élément de nature à contester cette allégation de M. [J].

D'autre part, M. [J] justifie de ce qu'il avait souscrit une convention portant sur des loyers sociaux ou très sociaux ouvrant droit au versement de subventions pouvant aller jusqu'à 65 % du montant des travaux subventionnables.

Il a versé aux débats un document établi par le Pact-HD du Pays Basque, non contesté par celui-ci, dénommé étude d'impact économique, effectuée le 24 septembre 2007 dont il résulte que dans le cas de financement de logements à caractère très social, la subvention peut être de 39 099 €.

Il s'agit à l'évidence d'un élément entrant dans le champ du préjudice subi par M. [J].

Il soutient par ailleurs à bon droit avoir subi un préjudice moral tenant au fait qu'il est resté dans l'incertitude sur le sort de sa demande pendant plus d'un an et demi par la faute de l'intimé qui l'a laissé poursuivre l'exécution de travaux onéreux, alors qu'il savait à tout le moins depuis le mois d'avril 2008 que le projet de M. [J] ne pourrait pas être subventionné, alors qu'au surplus celui-ci qui présente un handicap de 80 %, et qu'il a subi un infarctus du myocarde au mois de novembre 2008.

Il y a donc lieu de faire droit à la demande formulée à ce titre et de fixer à 15 000 € le montant de l'indemnité qui lui sera allouée à ce titre.

Enfin, M. [J] a sollicité le paiement d'une somme de 118 693 € représentant la perte de valeur de son appartement qu'il a dû vendre au mois de février 2009 en soutenant qu'il y a été contraint du fait du refus de sa demande de subvention, et de la nécessité de régler ses fournisseurs.

M. [J] ne rapporte pas expressément la preuve d'un lien de causalité entre la nécessité de vendre en urgence son appartement à un prix inférieur à celui du marché, avec les fautes commises par le Pact-HD du Pays Basque.

Ce chef de préjudice ne sera donc pas retenu.

Au total, la Cour dispose d'éléments suffisants pour fixer à la somme de 60 000 € le montant des dommages-intérêts que le Pact-HD du Pays Basque sera condamné à payer à M. [J].

d) sur les malfaçons alléguées et la demande d'expertise ainsi que le règlement d'une provision :

M. [J] a soutenu que les travaux dont le Pact-HD du Pays Basque assurait la maîtrise d'oeuvre sont entachés de très nombreuses malfaçons qui ont fait l'objet de nombreux courriers et mises en demeure adressés à celui-ci.

Il est exact que M. [J] a adressé à plusieurs reprises des courriers à l'intimé pour lui signaler l'existence de désordres et malfaçons affectant selon lui les travaux en cours.

Mais ce n'est que le 26 octobre 2009, c'est-à-dire plus d'un an après la notification du 20 novembre 2008 relative au refus définitif de la subvention, que M. [J] a fait établir un constat d'huissier relatant l'existence de désordres.

D'autre part, la cessation des relations contractuelles entre les parties est intervenue semble-t-il dans le courant du mois de juin 2008, mais il n'a pas été établi de procès-verbal de réception, pas plus qu'un état des travaux réellement effectués dans le cadre du contrat de maîtrise d'oeuvre conquise au Pact-HD du Pays Basque.

Il appartenait à M. [J] de provoquer en temps utile au besoin par voie judiciaire l'établissement d'un tel acte.

En outre, les travaux se sont poursuivis après la cessation des relations contractuelles, et il ressort d'un courrier du 23 janvier 2009 que M. [J] a reconnu avoir changé la nature de son projet, rendant totalement vain le passage d'un expert eu égard à la modification de l'état des lieux et au dépérissement des preuves.

M. [J] s'est donc ainsi privé de la possibilité de prouver les faits qu'il allègue.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté de ses demandes formulées à ce titre.

e) sur les demandes formulées par le Pact-HD du Pays Basque :

L'intimé sollicite le paiement de la somme de 8 209,22 € représentant le montant de factures de prestations effectuées pour le compte de M. [J] dans le cadre du contrat de maîtrise d'oeuvre.

Dans la mesure où la Cour a prononcé la résolution de cette convention, l'intimé ne peut plus formuler de demande à ce titre, et il sera donc débouté de sa demande.

Le Pact-HD du Pays Basque succombe pour partie sur les demandes présentées par M. [J] ; il sera donc débouté de ses demandes en dommages-intérêts et en paiement d'une indemnité pour frais irrépétibles.

f) sur la demande formulée par M. [J] au titre de l'article 700 du code de procédure civile :

Il serait inéquitable de laisser à la charge de M. [J] les frais irrépétibles qu'il a dû exposer à l'occasion de cette procédure ; l'intimé sera donc condamné à lui payer à ce titre une indemnité de 4 000 €.

Par ces motifs

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Réforme le jugement du 10 octobre 2011 du tribunal de grande instance de Bayonne et statuant à nouveau,

Prononce la résolution de la convention du 16 mars 2007 conclue entre le Pact-HD du Pays Basque et M. [S] [J] aux torts exclusifs du Pact-HD du Pays Basque.

Condamne le Pact-HD du Pays Basque à payer à M. [J] :

- la somme de 60 000 € (soixante mille euros) à titre de dommages-intérêts ;

- une indemnité de 4 000 € (quatre mille euros) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Déboute les parties de leurs autres demandes.

Condamne le Pact-HD du Pays Basque aux dépens.

Autorise les avocats de la cause qui en ont fait la demande à recouvrer contre la partie condamnée ceux des dépens dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu provision.

Le présent arrêt a été signé par M. Castagné, Conseiller, faisant fonction de Président, et par Mme Peyron, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

Mireille PEYRON Patrick CASTAGNE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 11/03965
Date de la décision : 27/02/2013

Références :

Cour d'appel de Pau 01, arrêt n°11/03965 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-02-27;11.03965 ?
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