NR/SB
Numéro 5133/12
COUR D'APPEL DE PAU
Chambre sociale
ARRÊT DU 20/12/2012
Dossier : 11/00556
Nature affaire :
Demande d'indemnités ou de salaires liée à la rupture autorisée ou non d'un contrat de travail d'un salarié protégé
Affaire :
[U] [I]
C/
ADAPEI DES LANDES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 20 Décembre 2012, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 15 Octobre 2012, devant :
Monsieur CHELLE, Président
Madame ROBERT, Conseiller
Madame PAGE, Conseiller
assistés de Madame HAUGUEL, Greffière.
Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANT :
Monsieur [U] [I]
[Adresse 1]
[Localité 4]
comparant assisté de Maître SAADA, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉE :
ADAPEI DES LANDES
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Maître ARDANUY de SELAFA FIDAL, avocats au barreau de DAX
sur appel de la décision
en date du 08 FÉVRIER 2011
rendue par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DÉPARTAGE DE PAU
Monsieur [U] [I] est engagé par l'ADAPEI DES LANDES par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 7 septembre 1981 en qualité de chauffeur au CAT Aquitaine Meubles de [Localité 7].
Durant son activité professionnelle au sein de l'ADAPEI DES LANDES, Monsieur [U] [I] a exercé des activités syndicales en qualité de délégué du personnel, puis membre du CE et délégué syndical (CGT), il a également été conseiller prud'hommes.
Par avenant en date du 18 juin 2002, l'employeur propose à Monsieur [U] [I] de le détacher pour une durée indéterminée au foyer [8] pour y faire fonction d'Aide Médico Psychologique pour adultes, placé au coefficient indiciaire 486 de la convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966 ; cette proposition est acceptée par le salarié.
Une convention est signée entre le directeur général de l'ADAPEI DES LANDES, le directeur du CAT Aquitaine Meuble et le directeur du Foyer [8] fixant les modalités de cette mise à disposition.
Par lettre recommandée en date du 22 octobre 2009, le directeur de l'ESAT SUD ADOUR MULTISERVICES (anciennement CAT Aquitaine Meubles) informe Monsieur [U] [I] de sa demande de réintégration dans l'effectif de l'ESAT à compter du 1er novembre 2009 étant précisé qu'il lui sera confié les missions suivantes :
- transport des ouvriers vers leur lieu de travail extérieur
- transport et livraison chez le client
- renfort du moniteur d'atelier pour la prise en charge des ouvriers de la section alternative de l'ESAT
Par lettre en date du 29 octobre 2009, Monsieur [U] [I] notifie son refus.
Par lettre du 5 novembre 2009, l'employeur, l'ADAPEI DES LANDES constate le refus de réintégration dans l'établissement d'origine qui permet de satisfaire les besoins de l'établissement d'origine et de le libérer de la directrice dont il n'hésite pas à se plaindre par écrit lui précisant que la réintégration s'analysant non en une modification du contrat de travail mais en un changement des conditions de travail, il lui appartiendra s'il maintient son refus, soit de le conserver dans son emploi antérieur soit d'engager la procédure spéciale de licenciement.
L'employeur lui demande en conséquence de se présenter à son travail dans son établissement d'origine au plus tard le lundi 9 novembre à 9 h, à défaut de quoi il saisira l'inspection du travail.
Par lettre du 7 novembre 2009, Monsieur [U] [I] réitère son refus et par lettre du 23 novembre 2009 prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de la violation par l'employeur des principes d'exécution de bonne foi de la relation contractuelle.
Le 10 décembre 2009, Monsieur [U] [I] saisit le Conseil de Prud'hommes de Pau des demandes suivantes :
- requalifier en licenciement la prise d'acte de la rupture du contrat de travail en raison de la violation des statuts protecteurs liés au conseiller prud'hommes et au délégué syndical ;
- condamner l'employeur à payer la somme de 71.797, 20 € correspondant à 30 mois de salaire à titre de dommages-intérêts ;
- condamner l'employeur au paiement d'une indemnité de préavis de 4.786,48 € correspondant à deux mois de salaire ;
- condamner l'employeur au paiement de l'indemnité de licenciement chiffrée à hauteur de six mois de salaire sur la base de la convention collective applicable soit la somme de 14.359,44 € ;
Par jugement en date du 8 février 2011, le Conseil de Prud'hommes de Pau, présidé par le juge départiteur :
- dit que la rupture du contrat de travail existant entre l'ADAPEI DES LANDES d'une part et Monsieur [U] [I] d'autre part doit être qualifiée de démission à l'initiative de ce dernier ;
- déboute Monsieur [U] [I] de l'ensemble de ses demandes ;
- rejette la demande présentée par l'ADAPEI DES LANDES sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamne Monsieur [U] [I] aux dépens.
Monsieur [U] [I] interjette appel par lettre recommandée en date du 14 février 2011 du jugement qui lui est notifié le 9 février 2011.
Monsieur [U] [I] demande à la Cour de :
- dire Monsieur [U] [I] recevable et bien fondé en son appel ;
- infirmer le jugement ;
- dire que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail est imputable à l'employeur et qu'elle emporte les effets d'un licenciement prononcé en violation du statut protecteur des conseillers prud'hommes et des délégués syndicaux ;
- condamner l'ADAPEI DES LANDES à verser à Monsieur [U] [I] les sommes suivantes :
indemnité due au titre de la méconnaissance du statut protecteur : 112.482 €
indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 14.359 €
indemnité de licenciement : 19.478,36 €
indemnité compensatrice de préavis : 4.786,48 € outre les congés payés y afférents
rappel de frais de repas : 72 €
article 700 du code de procédure civile : 4.000 €
- dire que ces sommes porteront intérêts au taux légal et prononcer leur capitalisation à compter de la saisine du conseil soit le 10 décembre 2009 ;
- condamner l'ADAPEI DES LANDES aux dépens et frais d'exécution éventuelle ;
- dire que les condamnations au titre de la méconnaissance du statut protecteur s'entendent nettes de CSG et de CRDS ;
Dans des conclusions écrites, reprises oralement, Monsieur [U] [I] soutient que la rupture est imputable à l'employeur qui a modifié unilatéralement ses fonctions violant les termes de l'avenant à son contrat de travail et la protection reconnue à un salarié ayant un mandat de représentant du personnel.
L'avenant du 18 juin 2002 l'affectant aux fonctions d'AMP pour adultes au foyer, avec référence à l'annexe 10 la convention collective, est stipulé pour une durée indéterminée.
L'avenant qui manque en l'espèce de précision quant à son objet et à sa durée qui auraient dû faire l'objet d'un accord entre les parties, doit s'analyser comme une mutation claire et définitive du contrat de travail.
Alors qu'il exerçait ses nouvelles fonctions depuis 7 années il lui est enjoint par courrier du 22 octobre 2009, de réintégrer l'effectif de l'ESAT à des fonctions radicalement différentes, démontrant la volonté de l'employeur de modifier unilatéralement sa qualification.
De plus, la convention signée entre les deux établissements organisant sa mise à disposition précise qu'elle prendra automatiquement fin dès que Monsieur [U] [I] sera rayé définitivement des effectifs de l'ADAPEI ; démontrant la volonté de lier la durée du détachement à sa présence dans les effectifs.
Mais de plus, aucun changement des conditions de travail ne peut être imposé au salarié protégé sans son accord, or, l'employeur s'est abstenu entre le 9 novembre 2009 et le 23 novembre 2009 de saisir l'administration du travail au regard de sa volonté de modifier ses fonctions.
En réalité, cette décision constitue d'une part, une mesure disciplinaire déguisée compte tenu de sa volonté de dénoncer des faits de discrimination dont il était victime et d'autre part, une suppression de postes dès lors que ni son poste au sein du foyer ni celui de chauffeur au sein du CAT n'ont été remplacés.
La rupture doit produire en conséquence les effets d'un licenciement nul.
Mais de plus, l'employeur a fait preuve de mauvaise foi dès lors qu'il lui demande de réintégrer son ancien poste le 22 octobre 2009 alors que le 23 octobre 2009 sera signé entre les organisations syndicales représentatives et la direction un accord collectif d'entreprise en faveur de l'emploi des seniors précisant qu'il ne sera plus imposé de mobilité interne pour les salariés âgés de 55 ans et plus.
Le Conseil de Prud'hommes a omis de statuer sur la demande relative à la discrimination syndicale qui résulte :
- des manoeuvres récurrentes de déstabilisation de la part de l'employeur
- des modifications fréquentes des plannings sans respect du délai de prévenance
- de contrôles vexatoires des heures de délégation
- de vexations diverses telles que le refus de rembourser des frais de repas
- de la volonté de la direction de le pousser vers un départ en retraite
L'employeur succombe dans la charge de la preuve de la non discrimination qu'il lui incombe de rapporter en ce que son comportement est objectivement étranger à toute discrimination.
En sa qualité de salarié protégé, il a droit à une indemnisation pour violation de son statut protecteur, cumulable avec la réparation du préjudice résultant d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
L'ADAPEI DES LANDES demande à la Cour de :
- confirmer le jugement du Conseil de Prud'hommes en ce qu'il a considéré que la prise d'acte de la rupture était une démission ;
- rejeter la totalité de ses demandes ;
- le condamner au paiement de la somme de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans des conclusions écrites, reprises oralement, l'ADAPEI DES LANDES soutient que la rupture du contrat de travail est imputable au salarié qui a pris acte de la rupture alors même que la modification envisagée lui était simplement proposée, le directeur du foyer d'origine l'informant de la demande de réintégration et l'employeur pour sa part, constatant son refus de réintégration, l'informant qu'à défaut de réintégrer l'établissement d'origine il se verrait contraint de saisir l'inspection du travail ; or, le salarié a pris acte de la rupture alors que l'employeur était encore dans la réflexion.
En effet, connaissant le statut protecteur de Monsieur [U] [I] ne permettant pas à l'employeur de lui proposer un changement dans les conditions de travail, l'ADAPEI DES LANDES lui écrivait expressément qu'elle n'avait que deux solutions, soit le conserver, soit saisir l'inspection du travail.
En conséquence, l'ADAPEI DES LANDES a parfaitement respecté la législation mais Monsieur [U] [I] a préféré rompre le contrat avant même qu'elle ne saisisse l'inspection du travail.
Mais de plus, alors qu'en sa qualité de salarié protégé aucune modification ne pouvait intervenir sans son accord, il lui suffisait de se maintenir sur son poste, il a pris l'initiative de la rupture.
En réalité, ainsi que le constate le Conseil de Prud'hommes la prise d'acte est due à la volonté de Monsieur [U] [I] d'écarter l'inspection du travail du dossier et d'échapper à l'impôt et aux charges sociales liés à l'indemnité de départ à la retraite.
En effet, Monsieur [U] [I] savait parfaitement que l'autorisation de licenciement pour faute était possible compte tenu que son courrier de refus ne comportait aucune motivation d'ordre professionnel ou familial.
L'avenant avait pour objectif un détachement destiné à le sortir d'un établissement où il ne se sentait plus bien mais ne s'analyse pas comme une mutation ; en conséquence, l'employeur était en droit de le rapatrier dans son établissement d'origine.
Enfin, Monsieur [U] [I] ne peut invoquer une convention à laquelle il n'était pas partie et qui avait pour objet l'organisation de ce détachement.
L'ADAPEI DES LANDES a indiqué à Monsieur [U] [I] qu'à défaut de revenir dans son établissement d'origine, elle serait contrainte de mettre en oeuvre la procédure protectrice des droits de salariés protégés ; Monsieur [U] [I] ne peut dans ces conditions invoquer une violation du statut protecteur.
Les éléments présentés par Monsieur [U] [I] à l'appui de sa demande au titre de discrimination syndicale ne sont pas significatifs il sera en conséquence débouté de ce chef de demande.
SUR QUOI
Sur la rupture du contrat de travail :
Par lettre du 23 novembre 2009, Monsieur [U] [I] prend acte de la rupture de son contrat de travail aux motifs de l'obligation qui lui est faite de «réintégrer» un établissement qu'il a quitté depuis le mois de juin 2002 et des nombreuses difficultés qu'il a rencontrées dans le cadre de son exercice professionnel, précisant dans ses écritures avoir été victime d'une discrimination syndicale au cours de l'exécution de son contrat de travail.
Lorsque le salarié titulaire d'un mandat électif ou de représentation, tel que Monsieur [U] [I], prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets d'un licenciement nul pour violation du statut protecteur lorsque les faits invoqués par le salarié le justifiaient, soit, dans le cas contraire, les effets d'une démission.
Il appartient au salarié qui prend acte de la rupture de son contrat de travail d'établir que la prise d'acte est justifiée c'est-à-dire qu'il a décidé de rompre son contrat à la suite d'un manquement de l'employeur suffisamment grave à ses obligations, soit en l'espèce, une modification unilatérale de ses fonctions contractuellement convenues dans le cadre de l'avenant définitif du 18 juin 2002 de plus en violation de son statut protecteur.
Sur le surplus des manquements reprochés à l'employeur à savoir des faits de discrimination syndicale, le régime de la preuve est partagé entre l'employeur et le salarié, conformément aux dispositions de l'article L1134-1 du code du travail qui stipule que lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions du chapitre II le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte.
Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
Le juge forme alors sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
' sur la discrimination syndicale :
Monsieur [U] [I] fonde sa demande sur :
- les manoeuvres de déstabilisation dont il fait l'objet depuis de nombreuses années, multiples tentatives de licenciement, de modification unilatérale de son contrat de travail;
- les vexations diverses dont le refus de lui rembourser des frais de repas ;
- l'insistance de l'employeur voulant le mettre à la retraite ;
- le fait que l'ADAPEI DES LANDES est coutumière de condamnations pour des faits de discrimination syndicale ;
- le contenu des écritures de l'ADAPEI DES LANDES dans le cadre de la présente procédure.
La demande de l'employeur en 2006 à Monsieur [U] [I], âgé de 61 ans, de lui communiquer son relevé de carrière afin de faire le point sur sa fin de carrière ainsi que le courrier adressé le 19 mars 2009 par l'employeur afin de connaître son intention quant à un éventuel départ en retraite, information nécessaire pour programmer son éventuel remplacement ainsi que pour l'établissement du budget auquel il émarge, ne sauraient être considérés comme une incitation à la prise de retraite relevant d'une discrimination.
Par ailleurs, s'il est effectivement démontré la saisine a au moins à trois reprises du Conseil de Prud'hommes par Monsieur [U] [I] à l'encontre de son employeur, il importe de constater que Monsieur [U] [I] n'a jamais, jusqu'à la présente procédure, allégué d'une quelconque discrimination syndicale à l'encontre de son employeur alors qu'il convient de rappeler que conformément à l'article L 1134-5 du code du travail, l'action en réparation du préjudice résultant d'une discrimination se prescrit par cinq ans à compter de la révélation de la discrimination.
Le 28 novembre 1986, Monsieur [U] [I], en sa qualité de délégué titulaire du comité entreprise, déposait plainte avec constitution de partie civile contre le président de l'association pour entrave au fonctionnement des instances électives et représentatives du personnel auprès du juge d'instruction de Mont-de-Marsan, cependant, ce dernier le 23 avril 1987, lui demandait des précisions sur les lieux, les conditions et la date des infractions invoquées or Monsieur [U] [I] ne justifie nullement de la suite donnée à ce dépôt de plainte.
Enfin, la plainte du 30 avril 1993 par Monsieur [U] [I] pour section du fil électrique du témoin des plaquettes de freins dirigée contre X. est sans lien avec une quelconque discrimination.
Par ailleurs, il s'avère qu'en 1986, période largement antérieure à la prescription quinquennale de l'article L 1134-5 du code du travail un litige s'est développé entre Monsieur [U] [I] et son employeur sur la récupération d'heures et la fixation des dates des congés, cependant aucune pièce n'est produite sur la résolution de ce litige ni sur ses incidences en matière de discrimination.
Enfin, le seul engagement d'une procédure de licenciement à l'encontre de Monsieur [U] [I] en 2001 refusée par la direction du travail du fait de l'inobservation des délais entre la date de mise à pied et la tenue de la réunion du comité d'entreprise portant sur le projet de licenciement ne suffit pas à établir un fait de harcèlement.
Enfin, ni les écritures développées par le conseil de l'ADAPEI DES LANDES dans la présente procédure, ni la condamnation de l'ADAPEI DES LANDES en 2009 par la Cour d'Appel de PAU au paiement de dommages-intérêts à la compagne de Monsieur [U] [I] pour l'avoir exclue de recrutement en raison de sa situation de famille ne sont susceptibles de caractériser des faits de discrimination syndicale à l'encontre de Monsieur [U] [I].
S'il est justifié que les plannings de travail des mois d'avril et juin 2009 ont été communiqués avec retard, ce qui pouvait générer une gène pour le demandeur, ils ne suffisent pas à établir des faits de discrimination.
' Sur la modification des fonctions et la violation de l'avenant définitif du 18 juin 2002 :
En l'espèce, il résulte de l'ensemble des pièces produites et des explications des parties, que Monsieur [U] [I] engagé le 7 septembre 1981 par l'ADAPEI DES LANDES aux fins d'exercer les fonctions de chauffeur au sein du CAT Aquitaine Meubles a été détaché à compter du 18 juin 2002, pour une durée indéterminée, par le CAT Aquitaine Meubles, situé à [Localité 7], au Foyer [8], également situé à [Localité 7] pour y faire fonction d'AMP pour adultes.
Il est précisé sur l'avenant que sur un plan organisationnel (gestion des tâches, horaires de travail, gestion des absences) il devra s'adresser à la direction du Foyer [8].
Parallèlement, le directeur du CAT Aquitaine Meubles, le directeur du foyer [8] et le directeur général de l'ADAPEI signent une convention fixant les modalités de fonctionnement interne de la mise à disposition de Monsieur [U] [I] le 19 février 2003.
Il résulte tant des mentions de l'avenant que de la convention de mise à disposition que Monsieur [U] [I] reste sous l'autorité hiérarchique du directeur du CAT Aquitaine Meubles, service d'origine qui continue à le rémunérer.
En conséquence, le transfert de Monsieur [U] [I], validé par l'avenant du 18 juin, ne revêt pas les caractères d'une mutation mais constitue une mise à disposition entre deux services dépendant par ailleurs du même employeur, l'ADAPEI.
Mais de plus, une mise à disposition est par essence temporaire et la mention dans l'avenant ' pour une durée indéterminée ' ne s'entend que de l'impossibilité, lors de sa conclusion, d'en prévoir le terme précis, sans pouvoir en tirer la conséquence de son caractère définitif, jusqu'au départ de Monsieur [U] [I] de l'effectif de L'ADAPEI.
En conséquence, en proposant le 22 octobre 2009 à Monsieur [U] [I] de rejoindre son service d'origine, lequel est toujours resté son service de rattachement administratif, l'employeur n'a pas violé les dispositions du code du travail.
Mais de plus, alors que par lettre du 29 octobre 2009, Monsieur [U] [I] confirmait au directeur de l'ESAT son refus de réintégrer son service d'origine, son employeur, l'ADAPEI DES LANDES lui répondait :
« .....Ce détachement a consisté à passer d'un établissement situé à [Localité 7], l'ESAT à un autre établissement situé à [Localité 7], le Foyer [8].
Ces deux établissements sont distants de moins de 2000 m.
Votre salaire, votre coefficient, vos conditions et avantages acquis non seulement ont été maintenus, mais même ont été améliorés.
Votre établissement d'origine demande votre réintégration.
Je constate que vous refusez de réintégrer votre établissement d'origine..........
........ vous indiquez que vous refusez de donner suite à la demande de réintégration dans votre établissement d'origine ; comme il s'agit non pas d'une modification de votre contrat de travail mais d'un changement de vos conditions de travail, l'établissement n'étant pas situé au même le lieu (même si la distance entre les deux établissements est très faible), deux solutions s'offrent à moi ; soit vous conserver à votre emploi antérieur, soit engager la procédure spéciale de licenciement.
C'est la raison pour laquelle je vous demande de vous présenter au travail, dans votre établissement d'origine, l'ESAT SAM au plus tard le lundi 9 novembre 2009 à 9 h.
À défaut, je considérerai que vous refusez donc de réintégrer votre établissement d'origine et je me verrais contraint de saisir l'inspection du travail. »
Au regard des constatations précédentes sur la situation de mise à disposition, avec demande de réintégration dans le service d'origine, il est constant qu'il n'y avait pas modification du contrat de travail mais seulement des conditions de travail.
Cependant, il résulte des articles L. 2411-5, L. 2411-8 et L. 2411-22 du code du travail, qu'aucune modification de son contrat de travail ou changement de ses conditions de travail ne peut être imposé à un salarié protégé, et en cas de refus par celui-ci de cette modification ou de ce changement, l'employeur doit poursuivre le contrat de travail aux conditions antérieures ou engager la procédure de licenciement en saisissant l'autorité administrative d'une demande d'autorisation de licenciement.
Or, en l'espèce l'employeur dans son courrier du 5 novembre 2009 mentionne expressément qu'en raison du refus du salarié d'accepter ce changement dans ses conditions de travail, deux solutions s'offrent à lui soit le conserver à son emploi antérieur soit engager la procédure spéciale de licenciement, s'il ne se présente pas son travail le lundi 9 novembre à 9 h.
Cependant, le 23 novembre 2009, Monsieur [U] [I] prend l'initiative de rompre le contrat alors qu'il ne peut être fait grief à l'employeur de ne pas s'être positionné dans le bref délai de 14 jours, entre les deux options qui lui étaient offertes, décision exigeant un temps de réflexion suffisant compte tenu de son statut de salarié protégé et de son ancienneté.
En conséquence, il ne peut être fait grief à l'employeur de ne pas avoir respecté la procédure spécifique au salarié protégé.
En conséquence, il résulte de l'ensemble des dossiers que l'employeur a légitimement souhaité, pour des motifs organisationnels, mettre un terme à une mise à disposition d'un salarié entre deux services et qu'il n'est pas démontré que cette décision ait été prise de mauvaise foi.
Compte tenu du refus formel opposé par Monsieur [U] [I], l'employeur, ainsi qu'il en a informé le salarié était dans l'obligation soit de le conserver à son poste soit d'engager la procédure spéciale de licenciement liée à son statut de salarié protégé ; cependant, court-circuitant l'employeur, Monsieur [U] [I] a décidé, prématurément, de prendre acte de la rupture de son contrat de travail.
Il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a dit que la rupture du contrat de travail produit les effets d'une démission et a débouté Monsieur [U] [I] de l'ensemble de ses demandes au titre de la rupture.
Sur la demande de remboursement de repas :
Monsieur [U] [I] sollicite le remboursement de frais de repas à hauteur de 72 € et produit à l'appui de sa demande une pièce 42 qui ne permet pas de justifier du bien fondé de sa demande.
Les seules pièces relatives à des frais de repas sont les pièces 22 et 23 au sujet d'un repas pris dans un restaurant de l'association pour un montant de 5,40 € et dont Monsieur [U] [I] n'a pas voulu s'acquitter alors qu'il lui appartenait après paiement d'en solliciter le remboursement auprès de l'employeur.
Il sera en conséquence débouté de ce chef de demande.
Sur les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile :
L'équité et la situation économique des parties ne commandent pas de faire droit à la demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud'homale et en dernier ressort,
Reçoit l'appel formé par Monsieur [U] [I] le 14 février 2011.
Confirme le jugement du Conseil de Prud'hommes de Pau en date du 8 février 2011 en toutes ses dispositions.
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne Monsieur [U] [I] aux dépens.
Arrêt signé par Monsieur CHELLE, Président, et par Madame HAUGUEL, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE,LE PRÉSIDENT,