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24/11/2011 | FRANCE | N°10/02529

France | France, Cour d'appel de Pau, Chambre sociale, 24 novembre 2011, 10/02529


CP/MS



Numéro 5222 /11





COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale







ARRÊT DU 24/11/2011







Dossier : 10/02529





Nature affaire :



Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution















Affaire :



VIANDES DU HAUT-BÉARN



C/



[O] [O]

















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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R Ê T



Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 24 novembre 2011, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du C...

CP/MS

Numéro 5222 /11

COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 24/11/2011

Dossier : 10/02529

Nature affaire :

Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution

Affaire :

VIANDES DU HAUT-BÉARN

C/

[O] [O]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 24 novembre 2011, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APR'S DÉBATS

à l'audience publique tenue le 26 septembre 2011, devant :

Monsieur PUJO-SAUSSET, Président

Madame ROBERT, Conseiller

Madame PAGE, Conseiller

assistés de Madame HAUGUEL, Greffière.

Les Magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

VIANDES DU HAUT-BÉARN venant aux droits de la SARL LAUGE

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Maître MALTERRE, avocat au barreau de PAU

INTIMÉ :

Monsieur [O] [O]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Comparant,

Assisté de Monsieur [W] [W], Délégué Syndical, muni d'un pouvoir régulier

sur appel de la décision

en date du 21 JUIN 2010

rendue par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES

FORMATION DE DÉPARTAGE DE PAU

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur [O] [O] a été embauché par la SA LAUGE le 21 octobre 2001 en qualité de découpeur à [Localité 5] suivant contrat à durée indéterminée. La SA LAUGE a été reprise par la SARL VIANDES DU HAUT-B''ARN et est devenue la SARL LAUGE, nouvel employeur de Monsieur [O] [O] qui a transféré l'activité de découpe de viande sur le site d'[Localité 6].

Par lettre du 31 octobre 2007, la SARL LAUGE a signifié à Monsieur [O] [O] la proposition de transférer le lieu d'exécution du contrat du travail de [Localité 5] à [Localité 6] dans le cadre de l'article L.1222-6 du Code du Travail, lui indiquant qu'il avait un mois pour faire connaître s'il acceptait la modification de son contrat de travail et Monsieur [O] [O] a refusé la modification.

Après avoir été convoqué à un entretien préalable au licenciement, il a été licencié par lettre du 21 mars 2008 pour cause économique et il a saisi le Conseil de Prud'hommes de PAU.

Le Conseil de Prud'hommes de PAU, section Industrie, par jugement contradictoire de départition du 21 juin 2010, auquel il conviendra de se reporter pour plus ample exposé des faits, des moyens et de la procédure a considéré que le licenciement est intervenu sans cause réelle et sérieuse.

Il a condamné la SARL LAUGE à verser à Monsieur [O] [O] la somme de 9 282,18 € au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Il a condamné Monsieur [O] [O] à payer à la SARL LAUGE la somme de 3 094,06 € au titre de l'indemnité de préavis non effectué,

Il a débouté les parties du surplus de leurs demandes et a condamné la SARL LAUGE aux dépens de l'instance.

La SARL LAUGE a interjeté appel de ce jugement le 29 juin 2010.

Les parties ont comparu à l'audience, la SARL LAUGE par représentation de son conseil, Monsieur [O] [O] était assisté de Monsieur [W], Représentant Syndical, régulièrement mandaté.

PR''TENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions développées à l'audience, la SARL LAUGE demande à la Cour de déclarer l'appel recevable, de confirmer le jugement sur le préavis mais de le réformer sur le licenciement et de le dire bien fondé, de débouter Monsieur [O] [O] de toutes ses demandes.

De condamner Monsieur [O] [O] à payer la somme de 3 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et celle de 1 500 € par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens.

La SARL LAUGE fait valoir que la SA LAUGE était sur le point de se voir retirer l'agrément de la salle de découpe et que compte tenu de la vétusté des locaux, la remise aux normes était au-delà de ses capacités financières, qu'au moment de la reprise, il a donc été décidé de transférer cette activité de découpe sur le site d'[Localité 6] qui faisait l'objet d'agrandissements pour permettre le maintien des emplois, que donc le transfert du lieu de travail était proposé à Monsieur [O] [O] par courrier du 30 octobre 2007, qu'il s'agissait d'une simple modification de ses conditions de travail qu'il refusait. Elle ajoute que la lettre de licenciement répond aux exigences légales, elle contient les motifs exacts de la cause économique, savoir l'arrêt de la fabrication à [Localité 5] et du regroupement de l'activité sur le site d'[Localité 6] qui constitue bien une réorganisation de l'entreprise et permet le contrôle du Juge, qu'elle a cherché à reclasser le salarié en lui proposant le maintien de son emploi sur le site d'[Localité 6], que le licenciement est donc fondé. Elle ajoute enfin que Monsieur [O] [O] n'a pas effectué son préavis qui débutait le 22 mars 2008, qu'à la reprise du travail, le 28 janvier 2008, il n'a pas sollicité de visite de reprise, qu'il a repris son travail jusqu'au 17 mars date à laquelle il abandonnera son poste sans faire parvenir aucun justificatif alors qu'il a refusé la convention de reclassement et ne reprendra pas son travail.

*******

Monsieur [O] [O], intimé, par conclusions développées à l'audience demande à la Cour de confirmer le jugement sur le licenciement et implicitement de l'infirmer sur le préavis, puisqu'il fait valoir qu'il ne pouvait pas être exécuté du fait de l'absence de visite médicale de reprise après ses arrêts de travail.

Monsieur [O] [O] fait valoir que la proposition de transfert constitue une modification des conditions de travail, puisqu'il n'existe dans le contrat, aucune clause de mobilité, que la lettre de licenciement ne fait pas référence à une réorganisation de l'entreprise indispensable à la sauvegarde de sa compétitivité et qu'il ne lui a été fait aucune proposition de reclassement. Il ajoute qu'à compter du 17 décembre 2007, il va devoir arrêter de travailler suite à des douleurs paralysantes de l'épaule et bénéficiera d'arrêts de travail du 17 décembre 2007 au 28 janvier 2008, totalisant 42 jours d'arrêts de travail, qu'il appartenait à la SARL LAUGE d'organiser une visite de reprise obligatoire pour assurer son obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des salariés et qu'il n'effectuera pas son préavis au regard du certificat médical, selon les prescriptions contenues dans le certificat médical établi par son médecin traitant.

La Cour se réfère expressément aux conclusions visées plus haut pour l'exposé des moyens de fait et de droit.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La Cour examinera successivement les points litigieux au vu du dossier de la procédure, des éléments des débats et des pièces régulièrement produites au dossier.

Sur la recevabilité de l'appel

L'appel formalisé dans les délais et formes requis est recevable.

Au fond,

Sur la rupture du contrat de travail.

La lettre de licenciement du 21 mars 2008 qui fixe les limites du litige est libellée comme suit :

« ... Les motifs d'ordre économique de cette décision, nous vous le rappelons sont les suivants :

Dans le cadre de l'arrêt des fabrications à [Localité 5] de la Société LAUGE et du regroupement des activités des sociétés LAUGE SA et les VIANDES DU HAUT-BÉARN sur le seul site d'[Localité 2], nous vous avons proposé par courrier recommandé du 29 octobre 2007 de transférer votre contrat de travail à [Localité 6] pour le début d'année 2008... Nous avons souhaité vous faire bénéficier des dispositions de l'article L.321'1'2 du Code du Travail, vous avez donc bénéficié d'un délai de réponse et de réflexion d'un mois. Vous avez refusé notre proposition destinée à maintenir votre collaboration et ainsi éviter votre licenciement. Nous ne disposons d'aucune autre possibilité de reclassement ... »

Le motif économique est ainsi défini par l'article L.1233-3 du Code du Travail : « Constitue un licenciement pour motif économique, le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié, résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques.

Les dispositions du présent chapitre sont applicables à toute rupture du contrat de travail à l'exclusion de la rupture conventionnelle visée aux articles L.1237'11 et suivants résultant de l'une des causes énoncées au premier alinéa.. »

Selon l'article L.1233-3 du Code du Travail, constitue donc un licenciement économique, le licenciement effectué par un employeur résultant d'une modification refusée par le salarié d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutif notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques ou encore à une réorganisation de l'entreprise. '

Lorsqu'elle n'est pas liée à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques, une réorganisation ne peut constituer un motif économique que si elle est effectuée pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise, étant précisé que c'est la menace qui pèse sur la compétitivité qui est à prendre en considération et qui justifie la réorganisation à l'origine du licenciement. Enfin, la preuve de la nécessaire sauvegarde de la compétitivité incombe à l'employeur.

En l'espèce, si la SARL LAUGE invoque la réorganisation de l'entreprise par le transfert de l'activité découpe sur le seul site d'[Localité 6], elle ne précise pas dans la lettre de licenciement, si cette réorganisation est liée à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques ou si elle est effectuée pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise, le dossier de la SARL LAUGE ne contient aucun justificatif à tous égards.

Par ailleurs, l'article L.1233-4 du même Code du Travail précise que : ' Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient.

Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe sur un emploi équivalent. À défaut et sous réserve de l'accord express du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi de catégorie inférieure.

Les offres de reclassement proposées aux salariés sont écrites et précises. »

Les recherches de reclassement doivent s'effectuer à compter du moment où le licenciement est envisagé et l'employeur doit exécuter loyalement son obligation de reclassement.

En l'espèce, le licenciement n'a pu être envisagé que postérieurement au refus de Monsieur [O] [O] de la modification du contrat de travail, cette proposition de modification ne peut donc pas justifier la recherche de reclassement qui pèse sur l'employeur.

En conséquence, la décision déférée sera confirmée en ce qu'elle a retenu que le licenciement de Monsieur [O] [O] est dépourvu de cause réelle et sérieuse et sur les dommages et intérêts, dont le montant n'est pas critiqué.

Sur l'indemnité compensatrice de préavis.

Le préavis de Monsieur [O] [O] devait débuter à compter du 22 mars 2008, ce dernier a refusé la convention de reclassement personnalisé et il ne l'a pas effectué, il a été en arrêt maladie du 17 décembre 2007 au 28 janvier 2008, puis a repris son travail jusqu'au 17 mars 2008 sans passer de visite de reprise, il ne demande pas le paiement de son préavis.

L'article R.4624-21 du Code du Travail précise que le salarié bénéficie d'un examen de reprise de travail par le médecin du travail après une absence d'au moins 21 jours en raison d'une maladie non professionnelle, cet examen devant intervenir en application de l'article R.4624-22 du Code du Travail, au plus tard dans un délai de huit jours après la reprise du travail.

C'est à l'employeur de prendre l'initiative de cette visite, qui seule met fin à la période de suspension du contrat de travail, de telle sorte que le refus du salarié d'effectuer son préavis n'est pas fautif et il ne peut être fait droit à la demande de la SARL LAUGE de paiement du préavis, le jugement sera réformé sur ce point.

Sur les dépens.

La SARL LAUGE qui succombe en ses prétentions sera condamnée aux entiers dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire, rendu en matière prud'homale et en dernier ressort,

Déclare l'appel recevable.

Confirme le jugement sur le licenciement et les dommages et intérêts.

L'infirme pour le surplus et statuant à nouveau,

Déboute la SARL LAUGE de sa demande de paiement du préavis,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Y ajoutant,

Le licenciement déclaré illégitime est sanctionné par l'article L.1235-4, la Cour ordonne le remboursement par la SARL LAUGE à P LE-EMPLOI des sommes versées au salarié au titre du chômage dans la limite de six mois.

Condamne la SARL LAUGE aux entiers dépens d'appel.

Arrêt signé par Monsieur PUJO-SAUSSET, Président, et par Madame HAUGUEL, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le Magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE,LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/02529
Date de la décision : 24/11/2011

Références :

Cour d'appel de Pau 3S, arrêt n°10/02529 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-11-24;10.02529 ?
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