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25/07/2011 | FRANCE | N°08/02941

France | France, Cour d'appel de Pau, 1ère chambre, 25 juillet 2011, 08/02941


FA/CR



Numéro 11/





COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre







ARRET DU 25/07/2011







Dossier : 08/02941





Nature affaire :



Demande relative à un droit de passage















Affaire :



[N] [L] épouse [P], [G] [P]



C/



[S] [M] épouse [K],

[Y] [K]

























Grosse dél

ivrée le :



à :











RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R E T



prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 25 juillet 2011, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civ...

FA/CR

Numéro 11/

COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRET DU 25/07/2011

Dossier : 08/02941

Nature affaire :

Demande relative à un droit de passage

Affaire :

[N] [L] épouse [P], [G] [P]

C/

[S] [M] épouse [K],

[Y] [K]

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 25 juillet 2011, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 26 Avril 2011, devant :

Monsieur CASTAGNE, Conseiller faisant fonction de président.

Monsieur AUGEY, Conseiller, Magistrat chargé du rapport conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Madame BENEIX, Conseiller

assistés de Madame PEYRON, Greffier, présent à l'appel des causes.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTS :

Madame [N] [L] épouse [P]

[Adresse 14]

[Localité 13] - PAYS BAS

Monsieur [G] [P]

[Adresse 14]

[Localité 13] - PAYS BAS

représentés par la SCP DE GINESTET DUALE LIGNEY, avoués à la Cour

assistés de Me BAQUE, avocat au barreau de TARBES

INTIMES :

Madame [S] [M] épouse [K]

[Adresse 6]

[Localité 5]

Monsieur [Y] [K]

[Adresse 6]

[Localité 5]

représentés par la SCP LONGIN-LONGIN-DUPEYRON-MARIOL, avoués à la Cour

assistés de Me PILLON, avocat au barreau de CAEN

sur appel de la décision

en date du 14 MAI 2008

rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE TARBES

Les époux [P] bénéficient d'une servitude de passage sur le fonds de M. et de Mme [K] cadastré section C numéro [Cadastre 10] , situé à [Localité 15] (Hautes-Pyrénées).

Ils soutiennent que les époux [K] ne respectent pas les dispositions de l'acte constitutif de la servitude, au motif qu'ils ont fermé ce passage au moyen d'un portail de 3,40 mètres de large, alors que l'assiette du droit est d'une largeur de cinq mètres.

M. et Mme [K] ont conclu au rejet de la demande en faisant valoir que l'architecte des bâtiments de France s'est opposé à ce que l'ouverture ait une largeur de cinq mètres, et qu'ils n'ont donc fait qu'exécuter les prescriptions légales édictées par l'autorité publique.

Ils ont fait valoir d'autre part que cette servitude est éteinte, au motif que l'état d'enclave a cessé par l'effet de l'acquisition par les époux [P] d'une nouvelle parcelle leur donnant un accès direct à la voie publique.

Par jugement du 14 mai 2008, le tribunal de grande instance de Tarbes a débouté les époux [P] de l'ensemble de leurs demandes.

Par un arrêt du 28 septembre 2009, la cour d'appel de Pau a sursis à statuer sur les demandes et ordonné une expertise ayant pour objet de dire :

' si la parcelle cadastrée section C numéro [Cadastre 8] appartenant aux époux [P] se trouvait en situation d'enclave lors de l'acquisition par Mme et M. [K] de la parcelle cadastrée section C numéro [Cadastre 10] ;

' si cette situation d'enclave a disparu depuis l'acquisition par M et Mme [P] de la parcelle cadastrée section C numéro [Cadastre 12], en précisant notamment si le chemin dénommé [Adresse 17] permet une desserte suffisante du fonds des époux [P].

L'expert a déposé son rapport le 1er juin 2010.

Dans leurs dernières conclusions déposées le 3 janvier 2011, les époux [P] ont demandé à la cour d'appel de juger que leur parcelle numéro [Cadastre 8] n'était pas enclavée lors de l'acquisition par les époux [K] de la parcelle numéro [Cadastre 10], et de dire d'autre part que le chemin dénommé [Adresse 17] ne permet pas une desserte suffisante de leur fonds.

Ils se fondent sur les conclusions du rapport d'expertise et sur les dispositions des articles 700 et 701 du Code civil pour dire que les époux [K] ont aggravé l'exercice de la servitude, en mettant en place un portail d'une largeur de 3,40 mètres qui ne correspond pas à l'assiette définie par l'acte constitutif de la servitude.

Ils ont donc demandé à la cour de juger que la servitude n'est pas éteinte, d'ordonner le rétablissement de la largeur de cinq mètres de la servitude de passage dans le délai d'un mois sous astreinte de 1.000 € par jour de retard passé ce délai, et ils ont sollicité d'autre part une somme de 30.000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi.

À titre subsidiaire, ils ont demandé à la cour d'appel de juger qu'ils sont toujours enclavés, en raison de la desserte insuffisante de leur fonds, et ils ont conclu à la mise en place d'une servitude de passage par transfert de la servitude existante sur la parcelle cadastrée numéro [Cadastre 11].

Dans leurs ultimes conclusions déposées le 25 janvier 2011, les époux [K] ont conclu à la confirmation du jugement du 14 mai 2008 en ce qu'il a débouté les époux [P] de l'ensemble de leurs demandes, et ils ont conclu d'autre part à l'irrecevabilité de la demande présentée par les appelants à titre subsidiaire tendant à dire que la servitude de passage se fera désormais par transfert de la servitude sur la parcelle numéro [Cadastre 11], et ils ont sollicité le paiement d'une indemnité de 6.000 € pour frais irrépétibles.

Ils soutiennent d'une part, que la parcelle cadastrée numéro [Cadastre 8] appartenant aux époux [P] était bien enclavée lors de l'acquisition par eux-mêmes de la parcelle cadastrée numéro [Cadastre 10].

Ils ajoutent qu'en raison des prescriptions édictées par l'architecte des bâtiments de France, le portail qu'ils étaient en droit de mettre en place sur l'assiette de la servitude ne pouvait qu'être d'une largeur de 3,40 mètres au lieu des cinq mètres prévus dans l'acte constitutif de la servitude.

Ils font observer en s'appuyant sur le rapport d'expertise que le chemin du Lavoir Debat ne permet pas une desserte suffisante de la parcelle numéro [Cadastre 8] via la parcelle numéro [Cadastre 12].

L'ordonnance de clôture a été rendue le 25 janvier 2011.

MOTIFS DE L'ARRET

Par acte authentique du 28 mai 1980, M. et Mme [K] ont acquis une maison à usage d'habitation avec un terrain, cadastrés section C numéro [Cadastre 10].

Cet acte comporte une stipulation de servitude ainsi libellée :

«les vendeurs déclarent se réserver une servitude de passage à titre perpétuel sur l'immeuble vendu au profit de la parcelle numéro [Cadastre 8] restant leur propriété pour accéder du [Adresse 16] à ladite parcelle. Cette servitude s'exercera sur une largeur de cinq mètres tout le long de la propriété contigüe des acquéreurs, et devra rester en toute heure du jour ou de la nuit libre de passage. Après la pose des égouts par les services municipaux, les acquéreurs s'engagent dans le délai d'un an à fermer ce passage à leurs frais par un portail donnant sur la rue, et à remettre un jeu de clefs au vendeur... En outre, les vendeurs confèrent aux acquéreurs qui acceptent la possibilité de déplacer la servitude de passage dont il s'agit sur la propriété leur appartenant numéro [Cadastre 11] ».

Par acte notarié du 23 février 1983, Mme [X] a vendu à M. et Mme [P] la parcelle cadastrée section C numéro [Cadastre 8].

Cette parcelle est actuellement divisée en trois parties portant respectivement les numéros [Cadastre 2], [Cadastre 3] et [Cadastre 4].

L'acte du 28 mai 1980 stipulait qu'après la pose des égouts par les services municipaux, les acquéreurs s'engageaient dans le délai d'un an à fermer ce passage par un portail.

La pose des égouts a été effectuée, et M. et Mme [K] ont fait édifier un mur ainsi qu'un portail d'une largeur de 3,40 mètres sur l'assiette de la servitude de passage donnant sur la [Adresse 18].

Il ressort du rapport d'expertise qu'avant l'acquisition de la parcelle numéro [Cadastre 10] par les époux [K], l'accès à la parcelle numéro [Cadastre 8] située à l'arrière de la parcelle numéro [Cadastre 9] s'effectuait à travers le bâtiment actuellement cadastré sous le numéro [Cadastre 1] pour accéder ensuite dans la cour de la parcelle cadastrée auparavant numéro [Cadastre 7], puis à la [Adresse 18]. Il s'agissait d'un accès piétonnier.

D'autre part, les époux [K] soutiennent que la situation d'enclave a cessé depuis l'acquisition par les époux [P] d'une parcelle cadastrée numéro [Cadastre 12] jouxtant leur parcelle numéro [Cadastre 8], cette parcelle débouchant sur un chemin dénommé [Adresse 17].

Il ressort du rapport d'expertise que ce chemin est herbeux et étroit et qu'il est en surélévation par rapport aux parcelles situées à l'est, qu'il présente un rétrécissement entre le mur de soutènement en pierre et le pilier nord-ouest du lavoir, que la largeur de ce chemin à ce niveau est de 2,45 mètres, ne permettant donc pas le passage des véhicules automobiles.

Les constatations de l'expert sont précises, argumentées, et n'ont d'ailleurs pas été sérieusement contestées par les époux [K].

Il résulte de ce qui précède que la parcelle des époux [P] est toujours enclavée, puisqu'elle ne dispose pas d'un accès suffisant à la voie publique par la parcelle numéro [Cadastre 12], et qu'en consequence, la servitude conventionnelle dont ils bénéficient sur la parcelle numéro [Cadastre 10] appartenant aux époux [K] n'est pas éteinte.

L'acte constitutif de la servitude prévoit expressément que l'assiette doit avoir une largeur de cinq mètres.

Les époux [K] opposent une lettre qui leur a été adressée par le service départemental de l'architecture et du patrimoine des Hautes-Pyrénées du 14 novembre 2006 dans laquelle l'architecte des bâtiments de France a émis un avis défavorable à la mise en place d'un portail de cinq mètres de large, afin de pouvoir respecter les dimensions traditionnelles en vigueur dans cette commune qui se trouve proche d'un bâtiment classé au titre des monuments historiques., et il leur indique que la largeur maximum est de 3,40 mètres.

Cependant, les prescriptions édictées par cette autorité administrative ne sont pas opposables aux époux [P] qui bénéficient d'une servitude conventionnelle à laquelle il ne peut être dérogé.

En conséquence, il y a lieu de réformer le jugement du 14 mai 2008 rendu par le tribunal de grande instance de Tarbes, et d'ordonner le rétablissement par les époux [K] de la largeur de cinq mètres de la servitude de passage grevant leur fonds cadastré numéro [Cadastre 10], au profit de la parcelle des appelants, dans un délai d'un mois à compter de la signification du présent arrêt, sous astreinte de 200 € par jour de retard passé ce délai, et d'ordonner aux époux [K] de supprimer tous les portails ou ouvrages restreignant la largeur contractuelle de cinq mètres de cette servitude de passage.

Les époux [P] ne justifient pas d'un préjudice indemnisable, et ils ne démontrent pas qu'ils se trouveraient totalement privés d'accès à leur propriété ; ils seront donc déboutés de leur demande en dommages-intérêts.

Par contre, il serait inéquitable de laisser à leur charge les frais irrépétibles qu'ils ont dû engager à l'occasion de cette procédure ; les époux [K] seront solidairement condamnés à leur payer une indemnité de 2.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

M. et Mme [K] qui succombent dans cette procédure seront déboutés de leur demande en paiement d'une indemnité pour frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort.

Réforme le jugement du tribunal de grande instance de Tarbes du 14 mai 2008 et statuant à nouveau.

Dit que le fonds des époux [P] situé à [Localité 15], anciennement cadastré section C. Numéro [Cadastre 8] et portant actuellement les numéros [Cadastre 2], [Cadastre 3] et [Cadastre 4], bénéficie sur le fonds des époux [K] cadastré section C numéro [Cadastre 10] d'une servitude de passage telle que définie dans l'acte authentique du 28 mai 1980, d'une largeur de cinq mètres sur toute la longueur de la propriété pour pouvoir accéder au [Adresse 16].

Ordonne aux époux [K] de rétablir cette servitude selon les modalités énoncées ci-dessus, et leur ordonne d'enlever tous les portails et ouvrages d'une largeur de moins de cinq mètres situés sur l'assiette de cette servitude, dans un délai d'un mois à compter de la signification du présent arrêt, sous astreinte de 200 € (deux cent euros) par jour de retard passé ce délai.

Condamne solidairement les époux [K] à payer aux époux [P] une indemnité de 2.000 € (deux mille euros) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Déboute les parties de leurs autres demandes.

Condamne solidairement les époux [K] aux dépens, et autorise la SCP De Gineste-Duale-Ligney à recouvrer directement ceux d'appel, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par M. Patrick Castagné, Président, et par Mme Sabine Dal-Zovo, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,

Sabine DAL-ZOVOPatrick CASTAGNE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 08/02941
Date de la décision : 25/07/2011

Références :

Cour d'appel de Pau 01, arrêt n°08/02941 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-07-25;08.02941 ?
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