NR/CD
Numéro 5040/10
COUR D'APPEL DE PAU
Chambre sociale
ARRET DU 25/11/2010
Dossier : 09/00986
Nature affaire :
Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution
Affaire :
S.A. THERMALE DE FRANCE
C/
[H] [Y]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R E T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 25 novembre 2010, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 30 Septembre 2010, devant :
Monsieur PUJO-SAUSSET, Président
Madame ROBERT, Conseiller
Monsieur GAUTHIER, Conseiller
assistés de Madame HAUGUEL, Greffière, présente à l'appel des causes.
Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANTE :
S.A. THERMALE DE FRANCE
agissant poursuites et diligences de son Président en exercice, domicilié ès qualités audit siège
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Maître ARDANUY, avocat au barreau de DAX
INTIMÉE :
Madame [H] [Y]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 3]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2009/002066 du 15/04/2009 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PAU)
Comparante et assistée de Maître [T], avocat au barreau de DAX
sur appel de la décision
en date du 12 FÉVRIER 2009
rendue par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE DAX
Madame [H] [Y] a été employée par la Compagnie Thermale de DAX, devenue la Société THERMALE DE FRANCE à compter de l'année 1970 dans le cadre de contrats de travail saisonniers puis d'un contrat à durée indéterminée intermittent.
Madame [H] [Y] a été victime de plusieurs accidents du travail.
A compter du 10 décembre 2006 Madame [H] [Y] est en arrêt de travail pour maladie.
Dans le cadre d'une visite qualifiée de reprise le 26 février 2007, la médecine du travail conclut :
« Inapte à son poste de vestiaire en raison de la nécessité de manutention répétitive des portants de vêtements et des sacs de linge et de la nécessité d'un travail de manutention au-dessus des épaules.
En date du 5/01/2007 il m'est précisé qu'un aménagement en raison de son coût est inenvisageable, donc l'aptitude à ce jour doit s'orienter vers un autre poste respectant les contre-indications susmentionnées - par exemple l'accueil ou l'administratif ou veilleur de nuit par exemple. ».
Dans le cadre de la deuxième visite de reprise le 13 mars 2007 elle conclut :
« Mêmes conclusions qu'au 26/02/2007
Inapte à son poste de vestiaire en raison de la nécessité de manutentions répétitives des portants de vêtements et des sacs de linge et de la nécessité d'un travail de manutentions au-dessus des épaules.
En date du 5/01/2007 il m'est précisé qu'un aménagement en raison de son coût est inenvisageable, donc l'aptitude à ce jour doit s'orienter vers un autre poste respectant les contre-indications susmentionnées - par exemple l'accueil ou l'administratif ou veilleur de nuit ou autre ».
Le 28 février 2007, Madame [H] [Y] adresse à la caisse primaire d'assurance maladie une déclaration de maladie professionnelle, assortie d'un arrêt de travail à compter du 27 février 2007.
L'arrêt de travail ne sera transmis à l'employeur que le 23 mars 2007.
La caisse primaire d'assurance maladie par décision du 30 avril 2007 refusera la prise en charge au titre des maladies professionnelles.
Par lettre en date du 23 mars 2007 notifiée à la salariée, la Société THERMALE DE FRANCE constate l'impossibilité de reclassement au sein de l'entreprise et propose à titre de reclassement dans le groupe :
- un poste de vendeuse boutique à [Localité 4],
- un poste d'hôtesse d'accueil à [Localité 4].
Par lettre recommandée en date du 31 mars 2007, la Société THERMALE DE FRANCE constate l'impossibilité de reclassement, le refus de Madame [H] [Y] des propositions de reclassement et la convoque à l'entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement.
Par lettre en date du 13 avril 2007, la Société THERMALE DE FRANCE notifie à Madame [H] [Y] son licenciement.
Contestant son licenciement, Madame [H] [Y] saisit le conseil de prud'hommes de Dax le 27 mai 2008 aux fins de :
- requalifier la relation de travail en relation à durée indéterminée avec condamnation de l'employeur à lui régler la somme de 1.400 € au titre de l'indemnité de requalification,
- condamner l'employeur à lui payer la somme de 60.200 € par application de l'article L. 122-32-5 du Code du travail.
Par jugement en date du 12 février 2009 le conseil de prud'hommes de Dax :
- a débouté Madame [H] [Y] de sa demande de requalification de la relation de travail,
- a condamné la Société THERMALE DE FRANCE à régler à Madame [H] [Y] la somme de 25.000 € pour non-respect de l'obligation de reclassement outre la somme de 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
La Société THERMALE DE FRANCE a interjeté appel par lettre recommandée en date du 10 mars 2009 du jugement qui lui a été notifié le 16 février 2009.
La Société THERMALE DE FRANCE demande à la Cour de :
- réformer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Dax le 12 février 2009 en ce qu'il a condamné la Société THERMALE DE FRANCE pour non-respect de l'obligation de reclassement,
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Madame [H] [Y] de sa demande de requalification de la relation de travail en relation à durée indéterminée,
- débouter Madame [H] [Y] de la totalité de ses demandes,
- la condamner sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile au paiement d'une indemnité de 2.500 €.
Dans des conclusions écrites, reprises oralement, la Société THERMALE DE FRANCE, sur la demande de requalification rappelle que Madame [H] [Y] a été engagée par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 9 janvier 1987 ; en conséquence la demande de requalification est sans objet.
Sur la contestation du licenciement, la Société THERMALE DE FRANCE soutient que le jugement repose sur une base illégale et sur une appréciation sans fondement.
Elle rappelle que le licenciement de Madame [H] [Y] n'est pas d'origine professionnelle, contrairement aux visas du conseil de prud'hommes.
La Société THERMALE DE FRANCE reconnaît que Madame [H] [Y] a subi de nombreux accidents du travail mais la maladie professionnelle invoquée par Madame [H] [Y] dans le cadre de ses derniers arrêts de travail ayant donné lieu aux fiches d'inaptitude n'a pas été reconnue par la caisse primaire d'assurance maladie.
De plus le conseil de prud'hommes lui reproche de ne pas avoir reclassé Madame [H] [Y] avant la déclaration d'inaptitude.
La Société THERMALE DE FRANCE soutient avoir mis tout en oeuvre aux fins de reclassement de Madame [H] [Y] postérieurement à la déclaration d'inaptitude au poste, en la convoquant afin d'étudier une éventuelle solution de reclassement, en lui remettant une fiche destinée aux recherches de poste de reclassement.
Par lettre du 23 mars 2007 elle l'a avisée de l'impossibilité de reclassement sur le site de [Localité 3] et lui a proposé deux postes conformes à ses voeux.
La Société THERMALE DE FRANCE a parfaitement respecté ses obligations en matière de recherche d'un reclassement en consultant de plus les délégués du personnel alors qu'elle n'avait pas l'obligation de le faire et en organisant un entretien avec la responsable des relations humaines de l'entreprise en présence d'un membre du CHSCT.
Enfin la Société THERMALE DE FRANCE précise que lorsque la salariée a été déclarée inapte à son poste aux vestiaires, elle a engagé des études et effectué de nombreuses consultations pour permettre à Madame [H] [Y] de continuer à exercer sa tâche : étude de poste par un ergonome, réunion avec le médecin du travail.
Cependant les aménagements envisagés n'ont pas été réalisables.
Enfin aucun texte ne permet la condamnation de l'employeur sur un défaut de reclassement avant que le salarié ne soit déclaré inapte mais de plus chacun de ses arrêts de travail s'est terminé par une déclaration d'aptitude avec des propositions d'adaptation du poste lesquelles n'étaient fondées ni sur l'âge ni sur la résistance physique ni sur l'état de santé physique ou mentale de Madame [H] [Y].
Madame [H] [Y] demande à la Cour de :
- condamner la Société THERMALE DE FRANCE à verser à Madame [H] [Y] la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour ses préjudices moral et financier (5.000 € chacun),
- confirmer en son principe le jugement rendu le 12 février 2009 par le conseil des prud'hommes de [Localité 3],
- débouter la Société THERMALE DE FRANCE de son appel et par voie de conséquence de ses demandes ;
Faire droit à l'appel incident,
- réformer le jugement quant au quantum de l'indemnité fixée par les premiers juges à titre de réparation de son préjudice,
- condamner la Société THERMALE DE FRANCE à verser à Madame [H] [Y] la somme de 67.200 € par application de l'article L. 122-32-5 du Code du travail,
- la condamner à verser à Maître [U] [T] la somme de 5.000 € hors taxes sur le fondement de l'article 37 de la loi numéro 91-647 du 10 juillet 1991 relatives à l'aide juridictionnelle, pour l'ensemble de la procédure tant en première instance que devant la Cour d'appel,
- la condamner aux dépens.
Dans des conclusions écrites, reprises oralement, Madame [H] [Y] rappelle qu'il appartenait à l'appelante de conclure au plus tard pour le 30 avril 2010 ; cependant elle n'a produit ses écritures et pièces que le 4 août 2010 malgré les demandes réitérées de l'intimée.
Elle sollicite la condamnation de l'appelante à des dommages et intérêts compte tenu de son attitude méprisante.
Madame [H] [Y] rappelle avoir abandonné sa demande au titre de la requalification du contrat de travail.
Sur le licenciement, Madame [H] [Y] expose avoir été victime de 7 accidents du travail entraînant un état pathologique chronique fait de cervicalgies, lombalgies, céphalées, douleurs dorsales, etc.
Dès l'année 1989, la médecine du travail a émis des réserves sur son aptitude, réserves réitérées en 2002, 2003 et 2004.
En 2005 la médecine du travail a proposé une étude de poste puis en 2006 quatre nouvelles fiches concluaient à une aptitude sous réserves d'aménagement de poste et excluant la manutention.
En conséquence l'attention de la Société THERMALE DE FRANCE a été attirée dès l'année 1989 par le médecin du travail sur l'état de santé de Madame [H] [Y] nécessitant son reclassement ; les conclusions du médecin en 2006 n'étant que la conséquence de cette dégradation inévitable de son état de santé.
En conséquence l'inaptitude est la conséquence des différents arrêts de travail d'origine professionnelle.
De plus la Société THERMALE DE FRANCE ne rapporte pas la preuve de l'impossibilité de reclassement de Madame [H] [Y] alors que cette dernière sollicitait un poste de vente de produits ou un poste en phlébologie, postes qu'elle avait déjà occupés.
La proposition d'aller travailler à [Localité 4] est tout à fait fantaisiste.
Elle rappelle avoir été classée en travailleur handicapé catégorie B dès 1995 avec un taux d'incapacité de 20 % puis 25 %.
Par ailleurs en 2004 le tribunal du contentieux de l'incapacité lui a accordé un taux d'IPP de 4 % à la suite de son accident du travail du 18 septembre 2002 et elle est bénéficiaire par décisions de 1995 et 2005 d'une indemnité forfaitaire sous la forme d'un capital puis d'une rente annuelle.
La Société THERMALE DE FRANCE était parfaitement au courant de sa situation médicale et administrative depuis de nombreuses années.
À ce jour elle bénéficie de l'allocation de solidarité spécifique et subit un préjudice important qui sera indemnisé par quatre années de salaire.
Madame [H] [Y] précise être bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale par décision du 4 avril 2009 et son conseil indique vouloir renoncer à percevoir la contribution de l'État et sollicite la condamnation de la Société THERMALE DE FRANCE à lui payer la somme de 5.000 € hors taxes par application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1191.
SUR QUOI
Sur la demande de dommages et intérêts pour conclusions tardives :
Aux termes du calendrier de procédure, l'appelante devait déposer ses écritures avant le 30 avril 2010 et ne les a déposées que le 4 août 2010 mettant l'intimée dans l'obligation de ne conclure que le 24 septembre 2010 pour l'audience du 30 septembre.
Il y a cependant lieu de rappeler qu'en matière prud'homale, la procédure est orale, sous la réserve cependant du respect du contradictoire.
Si l'appelante n'a effectivement pas respecté le calendrier de procédure, elle n'a cependant pas mis l'intimée dans l'impossibilité de conclure puisque le dossier a pu être conclu par celle-ci et retenu à l'audience du 30 septembre ; en conséquence l'intimée n'a subi aucun préjudice.
De plus il convient de rappeler que les règles de procédure permettent la sanction de la carence de l'appelant.
Sur la nature de l'inaptitude :
A l'examen des pièces médicales produites il s'avère que Madame [H] [Y] a été victime durant son activité professionnelle, depuis 1977, d'au moins 17 accidents du travail plus ou moins bénins.
Ces accidents ont affecté diverses parties de son corps, doigts, crâne, rachis, membres supérieurs et inférieurs, quadriceps, genou, épaule, dos.
Le dernier accident déclaré et reconnu d'origine professionnelle est en date du 13 octobre 2005 et a consisté en un traumatisme des épaules et du dos, en retenant un portant.
L'arrêt de travail consécutif à cet accident a été prolongé jusqu'au 26 février 2006, date de la consolidation.
Par la suite, Madame [H] [Y] a été de nouveau en arrêt de travail à compter du 10 décembre 2006 pour des douleurs cervico-dorso-lombaires, cependant dans le cadre d'une maladie de droit commun ainsi que cela résulte du relevé des indemnités journalières produit aux débats.
Dans le cadre d'une visite qualifiée de reprise le 26 février 2007, la médecine du travail a rédigé la fiche d'inaptitude suivante :
« Inapte à son poste de vestiaire en raison de la nécessité de manutention répétitive des portants de vêtements et des sacs de linge et de la nécessité d'un travail de manutention au-dessus des épaules.
En date du 5/01/2007 il m'est précisé qu'un aménagement en raison de son coût est inenvisageable, donc l'aptitude à ce jour doit s'orienter vers un autre poste respectant les contre-indications susmentionnées - par exemple l'accueil ou l'administratif ou veilleur de nuit par exemple. ».
Puis dans le cadre de la deuxième visite de reprise le 13 mars 2007 :
« Mêmes conclusions qu'au 26/02/2007 :
Inapte à son poste de vestiaire en raison de la nécessité de manutentions répétitives des portants de vêtements et des sacs de linge et de la nécessité d'un travail de manutentions au-dessus des épaules.
En date du 5/01/2007 il m'est précisé qu'un aménagement en raison de son coût est inenvisageable, donc l'aptitude à ce jour doit s'orienter vers un autre poste respectant les contre-indications susmentionnées - par exemple l'accueil ou l'administratif ou veilleur de nuit ou autre ».
Il résulte des pièces produites que le 28 février 2007, Madame [H] [Y] a transmis un nouvel arrêt de travail en procédant à une déclaration de maladie dont le caractère professionnel a été refusé par la CPAM.
Cette déclaration et la procédure qui s'en est suivie n'ont été portées à la connaissance de l'employeur qu'en cours de procédure de licenciement, le 23 mars ainsi que cela résulte des courriers de l'employeur, en conséquence postérieurement à l'engagement de la présente procédure pour inaptitude.
Il est constant cependant que l'origine professionnelle de l'inaptitude de la salariée n'est pas subordonnée à la reconnaissance par la caisse primaire d'assurance maladie du lien de causalité entre la maladie ou l'accident dont le salarié a été victime et son inaptitude.
Par ailleurs, les règles protectrices applicables aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent dès lors que l'inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie et que l'employeur en avait connaissance.
En l'espèce, il résulte des pièces médicales que les accidents du 21 juillet 1994, du 10 septembre 1999, du 17 janvier 2002, du 12 décembre 2003 et du 13 octobre 2005 (en prenant les accidents les plus récents) ont entraîné des contusions et douleurs du rachis, du dos et des lombaires.
Il s'avère également que l'inaptitude a été constatée en février/mars 2007 et que depuis le mois de mars 2006 l'employeur échangeait régulièrement avec la médecine du travail sur l'aptitude de la salariée à son poste de travail et les aménagements envisageables.
La pathologie affectant le rachis et le dos de Madame [H] [Y] résulte au moins partiellement d'accidents du travail antérieurs, pathologie connue de l'employeur depuis plusieurs mois.
En conséquence, l'inaptitude de Madame [H] [Y] est d'origine professionnelle, ainsi que l'a constaté le conseil de prud'hommes.
Sur la procédure de licenciement :
Conformément aux dispositions de l'article L. 1226-10 du Code du travail, il appartient à l'employeur, dans le cadre d'une inaptitude d'origine professionnelle de recueillir l'avis des délégués du personnel et ce après les deux examens médicaux.
En l'espèce, l'employeur a procédé à cette consultation le 5 avril 2007, soit après les deux examens de reprise.
Conformément aux dispositions de l'article L. 1226-12'du Code du travail si l'employeur ne peut proposer un autre emploi, il est tenu de faire connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement.
En l'espèce, l'employeur a procédé à cette notification le 23 mars pour le site puis le 31 mars.
En conséquence, l'employeur a respecté la procédure du licenciement pour inaptitude professionnelle.
Sur le caractère abusif du licenciement imputable aux manquements de l'employeur :
À travers ses écrits, Madame [H] [Y] soutient que la rupture du contrat de travail est imputable aux manquements par l'employeur à son obligation de préserver sa santé et sa sécurité en n'ayant pas respecté les diverses prescriptions de la médecine du travail relatives à son poste.
Madame [H] [Y] produit un ensemble de fiches médicales d'aptitude avec réserves émises par la médecine du travail pour en déduire le comportement fautif de l'employeur.
Depuis 2002, la médecine du travail, tout en déclarant Madame [H] [Y] apte à son poste, émet des réserves sur les manutentions et le port de charges lourdes.
Cependant depuis cette date, Madame [H] [Y] a procédé à la déclaration de 5 accidents du travail qui sont venus chaque fois alourdir son état.
Ainsi la fiche médicale de juin 2002 qui la déclare apte sous réserve d'éviter les manutentions de charges lourdes est consécutive à l'accident du travail du 17 janvier 2002 pour cervicalgie aiguë.
La fiche médicale de mai 2003 la déclare également apte, précisant qu'il convient d'envisager un reclassement à un poste qui n'exige pas des manutentions de charges, étant précisé qu'entre-temps Madame [H] [Y] a déclaré un accident du travail le 18 septembre 2002 pour une chute ayant entraîné une contusion du genou et des lombalgies.
Dans le cadre d'une visite de reprise faisant suite à deux autres accidents du travail déclarés les 5 septembre 2003 (contusion du quadriceps) et le 12 décembre 2003 (cervicalgie aiguë), la médecine du travail la déclare de nouveau : apte, précisant qu'elle ne doit pas manutentionner de charges lourdes.
Le 13 mai 2005, dans le cadre de la visite annuelle, il est précisé qu'une étude de poste est nécessaire.
L'étude de poste est en cours lorsque Madame [H] [Y] est de nouveau victime d'un accident du travail le 13 octobre 2005.
Ce dernier accident va incontestablement aggraver l'état de Madame [H] [Y] puisqu'il affecte l'épaule et le dos.
Aux termes de son arrêt de travail en février 2006, la médecine du travail la déclare apte au vestiaire sous réserve d'un aménagement du poste tel que défini dans l'intervention ergonomique en cours et à défaut « apte à un poste sans ou peu de manutention ».
Le 6 mars 2006, l'employeur, dans le cadre de la reprise de la salariée écrit à la médecine du travail pour lui préciser que l'aménagement est incompatible avec l'économie de l'entreprise et en tout état de cause ne peut être mis en oeuvre pour cette saison thermale.
Craignant les conséquences d'un nouvel accident du travail qui pourrait survenir avec l'aptitude telle que définie il sollicite une nouvelle convocation de la médecine du travail.
Le 8 mars 2006 la médecine de travail rendra une fiche d'aptitude au poste de vestiaire en excluant la manutention des sacs demandant un effort trop intense au niveau des épaules et des cervicales.
Il résulte de la fiche médicale d'aptitude du 14 juin 2006 qu'un essai de reconversion de Madame [H] [Y] sur un poste d'agent thermal a été tenté entre-temps (à l'initiative de la médecine du travail) qui cependant aboutit à une fiche d'inaptitude à ce poste.
Enfin dans le cadre de la visite annuelle de 2006 il est précisé que Madame [H] [Y] est apte à son poste sous réserve d'envisager un aménagement.
C'est dans ce contexte qu'à la veille de la reprise de la salariée, alors en arrêt de travail depuis le 10 décembre 2006, l'employeur interroge par lettre du 5 janvier 2007 la médecine du travail rappelant qu'au cours de l'année 2006 il a été mené une étude avec l'aide d'un ergonome afin d'étudier les différentes propositions d'aménagement du poste de vestiaire sur le lieu de travail ; la proposition de l'ergonome n'étant pas compatible avec l'établissement concerné, l'employeur s'est alors orienté sur la mise en place d'une cabine-vestiaire représentant cependant un investissement de 60.000 à 70.000 €, travaux qui ne sont pas envisageables.
Elle sollicite en conséquence un nouvel avis médical.
C'est dans ces conditions que lors de sa reprise, Madame [H] [Y] sera déclarée inapte.
Il résulte des pièces produites qu'à compter du mois de novembre 2005 la THERMALE DE FRANCE a engagé des démarches avec un ergonome sur la possibilité d'aménagement du poste, qu'entre mars et juin 2006 des devis lui ont été adressés, lesquels se sont avérés soit trop onéreux, soit incompatibles avec les lieux.
Il ne peut en conséquence être reproché à la THERMALE DE FRANCE de ne pas avoir tenu compte des prescriptions de la médecine du travail préalablement à la déclaration d'inaptitude de la salariée.
De plus la déclaration d'inaptitude est la conséquence des cinq accidents du travail dont a été victime Madame [H] [Y] entre 2002 et 2007 et qui n'ont pu qu'aggraver l'état de son rachis et de son dos déjà affectés par des accidents du travail antérieurs.
Sur l'obligation de reclassement :
Conformément aux dispositions de l'article L. 1226-10'du Code du travail, lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.
Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise.
L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes.
Conformément aux dispositions de l'article L. 1226-12'du Code du travail s'il ne peut proposer un autre emploi, l'employeur est tenu de faire connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement.
L'employeur ne peut prononcer le licenciement que s'il justifie soit de l'impossibilité où il se trouve de proposer un emploi dans les conditions prévues ci-dessus soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions.
Il convient de préciser que c'est le second examen pratiqué par le médecin du travail qui marque le point de départ des obligations légales de l'employeur, le reclassement du salarié devant être recherché postérieurement à cet examen qui constate son inaptitude définitive.
L'obligation de reclassement doit s'apprécier au sein des différents établissements de l'entreprise concernée, et, si nécessaire, à l'intérieur du groupe auquel celle-ci appartient, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettent à l'employeur d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel.
Aux termes de la fiche médicale d'inaptitude, la médecine du travail proposait un poste respectant les contre-indications susmentionnées à savoir les manutentions répétitives et suggérait un poste à l'accueil ou dans l'administratif ou en tant que veilleur de nuit.
Dans le cadre de la recherche de reclassement, l'employeur a remis à la salariée une fiche destinée aux recherches de poste de reclassement que cette dernière a rempli le 13 mars 2007 précisant :
- un niveau d'études : CEP,
- souhaits de reclassement : vendeuse pour les produits thermale de France,
- demande de formation : souhaite une formation afin de pouvoir occuper le nouveau poste de vendeuse,
- région de reclassement : [Localité 3],
- remarque : souhaite occuper un poste de vendeuse des produits Thermale de France pour l'avoir bien connu et bien vendu aux clients qui venaient au poste vestiaire pendant la saison « 11 mois ».
Le 19 mars 2007, l'employeur a organisé un rendez-vous en présence d'un membre du CHSCT afin de déterminer les éventuelles solutions de reclassement pouvant lui convenir.
Le compte-rendu d'entretien produit aux débats a été adressé à Madame [H] [Y] le 20 mars 2007, sans que cette dernière n'en conteste les termes.
Il en résulte que Madame [H] [Y] n'avait aucune connaissance en informatique et que la station debout prolongée lui était très pénible pour assurer un poste de réceptionniste.
Le poste de veilleur de nuit implique de la manutention exclue par la médecine du travail.
Lors de cet entretien Madame [H] [Y] fait part de sa volonté d'être placée sur un poste de vente de produits qui, selon les termes de l'employeur n'existe pas dans l'entreprise.
Il en est de même du poste de surveillance des soins de phlébologie qui fait partie intégrante du poste d'agent thermal.
Il résulte du registre d'entrée et de sortie du personnel :
- aucun poste de vendeuse n'est rubriqué dans l'entreprise,
- aucun poste de réceptionniste n'est vacant au moment du licenciement,
- aucun poste de veilleur de nuit n'est vacant au moment du licenciement.
Enfin Madame [H] [Y] a été déclarée inapte à un poste d'agent thermal, par la médecine du travail le 14 juin 2006, poste associé aux soins en phlébologie.
Il est en conséquence démontré par l'employeur l'impossibilité de reclassement au sein de l'entreprise.
De plus la THERMALE DE FRANCE justifie avoir adressé des demandes de reclassement au niveau du groupe, à compter du 19 mars 2007.
Le courriel adressé aux différents responsables d'établissements précise la qualification et le cursus professionnel de Madame [Y] ainsi que les restrictions à l'emploi telles que résultant des conclusions de la médecine du travail outre le souhait de la salariée.
La THERMALE DE FRANCE justifie également des réponses négatives qu'elle a reçues.
Cependant par lettre en date du 23 mars 2007 elle adressait à Madame [H] [Y] deux propositions de postes disponibles de vendeuse et hôtesse d'accueil situés à [Localité 4], postes refusés par cette dernière.
En fait l'employeur a envisagé et sollicité des devis pour l'aménagement des locaux qui se sont finalement avérés impossibles.
En conséquence l'employeur démontre avoir loyalement mis en oeuvre tous les moyens pertinents pour tenter de remplir son obligation mais également apporte la preuve qu'il s'est réellement trouvé dans l'impossibilité de reclasser la salariée dans un poste adapté à ses capacités.
Il y a lieu en conséquence d'infirmer le jugement et de dire que le licenciement pour inaptitude de Madame [H] [Y], compte tenu de l'impossibilité de reclassement repose sur une cause réelle et sérieuse.
Sur les demandes fondées sur l'article 700 du Code de procédure civile :
L'équité et la situation économique des parties ne commandent pas de faire droit à la demande fondée sur l'article 700 du Code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud'homale et en dernier ressort,
Reçoit l'appel formé par la Société THERMALE DE FRANCE par lettre recommandée en date du 10 mars 2009,
Donne acte à Madame [Y] de l'abandon de sa demande au titre de la requalification,
Confirme le jugement du conseil des prud'hommes de [Localité 3] en date du 12 février 2009 en ce qu'il a dit que l'inaptitude de Madame [H] [Y] est d'origine professionnelle,
Infirme le jugement du conseil des prud'hommes de [Localité 3] en date du 12 février 2009 pour le surplus de ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Dit que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse,
Déboute Madame [H] [Y] de ses demandes,
Y rajoutant,
Déboute Madame [H] [Y] de ses demandes de dommages et intérêts pour préjudice matériel et moral,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions fondées sur l'article 700 du Code de procédure civile,
Condamne Madame [H] [Y] aux dépens lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions sur l'aide juridictionnelle.
Arrêt signé par Monsieur PUJO-SAUSSET, Président, et par Madame HAUGUEL, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE,LE PRÉSIDENT,