La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/09/2010 | FRANCE | N°06/00946

France | France, Cour d'appel de Pau, 1ère chambre, 13 septembre 2010, 06/00946


RN/NL



Numéro 3628/10





COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre







ARRET DU 13/09/10







Dossier : 06/00946





Nature affaire :



Demande en réparation des dommages causés par l'activité médicale ou para-médicale















Affaire :



SA Clinique [Localité 20]

et du Pays Basque

C/



Consorts [D]

[U] [J] - AGF

GAN

[N] [G]

et autres

<

br>
















Grosse délivrée le :

à :





























RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R E T



prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 13 septembre 2010, les parties en ayant été préalablement...

RN/NL

Numéro 3628/10

COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRET DU 13/09/10

Dossier : 06/00946

Nature affaire :

Demande en réparation des dommages causés par l'activité médicale ou para-médicale

Affaire :

SA Clinique [Localité 20]

et du Pays Basque

C/

Consorts [D]

[U] [J] - AGF

GAN

[N] [G]

et autres

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 13 septembre 2010, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 10 Mai 2010, devant :

Monsieur NEGRE, Président, Magistrat chargé du rapport conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Monsieur AUGEY, Conseiller

Madame BELIN, Conseiller

assistés de Madame PEYRON, Greffier, présente à l'appel des causes.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

SA CLINIQUE [Localité 20] ET DU PAYS BASQUE agissant poursuites et diligences de son Président Directeur Général domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 19]

[Localité 9]

représentée par Me VERGEZ, avoué à la Cour

assistée de la SELARL RACINE, avocats au barreau de BORDEAUX

INTIMES :

Compagnie ALLIANZ, nouvelle dénomination des ASSURANCES GENERALES DE FRANCE prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 13]

[Localité 12]

Madame [Y] [J]

[Adresse 8]

[Localité 10]

représentées par la SCP MARBOT / CREPIN, avoués à la Cour

assistées de la SCP ETESSE/MOUTIER, avocats au barreau de PAU

Compagnie G.A.N. - GROUPE D'ASSURANCES NATIONALES prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 12]

représentée par la SCP RODON, avoués à la Cour

assistée de Me MALTERRE, avocat au barreau de PAU

Monsieur [N] [G]

Clinique [Localité 20] et du Pays Basque

[Adresse 19]

[Localité 9]

représenté par la SCP DE GINESTET / DUALE / LIGNEY, avoués à la Cour

assisté de Me DOMERCQ, avocat au barreau de PAU

Monsieur [L] [D]

[Adresse 21]

[Adresse 21]

[Localité 6]

Madame [A] [W] épouse [D]

[Adresse 21]

[Adresse 21]

[Localité 6]

Monsieur [I] [D]

[Adresse 21]

[Adresse 21]

[Localité 6]

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES LANDES prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 5]

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU LOT ET GARONNE

[Adresse 2]

[Localité 7]

représentés par la SCP LONGIN, LONGIN-DUPEYRON, MARIOL, avoués à la Cour

assistés de Me DAUGA, avocat au barreau de DAX

SA SIEMENS prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 14]

[Localité 15]

représentée par la SCP PIAULT / LACRAMPE-CARRAZE, avoués à la Cour

assistée de la SCP RAFFIN ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS

Monsieur [P] [K]

[X] [G]

[Adresse 18]

[Localité 9]

représenté par la SCP PIAULT / LACRAMPE-CARRAZE, avoués à la Cour

assisté de Me COHEN, avocat au barreau de PÂRIS

Madame [O] [S]

Clinique [Localité 20] et du Pays Basque

[Adresse 19]

[Localité 9]

représentée par la SCP DE GINESTET / DUALE / LIGNEY, avoués à la Cour

assistée de Me GARRETA, avocat au barreau de PAU

MUTUELLE LANDES MUTUALITE prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 16]

[Localité 5]

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE BAYONNE prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 11]

[Localité 9]

sur appel de la décision

en date du 16 JANVIER 2006

rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BAYONNE

FAITS ET PROCEDURE

Suivant arrêt du 3 février 2009, auquel il convient de se reporter, la cour a :

- mis hors de cause de la présente procédure la MUTUELLE LANDES MUTUALITE et la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE BAYONNE,

- rejeté l'exception de nullité des expertises soulevée,

- confirmé la décision entreprise en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à expertise du ventilateur, mis hors de cause les docteurs [S] et [K] et ordonné une mesure d'expertise complémentaire.

Réformant pour le surplus, elle a :

- déclaré le docteur [J], la CLINIQUE SAINT-ETIENNE ET DU PAYS BASQUE et le docteur [G] responsables in solidum du préjudice des consorts [D],

- dit que la compagnie GAN (GROUPE D'ASSURANCES NATIONALES) doit sa garantie à son assurée la CLINIQUE SAINT-ETIENNE ET DU PAYS BASQUE à la fois sur le fondement des garanties responsabilité civile exploitation encourue par l'assuré à l'égard des tiers (risque A) et la responsabilité civile professionnelle encourue par l'assuré à l'égard des tiers (risque D),

- condamné in solidum le docteur [J], la clinique SAINT-ETIENNE ET DU PAYS BASQUE et le docteur [G] avec les compagnies AGF (ASSURANCES GENERALES DE FRANCE) et GAN à payer à Monsieur et Madame [D] la somme de 40.000 € à chacun en réparation de leur préjudice moral sous réserve des provisions déjà allouées,

- condamné les mêmes in solidum à payer aux consorts [D] la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à titre provisionnel,

- dit que dans leurs rapports entre eux, le docteur [J], assuré auprès de la société AGF, supporterait 35 % des condamnations, la CLINIQUE, assurée auprès de la compagnie GAN, 50 % et le docteur [G] 15 %,

- condamné la CLINIQUE SAINT-ETIENNE ET DU PAYS BASQUE et la compagnie GAN à payer à la SA SIEMENS 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice des docteurs [S] et [K],

- condamné la CLINIQUE SAINT-ETIENNE ET DU PAYS BASQUE et la compagnie GAN aux dépens afférents à la mise en cause de la société SIEMENS et autorisé la SCP PIAULT LACRAMPE-CARRAZE à les recouvrer conformément à l'article 699 du code de procédure civile,

- dit que les docteurs [S] et [K] supporteraient la charge de leurs dépens,

- dit y avoir lieu à évocation.

Et avant dire droit pour le surplus, elle a :

- invité le docteur [J] et la compagnie AGF ainsi que le docteur [G] à conclure sur l'évaluation du préjudice de [I] [D],

- invité en tant que de besoin toutes les parties à mettre leurs écritures en conformité avec les dispositions de la loi du 21 décembre 2006,

- réservé les autres demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et le surplus des dépens.

Suivant conclusions du 22 septembre 2009, Madame [Y] [J] et la COMPAGNIE ASSURANCES GENERALES DE FRANCE (AGF) demandent à la cour :

- de condamner tout d'abord le docteur [G] à leur rembourser 15 % des sommes qui ont à ce jour été versées au fur et à mesure des décisions de justice rendues,

POUR L'AVENIR,

- d'ordonner une nouvelle expertise médicale qui sera confiée au professeur [C] (précédemment désigné en référé puis au fond pour un complément d'expertise et ayant déposé son rapport le 22 juillet 2002 pour sa mission initiale et le 12 septembre 2006 pour sa mission complémentaire), lequel avait prévu de revoir [I] [D] après l'âge de 20 ans, soit après le 2 octobre 2008, pour pouvoir apprécier notamment l'existence ou pas d'un projet professionnel, les besoins exacts en tierce personne, une fois l'hébergement au centre Lestrade terminé,

- de donner mission en outre à l'expert judiciaire de se prononcer sur la nécessité d'adaptation du logement en fonction du lieu actuel de vie de [I] [D],

- d'enjoindre par ailleurs la CPAM des Landes de produire son recours définitif poste par poste, conformément à la nomenclature Dintilhac,

- A TITRE PRINCIPAL, de surseoir à statuer sur les postes de préjudice 'dépenses de santé actuelles', 'dépenses de santé futures', 'tierce personne', 'frais de logement', 'frais de transport',

- SUBSIDIAIREMENT et en l'état des pièces produites, de débouter [I] [D] de sa demande formée au titre du préjudice matériel, comprenant les frais de transport et les frais informatiques, ainsi que de sa demande formulée au titre de l'adaptation du logement,

- de débouter [I] [D] de sa demande d'indemnisation d'une tierce personne 24h/24, les conclusions médicales du professeur [C] de 2006 n'ayant retenu qu'une aide de 5 heures par jour,

- d'évaluer ainsi qu'indiqué à ses présentes écritures les différents postes de préjudice susceptibles d'être en l'état chiffrés,

- de constater que les préjudices de Monsieur et Madame [D] ont été définitivement liquidés par l'arrêt du 3 février 2009,

- de réduire à de plus justes proportions l'indemnité susceptible d'être allouée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- de répartir les dépens en fonction des succombances réciproques,

- vu l'arrêt du 3 février 2009, de dire n'y avoir lieu à l'allocation en faveur de Monsieur et Madame [D] d'une somme complémentaire au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Suivant conclusions du 7 janvier 2010, le docteur [G] demande à la cour :

- de constater qu'aucune créance définitive ne vient justifier la créance définitive de la CPAM et de débouter par conséquent cette dernière de la totalité de ses demandes,

- de constater qu'il n'existe aucune pièce justifiant l'impossibilité de [I] d'exercer une activité professionnelle et de débouter par conséquent les demandeurs de leur demande à ce titre,

- de constater qu'il n'existe aucune pièce démontrant le recours à une tierce personne 24h/24,

- de débouter les demandeurs de leur demande présentée au titre des frais de transport, au titre de l'aménagement du logement,

- de réduire à de plus justes proportions les sommes sollicitées par les consorts [D],

- de constater qu'il a déjà été perçu par les demandeurs 243.918,42 € pour [I] et 30.489,98 € pour Monsieur et Madame [D],

- de débouter Monsieur et Madame [D] en leur nom personnel de leur demande en réparation de leur préjudice compte tenu des sommes déjà obtenues,

- en tout état de cause, de condamner toute partie succombante à lui payer la somme de 5.000 € au titre des frais irrépétibles par lui exposés en cause d'appel.

Suivant conclusions du 8 janvier 2010, Monsieur [L] [D], Madame [A] [W] épouse [D] et Monsieur [I] [D] demandent à la cour :

- de condamner in solidum le docteur [J], la CLINIQUE SAINT-ETIENNE ET DU PAYS BASQUE et le docteur [G] ainsi que les compagnies AGF et GAN à payer à [I] [D] les sommes suivantes :

' PREJUDICES PATRIMONIAUX

' dépenses de santé jusqu'à la date de consolidation : 232.814,88 €

' dépenses de santé postérieures et à régler sur présentation des états de la CPAM : à réserver

' incidence professionnelle : 1.186.505 €

' frais de logement adapté : 80.000 €

' frais de transport : 109.516,97 €

' assistance de tierces personnes : 4.628.282 €

' matériel informatique : 12.004,71 €

' PREJUDICES EXTRA-PATRIMONIAUX

' déficit fonctionnel temporaire : 30.000 €

' souffrances endurées : 100.000 €

' déficit fonctionnel permanent : 600.000 €

' préjudice esthétique : 25.000 €

' préjudice sexuel et d'établissement : 80.000 €

' préjudice d'agrément : 80.000 €

- de statuer ce que de droit quant au recours des organismes sociaux,

- de dire et juger que des sommes en définitive allouées seront déduites les provisions déjà perçues, soit pour [I] [D], 243.918,43 €,

- de condamner in solidum la CLINIQUE SAINT-ETIENNE ET DU PAYS BASQUE, le docteur [J], le docteur [G] ainsi que les compagnies AGF et GAN au paiement d'une indemnité de 100.000 € HT sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner in solidum les défendeurs aux dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais des expertises du professeur [C].

Suivant conclusions du 10 février 2010, la COMPAGNIE GAN - GROUPE D'ASSURANCES NATIONALES demande à la cour :

- de lui donner acte de ses réserves sur la suite de la procédure, la cour ayant décidé d'évoquer sur le préjudice de [I] [D], en raison du pourvoi formé contre cette décision,

- vu le décompte des prestations servies par la CPAM, de constater que celle-ci n'a aucune créance à faire valoir pour le futur, sa créance étant définitive,

- vu le rapport du professeur [C] du 11 juillet 2006, d'ordonner un sursis à statuer dans l'attente du rapport complémentaire de la victime,

- de débouter [I] [D] de sa demande, au vu des pièces produites, formulée au titre du préjudice matériel comprenant les frais de transport et les frais informatiques ainsi que de sa demande au titre de l'adaptation du logement,

- de débouter Monsieur [D] du surplus de ses demandes,

- de chiffrer 'comme ci-dessus' les différents postes de préjudice susceptibles d'être indemnisés, étant rappelé que ceux de Monsieur et Madame [D] ont été liquidés par l'arrêt du 3 février 2009,

- de répartir les dépens en fonction des succombances réciproques.

Suivant conclusions du 16 mars 2010, la SA CLINIQUE SAINT-ETIENNE ET DU PAYS BASQUE demande à la cour :

- de réduire 'dans les proportions susvisées' les indemnisations sollicitées,

- de dire et juger qu'aucune pièce ne permet à la cour de se prononcer sur l'impossibilité de [I] [D] d'exercer une activité professionnelle et de débouter en conséquence les consorts [D] de leurs demandes présentées à ce titre,

- de dire et juger que le recours à une tierce personne 24 heures sur 24 n'et pas justifié et de débouter en conséquence les consorts [D] de leurs demandes présentées à ce titre,

- de débouter les consorts [D] de leurs demandes présentées au titre des frais de transport,

- de débouter les consorts [D] de leurs demandes présentées au titre de l'acquisition de matériel informatique,

- de rejeter la demande présentée au titre de l'aménagement du logement,

- de débouter les consorts [D] de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de dire et juger que si une quelconque condamnation devait être prononcée à son encontre, son assureur le GAN serait tenu à garantir l'intégralité des sommes auxquelles elle pourrait être condamnée et de condamner le GAN à la relever indemne de toute condamnation,

- en tout état de cause, de condamner in solidum les parties défaillantes à lui verser la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Suivant conclusions du 28 octobre 2009, la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE des Landes et la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE du Lot-et-Garonne demandent à la cour :

- de condamner solidairement les parties qui succomberont à payer à la CPAM des Landes le montant de sa créance définitive, soit la somme de 717.944,47 €,

- de condamner solidairement les parties qui succomberont au paiement de l'indemnité forfaitaire de 955 € HT,

- de condamner solidairement les parties succombantes aux dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais des expertises du professeur [C].

La SA SIEMENS, Madame [O] [S] et Monsieur [P] [K] n'ont pas émis de nouvelles conclusions postérieurement à l'arrêt du 3 février 2009.

L'instruction de la procédure a été déclarée close par ordonnance du 16 mars 2010.

MOTIFS DE L'ARRET

Attendu que les consorts [D] communiquent l'ordonnance du 1er février 2010 constatant le désistement de la société GAN de son pourvoi formé contre l'arrêt du 26 mai 2009 ;

Attendu que [I] [D] était âgé de neuf ans au moment de l'accident dont il a été victime ; qu'il suivait une scolarité normale, étant en cours moyen première année ; qu'il avait présenté à la naissance un hématome extra-dural d'évolution favorable et qu'il avait été traité pour des convulsions ayant fait suite à une infection urinaire mais que lors de la consultation d'anesthésie du 11 décembre 1997, il avait été noté un excellent état général compte tenu de ces antécédents ; que son médecin traitant l'avait adressé au docteur [Z] pour une ectopie testiculaire bilatérale ;

Que l'enfant a présenté, au cours de l'intervention chirurgicale litigieuse, un arrêt cardiaque à la suite du surdosage en fluothane survenu dans les circonstances déjà évoquées ; que son activité cardiaque a repris après mise en oeuvre d'un massage cardiaque et d'une ventilation assistée ; qu'il est résulté de cet arrêt cardiaque prolongé un coma post-anoxique ayant nécessité son transfert en service de réanimation pédiatrique où il a séjourné du 16 février au 19 mars 1998 ;

Attendu que [I] [D] a ensuite séjourné en service de pédiatrie du 19 mars au 14 avril 1998, dans un premier centre de rééducation fonctionnelle du 14 avril 1998 au 12 février 1999, puis dans un deuxième du 12 février 1999 au 4 septembre 2000, avant d'être admis à cette date au centre Lestrade à [Localité 17] (Haute-Garonne), institut d'éducation sensorielle au sein duquel il devait séjourner jusqu'à l'âge de 20 ans ;

Que l'examen clinique du 5 janvier 1999 montrait des troubles visuels majeurs, étant précisé que la cécité, totale initialement, était alors quasi complète avec une simple vision floue des couleurs, ainsi qu'un syndrome cérébelleux discret ;

Attendu que l'expert a estimé que l'état organique de [I] [D], qui présente un lourd handicap, pouvait être considéré comme consolidé à la date de son examen du 5 juin 2002, les séquelles organiques de son état post anoxique ne s'étant pas modifiées au cours des dernières années ;

Que l'expert note un déficit oculaire majeur caractérisé par une mal-voyance très profonde de l'ordre de la cécité légale (possibilités visuelles stables, presque inquantifiables, soit 1/150° environ), un strabisme divergent droit (fixation excentrique, regard vers le haut), un champ visuel excessivement réduit ; que [I] ne reconnaît les gens qu'à la voix ;

Qu'il fait également état d'un syndrome cérébelleux avec troubles associés : troubles de l'équilibre à l'arrêt en position debout (très difficile à droite) et à la marche (marche avec rotation externe du pied droit), troubles de la préhension, troubles de la concentration et de la mémorisation ;

Qu'il relève une absence d'autonomie pour les gestes élémentaires de la vie, nécessitant notamment une aide pour l'habillage, les repas, la toilette ;

Attendu que les consorts [D] demandent 30.000 € au titre du déficit fonctionnel temporaire pour la gêne supportée par [I] durant la période du 16 février 1998 (date de son accident) au 4 septembre 2000 (date de son entrée au centre Lestrade) ; que l'amplitude de la période de déficit fonctionnel temporaire à laquelle ils se réfèrent expressément n'est pas contestée par les responsables de l'accident qui sollicitent la fixation de la somme allouée sur la base, pour ceux qui font une proposition chiffrée, d'environ 500 € par mois ;

Attendu que l'expert retient effectivement une incapacité temporaire totale ayant duré, selon lui, depuis l'accident jusqu'à l'entrée de [I] au centre Lestrade, établissement de rééducation où celui-ci a repris des activités scolaires adaptées à son état psychomoteur;

Attendu que la gêne dans la vie courante représente l'atteinte au bien-être de la victime, résultant des troubles que ressent celle-ci dans ses conditions d'existence quotidiennes ; qu'il s'agit d'un préjudice personnel, distinct du préjudice économique et non compris dans l'assiette du recours des tiers payeurs ; qu'en l'occurrence, les consorts [D] demandent l'indemnisation du déficit fonctionnel temporaire en référence à la période d'incapacité temporaire totale retenue par l'expert ;

Attendu que ce chef de préjudice sera justement indemnisé par l'allocation de la somme de 18.000 € ;

Attendu que les consorts [D] demandent 100.000 € au titre des souffrances endurées ; que le GAN sollicite la confirmation du jugement ayant alloué 30.000 € ; que la clinique [Localité 20], Madame [J] et la société AGF ainsi que Monsieur [G] estiment la demande excessive ;

Attendu que selon l'estimation expertale, le pretium doloris ne saurait être inférieur à 6/7 ; qu'il importe de rappeler que [I] [D] a subi un arrêt cardiaque ayant nécessité un massage cardiaque, une période de coma ayant nécessité un séjour de cinq semaines en service de réanimation et qu'il séjournait toujours en établissement spécialisé à la date de son dernier examen par l'expert ; que celui-ci qualifie d'importantes ses souffrances morales, précisant qu'il a une pleine conscience de ce qui lui arrive et qu'il est souvent envahi par des moments d'anxiété, notamment quand il ne peut arriver à faire les exercices demandés ;

Attendu que le préjudice consécutif aux souffrances physiques et morales subies par [I] [D] sera justement indemnisé par l'allocation de la somme de 35.000 € ;

Attendu que les consorts [D] demandent la somme de 600.000 € au titre du déficit fonctionnel permanent; que se référant à l'estimation expertale, la société AGF propose d'évaluer ce chef de préjudice à 272.000 €, que le GAN propose une évaluation à 323.000 € et que selon la clinique [Localité 20] et Monsieur [G], la somme attribuée ne saurait être supérieure à cette dernière proposition ;

Attendu que compte tenu de la cécité quasi totale dont est atteint le jeune [I] et des handicaps associés liés à son état post anoxique, l'expert conclut que les séquelles sont maintenant stables et 'propose que le taux d'incapacité permanente partielle ne soit pas inférieur à 85 %' ;

Attendu que le déficit fonctionnel séquellaire, qui a succédé au déficit fonctionnel temporaire ci-dessus considéré et dont l'expert a constaté le 5 juin 2002 qu'il s'était stabilisé à un taux ne pouvant être inférieur à 85 %, étant observé que ce taux minimum ne pouvait qu'être atteint depuis la fin de la période d'incapacité temporaire totale retenue par lui, est également, par ses répercussions sur les actes de la vie courante de la victime, à l'origine d'un préjudice personnel, distinct du préjudice économique et non compris dans l'assiette du recours des tiers payeurs ;

Que ce déficit, qui est à la fois moteur et visuel, entraîne pour [I] [D] une absence d'autonomie pour les gestes élémentaires de la vie, tels que la toilette, l'habillage, la préparation des repas ; qu'il ne sort jamais seul ; qu'il maîtrise maintenant la lecture du Braille mais éprouve des difficultés de coordination des mouvements ; qu'il peut pratiquer le traitement de texte et la recherche sur Internet avec un logiciel de synthèse vocale ;

Attendu que compte tenu de l'âge de la victime et de l'importance de son déficit fonctionnel permanent, ce chef de préjudice sera justement indemnisé par l'allocation d'un capital de 350.000 € ;

Attendu que les consorts [D] demandent la somme de 25.000 € au titre du préjudice esthétique ; que le GAN ainsi que Madame [J] et la société AGF concluent à la confirmation du jugement ayant alloué 8.000 € ; que selon la clinique [Localité 20] et Monsieur [G], il ne saurait être alloué plus de 5.000 € ;

Attendu qu'ainsi que le rappellent les consorts [D], l'expert retient que [I] présente un strabisme divergent droit avec une fixation excentrique et un regard vers le haut et qu'il marche avec une rotation externe du membre inférieur droit ; que selon lui, le préjudice esthétique ne peut être inférieur à 3/7 ;

Attendu que ce chef de préjudice a été justement indemnisé par le premier juge à la somme de 8.000 € ;

Attendu que les consorts [D] demandent la somme de 80.000 € au titre du préjudice sexuel et d'établissement ; qu'ils soutiennent que compte tenu de son handicap, [I] ne pourra ni se marier, ni fonder un foyer, ni avoir des enfants et des petits-enfants ;

Que Madame [J] et la société AGF proposent de ramener l'indemnité à 30.000 € ; le GAN et la clinique [Localité 20], à 25.000 € ;

Attendu que les handicaps dont souffre [I] [D] à la suite de son accident sont de nature à entraver considérablement la possibilité pour lui d'avoir des rapports intimes ainsi que de s'établir socialement ; qu'il subit ainsi un préjudice qui sera justement indemnisé par l'allocation de la somme de 40.000 € ;

Attendu que les consorts [D] demandent la somme de 80.000 € au titre du préjudice d'agrément ; que Madame [J] et la société AGF, le GAN et la clinique SAINT-ETIENNE proposent la prise en compte d'une somme de 30.000 € ;

Attendu qu'il ressort du rapport d'expertise que la cécité et les troubles de l'équilibre de [I] [D] l'empêchent de se livrer à une activité sportive et limitent considérablement pour lui les possibilités de loisirs ; que s'il peut écouter de la musique, ce qui est son seul loisir, il ne peut la pratiquer, l'apprentissage d'un instrument lui étant impossible en raison des troubles de la préhension ;

Attendu que ce chef de préjudice, à propos duquel l'expert évoque un handicap majeur, sera justement indemnisé par l'allocation de la somme de 60.000 € ;

Attendu que l'indemnisation des différents chefs de préjudice extra patrimoniaux subis par [I] [D] à la suite de l'accident litigieux représente ainsi une somme totale de 511.000 €, dont seront déduites les provisions déjà perçues ;

Attendu que les consorts [D] demandent, au titre des préjudices patrimoniaux, la condamnation du docteur [J], de la clinique SAINT-ETIENNE, du docteur [G] et des compagnies AGF et GAN au paiement de différentes sommes mentionnées ci-dessus, des chefs des dépenses de santé, de l'incidence professionnelle, des frais de logement adapté, des frais de transport, de l'assistance de tierces personnes ainsi que du matériel informatique ;

Attendu que [I] [D] séjournait encore au centre Lestrade lors du dernier rapport d'expertise ; que précisant qu'il pouvait séjourner dans ce centre jusqu'à l'âge de 20 ans, l'expert concluait que cette période devrait être mise à profit pour le développement d'un projet personnel, voire professionnel, et que c'est alors que pourrait être évaluée avec plus de précision la présence d'une tierce personne ; qu'en l'état de son rapport, il évaluait cette présence à 4 heures par jour pour l'aide aux besoins élémentaires de la vie à son domicile, plus une heure par jour pour le transport vers les activités dans les villes de proximité ;

Attendu que l'éducateur ayant suivi [I] [D] durant les dernières années de sa prise en charge au centre Lestrade évoquait dans une note de bilan du 10 octobre 2007 l'éventualité d'un travail en milieu protégé, n'estimant pas 'raisonnable' de le préparer actuellement au milieu professionnel ordinaire bien qu'il soit 'socialement repéré comme un jeune adulte très ouvert' ; que selon lui, 'l'avenir dépendra de sa propre évolution en milieu spécialisé et seuls les professionnels qui l'accompagneront dans son parcours seront en mesure d'affirmer si oui ou non il a trouvé suffisamment d'autonomie pour intégrer éventuellement le travail en milieu ordinaire' ;

Attendu que les chefs de préjudice patrimoniaux représentés par le besoin d'assistance d'une tierce personne et par l'incidence professionnelle du déficit fonctionnel permanent ne peuvent être évalués en l'absence d'éléments d'appréciation postérieurs à la fin du séjour de [I] [D] dans l'établissement d'éducation spécialisé au sein duquel il ne pouvait être pris en charge au-delà de l'âge de 20 ans et dans le cadre duquel devait être préparé un projet personnel susceptible d'influer sur les conditions de son assistance dans sa vie quotidienne future et de son éventuel accès à une activité professionnelle ;

Qu'il en va de même en ce qui concerne les frais de logement adapté et de transport, frais futurs liés à la mise en oeuvre du projet personnel qui aura pu être élaboré ;

Qu'un complément d'expertise sera ordonné à cet effet ;

Attendu qu'en revanche, le rapport d'expertise fait ressortir d'ores et déjà qu'il est indispensable que [I] puisse disposer à son domicile du matériel informatique adapté dont il disposait au centre Lestrade et ce, quelles que soient ses conditions de logement futures ; qu'au vu du devis de la société ALPHABRAILLE du 3 avril 2008, la demande d'une somme de 12.004,71 € pour l'acquisition de ce matériel apparaît justifiée ;

Attendu que la CPAM des Landes produit un décompte de ses prestations pour un montant général et définitif de 717.944,47 € concernant des frais d'hospitalisation et de soins, des frais de transport, des frais médicaux et pharmaceutiques ; qu'il s'agit de frais déjà exposés, ne se confondant pas avec les postes de préjudice futurs devant être déterminés au moyen d'une expertise complémentaire ; que rien ne s'oppose à la liquidation de la créance de la CPAM qui ne fait état d'aucun frais futurs ; qu'il y a également lieu d'allouer à cette dernière l'indemnité forfaitaire de 955 € ;

Attendu qu'il échet de condamner in solidum la clinique SAINT-ETIENNE et le GAN, Madame [J] et la société AGF ainsi que Monsieur [G] aux dépens réservés par l'arrêt du 3 février 2009 ainsi qu'aux dépens exposés au jour du présent arrêt ;

Attendu qu'il est équitable d'allouer aux consorts [D] la somme complémentaire de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Après en avoir délibéré, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;

Vu son arrêt du 3 février 2009, rectifié par arrêt du 26 mai 2009 en ce qui concerne la mise hors de cause de la société SIEMENS,

Condamne in solidum la SA CLINIQUE SAINT-ETIENNE et la compagnie GAN, Madame [J] et la compagnie AGF ainsi que Monsieur [G] à payer à [I] [D] la somme de 511.000 € (cinq cent onze mille euros) au titre de son préjudice extra patrimonial, dont seront déduites les provisions déjà versées pour un montant de 243.918,43 € (deux cent quarante trois mille neuf cent dix huit euros et quarante trois centimes),

Les condamne sous le même lien à payer à [I] [D] la somme de 12.004,71 € (douze mille quatre euros et soixante et onze centimes) au titre de l'acquisition de matériel informatique spécialisé,

Les condamne sous le même lien à payer à la Caisse primaire d'assurance maladie des Landes la somme de 717.944,47 € (sept cent dix sept mille neuf cent quarante quatre euros et quarante sept centimes) correspondant au décompte général et définitif de ses prestations ainsi que la somme de 955 € (neuf cent cinquante cinq euros) au titre de l'indemnité forfaitaire due à cet organisme,

Avant dire droit sur les chefs de préjudice consistant dans le besoin d'assistance par une tierce personne, les frais de logement adapté, les frais futurs de transport et l'incidence professionnelle du déficit professionnel permanent, ordonne un complément d'expertise,

Désigne pour y procéder Monsieur le professeur [B] [C], [Adresse 1], avec mission,

- de convoquer les parties et d'aviser leur conseil respectif, de se faire communiquer tous documents utiles à l'accomplissement de sa mission,

- de réexaminer [I] [D],

- de déterminer et de quantifier son besoin d'assistance par une tierce personne,

- de préciser également ses besoins spécifiques en termes de logement et de moyen de transport adaptés,

- de se prononcer sur l'incidence professionnelle de son déficit fonctionnel permanent,

Dit que l'expert pourra se faire assister par un technicien d'une autre spécialité que la sienne, notamment un ergothérapeute,

Fixe à la somme de 600 € (six cents euros) le montant de la rémunération à valoir sur la rémunération de l'expert que les consorts [D] devront consigner entre les mains du régisseur de la cour d'appel de PAU, avant le 31 octobre 2010,

Dit qu'en cas d'empêchement ou de refus de l'expert, il sera procédé à son remplacement par le conseiller de la mise en état, chargé du suivi des opérations d'expertise,

Dit que l'expert établira un pré-rapport qu'il communiquera aux parties en leur impartissant un délai raisonnable pour lui faire parvenir leurs dires auxquels il répondra dans son rapport définitif, lequel devra être déposé au greffe de la cour d'appel de Pau avant le 20 janvier 2011,

Condamne in solidum la SA CLINIQUE SAINT-ETIENNE et la compagnie GAN, Madame [J] et la compagnie AGF ainsi que Monsieur [G] aux dépens réservés par l'arrêt du 3 février 2009 ainsi qu'aux dépens exposés au jour du présent arrêt,

Les condamne sous le même lien à payer aux consorts [G] la somme complémentaire de 2.000 € (deux mille euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Rappelle que dans leurs rapports entre eux, la SA CLINIQUE SAINT-ETIENNE et la compagnie GAN supporteront 50 % des condamnations, Madame [J] et la compagnie AGF, 35 % et Monsieur [G], 15 %,

Accorde à la SCP LONGIN - LONGIN-DUPEYRON - MARIOL et en tant que de besoin aux autres avoués de la cause le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roger NEGRE, Président, et par Madame Mireille PEYRON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,

Mireille PEYRONRoger NEGRE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 06/00946
Date de la décision : 13/09/2010

Références :

Cour d'appel de Pau 01, arrêt n°06/00946 : Expertise


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-09-13;06.00946 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award