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03/05/2010 | FRANCE | N°10/01392

France | France, Cour d'appel de Pau, 1ère chambre, 03 mai 2010, 10/01392


RN/PP



Numéro 1915/10





COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre







ARRET DU 03/05/10







Dossier : 10/01392





Nature affaire :



Requête en récusation















Affaire :



[KN] [CF]



C/



CONSEIL DE DISCIPLINE DES AVOCATS DU RESSORT DE LA COUR D'APPEL DE PAU,

LE BATONNIER DE L'ORDRE DES AVOCATS DE PAU














>





















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R E T



prononcé par Monsieur CASTAGNE, Conseiller

en vertu de l'article 452 du code de procédure civile,



assisté de Madame PEYRON, Greffier,



à l'audience publique du 03 mai 2010

date indiquée à l'issue des...

RN/PP

Numéro 1915/10

COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRET DU 03/05/10

Dossier : 10/01392

Nature affaire :

Requête en récusation

Affaire :

[KN] [CF]

C/

CONSEIL DE DISCIPLINE DES AVOCATS DU RESSORT DE LA COUR D'APPEL DE PAU,

LE BATONNIER DE L'ORDRE DES AVOCATS DE PAU

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

prononcé par Monsieur CASTAGNE, Conseiller

en vertu de l'article 452 du code de procédure civile,

assisté de Madame PEYRON, Greffier,

à l'audience publique du 03 mai 2010

date indiquée à l'issue des débats.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience solennelle et en chambre du conseil tenue le 14 Avril 2010, devant :

Monsieur PUJO-SAUSSET, Président de Chambre

Monsieur NEGRE, Président de Chambre

Monsieur LESAINT, Conseiller

Monsieur CASTAGNE, Conseiller

Monsieur BILLAUD, Conseiller

En présence de Monsieur BOIRON, Substitut Général

assistés de Madame PEYRON, Greffier

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

sur la requête présentée par :

Maître [KN] [CF]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

aux fins de renvoi pour cause de suspicion légitime et en récusation

CONSEIL DE DISCIPLINE

représenté par son Président, Monsieur [U] [L]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Monsieur LE BATONNIER DE L'ORDRE DES AVOCATS DE PAU

Palais de Justice

[Adresse 2]

[Adresse 2]

FAITS ET PROCEDURE

Par courrier recommandé du 8 février 2010, Maître [KN] [CF] a été convoqué à l'audience du conseil de discipline des avocats du ressort de la cour d'appel de Pau pour l'audience du 18 mars 2010.

Etant fait référence, dans cette convocation, à une première décision du conseil de discipline du 2 juillet 2009 et à un arrêt de cette cour du 12 janvier 2010 ayant pris acte du désistement de Madame la déléguée du bâtonnier et écarté sa demande d'annulation de la procédure, les faits reprochés, relatifs à une affaire dans le cadre de laquelle Maître [CF] avait été initialement saisi par le comité d'entreprise de la société GIRARD IBERICA, étaient à nouveau évoqués en imputant à Maître [CF] 'deux catégories de manquements disciplinaires graves', à savoir :

- manquement à l'exigence de transparence et de modération dans le calcul des honoraires,

- défaut d'information dans le cadre du mandat individuel signé par chacun des salariés et manquement à la probité, à l'honneur et à la délicatesse.

A l'audience du 18 mars 2010, Maître [CF] a déposé une 'requête aux fins de renvoi pour cause de suspicion légitime et en récusation', accompagnée de 39 pièces, aux fins de voir, au visa :

- de l'articles 6 .1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme,

- des articles 341 et suivants du code de procédure civile,

- du règlement intérieur du conseil de discipline et en particulier de son article 3,

- de la communication à ladite audience des noms des membres siégeant effectivement au conseil de discipline,

- et de la communication à cette même date et avant l'ouverture des débats du nom de la personne faisant office de secrétaire du conseil de discipline,

' prendre acte, avec toutes les conséquences de droit, de la récusation par le requérant, du bâtonnier [R] cumulativement, plaignant, personnellement intéressé et autorité poursuivante dans cette affaire ; la juger fondée ;

' prenant acte de la suspicion légitime soulevée par le requérant à l'encontre du conseil de discipline, faire droit à la demande de renvoi, ledit conseil ne permettant pas de garantir le droit à un procès impartial et équitable,

' surabondamment, prendre acte avec toutes les conséquences de droit, de la récusation par le requérant du président et des membres titulaires et suppléants du conseil de discipline appartenant au barreau de Pau ainsi que des conseillers ayant déjà siégé lors de l'audience disciplinaire du 2 juillet 2009.

Par décision du 18 mars 2010, le conseil de discipline a constaté qu'il y avait lieu à application des dispositions des articles 341 à 364 du code de procédure civile.

Par décision du 30 mars 2010, le président du conseil de discipline, faisant application de l'article 359 du code de procédure civile, a ordonné la transmission de la requête, avec le dossier de la procédure disciplinaire, au premier président de la cour d'appel de Pau.

Maître [CF] et le président du conseil de discipline ont été avisés de la date de l'audience par courrier du 8 avril 2010.

Le conseil de Maître [CF] a adressé à la cour 6 pièces supplémentaires par courrier recommandé du 8 avril 2010, dont un procès-verbal de constat dressé à la requête de ce dernier le 18 mars 2010 par Maître [UR], huissier de justice à [Localité 3]. Le 14 avril 2010, Maître [CF] a déposé des conclusions additionnelles, tendant à ce qu'il soit fait droit à la demande de renvoi pour cause de suspicion légitime et de récusation, ainsi que deux pièces supplémentaires.

L'affaire a été évoquée à l'audience du 14 avril 2010, la cour siégeant en audience solennelle et en chambre du conseil conformément à l'article 16 du décret du 27 novembre 1991, et aux dispositions de l'article 359 du code de procédure civile.

Le Ministère Public a conclu au rejet de la requête.

MOTIFS DE L'ARRET

Attendu que Maître [CF] sollicite expressément :

' 'la récusation du bâtonnier [R], autorité exerçant la poursuite',

' 'le dessaisissement avec renvoi pour cause de suspicion légitime de la juridiction ordinale dont la composition a été communiquée au requérant à l'audience du conseil de discipline du 18 mars 2010", à savoir :

- Barreau de Pau :

' [H] [AD],

' [UR] [NR],

' [F] [S],

- Barreau de Tarbes :

' P. [Z],

' E. [HR],

- Barreau de Dax :

' [G] [C],

'[NO] [X], 'greffier secrétaire'

- Barreau de Mont de Marsan :

' [D] [HO],

- Barreau de Bayonne :

' [U] [L],

' [M] [DU],

' [P] [UT]-[K],

' 'la récusation du président et des membres titulaires et suppléants du conseil de discipline appartenant au barreau de Pau ainsi que des conseillers ayant siégé lors de l'audience disciplinaire du 2 juillet 2009", à savoir :

' Monsieur le bâtonnier [U] [L], président,

- Membres titulaires du barreau de Pau :

' Monsieur [H] [AD],

' Monsieur [A] [US],

' Monsieur [O] [N],

' Monsieur [W] [KO],

- Membres suppléants du barreau de Pau :

' Madame [DC] [I],

' Monsieur [J] [NN],

' Monsieur [UR] [NR],

' Monsieur [F] [S],

- Membres du conseil de discipline ayant siégé lors de l'audience disciplinaire du 2 juillet 2009 :

' Monsieur [U] [L], président,

' Monsieur [H] [AD],

' Monsieur [UR] [NR],

' Madame [P] [UT],

' Monsieur [NO] [X], 'secrétaire greffier' ;

Attendu que la requête repose sur les moyens suivants :

1) Violation par le président du conseil de discipline de l'article 3 du règlement intérieur (relatif à la procédure disciplinaire)

Les décisions du président du conseil de discipline lors de l'audience du 2 juillet 2009 et les réponses à l'avocat du requérant en violation de l'article 3 du règlement intérieur du conseil permettent de nourrir un 'soupçon de suspicion légitime' et des 'appréhensions sur l'impartialité dudit conseil'.

Maître [CF] estime pouvoir opposer au président du conseil de discipline son comportement partial, ce d'autant qu'il avait, observe-t-il, déjà rencontré des difficultés avec celui-ci lors de la précédente audience disciplinaire du 2 juillet 2009.

2) Risque de partialité au regard de la composition du conseil de discipline

La composition du conseil de discipline du 2 juillet 2009 et la teneur de sa décision permettent également de fonder la demande de renvoi pour cause de suspicion légitime pour 'défaut d'impartialité objective'.

La jurisprudence de la cour de cassation impose que les demandes de renvoi pour cause de suspicion légitime et de récusation soient non seulement examinées sur le fondement des huit cas de l'article 341 du code de procédure civile mais également, sous l'angle de l'article 6.1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme.

3) Dévoiement des faits dans la décision du conseil de discipline du 2 juillet 2009

Dans sa décision du 2 juillet 2009, le conseil de discipline, par une présentation dévoyée des faits de l'espèce, prend position et émet une appréciation apparaissant objectivement comme susceptible d'avoir une influence sur la seconde décision à intervenir dans le cadre de l'audience disciplinaire du 18 mars 2010.

L'exposé des faits figurant dans la décision du conseil de discipline du 2 juillet 2009 est inexact. Il repose uniquement sur les éléments de la poursuite et ne comporte aucune mention des faits tels que rectifiés par la défense et des moyens mis en avant par celle-ci.

Attendu que s'il n'est pas fait droit à la demande de renvoi pour cause de suspicion légitime, le requérant demande à la cour de faire droit à sa demande de récusation visant le président et certains membres du conseil de discipline, soit

1) Récusation du président et des conseillers ayant siégé le 2 juillet 2009,

2) Proximité des membres du conseil de discipline avec le bâtonnier [R].

Récusation des 8 membres titulaires et suppléants appartenant au barreau de Pau, 'appartenance permettant de concevoir un doute et des appréhensions sur l'impartialité desdits membres', objectivement justifiés par les circonstances particulières relatées.

L'accumulation des faits rappelés démontre que tous les membres du conseil de l'ordre du barreau de Pau ayant eu à connaître de cette affaire ont manifesté soit un comportement partial, soit, pour le moins, un comportement n'offrant aucune garantie d'impartialité.

Attendu que le président du conseil de discipline a répondu aux griefs de la manière suivante :

A) Sur la demande de récusation du bâtonnier [R], autorité de poursuite

L'autorité de poursuite ne peut être récusée ; la demande n'est donc pas fondée.

B) Sur la violation par le président du conseil de discipline de l'article 3 du règlement intérieur

Les dispositions de l'article 3 du règlement intérieur ne peuvent être considérées comme ayant été violées ; en outre la preuve d'un comportement partial du président n'est pas rapportée ; le moyen doit donc être écarté.

C) Sur la composition du conseil de discipline

Le conseil de discipline s'est prononcé le 2 juillet 2009 par une décision statuant sur une fin de non recevoir tirée du défaut de qualité pour agir de l'autorité de poursuite. N'ayant statué que sur une exception de procédure, il n'avait pas épuisé sa saisine et reste donc compétent pour statuer sur le fond du dossier, sans que le requérant puisse demander la récusation de ses membres au motif qu'ils auraient déjà connu le litige.

Le moyen n'est donc pas fondé.

D) Sur la motivation du 'jugement' du 2 juillet 2009

La motivation critiquée n'apporte aucun jugement de valeur ni appréciation sur les manquements disciplinaires allégués par l'autorité de poursuite et imputés à Maître [CF].

La circonstance que le président n'ait pas répondu à une requête en rectification d'erreur matérielle présentée le 8 juillet 2009 ne caractérise pas davantage un comportement partial.

Enfin la partialité du président du conseil de discipline ne peut se déduire de la mention, dans la décision du 2 juillet 2009, selon laquelle le requérant n'aurait pas eu la parole en dernier sur la base d'une attestation émanant du bâtonnier [E], par ailleurs associé du requérant, présent à l'audience. La décision du 2 juillet 2009 a précisé que Maître [CF] et son avocat avaient eu la parole le dernier, cette affirmation résultant des notes d'audience du secrétaire faisant office de greffier qui attestent du déroulement de la procédure.

Le moyen n'est donc pas fondé.

E) La proximité des membres du conseil de discipline de [Localité 3]

La loi impose désormais le respect d'une double règle concernant la composition du conseil de discipline : il doit être impérativement composé d'un membre par barreau, la formation plénière ne siégeant valablement que si plus de la moitié de ses membres sont présents. Il en résulte que le conseil de discipline des avocats du ressort de la cour d'appel de Pau ne peut valablement siéger qu'en présence des membres du conseil de l'ordre du barreau auquel appartient Maître [CF]. 'L'impartialité objective contestée par le requérant se heurte, sur ce point, aux exigences de la loi relative à la composition du conseil de discipline.

En outre, le requérant n'allègue aucun fait précis et circonstancié qui puisse permettre de douter de l'impartialité des membres de la formation du conseil de l'ordre du barreau de Pau, aucune pièce versée aux débats n'étant de nature à étayer un tel grief.

Dans ces conditions, les craintes nourries par Maître [CF] quant à l'impartialité des membres de la formation du conseil de discipline devant lequel il doit comparaître ne sont pas fondées.

Il convient donc de ne pas faire droit à la requête.

Attendu que selon courrier recommandé en date du 8 avril 2010, le conseil de Maître [CF] fait notamment valoir :

- que le procès-verbal constituant sa pièce n° 45 relate de façon circonstanciée les conditions et le déroulement de la procédure disciplinaire au cours de laquelle Maître [CF] fut amené à déposer une requête en récusation,

- et que ce procès-verbal démontre surabondamment les difficultés rencontrées par Maître [CF] et son défenseur pour faire entendre leur voix dans la stricte application du code de procédure civile et la volonté de l'autorité poursuivante d'utiliser la publicité des débats comme un tremplin médiatique destiné à lui nuire.

Attendu qu'aux termes de ses conclusions additionnelles du 14 avril 2010, Maître [CF] fait notamment valoir :

- que des indices supplémentaires de la partialité du président du conseil de discipline sont établis par le procès-verbal de constat d'huissier dressé lors de l'audience disciplinaire du 18 mars 2010 ainsi que par la décision du 30 mars 2010, le soutien accordé par le président du conseil de discipline à l'autorité de poursuite permettant de douter à tout le moins de l'impartialité du président, lequel, au surplus, a commis un excès de pouvoir,

- que la médiatisation, par le bâtonnier [R], de la demande de radiation le concernant est un indice supplémentaire de sa partialité objective et subjective et que l'impossibilité de récuser l'autorité de poursuite serait contraire à l'exigence d'un procès équitable posée par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme,

- que la partialité de l'autorité de poursuite a imprégné le conseil de discipline lui-même, constitué pour partie de membres soumis à l'autorité hiérarchique du bâtonnier exerçant les poursuites, ce dernier étant au surplus personnellement intéressé ;

* * *

Attendu qu'il sera liminairement observé que la procédure spéciale instituée par les textes en vigueur en matière de discipline des avocats n'apparaît pas contraire aux exigences de l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la demande de 'récusation du bâtonnier [R], autorité exerçant les poursuites'

Attendu que l'article 23 de la loi du 31 décembre 1971 modifié par l'article 31 de la loi du 11 février 2004 dispose, en son premier alinéa, que l'instance disciplinaire compétente en application de l'article 22 est saisie par le procureur général près la cour d'appel dans le ressort de laquelle elle est instituée ou le bâtonnier dont relève l'avocat mis en cause et, en son deuxième alinéa, que ne peut siéger au sein de la formation de jugement l'ancien bâtonnier qui, au titre de ses fonctions antérieures, a engagé la poursuite disciplinaire ;

Attendu qu'il apparaît que par courrier recommandé expédié le 10 février 2010, le bâtonnier [R] a transmis au président du conseil de discipline la convocation pour l'audience disciplinaire par lui adressée à Maître [CF], laquelle se rapporte à des faits dont le bâtonnier [V] avait précédemment saisi le conseil de discipline, étant précisé que la poursuite alors engagée par l'acte de saisine du 24 novembre 2008 a donné lieu à un arrêt rendu par cette cour le 12 janvier 2010 qui figure tant au dossier transmis par le président du conseil de discipline qu'aux pièces de Maître [CF] ;

Attendu que même si le bâtonnier [R] nouvellement en fonction avait, postérieurement à la saisine du 24 novembre 2008 et ainsi qu'il ressort de sa lettre du 9 mars 2009, donné délégation à Maître [Y] [GC] afin de le substituer dans l'exercice des poursuites disciplinaires, ce au motif que par sa lettre du 10 juillet 2008, il était à l'origine du dossier, étant par ailleurs observé que la régularité de la délégation avait alors été critiquée, il n'en demeure pas moins que le bâtonnier [R] est aujourd'hui autorité poursuivante statutaire et que c'est à ce titre qu'il a vocation d'intervenir à l'audience disciplinaire ;

Qu'il n'est ni président ni membre du conseil de discipline, ni même partie jointe, et qu'il n'est donc pas récusable, en conséquence de quoi la demande sera rejetée ;

Sur la demande de dessaisissement avec renvoi pour cause de suspicion légitime de la juridiction ordinale dont la composition a été communiquée à l'audience du 18 mars 2010

Attendu que Maître [CF] soutient qu'en violation de l'article 3 du règlement intérieur du conseil de discipline des avocats du ressort de la cour d'appel de Pau, il a été mis dans l'impossibilité matérielle de déposer 'la présente requête' avant le jour de l'audience, le président du conseil de discipline ne lui ayant pas communiqué préalablement, malgré deux demandes, le nom des avocats siégeant effectivement le 18 mars en audience disciplinaire et celui de la personne assurant le secrétariat-greffe du conseil de discipline ;

Qu'ajoutant que l'article 3 du règlement intérieur stipule que certains actes de la procédure disciplinaire doivent être transmis 'au secrétariat du conseil de discipline huit jours au moins avant la date de l'audience, il fait ainsi valoir qu'en ne désignant pas, au moins huit jours avant la date de l'audience, le secrétaire du conseil de discipline, le président dudit conseil a fait irrégulièrement obstacle au dépôt de tout acte relatif à la procédure disciplinaire et notamment 'de la présente requête en suspicion légitime et récusation' ;

Attendu que selon l'article 3.1 du règlement intérieur du conseil de discipline des avocats de la cour d'appel de Pau,

'Le conseil de discipline est saisi, soit par le bâtonnier de l'ordre dont relève l'avocat poursuivi, soit par le procureur général, par un acte motivé.

Il appartient au président du conseil de discipline de fixer la date d'audience à laquelle l'avocat devra être cité par l'autorité poursuivante.

La citation ou la convocation doit être transmise au secrétariat du conseil de discipline par l'autorité de poursuite huit jours au moins avant la date de l'audience.

Le président désigne, le cas échéant, la formation qui sera amenée à juger.

Il convoque alors les membres de ladite formation à la date qu'il a fixée, et invite le bâtonnier de l'ordre dont relève l'avocat poursuivi, ainsi que le procureur général si ce dernier a exercé les poursuites disciplinaires, à se présenter à l'audience.

Toutes les pièces constitutives du dossier disciplinaire, côté et paraphé, avec rapport d'enquête et d'instruction, doivent être à la disposition de l'avocat poursuivi et de son avocat dès la délivrance de la citation ou de la convocation.'

Qu'il est précisé au 3ème alinéa de l'article 3.2 :

'Au début de l'audience, la formation disciplinaire désigne un secrétaire d'audience.'

Attendu que ces dispositions n'imposent pas de notifier huit jours au moins avant la date de l'audience le nom des avocats siégeant effectivement à l'audience disciplinaire, ni de désigner dans le même délai le secrétaire d'audience ;

Que c'est de manière pertinente que le président du conseil de discipline a répondu que le défaut de réponse de plusieurs membres du conseil de discipline, qui ont été convoqués mais se sont néanmoins abstenus, n'a pas permis de connaître avant la date du 18 mars 2010 la composition du conseil de discipline, étant en effet observé qu'il a dû être fait appel à plusieurs suppléants pour composer celui-ci, et que ces circonstances n'avaient pas fait obstacle à ce que Maître [CF] ait pu préparer la demande de renvoi pour cause de suspicion légitime et la requête en récusation, réunir les 39 pièces propres à fonder sa demande et les déposer le jour de l'audience, en sorte que l'ignorance de la composition exacte du conseil de discipline n'a donc pas empêché Maître [CF] d'exercer ses droits et d'organiser sa défense ;

Qu'il sera également observé qu'à l'audience du 18 mars 2010, lors de laquelle Maître [CF] a été en mesure de constater les éléments d'appartenance ordinale au barreau de Pau et d'identité partielle de composition excipés au soutien de sa requête, le conseil de discipline s'est borné à constater le dépôt de la requête aux fins de renvoi pour cause de suspicion légitime et en récusation par Maître [CF], à qui il a été délivré récépissé, et à constater qu'il y avait lieu à application des dispositions des articles 341 à 364 du code de procédure civile, accueillant ainsi en la forme le dépôt de la requête de Maître [CF] qui ne justifie pas du moindre préjudice consécutif aux violations prétendues de l'article 3 du règlement intérieur ;

Et attendu que la lecture du procès-verbal de constat d'huissier versé aux débats, dont il ressort notamment que le 18 mars 2010, Maître [CF] ne s'est pas opposé à la publicité des débats tout en 'rappelant la présence des journalistes conviés par Maître [R]' et a bénéficié d'une suspension d'audience pour pouvoir déposer sa requête in limine litis, ne conduit pas à retenir le grief de comportement partial opposé au bâtonnier [L] en sa qualité de président du conseil de discipline ;

Attendu qu'il y a lieu, en conséquence, de rejeter la demande ;

Sur la demande de récusation du président et des membres titulaires et suppléants du conseil de discipline appartenant au barreau de PAU ainsi que des conseillers ayant siégé lors de l'audience disciplinaire du 2 juillet 2009

Attendu qu'il apparaît :

- que Maîtres [AD], [NR] et [S] sont avocats au barreau de Pau et ont siégé au conseil de discipline réuni le 18 mars 2010,

- que Maîtres [L], [AD], [NR], [C] et [X], ce dernier faisant fonction de secrétaire de séance, avaient siégé au conseil de discipline le 2 juillet 2009 et ont à nouveau siégé à l'audience du conseil de discipline du 18 mars 2010,

- que Maîtres [B], [T], [KO] et [UT]-[K] avaient siégé le 2 juillet 2009 et n'ont pas siégé le 18 mars 2010 mais avaient été désignés comme titulaires ou suppléants, parmi lesquels Maître [KO] est avocat au barreau de Pau ;

Attendu que Maître [CF] évoque un risque de partialité en soutenant que dans sa décision du 2 juillet 2009, le conseil de discipline, par une présentation 'dévoyée' des faits de l'espèce, a pris position et émis une appréciation apparaissant objectivement comme susceptible d'avoir une influence sur la seconde décision à intervenir ;

Qu'il fait valoir que l'exposé des faits figurant dans la décision du conseil de discipline du 2 juillet 2009 est inexact ; qu'il repose uniquement sur les éléments de la poursuite et ne comporte aucune mention des faits tels que rectifiés par la défense ;

Attendu que la partie intitulée 'Les faits' du texte de la décision du 2 juillet 2009, précédant celle consacrée aux 'exceptions soulevées à l'audience in limine litis', évoque de manière synthétique le contexte de la saisine de Maître [CF] par le comité d'entreprise de la société GIRARD IBERICA, puis de son intervention pour les salariés de l'entreprise avec chacun desquels un mandat de représentation a été signé, avant de préciser ce dont 'les salariés font grief à leur avocat' ;

Que ces énonciations, antérieures à tout débat au fond, ne peuvent être considérées comme une prise de position du conseil de discipline qui constituerait un pré-jugement susceptible d'avoir une influence sur la décision à intervenir ;

Attendu qu'il est encore fait état par Maître [CF] du 'comportement partial du président du conseil de discipline lors de l'audience du 2 juillet 2009" en ce que celui-ci l'aurait, en violation des droits de la défense, empêché de s'exprimer en dernier ; que c'est faussement, selon Maître [CF], qu'il aurait donc été écrit que le requérant avait eu la parole le dernier ;

Attendu qu'à la teneur de la décision du 2 juillet 2009 qui mentionne effectivement 'Monsieur [KN] [CF] et son avocat ont eu la parole en dernier', Maître [CF] oppose une attestation de son associé [UP] [E] en date du 17 février 2009, régulière en la forme ; que certifiant avoir assisté à l'audience du conseil de discipline le 2 juillet 2009, l'attestant écrit : 'Par ailleurs, je confirme que [KN] [CF] n'a pas pu s'exprimer comme il l'avait pourtant demandé à la fin des débats, le président ne l'ayant pas accepté. [KN] [CF] n'a donc pas eu la parole en dernier, contrairement à ce qu'affirme pourtant la décision du 2 juillet 2009."

Attendu que les mentions de la décision du conseil de discipline signée par le président et le secrétaire de cette instance ordinale font foi jusqu'à inscription de faux ; que l'attestation de l'associé de Maître [CF] est de moindre force probante, étant au demeurant observé que la décision rendue a consisté à faire droit à l'exception soulevée in limine litis par Maître [CF] en constatant que le conseil de discipline n'était pas valablement saisi et en conséquence, à dire n'y avoir lieu de statuer ;

Attendu que dès lors que le débat au fond n'avait pas été abordé lors de l'audience du 2 juillet 2009, à l'issue de laquelle il a été rendu une décision ne faisant pas grief à Maître [CF], le fait que certains des membres du conseil de discipline réuni le 18 mars 2010 avaient déjà siégé à ladite audience du 2 juillet 2009 ne constitue pas un motif valable de suspicion légitime ;

Et attendu, d'autre part, que l'appartenance de certains membres du conseil de discipline au barreau de Pau ne saurait davantage constituer en elle-même un tel motif de suspicion légitime tenant à la 'proximité', alléguée en termes généraux, de ces avocats avec le bâtonnier de leur ordre, en l'occurrence autorité poursuivante ;

Que d'ailleurs, la présence, parmi les membres du conseil de discipline, de représentants du conseil de l'ordre dont le bâtonnier exerce précisément les poursuites n'est que le résultat nécessaire des règles de composition édictées à l'article 22-1 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée, lesquelles procèdent plus généralement du principe de comparution de l'avocat poursuivi devant ses pairs ;

Attendu, enfin, que les différents critères de récusation énumérés à l'article 341 du code de procédure civile ne sont pas invoqués par Maître [CF] de manière précise et circonstanciée, ce qui ne met pas la cour en mesure d'en constater la pertinence au regard de la situation de chacun des membres du conseil de discipline dont la composition est, de fait, contestée de manière collective plutôt qu'individuelle ;

Attendu que la demande, qui n'apparaît fondée en aucun de ses éléments, sera donc rejetée ;

* * *

Attendu que succombant ainsi sur l'ensemble de ses demandes, Maître [CF] sera condamné aux dépens ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Après en avoir délibéré, statuant publiquement après débats en chambre du conseil, en matière disciplinaire et en dernier ressort ;

Rejette les demandes de Maître [CF] ;

Condamne Maître [CF] aux dépens.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,

Mireille PEYRONPhilippe PUJO SAUSSET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 10/01392
Date de la décision : 03/05/2010
Sens de l'arrêt : Irrecevabilité

Références :

Cour d'appel de Pau 01, arrêt n°10/01392 : Déclare la demande ou le recours irrecevable


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-05-03;10.01392 ?
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