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12/04/2010 | FRANCE | N°08/01942

France | France, Cour d'appel de Pau, 1ère chambre, 12 avril 2010, 08/01942


PB/NL



Numéro 1639/10





COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre







ARRET DU 12/04/10







Dossier : 08/01942





Nature affaire :



Demandes relatives à une sûreté mobilière















Affaire :



[X] [N] épouse [H],

[P] [H]



C/



S.A.S. Etablissements SUBERCHICOT
























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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R E T



prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 12 avril 2010, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.







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PB/NL

Numéro 1639/10

COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRET DU 12/04/10

Dossier : 08/01942

Nature affaire :

Demandes relatives à une sûreté mobilière

Affaire :

[X] [N] épouse [H],

[P] [H]

C/

S.A.S. Etablissements SUBERCHICOT

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 12 avril 2010, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 05 Janvier 2010, devant :

Monsieur NEGRE, Président

Monsieur AUGEY, Conseiller

Madame BELIN, Conseiller, Magistrat chargé du rapport conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

assistés de Madame PICQ, faisant fonction de Greffier, présente à l'appel des causes.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTS :

Madame [X] [N] épouse [H]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Monsieur [P] [H]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentés par Me VERGEZ, avoué à la Cour

assistés de Me NOURY, avocat au barreau de MONT DE MARSAN

INTIMEE :

S.A.S. ETABLISSEMENTS SUBERCHICOT prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 1]

représentée par la SCP LONGIN, LONGIN-DUPEYRON, MARIOL, avoués à la Cour

assistée de Me GUILHEMSANG, avocat au barreau de DAX

sur appel de la décision

en date du 08 AVRIL 2008

rendue par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE DAX

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

[P] [H] et son épouse [X] [N] sont exploitants agricoles producteurs de maïs notamment.

Entre 2004 et 2006, dans le cadre de leurs relations commerciales avec la SAS SUBERCHICOT, ils étaient titulaires auprès de cet établissement d'une part d'un compte client où étaient comptabilisés les sommes dont ils étaient redevables et d'autre part un compte 'apporteur' correspondant aux apports de céréales après récoltes, stockées dans des silos de la SAS SUBERCHICOT jusqu'à vente des céréales, soit en 2006 : 764,871 tonnes au nom de Madame [H] et 2173,591 tonnes au nom de Monsieur [H]. Des warrants agricoles étaient signés le 10 mars 2006 par les époux [H] en garantie de créances de prêt de la SAS SUBERCHICOT à échéance au 30 novembre 2006 : l'un de 200.000 euros signé par Monsieur [H], l'autre de 60.000 euros signé par Madame [H]. Par ailleurs la SAS SUBERCHICOT bénéficiait d'une cession de créance des subventions dues par l'ONIC aux époux [H] pour les sommes de 180.000 et 60.000 euros selon acte sous seing privé du 17 mars 2006.

Monsieur [H] a été placé en redressement judiciaire par le tribunal de grande instance de Mont de Marsan le 15 décembre 2005.

Début 2007, Monsieur et Madame [H] décidaient de mettre un terme à leurs approvisionnements auprès la SAS SUBERCHICOT. Un litige survenait quant à l'apurement des comptes entre les parties, tenant au prix retenu par la SAS SUBERCHICOT pour valeur des céréales soit 146 euros la tonne valeur avril 2007 (prix net producteur : 134,83 euros).

Par assignations des 23 janvier 2008, jointes devant le tribunal de commerce de Dax, la SAS SUBERCHICOT était assignée par Madame [H] en paiement des sommes de 36.141,13 euros avec intérêts au taux légal à compter du 15 avril 2007, outre 3.000 euros à titre de dommages et intérêts, 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et par Monsieur [H] en paiement de la somme principale de 100.672,13 euros avec intérêts au taux légal à compter du 15 avril 2007, 9.000 euros à titre de dommages et intérêts et 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

DECISION CONTESTEE

Par jugement du 8 avril 2008, le tribunal de commerce de Dax a condamné sous le bénéfice de l'exécution provisoire la SAS SUBERCHICOT à payer à Monsieur [H] la somme de 30.509,24 euros avec intérêts au taux légal à compter du 15 avril 2007 jusqu'au 29 janvier 2008 et 250 euros à titre de dommages et intérêts, à Madame [X] [H] 8.887,94 euros avec intérêts au taux légal à compter du 15 avril 2007 et 250 euros titre de dommages et intérêts, et à chacun d'entre eux 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le tribunal retient qu'il n'y a pas d'autre écrit que les warrants, qu'à compter de leur échéance, la SAS SUBERCHICOT était autorisée à vendre la chose à sa discrétion, que l'apurement des comptes a été effectué conformément aux accords antérieurs et selon le prix du tonnage à la date de résiliation des relations commerciales, qu'un règlement par chèque est intervenu, pour les montants retenus dans le dispositif.

Les époux [H] [N] ont interjeté appel de cette décision le 28 mai 2008.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions du 15 septembre 2009, les époux [H] demandent la réévaluation de leur créance et la condamnation de la SAS SUBERCHICOT au paiement des sommes suivantes :

- à Madame [H] 36.141,13 euros avec intérêts au taux légal à compter du 15 avril 2007 sous déduction de la somme de 8.887,94 euros réglée conformément aux règles d'imputation légale en priorité sur les frais et intérêts échus, outre 3.000 euros à titre de dommages et intérêts 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- à Monsieur [H] la somme principale de 100.672,13 euros avec intérêts au taux légal à compter du 15 avril 2007 sous déduction de la somme de 30.509,94 euros dans les mêmes conditions d'imputation, 9.000 euros à titre de dommages et intérêts et 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Ils rappelaient avoir par courrier du 18 décembre 2006 indiqué à la SA SUBERCHICOT escompter un revenu minimum de 130 euros la tonne complété du prix au jour de l'ordre écrit de vente, lequel n'est intervenu que le 21 juin 2008 alors que le prix était de 178 euros la tonne, prix dont ils réclament application. Ils estiment que la SA SUBERCHICOT n'a pas respecté les conditions du dépôt-vente qu'elle avait admis par courrier du 20 décembre 2006, opérant de mauvaise foi et régularisant très tardivement les sommes dont elle se reconnaissait pourtant débitrice auprès des époux [H]. Ils estiment également que les warrants ne donnaient pas la faculté au créancier de vendre discrétionnairement lesdites récoltes sans l'accord de l'emprunteur et hors le cadre des dispositions procédurales édictées par le code rural.

En réponse, la SAS ETABLISSEMENTS SUBERCHICOT par conclusions du 17 novembre 2009 s'oppose aux demandes et réclame une somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que le décompte a été établi conformément aux dispositions appliquées entre les parties depuis 2004, sous forme de warrants agricoles et de dépôt de récoltes, en accord avec Maître [F], mandataire judiciaire, que n'est pas rapportée la preuve de modification de dispositions contractuelles, que les comptes ont été arrêtés au jour de la résiliation du contrat soit le 30 mars 2007. Elle conteste toute faute dans l'exécution du contrat et tout préjudice, la volonté spéculative des époux [H] ayant été suivie et honorée. Elle estime que les textes sur les warrants agricoles quant à l'application de la compensation, ont été respectés.

L'instruction a été close le 23 décembre 2009.

DISCUSSION

Ce litige porte sur le prix des céréales payées par la SAS SUBERCHICOT aux époux [H]. Le principe de la compensation de ce prix avec les sommes dues par les époux [H] à la SAS SUBERCHICOT au titre de marchandises ou services dus ou d'avances sur vente ou de prestations de stockage et courtage des marchandises pour des montants qui n'ont fait l'objet d'aucune contestation ne posait pas de difficulté.

Par application de l'article 1134 du code civil, pour déterminer si le prix des récoltes réglées aux époux [H] correspond à leurs droits, il importe de déterminer dans quel cadre l'application de la valeur de vente des céréales est intervenue : soit dans le cadre d'un contrat de dépôt vente, soit en application d'un warrant agricole. Et dans les deux cas il doit être vérifié si la date de la vente, et donc de la valeur des marchandises était à discrétion du négociant, résultait de la résiliation du contrat ou nécessitait l'accord des exploitants. En l'absence de contrat écrit fixant ces conditions de vente du maïs, il doit être recherché qu'elle était la commune intention des parties selon la réalité de leurs pratiques antérieures et tous autres éléments.

Il ressort des explications des parties et des pièces produites qu'il s'agit en réalité d'une vente fictive, que le prix avancé par les parties est celui du cours du marché. Il n'est en effet à aucun moment demandé de justifier de la réalité d'une vente, et s'agissant de céréales entreposées dans des silos avec d'autres marchandises du même type en fonction de leur qualité, le prix des récoltes déposées est déterminé à partir du prix du marché à un instant 'T'de marchandises du même type.

Ce prix varie en l'occurrence selon les périodes de décembre 2006 à juin 2007 de 130 à 178 euros la tonne.

Il ressort des pièces produites que dans le cadre de leurs relations, les époux [H] signaient en garantie de leur dette chaque année des warrants agricoles affectés aux comptes courants et portant sur des récoltes déterminées en leur origine et en leur quantité. De tels warrants ont été ainsi signés en 2004, 2005 et 2006 pour garantir les dettes souscrites ces années là. Ce warrant contient en outre une promesse de vente des produits au négociant. De telles garanties étaient renouvelées chaque année pour chaque récolte. Ces warrants ne confèrent pas au créancier un droit de propriété mais un simple droit de gage. Si la vente était intervenue en l'espèce par application des warrants, elle aurait été soumise aux dispositions des articles L 342-1 et suivants du code rural prévoyant notamment une mise en demeure, une vente publique par officier public ou ministériel. Il n'est justifié d'aucune demande de cet ordre de la part de la SAS SUBERCHICOT, les courriers adressés par celle ci aux exploitants agricoles en décembre 2006 puis début 2007 portaient sur le décompte des sommes, l'éventualité d'un report de la date de valeur du maïs à une date ultérieure selon les variations des cours escomptés, en attirant du reste l'attention des époux [H] sur le caractère aléatoire de cette spéculation, des questions relatives aux perspectives de maintien des relations commerciales avec les époux [H] pour l'année 2007 avec les mêmes garanties qu'antérieurement (warrants et cessions de créance).

Il ne peut donc être retenu que le prix de vente des céréales ait été fixé en application des warrants agricoles.

En revanche, il est établi que les marchandises étaient stockées dans les établissements SAS SUBERCHICOT qui percevait une rémunération pour cette opération, qu'elle bénéficiait d'une promesse de vente sur ces marchandises mentionnée dans le warrant et qu'elle devait procéder à la vente, percevant une commission de courtage pour ces négociations. Il y avait donc bien contrat de dépôt vente. La SAS SUBERCHICOT ne produit aucune pièce de nature à établir la réalité de ce qu'elle aurait en 2004 et 2005, suivant accord avec les appelants, vendu les récoltes dont elle assurait le dépôt aux dates de son choix, ou retenu la date de valeur à une date précise. En l'espèce il ne pourra donc qu'être fait référence aux courriers échangés entre les parties : le courrier du 18 décembre 2006 de Monsieur et Madame [H] préconisant une vente des céréales à une date ultérieure devant être fixée courant janvier 2007, la réponse du 20 décembre 2006 comportant mise en garde sur ce choix, et indication précise que 'la base de calcul retenue sera le prix du marché portuaire traité le jour de votre décision. Nous attendons votre décision'.

Aucun courrier relatif à la vente ne justifie d'un ordre de vente avant le courrier du 21 juin 2007 des époux [H]. Il résulte des courriers échangés entre les parties en début d'année 2007 qu'avant de décider une poursuite de relations, chacune d'entre elles demandait des assurances ou des renseignements divers quant aux conditions générales de vente, mais il n'est jamais question de la vente des récoltes des maïs 2006. Par courrier du 2 avril 2007 faisant suite à une rencontre intervenue le 27 mars précédant Monsieur [H] faisait savoir au négociant qu'il ne renouvellerait pas en 2007 les conventions antérieures. Il ne résulte aucunement de ce courrier résiliation de l'ensemble des accords antérieurs, notamment quant au dépôt vente. Il résulte donc de ces éléments que non seulement la SAS SUBERCHICOT ne justifie avoir pu de son propre chef décider de la date de valeur des marchandises stockées, mais encore qu'elle ne pouvait unilatéralement sans faute alléguée ni prouvée des époux [H] dans l'exécution de leurs obligations résultant des conventions convenues en 2006, résilier le contrat de dépôt vente au 2 avril 2007 pour estimer à cette date la valeur de la créance des exploitants.

En conséquence le décompte établi par les appelants faisant application des conventions établies quant aux frais divers à déduire de la date de valeur du maïs sur le marché au jour de l'ordre de vente, il doit être fait droit aux demandes en deniers ou quittances au constat que deux chèques ont été adressés aux époux [H] en janvier 2008. Les intérêts au taux légal sont dus conformément à l'article 1153 du code civil à compter de la mise en demeure du 11 octobre 2007 adressée par leur conseil par lettre recommandée avec accusé de réception.

Il n'est pas justifié d'un préjudice distinct de celui du retard occasionné dans le paiement, la demande en dommages et intérêts sera rejetée. En revanche une somme de 1.500 euros doit être allouée aux appelants sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Après en avoir délibéré, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;

Infirme le jugement du tribunal de commerce de Dax du 8 avril 2008 ;

Condamne la SAS ETABLISSEMENTS SUBERCHICOT à payer :

- à Monsieur [P] [H] la somme de 100.672,13 euros (cent mille six cent soixante douze euros et treize centimes),

- à Madame [X] [N] épouse [H] la somme de 36.141,13 euros (trente six mille cent quarante et un euros et treize centimes).

Dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 11 octobre 2007 et que les paiements intervenus au profit de Monsieur [H] à hauteur de 30.509,14 euros (trente mille cinq cent neuf euros et quatorze centimes), au profit de Madame [N] à hauteur de 8.887,94 euros (huit mille huit cent quatre vingt sept euros et quatre vingt quatorze centimes) s'imputeront en priorité sur les frais et les intérêts échus au jour du règlement.

Rejette la demande en dommages et intérêts.

Condamne la SAS ETABLISSEMENTS SUBERCHICOT à payer aux époux [N] [H] la somme de 1.500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la SAS ETABLISSEMENTS SUBERCHICOT aux entiers dépens qui pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile par Maître VERGEZ, Avoué à la cour.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roger NEGRE, Président, et par Madame Pascale PICQ, faisant fonction de Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,

Pascale PICQRoger NEGRE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 08/01942
Date de la décision : 12/04/2010

Références :

Cour d'appel de Pau 01, arrêt n°08/01942 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-04-12;08.01942 ?
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