MD/NL
Numéro 1457/10
COUR D'APPEL DE PAU
1ère Chambre
ARRET DU 30/03/10
Dossier : 08/04859
Nature affaire :
Demande en nullité d'une assemblée générale ou d'une délibération de cette assemblée
Affaire :
[J] [I],
S.C.I. LECA
C/
SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE LA RESIDENCE
[Adresse 3]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R E T
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour le 30 mars 2010, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 01 Février 2010, devant :
Monsieur NEGRE, Président
Monsieur CASTAGNE, Conseiller
Monsieur DEFIX, Conseiller, Magistrat chargé du rapport conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
assistés de Madame PEYRON, Greffier, présent à l'appel des causes.
Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANTS :
Monsieur [J] [I]
[Adresse 4]
[Localité 2]
[Localité 1]
S.C.I. LECA
[Localité 2]
[Localité 1]
représentés par la SCP LONGIN, LONGIN-DUPEYRON, MARIOL, avoués à la Cour
assistés de Me FILLASTRE, avocat au barreau de TARBES
INTIME :
SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE LA [Adresse 3]
[Localité 2]
[Localité 1]
représenté par son syndic Monsieur [W] [D] Agence AVA-PIAU-IMMO [Localité 1]
représenté par la SCP DE GINESTET / DUALE / LIGNEY, avoués à la Cour
assisté de la SCP AMEILHAUD ARIES BERRANGER BURTIN-PASCAL SENMARTIN, avocats au barreau de TARBES
sur appel de la décision
en date du 20 NOVEMBRE 2008
rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE TARBES
FAITS-PROC'DURE-PR'TENTIONS
Par acte d'huissier du 14 novembre 2006, Monsieur [J] [I] et la SCI LECA ont fait assigner le syndicat des copropriétaires de la [Adresse 3] sise à [Localité 2] aux fins d'annulation du point n° 10 de la délibération de l'assemblée générale extraordinaire des copropriétaires de cette résidence tenue le 09 septembre 2006.
Cette résolution a décidé la suppression de la clause para-hôtellerie du règlement de copropriété et mandaté le Syndic pour faire modifier en conséquence le règlement de copropriété. La destination para hôtelière de l'immeuble rappelée dans le règlement de copropriété résultait d'une clause du bail à construction du 12 septembre 1979 ainsi libellée :
'L'immeuble à édifier sera exclusivement un ensemble immobilier à destination para hôtellière et meublés, et à usage collectif s'intégrant dans le complexe hôtelier de la station de [Localité 2]. Cette destination ne pourra être en aucune manière modifiée ou changée sans l'accord préalable et par écrit du Conseil Municipal de la Commune de [Localité 1] "
Suivant jugement du 20 novembre 2008, le tribunal de grande instance de TARBES a :
- déclaré irrecevable la demande tendant à l'annulation de l'ensemble des délibérations de cette assemblée générale pour avoir été présentée en cours d'instance hors du délai de prescription prévu à l'article 42 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965,
- rejeté la fin de non recevoir soulevée par le Syndicat et tirée de la prescription décennale au titre de la demande initiale,
- débouté les demandeurs de leur action en annulation,
- condamné ces derniers à payer au Syndicat la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Monsieur [I] et la SCI LECA ont interjeté appel par déclaration du 11 décembre 2008.
''''''
Monsieur [J] [I] et la SCI LECA ont, dans leurs dernières conclusions déposées le 06 avril 2009, demandé à la cour de réformer le jugement en soutenant :
- que pour annuler la résolution critiquée, le tribunal avait pour obligation de vérifier qu'elles ont été prises par une assemblée de copropriétaires ayant préalablement constitué son bureau, formalité substantielle prévue à l'article 15 du décret du 17 mars 1967 dont la méconnaissance entraîne la nullité sans exigence de la démonstration d'un grief,
- que la destination première de l'immeuble était la para-hôtellerie contractuellement définie et qui ne pouvait être modifiée qu'à l'unanimité des copropriétaires et non des présents ou représentés, les clauses de répartition des charges devant être nécessairement modifiées en conséquence.
Les appelants ont demandé la condamnation du Syndicat à leur payer la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le Syndicat des copropriétaires de la [Adresse 3] a, dans ses dernières conclusions du 30 juin 2009, sollicité la confirmation du jugement entrepris en maintenant l'exception d'irrecevabilité de la demande d'annulation de toutes les délibérations de l'assemblée générale pour ne l'avoir pas visée dans l'assignation introductive d'instance et constituer ainsi une demande nouvelle postérieure à l'expiration du délai de 2 mois.
Il a affirmé que la clause de destination para hôtellière avait disparu en 1985 du double fait reconnu par les appelants de l'absence de ses conditions de viabilité (classement subordonné à la présence d'équipements et de services communs et d'un gestionnaire unique de la résidence, contrariété avec une clause du règlement prévoyant la liberté de location par les copropriétaires, accord municipal pour le changement de desitnation) et de l'absence de reversement par le gestionnaire des lots privatifs des loyers aux copropropriétaires titulaires.
Le syndicat a alors opposé la prescription décennale à l'action qui tend à demander le rétablissement effectif de cette clause devenue caduque.
Il a sollicité la condamnation in solidum des appelants à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel avec bénéfice de distraction.
SUR CE, LA COUR :
Attendu qu'aux termes de l'article 42 alinéa 2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 les actions qui ont pour objet de contester les décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants dans un délai de deux mois à compter de la notification desdites décisions, qui leur est faite à la diligence du syndic dans un délai de deux mois à compter de la tenue de l'assemblée générale ;
qu'il est constant en l'espèce que Monsieur [I] et la SCI LECA avaient dans l'assignation introductive d'instance du 14 novembre 2006 seulement sollicité l'annulation de la dixième résolution de l'assemblée générale du 09 septembre 2006 sur le seul fondement du défaut d'unanimité pour autoriser le changement de destination de l'immeuble et que les demandeurs n'ont présenté le moyen tiré de la nullité de « la délibération dans son ensemble » pour irrégularité dans la désignation des scrutateurs de séance que dans leurs conclusions récapitulatives n° III déposées le 07 février 2008 ; que retenir ce moyen pour obtenir la nullité de la résolution n° 10 alors qu'il a pour objet de faire constater la nullité de l'assemblée générale équivaudrait à faire échec au délai prévu à l'article 42 précité et durant lequel il n'a été présenté aucune demande d'annulation de l'assemblée générale ;
que la demande d'annulation de cette délibération sur ce moyen est irrecevable et la décision de première instance l'ayant constaté doit être confirmée ;
Attendu que l'action engagée par les appelants avait bien pour objet l'annulation d'une résolution visant à l'abandon de la destination déclarée de l'immeuble ;
Attendu qu'il convient de rappeler que la résolution n° 10 répondant à différentes mises en demeures notifiées par la SCI LECA visant à faire respecter la destination para hôtelière de l'immeuble, a constaté l'inapplication de la clause de para hôtellerie au regard du classement administratif ainsi que sa caducité au vu de l'article 9 du règlement de copropriété et a décidé de sa suppression mandatant le syndic pour « faire suivre jusqu'en Mairie la validité de cette présente résolution et de faire modifier le règlement en conséquence » ;
qu'en l'espèce, l'article 9 du règlement de copropriété établi le 17 décembre 1979 rappelle la liberté de jouissance de chaque copropriétaire de ses lots par la location sous condition de respecter « les conditions du règlement ainsi que la destination de l'immeuble telle que définie à l'article 6 » prévoyant la destination de l'immeuble à l'usage d'habitation avec possibilité d'offrir les logements à la location commerciale en renvoyant au chapitre II comprenant l'article 7, seule disposition à faire référence aux règles de la para hôtellerie ;
qu'il est constant que cette restriction à la faculté de louer avait été édictée en contemplation d'un bail à construction signé entre la SCI qui avait construit l'immeuble et la commune d'[Localité 1] sur un terrain situé en zone d'aménagement concerté créée pour l'aménagement de la station de [Localité 2] ; qu'il ne peut être sérieusement contesté que la para hôtellerie a cessé d'être pratiquée dans cette résidence depuis 1985 étant relevé qu'il n'est justifié d'aucune organisation conforme aux prescriptions règlementaires pour la gestion para hôtelière pour tout ou partie des lots de la résidence et qu'il n'est fourni par les appelants aucun contrat postérieur à cette date pour justifier d'une telle gestion ; que le tribunal a tiré de cette constatation la nécessité de mettre en conformité le règlement avec la réalité et a validé la résolution qui a officialisé ce changement de destination en estimant que seule la commune d'[Localité 1] aurait pu se prévaloir de la violation de la destination para hôtelière ;
qu'il est certain qu'un changement de destination de l'immeuble relève d'une décision à l'unanimité des copropriétaires prévue à l'article 26 de la loin° 65-557 du 10 juillet 1965 à savoir de tous les membres de la copropriété et non seulement des copropriétaires présents à l'assemblée générale ;
que toutefois, il s'agit en l'espèce par la décision querellée non de modifier la destination de l'immeuble mais de constater une modification de cette destination intervenue depuis plus de dix ans même pour les propres lots des appelants de telle sorte que ces derniers qui sont bien recevables à contester la résolution n° 10 pour avoir engagé leur action dans les deux mois de la notification du procès-verbal de l'assemblée générale qui l'a votée, étaient en revanche sans droit pour exiger de la copropriété le respect de la destination initiale de l'immeuble en raison de la prescription décennale prévue à l'article 42 alinéa 1er de la loi du 10 juillet 1965 et donc pour imposer un vote contraire à celui visant à adapter le règlement de copropriété à la nouvelle réalité créatrice de droits ;
qu'en effet, une telle opposition aurait été dans ces circonstances constitutives d'un abus de minorité rendant Monsieur [I] et la SCI LECA mal fondés à contester cette résolution ;
qu'il convient en conséquence de confirmer, par motifs propres ou adoptés, le jugement du tribunal de grande instance de Tarbes du 20 novembre 2008 dans toutes ses dispositions en ce qu'il a déclaré irrecevable le moyen tiré de la nullité de l'assemblée générale du 09 septembre 2006, recevable l'action en annulation de la résolution n° 10 et l'a débouté au fond de cette demande ;
Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge du syndicat des copropriétaires la charge des frais non compris dans les dépens qu'il a dû exposer à l'occasion de cette procédure ; que Monsieur [I] et la SCI LECA seront condamnés sans solidarité à lui payer la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
qu'en application du principe édicté par l'article 696 du code de procédure civile, les dépens restent à la charge de la partie perdante ;
PAR CES MOTIFS :
La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme par moyens propres ou adoptés le jugement du tribunal de grande instance de Tarbes du 20 novembre 2008 dans toutes ses dispositions en ce qu'il a déclaré irrecevable le moyen tiré de la nullité de l'assemblée générale du 09 septembre 2006, recevable l'action en annulation de la résolution n° 10 et a débouté au fond Monsieur [I] et la SCI LECA de cette demande.
Condamne Monsieur [J] [I] et la SCI LECA à payer au Syndicat des coproprétaires de la [Adresse 3] la somme de mille cinq cents euros (1.500 €) au titre de dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne Monsieur [J] [I] et la SCI LECA aux entiers dépens.
Accorde à la SCP DE GINESTET-DUALE-LIGNEY, avoués, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Mireille PEYRON Roger NÈGRE