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08/03/2010 | FRANCE | N°08/01118

France | France, Cour d'appel de Pau, Chambre sociale, 08 mars 2010, 08/01118


MP/LC



Numéro 1029/10





COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale







ARRÊT DU 08/03/2010







Dossier : 08/01118





Nature affaire :



Demande en paiement de prestations















Affaire :



[Z] [B]



C/



CAISSE RÉGIONALE D'ASSURANCE MALADIE AQUITAINE - C.R.A.M.A.


























r>









RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R E T



Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 08 mars 2010, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.







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MP/LC

Numéro 1029/10

COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 08/03/2010

Dossier : 08/01118

Nature affaire :

Demande en paiement de prestations

Affaire :

[Z] [B]

C/

CAISSE RÉGIONALE D'ASSURANCE MALADIE AQUITAINE - C.R.A.M.A.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 08 mars 2010, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 11 Janvier 2010, devant :

Madame de PEYRECAVE, Présidente

Madame ROBERT, Conseillère

Madame PAGE, Conseillère

assistées de Madame HAUGUEL, Greffière, présente à l'appel des causes.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANT :

Monsieur [Z] [B]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 3]

Comparant

INTIMÉE :

CAISSE RÉGIONALE D'ASSURANCE MALADIE AQUITAINE - C.R.A.M.A. représentée par son Directeur

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Madame [P], munie d'un pouvoir de représentation.

sur appel de la décision

en date du 18 JANVIER 2008

rendue par le TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SÉCURITÉ SOCIALE DE BAYONNE

FAITS ET PROCÉDURE :

Madame [F] [B] est décédée le [Date décès 1] 2001, alors que ses droits à la retraite n'étaient pas liquidés.

Le 28 novembre 2003 Monsieur [Z] [B], a rempli un imprimé pour demander une retraite de reversion du chef de son épouse.

Par lettre du 20 avril 2004 la Caisse Régionale d'Assurance Maladie Aquitaine(ci-après dénommé CRAMA) a notifié le rejet de sa demande à M. [B], sur le fondement des articles L. 353-1et R. 3 53-1 du Code la sécurité sociale.

Par lettre du 20 octobre 2004 [Z] [B] a écrit à la CRAMA en ces termes «je renouvelle ma demande de pension de reversion à partir du 20 juillet 2004...».

La CRAMA a de nouveau rejeté cette demande.

[Z] [B] a saisi la Commission de Recours Amiable puis le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BAYONNE.

La Commission de Recours Amiable, par décision du 22 mai 2007 a constaté que la décision de rejet du 20 avril 2004 non contestée dans les délais impartis était devenue définitive et que les services de la Caisse avaient fait une exacte application des textes en vigueur en matière de fixation de la date d'entrée en jouissance de la pension de reversion au 1er novembre 2004.

Elle a constaté que l'examen des droits avait bien été effectué dans le respect de la législation communautaire et en conséquence a rejeté le recours de [Z] [B]. Elle a pris acte qu'un nouvel examen des droits devait être effectué par les services techniques de la Caisse.

Le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BAYONNE par jugement du 18 janvier 2008 a :

- confirmé la décision du 22 mai 2007 en ce qu'elle a fixé au 1er novembre 2004 la date d'entrée en jouissance potentielle de la pension de reversion,

- dit qu'en application de la réglementation européenne et après examen de la législation espagnole qui ne prévoit pas de règles anti-cumul, la législation française est applicable,

- dit qu'en raison du dépassement du plafond de ressources prévues par la loi française M. [B] ne pouvait prétendre à une pension de reversion au 1er novembre 2004.

La décision précitée a été notifiée le 21 février 2008 à Monsieur [B] qui en a interjeté appel régulièrement le 21 mars 2008.

Oralement et par des écrits reçus les 21 mars 2008 et 22 avril 2009 au greffe de la Cour d'Appel et pour le troisième déposé le jour de l'audience du 11 janvier 2010, auxquels il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, M. [B] demande à la Cour de :

- annuler le jugement déféré,

- condamner la CRAMA , sur le fondement de l'article 1382 du Code civil pour les fautes qu'elle a commises à différents stades de la procédure concernant la demande de pension de réversion,

-dire que la CRAMA, sera tenue de lui verser :

- 83 746,37 € à titre de rappel d'arrérages de pension de reversion pour la période du 1er juillet 2001 au 1 janvier 2O1O avec intérêts capitalisés.

- 50'000 € en réparation de son préjudice moral, avec intérêts capitalisés à compter de la saisine du tribunal des affaires de sécurité sociale.

- condamner la CRAMA au titre des rappels des sommes dues, arrêtées au 21 avril 2009 à lui verser 135'886,32 euros ainsi que la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

Subsidiairement :

M. [B] sollicite un nouveau calcul de ses droits de reversion par l'intimée à compter du 1er juillet 2003 pour la période de2003 à 2009, sauf à admettre les sommes déterminées par ses soins.

Au soutien de ses demandes M. [B] fait valoir :

- que le litige porte sur l'application de la règle de calcul applicable au cumul des droits propres et de la pension de reversion,

- que la CRAMA a violé l'article L 161-17 du Code de la sécurité sociale et en conséquence son droit à l'information,

-qu'il dispose d'un droit d'option,

- que la CRAMA, s'est attaqué «à la doctrine des actes propres», en effet, en raison de ses revirements elle s'est mise en contradiction avec ses propres actes, car après lui avoir notifié le 22 juillet 2006 l'attribution d'une retraite de reversion réduite en fonction de ses ressources elle est revenue en 2007 sur sa décision d'attribution, toujours en fonction de ses ressources, alors que la question des ressources aurait dû être soulevée au moment de la demande de pension de réversion, or rien ne lui a été demandé à ce sujet,

- que contrairement à ce que soutient l'intimé L'ESPAGNE connaît des règles anti-cumul,

- que L'ESPAGNE n'a pas pris en compte ses ressources pour réduire, suspendre ou supprimer ses prestations étant donné que celles-ci ne dépassaient pas les plafonds signalés dans les règles anti-cumul prévues par la législation espagnole,

- qu'il est privé de la pension de reversion qui lui aurait été attribuée comme conjoint survivant sur la base des cotisations de son épouse si elle avait accompli toute sa carrière sous la législation espagnole,

- que le but des articles 48 à 51 du traité ne serait pas atteint si par suite de l'exercice de leurs droits à la libre circulation les travailleurs migrants devaient perdre des avantages de sécurité sociale que leur assurait la législation d'un État membre,

- qu'en refusant d'appliquer les règles de cumul des droits propres et de reversion conformément au droit communautaire, l'intimée a engagé sa responsabilité sans pouvoir se retrancher derrière l'argument de ses ressources.

L'appelant soutient aussi :

- que l'intimée n'a pas respecté les articles 36,41'-2° du règlement CEE 574 / 72,

- qu' il y a eu un accord de coopération administrative franco espagnole ,signé le 11 juillet 2005 entre la CRAM Aquitaine et l'INSS espagnol, contrairement à ce que dit l'intimée et il existe aussi une circulaire numéro 2000-74 du 11 décembre 2000de la CNAV qui donne des précisions sur les modalités d'application des règlements communautaires,

- que la circulaire précitée demande aux Caisses Régionales de veiller à ce que les dispositions de l'article 48 du règlement 574-72 soient rigoureusement appliquées,

- qu'aux termes de l'article 46 ter §1 du règlement numéro 1408-71 les clauses de réduction, de suspension ou de suppression prévue par la législation d'un État membre ne sont pas applicables à une prestation calculée conformément à l'article 46 §2,

- il en résulte que lorsque la pension de reversion est proratisée et que la prestation de l'autre État est de même nature et relève de l'exception énoncée ci-dessus, la clause de réduction prévue par la législation française ne peut pas être appliquée lors du calcul des prestations,

- que le paragraphe 2 de l'article 46 ter établit que lorsqu'il s'agit d'une pension nationale, la prestation de même nature de l'autre État peut être prise en considération à la double condition :

- que le montant de la prestation soit indépendant de la durée des périodes d'assurance et de résidence,

- que la prestation soit visée à l'annexe IV- D, or le règlement CEE numéro 1408-71 du 14 juin 1971 annexe IV d) mentionne : les pensions espagnoles de décès et de survivants octroyés dans le cadre des régimes généraux et spéciaux.

L'appelant sur la date d'effet de la pension de reversion fait valoir que :

- il s'est présenté en septembre 2001 pour la première fois au service de la Caisse de retraite de BAYONNE où il lui a été dit qu'il n'avait pas droit à une pension de reversion en raison de ses ressources,

- qu'au mois de novembre 2003 il a fait une demande écrite,

- qu'en application de l'article 36 du règlement 574-72 la date d'effet de la pension de reversion est en principe le 28 août 2003, date à laquelle il a obtenu une réponse de l'INSS espagnol,

- que les références de la CRAMA à une date ultérieure pour fixer la date de départ de la retraite de reversion n'a pas de sens,

- que l'appelant demande pourtant à la Cour de fixer la date d'effet de sa retraite de reversion au premier août 2001 premier jour du mois suivant le décès de son épouse, car c'est en raison d'un défaut d'information de la part de la Caisse que la demande écrite n'a pas été présentée plus tôt,

- qu'il y a lieu de calculer le montant de la retraite garantie par l'article 46. 2 du règlement, à partir des droits reconnus par les législations françaises et espagnoles,

- qu'en droit espagnol la pension de veuvage est égale aux 52 % de la somme résultant de l'assiette des cotisations pendant une période continue de 24 mois, les meilleures des 15 dernières années divisée par 28,

- qu'en droit français la retraite de reversion est égale à 54 % de la retraite qu' aurait pu percevoir l'assuré,

- qu'une fois vérifiée l'écart qui existe entre les niveaux des prestations des régimes généraux français et espagnol on s'aperçoit de l'importance du déni du droit d'option reconnu dans le droit communautaire et les conventions internationales,

- que l'intimé ignore ce droit d'option, en supprimant toute référence aux accords internationaux, instrument juridique toujours accepté par la jurisprudence de la Cour Européenne lorsqu'ils seraient plus favorables aux travailleurs que les législations nationales et les règlements communautaires,

- que l'intimé ne fait aucune mention du règlement CE numéro 647-2005, ni de la circulaire d'application 2005-111, alors que ce règlement considère que «sur la base de la jurisprudence relative aux rapports entre le règlement CEE numéro 1408-71 et les dispositions des conventions bilatérales de sécurité sociale il est nécessaire de réviser l'annexe III du dit règlement. En effet les inscriptions dans la partie A de l'annexe III ne se justifient que dans deux hypothèses : si elles sont plus favorables pour les travailleurs migrants ou si elles concernent des situations spécifiques exceptionnelles.

- que le règlement numéro 1408-71 a été modifié comme suit, l'article 7 § 2 point c, est remplacé par le texte suivant «certaines dispositions des conventions de sécurité sociale que les états membres ont conclu avant la date d'application du présent règlement pour autant qu'ils soient plus favorables aux bénéficiaires...',

- que le droit d'option dont il demande le bénéfice résulte de l'article 44§ 2 du règlement 1408-71 qui mentionne «le requérant désire qu'il soit sursis à la liquidation des prestations de vieillesse qui serait acquises au titre de la législation d'un ou plusieurs états membres».

L'appelant soutient «dans ma condition de requérant il me revient le choix de faire mon calcul de la pension de veuvage qui me correspondrait au cas ou j'aurais pu faire usage de mon droit d'option en faveur de l'application de la législation de la sécurité sociale espagnole».

La CRAMA par conclusions écrites , qu'elle a développé oralement à l'audience et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé des faits demande à la Cour de débouter M. [B] de ses demandes et de confirmer le jugement déféré.

Au soutien de ses demandes la CRAMA fait valoir :

- qu'en application des règles communautaires la date d'effet de la pension est déterminée par chaque pays selon les règles habituelles de sa propre législation,

- qu'en application de l'article R. 353-7 du Code de la sécurité sociale la date d'entrée en jouissance de la pension de reversion est fixée par le régime général français au premier jour du mois suivant le décès si la demande réglementaire est déposée dans un délai d'un an suivant le décès, dans les autres cas elle est fixée au premier jour du mois suivant la demande,

-.qu'à son décès Mme [B] n'était âgé que de 56 ans et elle n'ouvrait pas alors droit à une retraite personnelle au régime général français,

-qu' il appartenait donc à M. [B] de contacter la Caisse pour la mise à jour du compte de sa conjointe décédée,

- que depuis le 1er janvier 1986, date d'application des règlements communautaires à L'ESPAGNE, les droits à pension de réversion doivent être examinés en application de ces règlements et non plus dans le cadre de la convention générale de sécurité sociale signée le 31 octobre 1974 qui prévoyait le droit d'option évoqué par M. [B],

- que l'article quatre du règlement du 14 juin 1971 précise que ce dernier s'applique aux prestations de survivants,

- que l'article 7 relatif aux dispositions internationales auxquelles le règlement ne porte pas atteinte renvoie à l'annexe III, or c'est annexe ne mentionne aucun accord passé avec L'ESPAGNE,

- que pour obtenir en FRANCE une pension de reversion le demandeur doit remplir une condition de ressources,

- qu'en application de l'article L. 353-1 et R. 353-1du Code de la sécurité sociale la pension de reversion est attribuée lorsque le conjoint de l'assuré décédé ne dispose pas de ressources dépassant un montant fixé par décret aux trois mois civils précédant la date d'effet de la pension de réversion ou aux12 mois civils.

- que lors du dépôt de sa requête le 28 novembre 2003 M [B] a rempli un imprimé. sur lequel il a déclaré bénéficier de salaires d'un montant trimestriel de 4500 €, alors que le plafond fixé pour bénéficier d'une pension de reversion était de 3738,80 €,

- que le montant du plafond mensuel était également dépassé,

- que dans ces conditions le droit à pension de reversion au regard de la législation nationale n'est pas ouvert,

- qu'il convient dès lors en application de l'article 46 quater du règlement CEE 1408-71 du 14 juin 1971 de rechercher si l'autre État a pris en compte une prestation de nature différente (droit personnel) ou d'autres revenus, pour réduire, suspendre ou supprimer son droit à prestations de survivant,

- que dès lors que l'autre État n'a pas pris en compte une ressource identique ou un droit personnel pour réduire suspendre ou supprimer sa prestation, le droit à pension de reversion n'est pas ouvert au titre de la législation française,

-que la définition des prestations de même nature est donnée à l'article 46 bis alinéa1 du règlement précité ,dont relève le traitement de la pension de reversion,

- qu'elle a interrogé la Caisse de sécurité sociale espagnole pour avoir confirmation qu'elle n'appliquait pas les règles anti-cumul, puisque M. [B] contestait ce point,

- par courrier du 21 juillet 2009 la Caisse de sécurité sociale espagnole a confirmé qu'elle n'appliquait pas des règles anti-cumul,

- qu'en conséquence L'ESPAGNE n'ayant pas pris une ressource identique pour réduire, suspendre ,supprimer sa prestation, le droit à pension de reversion du régime général français n'a pas été ouvert M. [B],

- que la discussion sur les modalités de la pension de reversion ne présente dès lors d'intérêt.

Subsidiairement toutefois intimé a développé les modalités de calcul.

SUR CE :

Les règlements communautaires sont obligatoires dans tous leurs éléments et sont directement applicables en France (article 249 alinéa 2 du traité CE).

Le principe de primauté du droit communautaire oblige les autorités françaises à faire prévaloir les normes communautaires sur les normes françaises au besoin au moyen d'une interprétation conforme des textes internes. Il pèse sur les juges nationaux une obligation d'interprétation identique conforme, au besoin en laissant inappliquée la norme nationale contraire.

Sur le fondement de l'article 40 du traité de la Communauté Européenne deux règlements ont été adoptés par le Conseil de l'Europe, afin d'instituer un système permettant de coordonner les systèmes nationaux de sécurité sociale en faveur des migrants et des membres de leur famille :

- le règlement 1408/71 du 14 juin 1971 ,relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés ou aux membres de leur famille qui se déplacent l'intérieur de la communauté,

- le règlement 574/72 du 21 mars 1972 fixant les modalités d'application du règlement 1408 /71,

Le règlement 883/2004 du 29 avril 2004 destiné à remplacer le règlement 1408/71 n'est pas encore à ce jour applicable.

Dans le cadre d'un litige ,un particulier peut donc opposer aux organismes chargés de verser des prestations sociales, les dispositions des règlements de coordination qui devront prévaloir sur les dispositions de droit interne quelle que soit leur origine.

Sur le point de départ du droit éventuel à pension de reversion :

M. [B] reproche à la CRAMA de ne pas avoir satisfait au devoir d'information qui pesait sur elle en application de l'article L. 161-17 du Code de la sécurité sociale, lorsqu'il s'est présenté ,peu après le décès de son épouse à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de BAYONNE.

L'appelant ne rapporte pas la preuve de cette démarche effectuée peu après le décès de son épouse.

Il a déposé sa première demande écrite de retraite de reversion du chef de son épouse, le 28 novembre 2003.

La CRAMA a rejeté sa demande par lettre du 20 avril 2004, en se fondant sur les articles L. 353-1 et R. 353-1 du Code de la sécurité sociale, en retenant que les ressources personnelles de M. [B] dépassaient le montant prévu par décret, pour pouvoir prétendre à la pension de reversion sollicitée.

Par lettre du 1er octobre 2004 M. [B] précisait «dans votre courrier du 20 avril 2004 vous m'avez fait part de la notification de rejet de ma demande de pension de reversion. Sur ce même courrier vous m'avez indiqué la possibilité de déposer une nouvelle demande lorsque mes ressources ne dépasseraient plus la limite autorisée par la loi... Aussi je me permets à travers ce courrier de renouveler ma demande de pension de reversion à partir du 20 juillet 2004.»

La lettre du 20 avril 2004 n'était pas une lettre Recommandée avec accusé de réception. La date de réception n'est donc pas certaine. Mais dans son courrier du 1er octobre 2004 M. [B] précisait avoir reçu cette lettre qui mentionnait le délai pour exercer une voie de recours. À la date du 1er octobre 2004 M. [B] avait une connaissance certaine du rejet de sa demande et du délai de recours qui lui était ouvert.

Il n'est pas contesté que M. [B] n'a pas dans le délai de deux mois exercé de recours et qu'en application du droit interne, le rejet de la demande devenait définitif en application de l'article R. 142-1 du Code de la sécurité sociale.

M. [B] a formé une nouvelle demande de pension de reversion le 19 octobre 2004 et le 29 décembre 2004 la Caisse lui a notifié un nouveau rejet contre lequel il a exercé un recours devant la Commission de Recours Amiable . C'est cette procédure qui est toujours en cours actuellement.

L'article 36 du règlement CEE numéro 574-72 du 21 mars 1972 précise : «pour bénéficier des prestations en vertu des articles 40 à 51 du règlement... Le requérant est tenu d'adresser une demande à l'institution du lieu de résidence, selon les modalités prévues par la législation qu'applique cette institution.».

En application de l'article 36 précité, le requérant était tenu d'adresser une demande à l'institution du lieu de résidence, soit en FRANCE en l'espèce ,les numéros deux et trois du même article ne lui étant pas applicables.

En application de ce texte la demande à retenir est la première demande présentée en FRANCE. Aux termes de l'article 41 du même règlement «les demandes de prestations sont instruites par l'institution à laquelle elles ont été adressées ou transmises conformément aux dispositions de l'article 36 du règlement d'application. Cette institution est désignée par le terme « institution instruction».

L'article 48 du règlement CEE numéro 574-72 du 21 mars 1972 précise que les décisions définitives prises par chacune des institutions sont transmises à l'institution instruction. Chacune de ces décisions doit préciser les voies et les délais de recours prévus par la législation en cause. Au reçu de toutes ces décisions l'institution d'instruction les notifie au requérant dans la langue de celui-ci au moyen d'une note récapitulative à laquelle sont annexées lesdites décisions. Les délais de recours ne commencent à courir qu'à partir de la réception de la note récapitulative par le requérant ».

La date d'effet de la pension est déterminée par chaque pays selon les règles de sa propre législation.

Aucune forclusion ne pouvait être opposée à M. [B] en l'absence de la notification prévue par l'article 48 du règlement CEE n° 574-72.

L'article R. 353-7 du Code de la sécurité sociale précise que la date d'entrée en jouissance de la pension de réversion est nécessairement le premier jour d'un mois et ne peut pas être antérieure au dépôt de la demande sauf lorsque la demande est déposée dans le délai d'un an qui suit le décès.

Le point de départ de l'éventuel versement de la pension de reversion sollicitée par M. [B] devrait être fixé au 1er décembre 2003.

Sur le droit d'information :

Une loi du 21 août 2003 a réformé l'article L. 161-17 du Code de la sécurité sociale. Antérieurement à ce texte il était fait obligation aux caisses d'assurance vieillesse de procéder à l'information de leurs ressortissants sur la situation de leurs droits.

Mais les Caisses retenaient généralement, soutenues en cela par une partie de la jurisprudence ,que le bénéficiaire éventuel d'une pension de reversion n'avait pas la qualité de ressortissant et ne pouvait donc se voir appliquer les dispositions de l'article précité.

L'article L. 161-17 du Code de la sécurité sociale revu par la loi du 21 août 2003 étend le droit à l'information des assurés mais a étalé dans le temps la mise en application de l'envoi annuel du relevé des situations individuelles entre juillet 2007 et le 30 juin 2011.

M. [B] soutient qu'il a demandé une reconstitution de carrière de son épouse dès le décès de cette dernière, mais il en rapporte pas la preuve.

L'article L. 173-1 du Code de la sécurité sociale auquel se réfère M. [B] dans l'un de ses écrits, reprit oralement porte sur la transmission d'informations entre le régime général et les régimes spéciaux.

Sur le droit applicable :

L'appelant invoque des accords bilatéraux ou multinationaux.

En principe le règlement CEE1408-71 du 14 juin 1971 s'est substitué aux conventions internationales qui liaient deux ou plusieurs états membres, en application de l'article 6 mais sous réserve des dispositions des articles 7,8 et 46 § 4.

Dans l'article 7, seul le 2ème alinéa c, était susceptible de concerner le présent litige.

Jusqu'au règlement numéro 647-205 du 13 avril 2005 applicable à compter du 5 mai 2005, le texte précité était ainsi libellé «nonobstant les dispositions de l'article 6 restent applicables...c) les dispositions de conventions de sécurité sociale mentionnées à l'annexe III, laquelle annexe ne mentionnait aucune convention relative à L'ESPAGNE'.

Depuis le 5 mai 2005 le nouveau texte est ainsi libellé c) «certaines dispositions des conventions de sécurité sociale que les états membres ont conclues avant la date d'application du présent règlement, pour autant qu'elles soient plus favorables aux bénéficiaires ou si elle découle de circonstances historiques spécifiques et ont un effet limité dans le temps et si elles figurent à l'annexe III» restent applicables. Il apparaît de la lecture de ce texte que les conditions posées pour que les conventions restent applicables sont cumulatives et qu'il faut notamment qu'elles figurent à l'annexe III.

Le règlement du 14 juin 1971 est devenu applicable à L'ESPAGNE le 1er janvier 1986. Aucune convention de sécurité sociale concernant L'ESPAGNE et la FRANCE ne figure dans l'annexe III.

Les dispositions de conventions de sécurité sociale restant applicables en FRANCE en vertu de l'annexe III sont très réduites, car le règlement 629-206 du 5 avril 2006 a supprimé la plupart des exceptions ouvertes et aucune des conventions bilatérales applicables ne concernent L'ESPAGNE.

Les accords bilatéraux auxquels se réfèrent l'appelant ne sont pas applicables. Et les conventions internationales qu'il estime applicables en l'espèce ne sont pas précisées.

Il convient donc de se référer en l'espèce aux règlements CEE n°1408 71 du 14 juin 1971 et au règlement CEE numéro 574-72 du 21 mars 1972.

Par courrier du 17 juillet 2009 , l'intimé demandait à l'institut national de la sécurité sociale espagnole, si comme le soutenait M. [B] elle appliquait des règles anti-cumul lors de l'étude des droits à une prestation de survivant.

Par courrier en date du 21 juillet 2009 le Secrétariat d'État à la sécurité sociale espagnole, répondait que la sécurité sociale espagnole lors de l'attribution de ses pensions n'appliquait pas les règles de non-cumul établi par le règlement CEE 1408-71

Une note explicative était aussi transmise, ainsi libellée «les règles espagnoles au moment du calcul de la pension ne réduisent, ne suspendent ou ne suppriment pas les pensions lorsque le demandeur perçoit une autre pension de même nature, de nature différente ou qu'il dispose de ressources ».

Il sera donc retenu que l'ESPAGNE n'applique pas de règles anti-cumul, pour l'attribution d'une pension.

Les revenus de M. [B] ont été déterminés à partir des chiffres qu'il a donné. Il ne soutient pas que ses ressources au moment de sa demande étaient inférieures au plafond fixé par le droit interne français.

L'article L. 353-1 du Code de la sécurité sociale prévoit qu'en cas de décès de l'assuré son conjoint survivant a droit à une pension de réversion si ses ressources personnelles ou celles du ménage n'excèdent pas les plafonds fixés par décret.

Les ressources personnelles de l'appelant excédaient les plafonds fixés, pour pouvoir bénéficier d'une pension de reversion en droit interne français.

D'ailleurs dans sa lettre du 1er octobre 2004, il fait mention sans le contester du courrier que lui avait notifié la CRAM, rejetant sa demande de pension de reversion présenté le 28 novembre 2003, au motif que ses ressources personnelles dépassaient la limite autorisée fixée à l'époque annuellement à 14'955,20 euros.

Il déclarait dans sa demande de retraite de reversion avoir perçu au cours des trois mois précédant la demande, des salaires à hauteur de 4500 € par trimestre.

Le droit à pension de reversion n'était donc pas ouvert en droit interne français. En application des articles 46 du règlement CEE numéro 1408-71, il convenait dès lors de rechercher si l'autre pays, Etat membre de la communauté débiteur d'une pension de survivant, appliquait ou non les règles anti-cumul en matière de ressources ou tenait compte de la même nature de ressources que dans la législation française pour réduire ou supprimer le droit à pension de survivant à sa charge.

La sécurité sociale espagnole ayant répondu négativement sans ambiguïté à ces deux questions, le droit français est applicable.

La décision déférée sera de ce chef confirmée.

Elle sera aussi confirmée en ce qu'elle a dit qu'en raison du dépassement du plafond de ressources prévues par la loi, l'appelant ne peut prétendre à une pension de reversion.

Dès lors qu'il est jugé que M. [B] ne peut bénéficier d'une pension de reversion il ne justifie pas des préjudices allégués.

PAR CES MOTIFS :

La COUR,

Statuant publiquement, contradictoirement en dernier ressort et après débats oraux,

DÉCLARE recevable l'appel de M. [Z] [B],

INFIRME partiellement la décision déférée,

DIT qu'aucune forclusion ne pouvait être opposée à M. [Z] [B], en l'absence de la notification prévue par l'article 48 du Règlement du CEE n° 574-72,

DIT que la date de la demande de pension de reversion doit être fixée au 23 novembre 2003, et qu'à cette date l'appelant ne pouvait prétendre à cette pension.

CONFIRME pour le surplus la décision déférée;

Arrêt signé par Madame de PEYRECAVE, Présidente, et par Madame HAUGUEL, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE,

Sylvie HAUGUEL

LA PRÉSIDENTE,

Marie de PEYRECAVE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08/01118
Date de la décision : 08/03/2010

Références :

Cour d'appel de Pau 3S, arrêt n°08/01118 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-03-08;08.01118 ?
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