PB/NL
Numéro 625/10
COUR D'APPEL DE PAU
1ère Chambre
ARRET DU 09/02/10
Dossier : 09/03340
Nature affaire :
Demandes relatives à la procédure de saisie immobilière
Affaire :
S.C.I. MYMO
C/
S.A. CREDIT LYONNAIS,
[E] [T]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R E T
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 09 février 2010, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 14 Décembre 2009, devant :
Monsieur NEGRE, Président
Monsieur DEFIX, Conseiller
Madame BELIN, Conseiller, Magistrat chargé du rapport conformément à l'article 785 du Code de procédure civile.
assistés de Madame PEYRON, Greffier, présente à l'appel des causes.
Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANTE :
S.C.I. MYMO
agissant poursuites et diligences en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 7]
[Localité 3]
représentée par la SCP DE GINESTET / DUALE / LIGNEY, avoués à la Cour
assistée de Me REMBLIERE, avocat au barreau de DAX
INTIMES :
S.A. LCL - LE CREDIT LYONNAIS prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 5]
représentée par la SCP PIAULT / LACRAMPE-CARRAZE, avoués à la Cour
assistée de la SCP HEUTY - LORREYTE - LONNE, avocats au barreau de DAX
Monsieur [E] [T]
[Adresse 4]
[Localité 2]
représenté par la SCP LONGIN, LONGIN-DUPEYRON, MARIOL, avoués à la Cour
assisté de Me CUVREAU-DAUGA, avocat au barreau de DAX
sur appel de la décision
en date du 28 JUILLET 2009
rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE DAX
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Par acte d'huissier du 8 décembre 2008, Monsieur [E] [T] a fait délivrer à la SCI MYMO un commandement de payer le solde d'un prêt consenti à la SCI MYMO par acte notarié du 13 novembre 2007 avant saisie immobilière d'un bien immobilier situé à [Adresse 8] cadastré [Cadastre 6]. Faute de paiement, Monsieur [E] [T] a fait inscrire le commandement au service de la conservation des hypothèques et poursuivi la procédure de saisie immobilière devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de DAX : par assignation du 3 février 2009, Monsieur [T] a demandé la fixation de la créance pour un total de 101.209,54 euros comprenant le principal (100.000 euros,) le coût du commandement de payer (322,87 euros) et les intérêts échus au 24 mars 09 soit 886,67 euros, que la vente forcée de l'immeuble soit ordonnée sur une mise à prix de 70.000 euros, sa date fixée et que soit ordonnée l'expulsion de tous occupants.
LA SA CREDIT LYONNAIS a produit sa créance, son privilège de prêteur de deniers étant inscrit sur ce bien.
La SCI MYMO a soulevé des contestations de la saisie : elle nie être redevable du prêt dont elle n'est pas bénéficiaire, prêt accordé à une SARL D2A, pour lequel le prêteur a exigé une garantie immobilière. Elle estimait donc qu'il s'agit non d'un prêt mais d'une garantie hypothécaire et soulevait la nullité du prêt comme étranger à son objet social et non autorisé dans les conditions de régularité des assemblée générales requises.
Par jugement du 28 juillet 2009, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de DAX a rejeté les contestations de la SCI MYMO et renvoyé l'affaire à une audience ultérieure pour fixation de créance et orientation de la procédure. L'application de l'article 700 du Code de procédure civile a été écartée. Dans sa motivation, le premier juge retient que le titre exécutoire, l'acte notarié de prêt ne concerne que la SCI MYMO qui admet avoir reçu les fonds hors la comptabilité du notaire. Il estime qu'un prêt rentre bien dans l'objet social de la SCI, qu'une assemblée générale du 10 novembre 2007 autorise son gérant à contracter l'emprunt.
La SCI MYMO a interjeté appel le 23 septembre 2009 du jugement signifié aux avocats des parties (la SCI MYMO et le CREDIT LYONNAIS) le 11 août 2009.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par conclusions du 24 novembre 2009, la SCI MYMO demande la réformation du jugement, de voir prononcer la nullité de l'acte du 13 novembre 2007, la nullité du commandement de payer du 8 décembre 2008, ordonner la radiation du commandement de payer sous astreinte de100 euros par jour de retard à compter du 15ème jour après que l'arrêt soit devenu irrévocable. Elle réclame aussi une indemnité de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Elle reproche au commandement de payer du 8 décembre 2008 d'avoir imparti un délai de 8 jours et non un mois pour règlement contrairement à l'article 15 du décret du 27 juillet 2007.
Elle maintient ses explications et moyens antérieurs : que Monsieur [T] n'a jamais prêté d'argent à la SCI MYMO dont le véritable engagement est un cautionnement hypothécaire, que l'acte allégué de prêt est nul au sens de l'article 1131 du Code civil, qu'il n'est qu'une simulation, de cautionnement hypothécaire de la SCI MYMO au sens de l'article 1321 du Code civil ; cet engagement ne rentre pas dans l'objet social de la SCI, il n'existe aucune communauté d'intérêt entre la SCI et la SARL MS GESTION (qui a attesté de l'emprunt) et D2A ; que l'engagement de l'unique actif de la SCI par acte de disposition requérait le consentement de tous les associés par application de l'article 1852 du Code civil, alors que tous les associés n'ont pas été convoqués. L'assemblée générale du 10 novembre 2007 est également nulle, les convocations n'ayant pas été adressées dans les conditions de l'article 40 du décret, le procès verbal ne respecte pas l'article 44 du décret du 3 juillet 1978 (noms des associés, de parts). Elle soulève la nullité du contrat de prêt comme sans cause, non formé faute de remise de fonds.
Par conclusions du 2 décembre 2009, Monsieur [T] demande la confirmation du jugement et la condamnation de la SCI MYMO au paiement d'une somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile. S'appuyant sur la jurisprudence sur la cause de l'obligation, celle énoncée dans une reconnaissance de dette étant présumée exacte, il ajoute que l'acte authentique fait foi de la convention et de la remise des fonds (article 1319 du Code civil), que peu importe la destination de la somme, que la nullité de l'assemblée générale du 10 novembre 2007 serait tout au plus de nature à entraîner la responsabilité du gérant (ayant pouvoir d'engager la SCI ) et est inopposable aux tiers, qu'un emprunt rentre classiquement dans les opérations courantes des sociétés civiles immobilières.
En réplique aux derniers échanges, il s'interroge sur la sincérité de la lettre du 12 novembre 2009 émanant d'un animateur de la société MS GESTION. Il s'oppose à la nullité du commandement cette exception étant soulevée pour la première fois par les dernières conclusions et en l'absence de justification d'un grief.
Par conclusions du 20 novembre 2009, la S.A. LCL - LE CREDIT LYONNAIS s'en rapporte à justice.
DISCUSSION
* sur la qualification du contrat
L'acte notarié du 13 novembre 2007 est clairement stipulé contrat de prêt, ce terme est employé à plusieurs reprises dans l'acte qui désigne les parties sans équivoque et engage Monsieur [T], 'prêteur' au prêt d'une somme de 100.000 euros à la SCI MYMO 'emprunteur' tenue au remboursement de cette somme en deux échéances égales de 50.000 euros les 30 juin 2008 et 5 janvier 2009. Lors de l'assemblée générale du 27 novembre 2007 autorisant tout aussi explicitement le gérant de la SCI MYMO à souscrire cet emprunt, c'est bien d'un emprunt qu'il est question dont la motivation est énoncée 'pour faire face à un besoin de trésorerie'. Il n'a jamais été question dans les écrits contractuels entre Monsieur [T] et la SCI MYMO d'autres sociétés pouvant bénéficier, par l'effet de la seule volonté de la SCI MYMO des sommes emrpuntées par elle. La réalité de l'affectation des sommes provenant du prêt est d'ailleurs discutée : après avoir indiqué que le véritable emprunteur était la SARL D2A, la SCI MYMO produit devant la cour d'appel une attestation de l'EURL MS GESTION dont il n'avait pas été question auparavant dans ses conclusions. Il est produit aux débats une lettre en date du 20 novembre 2009 rédigée par Monsieur [L] [K], gérant de l'EURL MS GESTION libellée en ces termes à l'attention de Monsieur [T] : ' je viens de reprendre la SARL MS GESTION et m'aperçois que dans la comptabilité, vous avez prêté la somme de 100.000 euros à cette société. Cette somme correspondait au financement des investissements. Je vous propose en conséquence de vous rembourser cette somme sur 7 ans à partir de janvier 2010'. Une autre lettre a été adressée le 12 novembre 2009 à Me REMBLIERE, conseil de Monsieur [T], indiquant : 'nous vous confirmons que la MS Gestion SARL au capital de 20.000 euros a bien encaissé les chèques de Monsieur [T] pour un montant de 100.000 euros....'. La copie de deux chèques signés par Monsieur [T], l'un de 20.000 euros du 12 octobre 2007, l'autre de 80.000 euros du 13 novembre 2007 portant mention de MS GESTION comme bénéficiaire atteste que les chèques ont bien été libellés au nom de sociétés non contractantes au prêt, sous deux écritures différentes semble t'il dont l'auteur n'est pas identifié, ce qui ne permet pas d'exclure que ces chèques aient été remis au représentant de la SCI MYMO, à charge pour lui d'en faire l'usage qui lui convenait.
Il ne résulte nullement de ces éléments la preuve d'un contrat de prêt entre la société MS GESTION et Monsieur [T] puisque l'acte notarié indique que la somme de 100.000 euros a été remise par le prêteur à l'emprunteur directement hors la comptabilité du notaire, et qu'en définitive, l'affectation éventuelle de cette somme, fût-ce de chèques, au bénéfice d'un tiers, et l'existence d'un contrat de prêt secondaire entre l'emprunteur et ce tiers, ne sont pas de nature à modifier la nature, l'étendue et la portée d'engagements souscrits par acte notarié qui doivent recevoir application aux termes de l'article 1134 du Code civil.
Il n'est par ailleurs aucunement justifié des irrégularités de forme de l'assemblée générale de la SCI MYMO autorisant l'emprunt ; en application des articles 1849 et 1850 du Code civil, le gérant de la société est réputé agir dans l'intérêt de la société, l'engage valablement et doit en répondre vis-à-vis des tiers et de la société. Enfin, comme l'a fort justement retenu le premier juge, il ne peut être exclu que les activités d'une SCI justifient des besoins de liquidités. Il n'est pas plus établi de relations d'intérêts communs entre les différentes sociétés mentionnées.
* sur la nullité du commandement de payer du 8 décembre 2008
Le moyen tiré de la nullité n'a été soulevé par l'intimé pour la première fois que dans ses dernières conclusions. Au demeurant, l'article 15 au 4° du décret du 27 juillet 2007 prévoit bien un délai de 8 jours et non d'un mois pour ce commandement qui constitue l'acte préalable à toute voie d'exécution s'agissant d'une créance fondée sur un acte notarié à l'encontre du débiteur principal, et ce commandement ne faisant nullement état d'un cautionnement hypothécaire ne pourrait en tout état de cause valoir commandement de payer à caution hypothécaire. Cette demande sera rejetée.
Pour l'ensemble de ces motifs, le jugement, non contesté quant à ses dispositions consécutives à l'admission du principe de la créance doit être confirmé et une somme de 1.500 euros doit être allouée à Monsieur [T].
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Rejette l'exception de nullité du commandement de payer du 8 décembre 2008.
Confirme le jugement du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de DAX du 28 juillet 2009.
Condamne la SCI MYMO à payer à Monsieur [L] [T] la somme de 1.500 € (mille cinq cents euros) au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Condamne la SCI MYMO aux dépens qui pourront être recouvrés par la SCP LONGIN MARIOL DUPEYRON, Avoués, dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roger NEGRE, Président, et par Madame Mireille PEYRON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,
Mireille PEYRON Roger NEGRE