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09/11/2009 | FRANCE | N°08/01334

France | France, Cour d'appel de Pau, Chambre sociale, 09 novembre 2009, 08/01334


NR/CD



Numéro 4560/09





COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale







ARRÊT DU 09/11/2009







Dossier : 08/01334





Nature affaire :



Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution









Affaire :





Société SOGEDO SA





C/





[Z] [J]







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU

PEUPLE FRANÇAIS











A R R Ê T



prononcé par Madame ROBERT, Conseiller,

en vertu de l'article 452 du Code de Procédure Civile,



assistée de Madame HAUGUEL, Greffière,



à l'audience publique du 9 novembre 2009

date indiquée à l'issue des débats.









* * * * *







APRE...

NR/CD

Numéro 4560/09

COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 09/11/2009

Dossier : 08/01334

Nature affaire :

Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution

Affaire :

Société SOGEDO SA

C/

[Z] [J]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

prononcé par Madame ROBERT, Conseiller,

en vertu de l'article 452 du Code de Procédure Civile,

assistée de Madame HAUGUEL, Greffière,

à l'audience publique du 9 novembre 2009

date indiquée à l'issue des débats.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 16 Septembre 2009, devant :

Madame ROBERT, magistrat chargé du rapport,

assistée de Madame HAUGUEL, greffière présente à l'appel des causes,

Madame [R], en application des articles 786 et 910 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :

Madame ROBERT, Conseiller faisant fonction de Président

Madame PAGE, Conseiller

Monsieur GAUTHIER, Conseiller

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

Société SOGEDO SA

prise en la personne de son dirigeant légal en exercice domicilié de droit audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 5]

[Localité 2]

Rep/assistant : Maître ZELMATI, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

Madame [Z] [J]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Comparante et assistée de la SCP DARRIEUMERLOU BLANCO C. - BLANCO J.F, avocats au barreau de PAU

sur appel de la décision

en date du 10 MARS 2008

rendue par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE PAU

Madame [Z] [J] a été engagée par la société SOGEDO par contrat de travail à durée indéterminée en date du 4 janvier 2000 en qualité de Responsable Administrateur Facturation, statut cadre.

Le lieu de travail est situé à son domicile, dans le cadre d'un aménagement en télétravail avec des déplacements ponctuels sur [Localité 6] ou agence selon les besoins.

Par avenant du 20 février 2003, Madame [J] a été promue à compter du 1er mars 2003 responsable de la facturation des contrats de la région Ouest ainsi que de la gestion du contrat de Durance Lubéron.

Par avenant en date du 16 octobre 2003 le lieu de travail de Madame [Z] [J] est fixé une semaine par mois à [Localité 6].

Le 25 février 2004, l'employeur notifie à Madame [Z] [J] 'une modification de son contrat de travail' fixant le lieu de travail à [Localité 6] au plus tard le 1er mars 2005, dans le cadre de la future réorganisation du service facturation.

De mars 2004 à mars 2005, sur les demandes réitérées de l'employeur lui rappelant la nécessité de prendre son poste à [Localité 6] au 1er mars 2005, Madame [J] fait valoir des difficultés inhérentes à la situation de handicap de sa fille et à la recherche de solutions d'accueil, confirmant cependant sa volonté de rester dans l'entreprise puis d'une éventuelle prise de retraite.

Par lettre en date du 11 mars 2005, Madame [Z] [J] écrit à l'employeur n'avoir jamais accepté un tel changement et encore moins signé un avenant dans ce sens compte tenu de ses contraintes familiales.

Elle considère que son contrat de travail demeure inchangé et que son activité doit se poursuivre selon les modalités prévues dans l'avenant du 16 octobre 2003 à savoir troisième semaine à [Localité 6] le reste du temps à son domicile.

Après convocation à l'entretien préalable la société SOGEDO a notifié à Madame [Z] [J] son licenciement pour faute grave par lettre recommandée en date du 18 avril 2005.

Contestant son licenciement, Madame [Z] [J] a saisi le conseil de prud'hommes de Pau le 16 mai 2005.

Par jugement en date du 10 mars 2008, le conseil de prud'hommes de Pau, présidé par le juge départiteur :

- a déclaré sans cause réelle et sérieuse le licenciement de Madame [Z] [J] par la société SOGEDO,

- a condamné la société SOGEDO à payer à Madame [Z] [J] les sommes suivantes :

13.653 € à titre d'indemnité de délai congé,

1.365,30 € à titre d'indemnité de congés payés sur délai-congé,

4.551 € à titre d'indemnité de licenciement,

75.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

4.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- a débouté Madame [Z] [J] du surplus de ses demandes,

- a condamné la société SOGEDO à payer à l'ASSEDIC Aquitaine les sommes versées à la salariée au titre des indemnités de chômage à hauteur des six premiers mois d'indemnité.

La société SOGEDO a régulièrement interjeté appel par lettre recommandée en date du 4 avril 2008 du jugement qui lui a été notifié le 21 mars 2008.

La société SOGEDO demande à la Cour de :

- dire que l'employeur n'a fait que mettre en oeuvre la clause de mobilité contenue dans le contrat de travail de Madame [Z] [J],

- dire que ladite clause de mobilité était conforme aux exigences de la Cour de Cassation,

- dire qu'en modifiant le lieu de travail de Madame [Z] [J] en application de cette clause de mobilité, la société SOGEDO n'a fait que procéder à un changement de ses conditions de travail,

- dire que la société SOGEDO n'a fait qu'exercer son pouvoir de direction auquel Madame [Z] [J] devait se soumettre,

- dire que la société SOGEDO était fondée à licencier Madame [Z] [J] pour faute grave et qu'en toute hypothèse le licenciement était fondé sur une cause réelle et sérieuse.

En conséquence :

- réformer dans toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Pau le 10 mars 2008,

Statuant à nouveau,

- débouter Madame [Z] [J] de l'intégralité de ses demandes,

- condamner Madame [Z] [J] à payer à la société SOGEDO la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Dans des conclusions écrites, reprises oralement, la société SOGEDO soutient que lorsqu'une clause de mobilité est insérée dans un contrat de travail le changement d'affectation constitue un simple changement des conditions de travail, changement auquel le salarié doit se soumettre sous peine d'être licencié pour faute grave.

La clause de mobilité insérée dans le contrat de travail est valable et l'employeur a parfaitement justifié sa décision de mettre fin au contrat de travail à effet immédiat.

En effet la clause de mobilité prévoit une zone géographique d'application limitée à la zone définie par les services de l'entreprise du secteur d'activité et donc susceptible d'être appliquée dès lors qu'elle est conforme à l'intérêt de l'entreprise.

En l'espèce l'embauche de Madame [Z] [J] s'est inscrite dans un projet de consolidation du service et de développement de la recherche du futur logiciel de facturation. Madame [Z] [J] était membre du comité de pilotage chargé de valider la réception définitive du futur logiciel et chef de projet du groupe RECETTE or le siège de la facturation est à [Localité 6].

Dès l'année 2002, Madame [Z] [J] qui n'ignorait pas sa venue à terme à [Localité 6] a commencé à la préparer en sollicitant un prêt en vue de son installation.

En décembre 2002 la décision était prise de s'orienter, quant à la facturation, vers une solution interne.

C'est dans ce contexte qu'elle a accepté selon avenant en date du 16 octobre 2003, et de manière transitoire de venir travailler à [Localité 6] la première semaine de chaque mois.

Cependant cette solution étant onéreuse et insuffisante, en application de la clause de mobilité contenue à son contrat de travail un avenant lui a été proposé le 25 février 2004 prévoyant que le lieu de travail serait désormais à [Localité 6] à compter du 1er mars 2005.

A compter de cette date des discussions ont eu lieu entre les parties durant lesquelles Madame [Z] [J] a mis en avant sa situation familiale difficile, puis un possible départ à la retraite au 1er janvier 2007 pour finalement écrire le 11 mars 2005 qu'elle n'avait jamais accepté un tel changement et encore moins signé un avenant dans ce sens.

Il ne saurait être reproché à l'employeur d'avoir agi avec précipitation dans la mesure où dès le mois de mai 2002 elle savait avec certitude qu'elle serait mutée à [Localité 6] et que la notification de la mutation lui a été faite dès le 25 février 2004 pour le 1er mars 2005.

Alors que la mise en oeuvre de la clause de mobilité a été dictée dans l'intérêt de l'entreprise et qu'un délai de plus d'un an a été laissé à la salariée, l'employeur s'est heurté au refus quant au changement de ses conditions de travail le contraignant à un licenciement pour faute grave.

La société SOGEDO précise qu'à la suite du départ de Madame [Z] [J] une organisation transitoire qui n'a concerné qu'une partie de l'ensemble du service de facturation a été mise en place et soutient que Madame [K] n'occupe aucunement les fonctions assumées par Madame [Z] [J] contrairement à l'attestation de Madame [L] qui est erronée.

La société SOGEDO fait valoir que la réorganisation globale du service devenait urgente, rendant légitime et nécessaires la venue de Madame [Z] [J] dès le mois de mars 2005.

Le refus d'un salarié de rejoindre sa nouvelle affectation alors qu'elle a été décidée en conformité de la clause de mobilité constitue à tout le moins une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Elle conteste la demande de Madame [J] d'une indemnité équivalente à plus de deux ans de salaire.

Elle conteste toute rupture vexatoire du contrat de travail soulignant que l'employeur a fait preuve tant de compréhension que de patience.

Madame [Z] [J] demande à la Cour de :

- rejeter l'appel de la société SOGEDO,

- confirmer le jugement dans toutes ses dispositions,

- condamner société SOGEDO à verser une indemnité de 3.000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Dans des conclusions écrites, reprises oralement, Madame [Z] [J] conteste avoir refusé d'appliquer l'avenant dans la mesure où elle ne l'a jamais signé.

L'employeur n'ignorait pas ses difficultés d'organisation en raison des problèmes de santé de sa fille.

Le prétexte évoqué dans la lettre de licenciement est d'autant plus intolérable que selon une note du 28 avril 2005, l'ensemble de la facturation de la région OUEST à compter du 1er mai 2005 a été dévolu au centre de [Localité 8] en Gironde avec l'engagement d'une salariée, en conséquence sa mutation ne s'imposait pas.

En effet depuis qu'elle-même travaillait pour son compte Madame [K] assurait la facturation de la région OUEST et suite à une réorganisation de la facturation elle en est devenue responsable.

Par note de service du 5 juillet 2004 la tarification et la vérification de la facturation de la Gironde étaient attribuées à Madame [K] alors que lui étaient attribuées celles de Dordogne et des Landes.

Ainsi après son licenciement Madame [K] a repris ses tâches initiales avec l'aide d'une collaboratrice engagée le 2 mai 2005.

Bien que la note de service de juin 2005 prévoit la centralisation à [Localité 6], celle de Gironde a toujours été effectuée à [Localité 8].

Le licenciement s'inscrit dans la politique de l'entreprise de décourager les cadres.

Enfin il n'y avait pas lieu de lui demander d'approuver un avenant s'il est fait état du défaut d'une obligation contractuelle de mobilité ; avenant qu'elle ne pouvait signer sans avoir trouvé une solution pour sa fille.

Enfin une clause de mobilité pour être opposable au salarié doit comporter une limitation de son champ territorial.

Son préjudice est important eu égard à son ancienneté et à une longue période sans emploi.

SUR QUOI

La lettre de licenciement, en date du 18 avril 2005, qui fixe les limites du litige est libellée ainsi que suit :

« Nous vous avons reçu le 12 avril 2005 pour l'entretien préalable au licenciement que nous envisageons de prononcer à votre encontre pour le motif suivant :

- refus d'appliquer votre avenant en date du 25 février 2004 où il vous avait été notifié votre nouvelle affectation géographique à [Localité 6] à compter du 1er mars 2005 et ce dans le cadre de la future réorganisation du service de facturation. À ce jour, votre refus pénalise le bon fonctionnement dudit service.

Vos explications ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation à ce sujet. Nous vous informons que nous avons, en conséquence, décidé de vous licencier pour faute grave ».

Aux termes du contrat de travail signé entre les parties le 4 janvier 2000, il est stipulé une obligation contractuelle de mobilité, mobilité fonctionnelle et géographique autorisant la Direction Générale à la 'muter dans un de nos Secteurs'.

Il est constant en conséquence que, nonobstant la qualification « d'avenant », l'employeur a entendu par son courrier du 25 février 2004 mettre en jeu la clause de mobilité géographique insérée au contrat de travail, ce qui est confirmé par son courrier du 5 juillet 2004 dont l'objet est : « votre mutation au plus tard le 1er mars 2005 » dans laquelle il rappelle «... dans le courrier en date du 25 février 2004 la nécessité de vous voir prendre vos fonctions à [Localité 6] au plus tard le 1er mars 2005 », évoquant la clause de mobilité contenue dans le contrat de travail.

La faute grave dont la preuve appartient à l'employeur se définit comme un fait ou un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis.

' Sur la validité de la clause insérée au contrat de travail :

Dans leur principe, les clauses de mobilité insérées dans un contrat de travail sont valides sauf à constater un abus.

Cependant l'obligation contractuellement stipulée doit être précisément déterminée et non seulement déterminable dans son étendue et ce dans un souci de prévisibilité pour le salarié qui doit pouvoir connaître, lorsqu'il s'engage, le périmètre de la mobilité à laquelle il accepte par avance de se soumettre et pour prévenir tout risque d'arbitraire de la part de l'employeur qui pourrait le muter dans une zone géographique que celui-ci n'avait pas en vue lors de l'acceptation de la clause.

En l'espèce l'embauche de Madame [J], à l'examen d'une note interne en date du 6 octobre 1999, avait pour objet d'établir un binôme avec Monsieur [H], responsable du service relation clientèle installé à [Localité 6], avenue de Saxe afin d'éviter des effets de blocage dus à la présence d'une seule personne et également afin d'associer Madame [Z] [J] à la recherche d'un futur logiciel de facturation.

Madame [Z] [J] est engagée en qualité de Responsable Administrateur Facturation, statut cadre, placée directement sous la responsabilité du directeur général et de Monsieur [N], sur le site de [Localité 6].

Elle est chargée des paramétrages dans EPSYDRE, de tester le contrôle des évolutions, de la mise en place des nouveaux contrats, de l'assistance aux utilisateurs et de la participation à la procédure de mise à jour des facturations (mission correspondant aux tâches définies dans la note interne du 6 octobre 1999).

En conséquence, alors que Madame [Z] [J] est engagée en qualité de responsable facturation, rattachée à un service situé à [Localité 6] et dans la perspective d'un projet de réorganisation de ce même service, elle ne peut soutenir que la clause de mobilité est nulle en raison de son imprécision alors qu'incontestablement une mutation au service central de la facturation à [Localité 6] était un élément prévisible dès son embauche.

Cette prévisibilité est confirmée par le fait que le 17 mai 2002, soit près de deux ans avant la notification officielle de sa mutation, Madame [Z] [J] demandait à son employeur, dans le cadre d'une demande de prêt immobilier, une attestation confirmant qu'elle reviendrait travailler à [Localité 6] lorsque sa maison à [Adresse 7] sera terminée.

Ce dernier va effectivement rédiger une attestation en date du 27 mai 2002 précisant que Madame [Z] [J] bénéficie d'un aménagement de poste en télétravail et que son nouveau domicile sera situé à [Adresse 7] (38).

Il est évident qu'à cette date, Madame [Z] [J] avait d'ores et déjà pris la décision de s'installer à proximité de [Localité 6] et ce en l'absence de toute demande officielle de l'employeur, ce qui démontre que l'affectation à [Localité 6] était d'ores et déjà un élément contractualisé.

En conséquence la clause de mobilité insérée à son contrat de travail doit être déclarée valable.

'Sur la mise en oeuvre de la clause de mobilité :

Il est constant que la mise en oeuvre de la clause de mobilité interne doit être conforme à l'intérêt de l'entreprise et, la bonne foi contractuelle étant présumée, il incombe au salarié de démontrer que la décision de l'employeur a été prise en réalité pour des raisons étrangères à son intérêt ou bien que la clause a été mise en oeuvre dans des conditions exclusives de la bonne foi contractuelle.

A l'examen des pièces produites Madame [Z] [J] participait au projet nouvelle facturation, situé à [Localité 6], en sa qualité de membre du comité de projet assurant la planification, le pilotage des ressources humaines, la coordination, la communication et la remontée vers la direction générale des outils d'aide à la décision.

Par ailleurs elle était plus spécifiquement chef de projet du Groupe RECETTE chargé de valider la réception définitive du logiciel après avoir organisé une série de tests complets.

Dans un compte-rendu du 13 décembre 2002 il est décidé de retenir la solution de maintien et développement d'EPSYDRE et entre autres un renforcement rapide des ressources concernant la direction du service de facturation et la constitution d'une « bible » de la facturation avant fin décembre 2003 ce qui va nécessiter la présence de Madame [Z] [J] une semaine par mois à [Localité 6], conformément à l'avenant signé le 16 octobre 2003.

Madame [Z] [J] sera en arrêt de travail du mois d'octobre 2003 au mois de février 2004.

C'est dans ce contexte qu'après un entretien avec la Direction et « dans le cadre de la future réorganisation du service de facturation », Madame [J] recevra notification de son nouveau lieu de travail à [Localité 6] au plus tard le 1er mars 2005.

Il résulte incontestablement des comptes-rendus du projet nouvelle facturation, antérieurs à la mutation mais également du courrier électronique du 3 juin 2005 intitulé « synthèse et proposition d'organisation Service Facturation » que divers projets avaient été bloqués dans l'attente de sa venue et que sa présence à [Localité 6] était indispensable et attendue compte tenu des obligations du contrat CCPG imposant de mettre en place au 1er janvier 2006 au plus tard, la facturation « au fil de l'eau » et un système de proratisation des redevances.

Enfin la note de service du 6 juin 2005 précise la nouvelle organisation générale du service facturation :

- la centralisation à [Localité 6] de la direction des services liés à la facturation, ensemble géré par [F] [M],

- le renforcement de la direction du service facturation à [Localité 6] avec l'adjonction de [X] [W], lequel aux termes de la note du 3 juin 2005 avait le profil le plus adapté en interne pour remplacer Madame [J].

Il se déduit de l'ensemble de ces notes internes ainsi que du courrier de la direction en date du 5 juillet 2004, adressé à Madame [Z] [J] la nécessité compte tenu de ses fonctions de travailler désormais à [Localité 6], ses venues une semaine par mois s'avérant onéreuses et insuffisantes.

Afin de démontrer que sa mutation ne présentait aucun caractère de nécessité Madame [Z] [J] soutient que son poste a été pourvu par Madame [K], laquelle continue à travailler en Gironde et produit une attestation d'une salariée de l'entreprise, Madame [L] qui déclare que la facturation relative aux départements de la Dordogne, Gironde et Landes est réalisée à [Localité 8] (33) par Mesdames [K] et [T].

Cependant si effectivement dans une note de service du 28 avril 2005 l'employeur, dans le cadre du départ de Madame [Z] [J] en attente de la réorganisation du service facturation sur le plan national, charge cette dernière de l'ensemble de la facturation de la région Ouest à compter du 1er mai 2005 « tout en conservant son travail du centre de [Localité 8] » il est cependant précisé dans la note du 3 juin 2005 que Mesdames [K] et [O] n'interviennent que pour des paramétrages simples et que seule [F] [M] (qui gère la direction des services liés à la facturation) possède les compétences pour les paramétrages mais à un degré moins élevé que Madame [J].

Enfin il résulte également des notes des 3 et 6 juin 2005 que le remplacement de Madame [Z] [J] sera effectué par Monsieur [X] [W].

Mais de plus alors que le salaire de Madame [J], qualifiée responsable administratif facturation, était lors de son départ de l'entreprise de 4.700 € bruts, celui de Madame [K], qualifiée employée administrative était de 2.000 €.

En conséquence la salariée ne démontre pas que la décision de l'employeur a été prise en réalité pour des raisons étrangères à son intérêt ou bien que la clause a été mise en oeuvre dans des conditions exclusives de la bonne foi contractuelle mais de plus l'employeur rapporte suffisamment la preuve que la mutation de Madame [J], cadre, avec des compétences très spécifiques, chargée d'une mission particulière au service facturation, géré à [Localité 6], s'avérait indispensable au bon fonctionnement de l'entreprise.

Enfin il ne saurait être reproché à l'employeur de ne pas avoir pris en compte les contraintes liées à la situation familiale de Madame [Z] [J] et plus particulièrement à l'état de santé de sa fille dans la mesure où un délai d'une année lui a été accordé alors de plus que dès l'année 2002, Madame [Z] [J] connaissait la nécessité de s'installer à [Localité 6] et y avait adhéré.

Mais de plus Madame [Z] [J] a, durant ces 12 mois, laissé l'employeur dans la plus totale ignorance de la prise de poste en mars 2005, alléguant dans un premier temps de la difficulté dans laquelle elle était de trouver un établissement susceptible d'accueillir sa fille, puis dans un deuxième temps laissant entendre qu'elle prendrait sa retraite, pour quatre mois plus tard et sur demande de l'employeur lui confirmer qu'elle restait à son poste.

Enfin elle n'écrit à l'employeur qu'en mars 2005 qu'elle conteste sa mutation à [Localité 6] considérant que son activité doit se poursuivre selon les modalités prévues dans l'avenant du 16 octobre 2003 à savoir troisième semaine à [Localité 6] le reste du temps à son domicile.

La mise en oeuvre d'une clause de mobilité n'entraîne pas de modification du contrat de travail laquelle supposerait l'accord du salarié mais relève du pouvoir de direction de l'employeur.

En conséquence le refus par Madame [Z] [J] sans motif légitime de sa mutation à [Localité 6] fonde le licenciement sans cependant que cette violation ne soit d'une importance telle qu'elle rendait impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis

A défaut de rapporter la preuve d'un comportement vexatoire de l'employeur, Madame [J] sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

Il y a lieu en conséquence d'infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes en ce qu'il a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Cependant le jugement sera confirmé en ce qu'il a alloué à Madame [Z] [J] l'indemnité compensatrice de préavis outre l'indemnité compensatrice de congés payés y afférentes et l'indemnité de licenciement.

Sur la demande fondée sur l'article 700 du Code de Procédure Civile :

Il serait inéquitable de laisser à la charge de Madame [Z] [J] l'intégralité des frais engagés, il convient de lui allouer une indemnité de 1.000 € pour les frais de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud'homale et en dernier ressort,

Reçoit l'appel formé par société SOGEDO le 4 avril 2008,

Confirme le jugement du conseil des prud'hommes de Pau en date du 10 mars 2008 en ce qu'il a :

- condamné la société SOGEDO à payer à Madame [Z] [J] les sommes suivantes :

13.653 € à titre d'indemnité de délai congé,

1.365,30 € à titre d'indemnité de congés payés sur délai-congé,

4.551 € à titre d'indemnité de licenciement,

- débouté Madame [Z] [J] de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement vexatoire,

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau,

Dit que le licenciement de Madame [Z] [J] repose sur une cause réelle et sérieuse,

Déboute en conséquence Madame [Z] [J] de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Condamne la société SOGEDO à payer à Madame [J] la somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Condamne la société SOGEDO aux dépens.

LA GREFFIÈRE,LE PRÉSIDENT,

Sylvie HAUGUELNadine ROBERT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08/01334
Date de la décision : 09/11/2009

Références :

Cour d'appel de Pau 3S, arrêt n°08/01334 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2009-11-09;08.01334 ?
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