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14/05/2009 | FRANCE | N°08/00574

France | France, Cour d'appel de Pau, Chambre sociale, 14 mai 2009, 08/00574


CP/CD



Numéro 2257/09





COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale







ARRET DU 14/05/2009







Dossier : 08/00574





Nature affaire :



Contredit















Affaire :



[P] [U]





C/



S.A.R.L. INFORM'L















































RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R E T



prononcé par Monsieur PUJO-SAUSSET, Président,

en vertu de l'article 452 du Code de Procédure Civile,



assisté de Madame HAUGUEL, Greffière,



à l'audience publique du 14 mai 2009

date à laquelle le délibéré a été prorogé.







* * * * *







APRES DÉBATS



à l'audience publique tenue le 15...

CP/CD

Numéro 2257/09

COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRET DU 14/05/2009

Dossier : 08/00574

Nature affaire :

Contredit

Affaire :

[P] [U]

C/

S.A.R.L. INFORM'L

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

prononcé par Monsieur PUJO-SAUSSET, Président,

en vertu de l'article 452 du Code de Procédure Civile,

assisté de Madame HAUGUEL, Greffière,

à l'audience publique du 14 mai 2009

date à laquelle le délibéré a été prorogé.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 15 Janvier 2009, devant :

Madame PAGE, magistrat chargé du rapport,

assistée de Madame HAUGUEL, Greffière présente à l'appel des causes,

Madame PAGE, en application des articles 786 et 910 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries, en présence de Monsieur GAUTHIER et en a rendu compte à la Cour composée de :

Monsieur PUJO-SAUSSET, Président

Madame PAGE, Conseiller

Monsieur GAUTHIER, Conseiller

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

DEMANDERESSE :

Madame [P] [U]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Rep/assistant : Maître BLANCO, avocat au barreau de PAU

DEFENDERESSE :

S.A.R.L. INFORM'L

[Adresse 5]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Rep/assistant : SCP DARMENDRAIL - SANTI, avocats au barreau de PAU

sur contredit de la décision

en date du 21 JANVIER 2008

rendue par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE PAU

FAITS ET PROCÉDURE

Madame [P] [U] a été embauchée par la SARL INFORM'L le 16 janvier 1995 en qualité d'ingénieur, elle a été affectée au sein du groupe TOTAL comme sa collègue [D] [E]. Elle a été licenciée par lettre du 13 mai 2005 pour fautes lourdes.

Le conseil des prud'hommes de Pau section encadrement, par jugement de départage contradictoire du 21 janvier 2008 auquel il conviendra de se reporter pour plus ample exposé des faits, des moyens et de la procédure s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance de Pau et a réservé les dépens.

Le conseil des prud'hommes a retenu que malgré l'existence d'un contrat de travail écrit du 16 janvier 1995, malgré la délivrance de bulletins de salaire depuis cette date et le paiement desdits salaires, malgré l'existence d'une procédure de licenciement, il n'y avait aucun lien de subordination entre Madame [P] [U] et la SARL INFORM'L et que donc aucun contrat de travail n'avait existé dans la mesure où Madame [P] [U] était affectée au sein du groupe TOTAL, de telle sorte que le conseil des prud'hommes qui n'est compétent que pour connaître des litiges entre employeurs et salariés se déclare incompétent au profit du tribunal de grande instance de Pau.

Madame [P] [U] a formé un contredit par courrier du 29 janvier 2008.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions déposées le 9 janvier 2009 reprises à l'audience, Madame [P] [U] demande à la Cour de déclarer le contredit recevable, de réformer le jugement, de se déclarer compétent, de dire que son licenciement est intervenu sans cause réelle et sérieuse et de condamner la SARL INFORM'L à payer les sommes suivantes :

900 € au titre du salaire correspondant à la mise à pied,

11.550 € au titre de l'indemnité de préavis,

90 € et 1.155 € au titre des congés payés sur la mise à pied et le préavis,

7.500 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

100.000 € au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Condamner la SARL INFORM'L à payer aux ASSEDIC les indemnités de chômage,

Dire et juger le licenciement discriminatoire et lui allouer la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du Code civil,

4.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

De condamner la SARL INFORM'L aux dépens.

Elle fait valoir que la SARL INFORM'L s'est nécessairement reconnue comme son employeur dans la mesure où un contrat de travail écrit a été signé entre les parties, où elle lui a délivré des bulletins de salaire, elle a procédé au règlement des salaires et elle a régularisé une procédure de licenciement pour faute. Qu'il est certain qu'elle a, depuis son embauche toujours travaillé pour la SARL INFORM'L qui facturait ensuite ses prestations à la société TOTAL. Elle ajoute que les griefs figurant dans la lettre de licenciement sont totalement gratuits et artificiels, qu'il ne lui a jamais été fait de reproches dans son travail et qu'il n'est produit aucun document susceptible de démontrer qu'elle aurait manqué à ses devoirs. Qu'en outre, la référence à la mise en garde du 23 avril 2002 couverte par la loi d'amnistie est constitutive d'une infraction pénale, qu'il ne peut lui être reproché la diffusion d'un tract syndical portant son nom et sa photographie parmi celles d'autres personnes travaillant pour la SA TOTAL, que le licenciement s'est accompagné de pressions inadmissibles à l'égard des organisations syndicales ainsi qu'il en est justifié par la production de la mise en demeure du conseil de la SARL INFORM'L à l'égard de ces dernières, datée du 30 juin 2005, que le licenciement est constitutif d'une atteinte grave aux libertés syndicales d'opinion et d'expression qu'en outre, les griefs relatifs à la restitution tardive de l'ordinateur, au refus de former du personnel sont contradictoires et postérieurs à la décision de licencier.

*******

La SARL INFORM'L, intimée, par conclusions déposées le 9 janvier 2009 reprises à l'audience demande à la Cour de confirmer le jugement, à titre infiniment subsidiaire, si le jugement devait être réformé, il conviendrait de renvoyer le dossier devant le conseil des prud'hommes pour qu'il soit statué sur le fond.

Condamner reconventionnellement Madame [P] [U] à payer la somme de 5.000 € pour procédure abusive et celle de 2.500 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile et de la condamner aux dépens d'instance et d'appel.

Elle fait valoir que la charge de la preuve de l'existence d'un contrat de travail repose sur le demandeur, que l'existence d'une relation de travail salariée dépend des conditions de fait dans lesquelles s'exerce l'activité professionnelle et que l'existence de ce contrat de travail doit être recherchée au travers du lien de subordination à partir des conditions réelles d'exercice de l'activité. Que peu importe la délivrance de bulletins de salaire ou le paiement du salaire qui ne sont pas des critères déterminants. Qu'en l'espèce, Madame [P] [U] reconnaît qu'elle avait été mise à disposition de la société TOTAL et travaillait sous l'autorité de cette dernière de façon permanente, qu'elle était associée de la SARL INFORM'L et qu'en cette qualité, elle n'avait à rendre compte à personne, que le contrat de travail était un contrat de travail fictif.

La Cour se réfère expressément aux conclusions visées plus haut pour l'exposé des moyens de fait et de droit.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La Cour examinera successivement les points litigieux au vu du dossier de la procédure, des éléments des débats et des pièces régulièrement produites au dossier.

Sur la recevabilité du contredit :

Le contredit formalisé dans les délais et formes requis est recevable.

Au fond,

Sur le contrat de travail :

La SARL INFORM'L a mis Madame [P] [U] à la disposition de la SA TOTAL, la prestation de service informatique était facturée par la SARL INFORM'L à cette dernière. Il résulte en effet de l'attestation rédigée en la forme légale de [B] [F], ingénieur de la SA TOTAL que Madame [P] [U] a effectué de nombreuses prestations depuis de nombreuses années dans l'entité informatique de TOTAL SA et que la qualité de son travail donnait une très bonne image de la SARL INFORM'L.

Cette mise à disposition de Madame [P] [U] par la SARL INFORM'L à la SA TOTAL n'est pas contestée, elle n'était pas la seule salariée de la SARL INFORM'L dans cette situation, dès lors le contrat liant la SARL INFORM'L et la SA TOTAL dit de mise à disposition s'analyse en un contrat de sous-traitance.

Il y a en effet sous-traitance lorsqu'une entreprise se voit confier par une autre entreprise l'exécution d'une tâche définie sous sa propre responsabilité et avec le concours de son propre personnel. Cette opération ne pose aucun problème lorsqu'il s'agit de passer commande d'un travail à une entreprise extérieure qui l'effectuera dans ses locaux avec son personnel.

En l'espèce, la SARL INFORM'L a détaché du personnel chez TOTAL pour l'exécution d'une prestation de service mais, il apparaît que ce personnel accomplissait ses tâches sous l'autorité de l'entreprise utilisatrice et non de l'entreprise prêteuse ainsi que le soutient l'intimée qui développe tout au long de ses conclusions l'absence de lien de subordination pour conclure à l'absence de contrat de travail et à l'incompétence du conseil des prud'hommes et de la chambre sociale de la Cour.

Cette «'mise à disposition'» s'analyse en fait en un prêt de main d'oeuvre illicite prohibé par le Code du travail. En effet toute convention de fourniture exclusive de main-d'oeuvre à but lucratif est constitutif du délit de marchandage de main-d'oeuvre dès lors que l'entreprise qui fournit le personnel n'est pas une entreprise de travail temporaire ou une entreprise de travail à temps partagé.

Il résulte d'une attestation de l'expert comptable de la SARL INFORM'L produite par elle-même qu'en 2003, 98% de son chiffre d'affaires était réalisé avec TOTAL pour tomber à environ 75 % en 2005 et le fait que Madame [P] [U] ait des intérêts d'associée dans la SARL INFORM'L est sans conséquence dans le présent débat.

Aucun salarié ne doit être victime de telles pratiques, Madame [P] [U] a été licenciée par son employeur pour avoir tenté de défendre ses droits au regard précisément de cette situation illicite.

Il résulte en effet d'un tract diffusé par l'intersyndicale de chez TOTAL qu'un combat était mené depuis février 2004 contre « la sous-traitance massive et illégale pratiquée par la direction... Après une mise en garde de l'inspection du travail, la direction n'avait trouvé rien de mieux que de masquer l'illégalité en ne renouvelant pas certains contrats... dans ce contexte, 20 salariés prestataires avaient fait une demande d'embauche de régularisation...17 personnes non retenues, trois d'entre-elles ont été licenciées par leur employeur, Madame [P] [U] et [D] [E] de la SARL INFORM'L ont été licenciées le 14 mai 2005 avec mise à pied conservatoire depuis le 25 avril 2005 motifs : la démarche entreprise par ces salariées pour être recrutées par Total SA ».

Le conseil des prud'hommes n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations savoir, l'existence d'un contrat de travail écrit du 16 janvier 1995, la délivrance de bulletins de salaire depuis 1995 jusqu'au licenciement et le paiement desdits salaires, la procédure de licenciement diligentée par la SARL INFORM'L pour fautes graves et la mise à disposition de Madame [P] [U] par la SARL INFORM'L qui était facturée à la SA TOTAL pour reconnaître une relation salariée entre la SARL INFORM'L et Madame [P] [U].

Il y a lieu en conséquence de se déclarer compétent, de réformer le jugement de première instance, de faire droit à la demande de renvoi devant le conseil des prud'hommes et d'évoquer le dossier sur le fond et de renvoyer à une prochaine audience de la Cour afin de permettre aux parties de conclure contradictoirement sur le fond.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement, contradictoirement, en matière sociale et en dernier ressort,

Déclare le contredit recevable et bien-fondé.

Infirme le jugement et statuant à nouveau,

Se déclare compétent,

Invite les parties à conclure sur le fond et rouvre les débats à l'audience du :

- Jeudi 10 septembre 2009 à 14 heures 10 devant la Chambre Sociale de la Cour d'Appel de PAU.

Réserve les dépens.

LA GREFFIÈRE,LE PRÉSIDENT,

Sylvie HAUGUELPhilippe PUJO-SAUSSET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08/00574
Date de la décision : 14/05/2009

Références :

Cour d'appel de Pau 3S, arrêt n°08/00574 : Réouverture des débats


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2009-05-14;08.00574 ?
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