MFTL/ BLL
Numéro 1476/ 08
COUR D'APPEL DE PAU 2ème CH-Section 1
ARRET DU 31 mars 2008
Dossier : 06/ 03783
Nature affaire :
Demande en cessation de concurrence déloyale ou illicite et/ ou en dommages et intérêts
Affaire :
S. A. CIFSI ADHARA INFORMATIQUE, S. A. R. L. IDS FORMATION INFORMATIQUE
C/
S. A. R. L. VERTEGO INFORMATIQUE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R E T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 31 mars 2008, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de Procédure Civile
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 04 février 2008, devant :
Monsieur LARQUE, Président
Madame TRIBOT LASPIERE, Conseiller chargé du rapport
Monsieur FOUASSE, Conseiller
assistés de Madame MARI, Greffier, présent à l'appel des causes.
Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANTES :
S. A. CIFSI ADHARA INFORMATIQUE représentée par son Président Directeur Général Monsieur Hubert X... ès qualité 16 Bld d'Orient 34967 MONTPELLIER CEDEX
S. A. R. L. IDS FORMATION INFORMATIQUE représentée par son gérant M. Hubert X... ès qualité 75 rue Georges Bonnac 33000 BORDEAUX
représentées par la SCP J. Y RODON, avoués à la Cour assistées de Me Y..., avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMEE :
S. A. R. L. VERTEGO INFORMATIQUE prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège 26 avenue des Lilas HOTEL D'ENTREPRISES LES ALLEES 64000 PAU
représentée par la SCP P. et C. LONGIN, P. LONGIN-DUPEYRON, O. MARIOL, avoués à la Cour assistée de Me DISSEZ, avocat au barreau de PAU
sur appel de la décision en date du 17 OCTOBRE 2006 rendue par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE PAU
Faits et procédure
La société CIFSI est à la tête d'un groupe de sociétés ayant pour activité la formation informatique en entreprise dans le cadre de la formation professionnelle continue et du droit individuel à la formation reconnu à tous les salariés par le code du travail ; elle exerce cette activité sous l'enseigne ADHARA et dispose de 42 centres sur le territoire national ; la société IDS INFORMATIQUE qui est une filiale de la société CIFSI, a ouvert en 1996 à PAU un centre de formation professionnelle, situé dans le Centre d'Affaires « Les Lilas »,... ;
La société VERTEGO INFORMATIQUE qui exerce la même activité a été constituée le 27 septembre 2004 par d'anciens salariés de la société CIFSI notamment : Mme Marie Hélène A... qui était directrice du centre ADHARA INFORMATIQUE de PAU et Mr Didier B... qui était salarié de la société CIFSI depuis sa création et est encore actionnaire de cette société à hauteur de 25 % du capital social ;
La société VERTEGO INFORMATIQUE a installé son siège social au no 26 de l'avenue des Lilas à quelques centaines de la société CIFSI ;
Mr B... et Mme A... ont été respectivement licenciés par la société CIFSI en juillet et septembre 2004 ; le licenciement de Mr B... notifié pour faute lourde a été jugé fondé sur une cause réelle et sérieuse constituée par le refus de l'intéressé d'accepter sa mutation à MONTPELLIER ; celui de Mme A... a été reconnu illégitime et la société CIFSI a été condamnée à lui verser des dommages intérêts ;
Par acte d'huissier du 29 août 2005, les sociétés CIFSI ADHARA INFORMATIQUE et IDS FORMATION INFORMATIQUE ont fait assigner la société VERTEGO INFORMATIQUE devant le Tribunal de commerce de PAU à l'effet de l'entendre condamner à de justes dommages intérêts en rapport avec des faits de concurrence déloyale ayant entraîné la désorganisation de la société IDS FORMATION INFORMATIQUE de PAU et l'effondrement de son chiffre d'affaires ;
Par jugement du 17 octobre 2006, le Tribunal a considéré que la preuve des faits incriminés n'était pas rapportée ; les sociétés CIFSI ADHARA INFORMATIQUE et IDS FORMATION INFORMATIQUE ont été déboutées de leurs prétentions et ont été condamnées à verser à la société VERTEGO INFORMATIQUE la somme de 10 000 € à titre de dommages intérêts pour procédure abusive outre 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Les sociétés CIFSI ADHARA INFORMATIQUE et IDS INFORMATIQUE ont interjeté appel de ce jugement.
Prétentions et moyens des parties
Par conclusions récapitulatives du 7 septembre 2007 auxquelles la Cour se réfère expressément en application de l'article 455 du nouveau code de procédure civile, les appelantes exposent les circonstances dans lesquelles Mme A... et Mr B... ont quitté la société IDS INFORMATIQUE pour créer et développer parallèlement une activité concurrente dans le cadre de la société VERTEGO INFORMATIQUE qu'ils ont constituée ;
Les sociétés CIFSI ADHARA INFORMATIQUE et IDS INFORMATIQUE dénoncent le comportement anormal de ces deux anciens salariés auxquels elles reprochent d'avoir sciemment « vidé » la société IDS PAU de l'essentiel de sa substance ; les appelantes font notamment valoir que :
- la totalité des salariés d'IDF PAU ont donné leur démission en juillet dans les mêmes formes en demandant tous à être dispensés de préavis et ils ont tous été réembauchés dès le mois d'octobre par la société VERTEGO INFORMATIQUE ;
- la désorganisation de l'entreprise paloise a été méthodiquement orchestrée : rétention d'informations qui ne remontaient plus à la société holding (les plannings et les commandes n'étaient pas enregistrées, 13 chèques clients n'ont pas été transmis) ;
- Mr B... a dissimulé les démissions des salariés du centre de PAU jusqu'à la date de son licenciement ;
- l'un des formateurs vacataires travaillant habituellement avec la société IDS a rejoint la société VERTEGO INFORMATIQUE ;
- la société ADS a été contrainte de dispenser les salariés démissionnaires de l'exécution du préavis en raison de la perte de la totalité de la clientèle et du ralentissement important des activités de l'agence ;
- les boîtes aux lettres de ses collaborateurs palois ont subi une contamination de grande ampleur par des SPAM à caractère orduriers ou sexuels qui ont été transmis par une boîte aux lettres WANADOO au nom de Mr B..., lequel n'avait aucune raison de posséder dans sa messagerie les adresses professionnelles de ses collègues ;
- Melle C... a profité de sa fonction de formatrice de l'agence IDS PAU pour obtenir peu avant son départ et pendant l'exécution de son préavis un nombre inhabituel de certifications payantes (140 € l'unité) dont la nouvelle société VERTEGO INFORMATIQUE a seule bénéficié ;
- La clientèle de la société IDS INFORMATIQUE a été entièrement détournée du fait des démarchages agressifs des salariés démissionnaires qui ont utilisés les connaissances acquises dans le cadre de leurs anciennes fonctions pour démarrer une activité concurrente à quelques centaines de mètres de la société IDS ;
- L'ensemble de ces agissements déloyaux a eu pour effet de désorganiser gravement la société IDS INFORMATIQUE et la société CIFSI qui est directement intéressée au chiffre d'affaires réalisé par ses filiales ;
Au vu de la jurisprudence dont citée dans leurs conclusions, les sociétés IDS INFORMATIQUE et la société CIFSI concluent à la réformation du jugement dont appel ; elles demandent à la Cour de :
Øinterdire à la société VERTEGO INFORMATIQUE, à Mr B... et à Mme A... d'exercer, directement ou par personne interposée, l'activité litigieuse dans un périmètre de 300 km autour du siège social de la société IDS INFORMATIQUE pendant une durée de deux ans ;
Øcondamner la société VERTEGO INFORMATIQUE à payer à la société IDS INFORMATIQUE la somme de 1 500 000 € à titre de dommages intérêts en réparation des préjudices matériels qu'elle a subis ;
Øcondamner la société VERTEGO INFORMATIQUE à payer à la société CIFSI la somme de 525 000 € à titre de dommages intérêts compensatoires de ses propres préjudices matériels ;
Øcondamner la société VERTEGO INFORMATIQUE à payer à la société IDS FORMATION INFORMATIQUE la somme de 500 000 € en réparation de son préjudice moral ;
Øautoriser les sociétés IDS et CIFSI à faire procéder à la publication de la décision à intervenir aux frais de la société VERTEGO INFORMATIQUE dans trois journaux ou revues de son choix ainsi que sur la page d'accueil du site INTERNET de la société VERTEGO INFOMATIQUE et de fixer le montant maximum du coût de cette publication à la somme de 10 000 € ;
Øcondamner la société VERTEGO INFORMATIQUE au paiement de la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Øassortir l'arrêt à intervenir d'une astreinte de 5 000 € par jour de retard et se réserver la liquidation de l'astreinte.
Par conclusions du 19 juillet 2007 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé des prétentions et moyens de l'intimée, la société VERTEGO INFORMATIQUE expose que la société CIFSI, société mère basée à MONTPELLIER, est dirigée par Mr X..., ex beau frère de Mr B... (divorcé prononcé en 2001) ; qu'au cours du premier semestre 2004, la société CIFSI a rencontré des difficultés de management des équipes de ses agences et en particulier de l'agence de PAU dont elle a entrepris la réorganisation ; qu'il en est résulté un climat délétère ayant conduit plusieurs salariés à démissionner simultanément en juillet 2004 tandis que, dans le même temps, des procédures de rupture de leur contrat de travail étaient engagées à l'encontre de Mr B... et de Mme A... ; elle relève que ces procédures ont tourné à l'avantage des deux salariés qui ont obtenu gain de cause devant le conseil des prud'hommes ;
La société VERTEGO INFORMATIQUE rappelle que l'action en concurrence déloyale oblige le demandeur à l'action de rapporter la preuve de faits précis propres à mettre en cause l'honnêteté, la loyauté et à établir la volonté de nuire de la part de leur auteur ;
La société VERTEGO INFORMATIQUE conteste les faits qui lui sont imputés ; elle soutient notamment que :
- la société CIFSI ADHARA a toujours eu toute latitude pour vérifier les activités de l'agence IDS de PAU et qu'elle recevait l'ensemble des informations concernant les opérations réalisées par cette agence ;
- l'auteur des prétendus détournements de chèques clients n'a pas été identifié et aucune plainte n'a d'ailleurs été déposée par la société CIFSI ADHARA ;
- la pollution des boîtes e-mail des collaborateurs de cette société par des « spam » est un phénomène courant justifiant la mise en place de système de filtrage et rien ne démontre que la société VERTEGO soit directement ou indirectement à l'origine de ces nuisances ;
- les formateurs sont eux-mêmes soumis à des formations permanentes et il est donc parfaitement normal que d'anciens salariés de la IDS aient suivi des formations jusqu'à la date de leur départ de l'entreprise ;
- les démissions concomitantes ou successives des salariés de la société IDS sont justifiées par des motifs individuels et s'expliquent également par le climat détestable qui régnait à cette époque au sein de la société (litiges sur le paiement des primes, problème d'évolution de carrière, refus de négociation, suspicion …) ;
- les salariés démissionnaires ont tous été dispensés de préavis par la société IDS qui s'est donc volontairement privée de leurs compétences ;
- les attestations versées aux débats établissent que la clientèle a suivi le personnel sortant, non pas à la suite d'une politique agressive de captation mais dans le cadre d'une démarche personnelle de confiance envers les anciens salariés de la société IDS, et ce malgré la pratique de « dumping » mise en œ uvre depuis 2005 par cette société ;
- le juge des référés a parfaitement compris le comportement déloyal des sociétés CIFSI et IDS et a rétracté l'ordonnance qui avait autorisé ces dernières à recueillir des informations sur le disque dur de la société VERTEGO INFORMATIQUE ;
- l'intimée déclare que les appelantes ne produisent aucun document comptable de nature à établir qu'elle a subi un quelconque préjudice en rapport avec les faits qu'elles lui imputent ; que la société CIFSI ADHARA s'est en outre arrangée pour priver Mr B... de toute information en le tenant à l'écart des assemblées générales de la société dont il demeure pourtant actionnaire ;
La société VERTEGO INFORMATIQUE conclut à la confirmation du jugement entrepris ; elle demande à la Cour de dire que l'action en concurrence déloyale engagée à son encontre est abusive et de condamner solidairement les sociétés CIFSI ADHARA et IDS à lui payer la somme de 20 000 € à titre de dommages intérêts et de lui allouer la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais de la procédure d'appel.
Motifs de la décision
Attendu que si le principe de la liberté du commerce et de l'industrie autorise les entreprises à rivaliser entre elles afin de conquérir et de retenir la clientèle, la jurisprudence veille à ce que la concurrence s'exerce dans le respect des usages commerciaux ;
Attendu que l'action en concurrence déloyale demeure subordonnée aux conditions habituelles de la responsabilité civile délictuelle à savoir :
- l'existence d'une faute ;- un dommage ;- un lien de causalité entre la faute et le dommage ;
Attendu qu'en l'espèce, la société VERTEGO INFORMATIQUE auxquelles les sociétés CIFSI et IDS reprochent des faits de concurrence déloyale a été constituée, le 27 septembre 2004 par l'ancienne directrice de l'agence IDS de PAU : Mme Marie Hélène A... devenue gérante de la nouvelle société dont elle détient 99, 9 % du capital social ;
Attendu que la société VERTEGO INFORMATIQUE a rigoureusement le même objet social que la société IDS avec laquelle elle est donc directement en concurrence puisqu'elle a au surplus installé son siège social au no... à quelques 800 m de la société IDS dont l'établissement est situé au no 77 de la même avenue ;
Attendu que, ni Mme A... ni son compagnon Mr Didier B..., ancien salarié de la société CIFSI, n'étaient liés à leur employeur respectif par une clause de non concurrence ; qu'ils étaient donc libres, immédiatement après la rupture de leur contrat de travail, de créer pour leur compte personnel ou de reprendre une activité salariée dans le domaine de la formation informatique dans lequel ils avaient acquis une expérience professionnelle au service de leurs anciens employeurs ;
Attendu que la rupture des relations salariales est intervenue dans les deux cas au désavantage des sociétés IDS et CIFSI ; que Mme A... a fait savoir à la société IDS par lettre du 4 août 2004, qu'elle ne reprendrait pas son poste au sein de la société IDS à l'issue de son congé maternité en raison notamment du refus de l'employeur de lui maintenir intégralement sa rémunération pendant son congé et de la notification au cours de ce congé d'un avertissement qu'elle estimait injustifié ;
Attendu que le Conseil des Prud'hommes de PAU a donné globalement satisfaction à Mme A... en prononçant la résiliation du contrat de travail aux torts de la société IDS et en allouant à la salariée les indemnités de rupture et des dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que cette décision, confirmée par un arrêt de la Cour d'Appel de PAU du 28 juin 2007 a privé d'effet le licenciement pour faute lourde notifiée à l'intéressée postérieurement à la saisine du Conseil des prud'hommes pour absence injustifiée et prise de participation dans une société concurrente ;
Attendu que le licenciement de Mr B... a été notifié par acte d'huissier du 29 juillet 2004 pour faute grave motivée par son refus de rejoindre son poste à MONTPELLIER et l'inexécution, malgré les demandes réitérées de l'employeur, de la transmission à Mr D..., chargé de la supervision du site de PAU, des éléments d'information qui lui étaient nécessaires pour assurer sa mission ; qu'il était en outre reproché à Mr B... d'avoir sollicité le remboursement d'une note de restaurant d'un montant de 15 € alors que ses frais n'étaient pas remboursables puisqu'ils avaient été exposés dans une brasserie à PAU (lieu de son détachement temporaire en remplacement de Mme A...) ;
Attendu que par jugement du 13 juin 2005, le Conseil des Prud'hommes de PAU a écarté les faits d'insubordination reproché au salarié et a souligné le montant dérisoire de la demande de remboursement de frais, le conseil des Prud'hommes a en revanche retenu l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement dans le refus de Mr B... de rejoindre son lieu d'affectation ;
Attendu qu'il n'a pas été démontré au cours des instances sociales que Mme A... et Mr B... aient exercé des actes contraires aux intérêts de leur employeur respectif alors qu'ils étaient encore dans les liens contractuels ; Attendu que les sociétés CIFSI et IDS invoquent au soutien de leur action en concurrence déloyale la désorganisation de leurs entreprises par :
- la rétention d'information ;- le débauchage massif du personnel ;- le détournement de chèques clients ;- la pollution des boîtes e-mails ;- l'usage abusif de la qualité de salarié de la société IDS et l'économie des frais de lancement de la nouvelle société qui a notamment profité des certifications obtenues par les anciens salariés ;- le détournement de clientèle ;
Attendu que la société IDS a également déposé plainte le 29 octobre 2004 pour vol de trois micro-ordinateurs (marque ignorée) de plusieurs logiciels, de C. D de logiciels MICROSOFT avec leurs no de licence et de divers documents (conventions, fiches de présence, propositions commerciales, prospect clients, factures fournisseurs …) ; que la plainte dénonce également l'inscription des e-mails des anciens dirigeants sur des listes de diffusions de sites web à caractère pédophile et leur exposition à des virus ; Attendu que le déposant en la personne de Mr D..., nouveau directeur de la société IDS déclare dans sa plainte n'avoir aucun soupçon sur l'auteur ou les auteurs de ces actes et ne fournit aucune indication sur les conditions dans lesquelles les faits incriminés auraient pu se produire ; que force est de constater qu'à la date de la plainte, Mr D... étaient en fonction depuis trois mois et que les anciens salariés de l'entreprise tous démissionnaires n'étaient plus dans l'établissement au cours de cette même période puisqu'ils avaient été dispensés d'exécuter leur préavis ;
Attendu que la société IDS laisse la Cour dans l'ignorance du sort donné à cette plainte qui remonte désormais à plus de trois ans ; que l'instance pénale si tant est qu'elle existe demeure sans incidence sur le présent litige.
Sur la rétention d'informations
Attendu que Mme A... qui était en congé maternité depuis le mois de mai 2004 n'a pas repris son poste à l'issue de son congé en septembre de la même année ; qu'elle ne peut donc être concernée par cette question ;
Attendu que Mr D... a pris les fonctions de directeur de l'agence de PAU le 29 juillet 2004 date à laquelle Mr B... a reçu notification de son licenciement ;
Attendu que la SA CIFSI a délivré le même jour à Mr B... une sommation de lui communiquer les éléments suivants :
- liste des stages planifiés en 2004 avec leurs éléments constitutifs ;- liste des contrats nationaux en cours ;- liste des clients et contacts ;- liste des prospects et contacts ;- historique des plannings de production 2003, 2002, 2001 ;- contrats de travail et fiches de paie 2003 et 2004 ;- liste des sous traitants habituels et leur grille tarifaire ;- état du parc matériel et logiciel ;- état du parc mobilier ;- état du stock des supports de cours ;- liste des contrats fournisseurs en cours (E. D. F., France Telecom, bail, assurances …. ;- mot de passe et connexion au réseau ;
Attendu que bon nombre des éléments demandés étaient en possession de la société IDS ou pouvaient être obtenus sans avoir recours au service de Mr B... ; que la rétention d'information n'a d'ailleurs pas été jugée suffisamment caractérisée par le conseil des prud'hommes pour justifier le licenciement de ce dernier ; qu'il a été en revanche à juste titre relevé que le nouveau directeur n'avait apparemment effectué aucune démarche personnelle auprès de Mr B... pour s'informer des affaires en cours ;
Attendu que Mr B... a apporté à la sommation qui lui a été délivrée des réponses crédibles et pertinentes ;
Attendu que les pièces versées aux débats établissent par ailleurs que le système informatique mis en place par la société CIFSI ADHARA permettait le contrôle par le siège à MONTPELLIER de toutes les opérations réalisées dans les filiales du groupe et notamment dans sa filiale de PAU ; qu'en outre, la société CIFSI avait la faculté d'intervenir sur l'ensemble des messageries de l'agence de PAU ; que cette intrusion inacceptable de l'employeur sur les serveurs de cette agence, sans information préalable des intéressés est établie ; que dans le cas de Mme A..., la Cour dans son arrêt du 28 juin 2007 a considéré que le comportement de l'employeur à cet égard était constitutif de harcèlement moral envers cette salariée ;
Attendu que la rétention d'information, comme moyen de démonstration d'une concurrence déloyale, n'est donc pas établie.
Sur le débauchage massif du personnel
Attendu qu'il est constant que tous les salariés de la société IDS ont démissionné entre le 17 juillet et le 20 juillet 2004 ; que ces démissions qui s'apparentent à une démission collective ou du moins concertée eu égard au rapprochement des dates auxquelles elles ont été données, s'inscrivent dans un contexte social récemment émaillé de revendications salariales et de mécontentement latent ; que la direction de CIFSI s'était en effet opposée à l'octroi des primes demandées par les salariés eu égard aux bons résultats de l'année 2003 ; que plusieurs d'entre eux avaient protesté contre les intrusions informatiques de l'employeur dans leurs messageries ; que le climat social n'était donc pas aussi serein que le prétendent les sociétés CIFSI et IDS ;
Attendu que Mr Dany E..., embauché en octobre 1999 en qualité de formateur a démissionné le 18 juillet 2004 mais cette démission a été immédiatement suivie d'une tentative de renégociation de ses conditions d'emploi qui a échoué ; qu'il avait donc des raisons de chercher un emploi plus rémunérateur ;
Attendu que Melle Pascale C..., recrutée par la société IDS en novembre 1998 en qualité de formatrice avait refusé de répondre aux demandes inquisitoriales de la direction qui lui avait écrit à son domicile personnel pour lui demander d'établir « une déclaration sur l'honneur », attestant qu'elle avait déjeuné avec Mr B... les 20 janvier et 19 mars 2004 ; que cette sollicitation confirme le climat de suspicion ambiant ; que par ailleurs Mme C... avait été personnellement victime des intrusions de l'employeur sur sa messagerie ;
Attendu que Melle Z... F... embauchée en mars 2001 a démissionné le 20 juillet 2004 ; qu'elle avait eu en juin 2004 un échange de propos peu amènes à l'égard de la direction de la société CIFSI INFORMATIQUE à laquelle elle reprochait de s'être introduite clandestinement dans sa boîte aux lettres ; que le gérant, Mr X... l'avait vivement remise à sa place dans une correspondance du 11 mai 2004 en lui faisant remarquer qu'elle ne pouvait se prévaloir du statut d'assistante de direction alors qu'elle occupait un poste de secrétaire et en la remerciant de bien vouloir désormais utiliser le titre qui était le sien ;
Attendu que Melle Delphine G..., recrutée en octobre 1998, a également démissionné le 17 juillet 2004 ;
Attendu que lors du mouvement de revendication survenu au début de l'année 2004 concernant les primes de rendement, les salariés avaient manifesté leur solidarité en exprimant le désir d'être entendus collectivement par l'employeur ; qu'au travers des e-mail envoyés à cette époque à l'adresse de l'employeur, les salariés qui travaillaient ensemble depuis plusieurs années, avaient fait preuve d'un réel esprit d'équipe et, il n'apparaît pas étonnant, compte tenu du contexte, que cette équipe ait décidé collectivement de poursuivre ses activités professionnelles au sein d'une autre structure ; que pour autant, il n'est pas établi que la société VERTEGO INFORMATIQUE ou ses membres fondateurs aient démarché ou utilisé des méthodes déloyales pour inciter les salariés de la société IDS à quitter leur entreprise et se mettre au service de la nouvelle société ; que l'unique attestation produite par la société IDS pour les besoins de sa démonstration émane de l'un de ses salariés : Mr H... recruté en novembre 2004 et toujours en poste dans l'entreprise ; que l'existence du lien de subordination qui le lie à la société IDS retire à ce témoignage sa valeur probante ;
Attendu que les salariés démissionnaires ont été libérés de leur préavis par la société IDS et n'ont été réembauchés par la société VERTEGO INFORMATIQUE qu'en octobre 2004, soit trois mois plus tard ; que l'existence de man œ uvres constitutives de débauchage par la société VERTEGO INFORMATIQUE de ces salariés n'est pas établie.
Sur le détournement de chèques clients
Attendu que 13 chèques clients, dont deux émis les 8 avril et 27 avril 2004, et 11 chéques émis entre le 4 juin et le 23 juillet 2004, ont été égarés, obligeant la société IDS à demander à ses clients d'en établir de nouveaux ; qu'aucun élément du dossier ne permet cependant d'imputer à l'un quelconque des anciens salariés de la société IDS la disparition de ces chèques ; que le moyen n'est pas fondé.
Sur la pollution des boîtes e-mail
Attendu que la société IDS établit en revanche que le 4 août 2004, un e-mail, type SPAM a été envoyé à trois de ses collaborateurs au sein du groupe ADHARA à partir de la boîte aux lettres Wanadoo au nom de Mr Didier B... qui est devenu par la suite Directeur Commercial de la société VERTEGO INFORMATIQUE ; que ce SPAM de grand volume est venu pollué les boîtes aux lettres des destinataires ;
Attendu que si Mr B... peut être l'auteur de cet envoi qui émane de sa messagerie personnelle, il est étonnant s'il s'agissait d'un acte de malveillance de sa part qu'il n'ait pas pris soin de dissimuler son adresse ; que les faits ne paraissent pas s'être reproduits ; que cet acte unique s'inscrit dans un contexte de relations particulièrement conflictuelles entre les parties, la société cherchant à la même époque à le prendre en faute en procédant notamment à des investigations auprès du personnel sur ses frais de déplacement ; qu'elle l'a en outre fait suivre à la même époque par une agence de détective privé qu'elle avait engagée à cet effet ; que Mr B... a vivement réagi à cette surveillance rapprochée et l'affaire aurait pu prendre une coloration pénale si un arrangement amiable n'était finalement intervenu entre Mr B... et l'enquêteur qui le pistait ;
Attendu que dans ce contexte, la saturation parfaitement blâmable des boîtes aux lettres de trois des collaborateurs de la société IDS, apparaît davantage dicté par le ressentiment que par la volonté de désorganiser l'entreprise concurrente ; que l'envoi d'un message à caractère pédophile sur la boîte – mail de Mr D... est tout aussi détestable mais ces agissements répréhensibles dont la société IDS paraît s'être ensuite protégée n'ont pas été réitérés et ne peuvent fonder une action en concurrence déloyale.
Sur l'usage abusif de la qualité de salarié de la société IDS ADHARA
Attendu qu'il est reproché à Melle C..., formatrice de la société IDS d'avoir passé avant son départ de l'entreprise un nombre anormalement important de certifications qui ont été payés par IDS alors qu'elles ont directement profité à la société VERTEGO INFORMATIQUE ;
Attendu que les formateurs informatiques sont amenés à solliciter de fréquentes certifications en fonction des sorties sur le marché des nouveaux logiciels ; que la procédure suivie dans l'entreprise en vue de l'obtention de ces certifications n'est pas fournie de telle sorte que la cour est dans l'impossibilité de vérifier en quoi et comment la société VERTEGO INFORMATIQUE ou les personnes à son service ont pu abuser de ces formations au détriment de la société IDS qui les a financés ; que le moyen n'est pas fondé.
Sur le détournement de clientèle
Attendu que la société VERTEGO INFORMATIQUE était libre d'installer son siège social à l'endroit de son choix ; que la proximité géographique des deux entités peut être éventuellement une cause de confusion pour la clientèle, bien que les enseignes des deux sociétés soient parfaitement distinctes ; que ce choix de situation ne constitue pas un acte déloyal ; que les sites habilités à recevoir ce type d'activités ne sont pas nombreux sur la ville de PAU et le domicile élu par la société VERTEGO INFORMATIQUE fait parti de ceux qui regroupent les entreprises de la nouvelle technologie ;
Attendu que si la société VERTEGO INFORMATIQUE s'est rapidement développée au détriment de la société IDS, il n'est pas démontré de façon certaine que la nouvelle société ait utilisé pour ce faire des moyens déloyaux ou un démarchage agressif tendant à dénigrer la société IDS pour en détourner la clientèle ;
Attendu que les deux sociétés sont directement concurrentes et il est indéniable que dans le domaine de la formation qui est le leur, la clientèle s'attache plus particulièrement à la personnalité et aux compétences des formateurs qu'à l'enseigne sous laquelle ceux-ci dispensent leur savoir ; que huit attestations de clients de la société VERTEGO INFORMATIQUE confirment avoir privilégié la relation de confiance en changeant de prestataire pour s'adresser désormais à la société VERTEGO INFORMATIQUE ;
Attendu qu'à la même période, la société IDS s'est mise elle-même mise en situation d'infériorité en dispensant les salariés démissionnaires de leur préavis sans avoir préparer la relève de sorte que l'établissement a été fermé en août 2004 et qu'à la rentrée de septembre la nouvelle équipe, inconnue sur la place de PAU a rencontré des difficultés prévisibles pour s'imposer sur ce marché malgré la pratique de dumping qu'elle a mise en œ uvre pour attirer la clientèle ;
Attendu que par ailleurs, les activités de formation informatique s'adressent particulièrement aux entreprises de plus de 20 salariés qui ne sont pas nombreuses sur la place de PAU ; que la société VERTEGO INFORMATIQUE n'avait qu'à ouvrir l'annuaire ou à s'informer auprès des chambres de commerce et d'industrie de la région pour trouver la clientèle potentielle ; que l'envoi de mailing ne constitue pas en soi un acte de concurrence déloyale ;
Attendu que les procédures judicaires que les sociétés CIFSI et ADHARA ont mis en œ uvre pour tenter de se constituer des preuves non contradictoires des griefs invoqués à l'encontre de la société VERTEGO INFORMATIQUE n'ont finalement pas abouti ; qu'en effet, le président du Tribunal de grande instance qui les avaient autorisées dans un premier temps à effectuer des investigations au sein de la société concurrente a rétracté ces ordonnances, considérant que les sociétés CIFSI et ADHARA n'avaient pas agi avec une parfaite loyauté en omettant de signaler dans leur requête l'existence des instances parallèles en cours devant le Conseil des prud'hommes : que la suspension de l'exécution provisoire de l'ordonnance de rétractation a été refusée par le Premier Président pour le même motif ;
Attendu que les sociétés CIFSI ADHARA et IDS FORMATION INFORMATIQUE ont été ainsi privées de tous moyens de fonder leur action en concurrence déloyale dont elles ont été à juste titre déboutées ;
Attendu que cette action ne présente cependant pas un caractère abusif et il y a lieu d'écarter la demande de dommages intérêts de la société VERTEGO INFORMATIQUE ; qu'il lui sera seulement allouée la somme de 5 000 euros€ en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais de première instance et d'appel.
Par ces motifs
LA COUR
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;
Déclare l'appel infondé ;
Confirme le jugement du Tribunal de commerce de PAU du 17 octobre 2006 en ce qu'il a débouté les sociétés CIFSI ADHARA et IDS FORMATION INFORMATIQUE de leur action en concurrence déloyale ;
Déboute la société VERTEGO INFORMATIQUE de sa demande de dommages intérêts pour procédure abusive ;
Condamne les sociétés CIFSI ADHARA et IDS FORMATION INFORMATIQUE à payer à la société VERTEGO INFORMATIQUE la somme de 5 000 €euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais de première instance et d'appel ;
Condamne les sociétés CIFSI ADHARA et IDS FORMATION INFORMATIQUE aux dépens ; autorise la SCP LONGIN, avoués, à recouvrer ceux d'appel conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Arrêt signé par Monsieur LARQUE, Président et par Madame MARI, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIERLE PRESIDENT