AR/PP
Numéro 1434/08
COUR D'APPEL DE PAU
1ère Chambre
ARRET DU 31/03/08
Dossier : 04/03782
Nature affaire :
Demande en paiement direct du prix formée par le sous-traitant contre le maître de l'ouvrage
Affaire :
E.U.R.L. BASCO LANDAISE D'ARCHITECTURE
C/
S.A. FEUGAS,
S.A.S. SOPREMA ENTREPRISES,
SOCIETE DE DROIT AUSTRALIEN GSM
EUROPE PTY LTD
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R E T
prononcé par Monsieur NEGRE, Président,
en vertu de l'article 452 du Code de Procédure Civile,
assisté de Madame PUJAU, Greffier en Chef,
à l'audience publique du 31 Mars 2008
date à laquelle le délibéré a été prorogé.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 21 Janvier 2008, devant :
Monsieur NEGRE, Président
Madame RACHOU, Conseiller, magistrat chargé du rapport conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile
Madame CARTHE MAZERES, Conseiller
assistés de Madame PEYRON, Greffier, présente à l'appel des causes.
Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANTE :
E.U.R.L. BASCO LANDAISE D'ARCHITECTURE représentée par son gérant domicilié en cette qualité au siège social
...
40130 CAPBRETON
représentée par la SCP LONGIN, LONGIN-DUPEYRON, MARIOL, avoués à la Cour
assistée de Me X..., avocat au barreau de BAYONNE
INTIMEES :
S.A. FEUGAS
route de Mont de Marsan
40501 SAINT SEVER CEDEX
représentée par la SCP DE GINESTET / DUALE / LIGNEY, avoués à la Cour
assistée de la SCP LAMORERE - TORTIGUE - FRANCOIS, avocats au barreau de MONT DE MARSAN
S.A.S. SOPREMA ENTREPRISES agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège venant aux droits de la SA SOPREMA
...
BP 10931
67029 STRASBOURG CEDEX 1
représentée par Me VERGEZ, avoué à la Cour
assistée de Me MAZERES, avocat au barreau de BORDEAUX
SOCIETE DE DROIT AUSTRALIEN GSM EUROPE PTY LTD exploitant sous l'enseigne BILLABONG
...
Zone Artisanale Pedebert
40150 SOORTS HOSSEGOR
représentée par la SCP PIAULT / LACRAMPE-CARRAZE, avoués à la Cour
assistée de Me ARAEZ, avocat au barreau de BAYONNE
sur appel de la décision
en date du 01 OCTOBRE 2004
rendue par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE MONT DE MARSAN
La société GSM EUROPE, exerçant sous l'enseigne BILLABONG, a entrepris des travaux en vue de l'extension d'un bâtiment métallique.
Elle en a confié la maîtrise d'oeuvre à l'EURL BASCO LANDAISE D'ARCHITECTURE.
La société FEUGAS était en charge du lot "charpente métallique, étanchéité, couverture, bardage et serrurerie" pour un prix forfaitaire de 756.206,88 € TTC.
Cette société a sous traité la partie couverture et bardage à la SA SOPREMA selon contrat du 21 août 2002.
La réception de ce lot est intervenue le 28 février 2003 avec réserves qui ont été levées le 25 avril 2003.
Un solde restant dû à la société SOPREMA, celle-ci a assigné devant le Tribunal de Commerce de MONT DE MARSAN la société FEUGAS qui a appelé en la cause la société GSM qui a, à son tour, assigné l'EURL BASCO LANDAISE D'ARCHITECTURE.
Par jugement du 1er octobre 2004, le Tribunal de Commerce de MONT DE MARSAN a :
- condamné la société GSM EUROPE à payer à la société FEUGAS la somme de 31.075,36 € avec intérêts à compter du 10 décembre 2003 et 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
- débouté l'EURL BASCO LANDAISE D'ARCHITECTURE de son exception d'incompétence non recevable en matière d'appel en garantie,
- condamné l'EURL BASCO LANDAISE D'ARCHITECTURE à payer à la société GSM EUROPE la somme de 31.075,36 € avec intérêts à compter du 18 février 2004 et 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
- dit que la société FEUGAS n'est pas fondée à retenir des pénalités de retard et autres retenues à l'encontre de la société SOPREMA,
- condamné la société FEUGAS à payer à la société SOPREMA 45.912,92 € avec intérêts à compter du 2 octobre 2003 et 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
- dit que l'EURL BASCO LANDAISE D'ARCHITECTURE doit être condamnée à relever et garantir la société GSM EUROPE de la condamnation mise à sa charge sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision.
L'EURL BASCO LANDAISE D'ARCHITECTURE a régulièrement interjeté appel de cette décision le 25 novembre 2004.
L'EURL BASCO LANDAISE D'ARCHITECTURE conclut le 13 février 2007 à l'incompétence du Tribunal de Commerce de MONT DE MARSAN et, subsidiairement, à l'irrecevabilité de l'action de la société GSM EUROPE faute d'avoir saisi au préalable le conseil des architectes.
Infiniment subsidiairement, elle conclut au débouté de la société GSM EUROPE et à sa condamnation à lui payer 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Par conclusions du 7 novembre 2006, la SA FEUGAS demande à la Cour de :
- confirmer la décision en ce qu'elle a condamné la société GSM EUROPE à lui payer les factures nos 0303011 et 0303012 d'un montant respectif de 5.979,98 € et de 1.954,73 €,
- dire qu'aucune pénalité ne doit être retenue sur la facture no 0301009,
- condamner la société GSM EUROPE à lui payer 32.808,65 € avec intérêts à compter du 2 septembre 2003, date de la mise en demeure avec capitalisation des intérêts,
- débouter la société SOPREMA de ses demandes,
- condamner les sociétés GSM EUROPE et SOPREMA à lui payer 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Par conclusions du 19 décembre 2006, la SAS SOPREMA ENTREPRISES, venant aux droits de la SA SOPREMA, demande à la Cour la confirmation de la décision, outre la condamnation de la société FEUGAS et de l'EURL BASCO LANDAISE D'ARCHITECTURE, 5.000 € de dommages et intérêts pour procédure abusive et 8.000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Par conclusions du 3 avril 2007, la société GSM EUROPE demande à la Cour la confirmation de la décision, outre 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Vu les dernières conclusions des parties ;
Vu l'ordonnance de clôture en date du 13 novembre 2007 ;
SUR CE :
Attendu que l'EURL BASCO LANDAISE D'ARCHITECTURE fait valoir à l'appui de sa déclaration d'appel que le Tribunal de Commerce n'est pas compétent pour connaître du litige étant architecte professionnel libéral ;
Que, par ailleurs, la demande est irrecevable du fait de l'existence d'une clause compromissoire dans le contrat de maîtrise d'oeuvre, imposant de saisir pour avis le conseil régional de l'ordre des architectes avant toute procédure judiciaire ;
Qu'au fond, elle conteste les deux fautes reprochées et l'existence d'un lien de causalité entre celles-ci et le préjudice allégué ;
Que sur les factures de la société FEUGAS hors marché, la société GMS a cherché à ne pas les régler en invoquant un motif fallacieux ;
Qu'en toute hypothèse, le manquement à l'obligation d'information qui lui est reproché ne peut engendrer un préjudice équivalent au montant de la facture impayée ;
Que concernant les pénalités de retard, elle a correctement mené sa mission, la société GSM EUROPE ayant de sa propre autorité retenu des sommes excédant le montant des pénalités de retard déterminé par ses soins ;
Attendu que la société FEUGAS rappelle que la Cour est juridiction d'appel du Tribunal de Commerce et est saisie par l'effet dévolutif de l'ensemble du litige ;
Qu'au fond, la société GSM EUROPE est tenue du paiement des factures, les réserves ayant été levées et le retard étant le fait de la société SOPREMA ;
Que les relations du maître de l'ouvrage avec l'architecte lui sont inopposables ;
Attendu que la SAS SOPREMA ENTREPRISES conclut à la compétence de la Cour et au fond soutient que le calendrier avancé par la société FEUGAS n'est pas contractuel ;
Que les pièces communiquées sont en partie inexploitables ou manquantes ;
Que la société FEUGAS est seule responsable du retard, ayant livrée tardivement la charpente métallique et par étapes et ayant changé l'économie du contrat notamment sur l'habillage des hublots ;
Qu'en outre, le calcul de ces pénalités ne respecte pas le plafonnement contractuel prévu ;
Qu'enfin, le calcul des jours doit prendre en compte les intempéries ;
Qu'elle n'est pour rien dans la dégradation de la dalle béton ni du jambage de porte coupe feu ;
Attendu que la société GSM EUROPE conclut à la confirmation de la décision, soulignant qu'elle a attrait l'EURL BASCO LANDAISE D'ARCHITECTURE à une procédure déjà engagée pour assurer sa défense ;
Que l'EURL BASCO LANDAISE D'ARCHITECTURE a commis des fautes engageant sa responsabilité en faisant état de réserves non justifiées, en ne l'informant pas sur l'existence de travaux supplémentaires et en faisant des erreurs sur les pénalités de retard dues ;
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Sur l'exception d'incompétence :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur cette exception, la Cour ayant plénitude de compétence et étant investie de l'entière connaissance du litige ;
Sur l'irrecevabilité :
Attendu que le contrat d'architecte conclu entre l'EURL BASCO LANDAISE D'ARCHITECTURE et la société GSM EUROPE prévoit que :
"en cas de litige portant sur l'exécution du présent contrat, les parties conviennent de saisir pour avis le conseil régional de l'ordre des architectes dont relève l'architecte, avant toute procédure judiciaire, sauf conservatoire." ;
Attendu que ce contrat ne prévoit aucune dérogation à la saisine préalable du conseil de l'ordre pour avis et ne distingue pas selon qu'il y ait action directe ou appel en garantie ;
Que cet engagement contractuel de la société GSM EUROPE ne fait pas obstacle aux droits de la défense et que les courriers envoyés à l'ordre des architectes ne faisaient état d'aucune demande d'avis avant introduction d'une procédure judiciaire ;
Que l'appel en garantie de la société GSM EUROPE à l'encontre de l'EURL BASCO LANDAISE D'ARCHITECTURE est irrecevable ;
Attendu qu'il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de l'EURL BASCO LANDAISE D'ARCHITECTURE les frais irrépétibles engagés ;
AU FOND :
Sur le solde du marché :
Attendu qu'il convient d'observer que la société GSM EUROPE n'articule aucun moyen envers la société FEUGAS et ne conteste pas en être débitrice, ses conclusions d'appel visant à la confirmation du jugement qui a condamné l'EURL BASCO LANDAISE D'ARCHITECTURE à la garantir des condamnations prononcées contre elle ;
Attendu que la société FEUGAS interjette appel incident sur le montant des condamnations retenues et le point de départ des intérêts, imputant le retard à son sous traitant la société SOPREMA ;
Attendu que la société GSM EUROPE ne fait valoir aucun moyen de ce chef ;
Attendu que la société GSM EUROPE est débitrice de trois factures nos 0303011, 0303012 et 0301009 d'un montant respectif de 5.979,98 €, 2.954,73 € et 32.808,65 € ;
Attendu que sur cette dernière facture, l'EURL BASCO LANDAISE D'ARCHITECTURE a retenu 18.227,04 € au titre des pénalités de retard, soit 20 jours ;
Attendu que le Tribunal a limité ces pénalités à la somme de 10.668 €, soit 14 jours et a donc condamné la société GSM EUROPE à payer la somme de 31.075,36 € montant du solde du marché ;
Attendu que la décision sera confirmée sur ce point, la société FEUGAS ne pouvant opposer à son cocontractant les déficiences éventuelles de son sous traitant et devant livrer l'ouvrage dans les délais prévus ;
Qu'en revanche, les sommes dues porteront intérêts à compter du 10 octobre 2003 date de la mise en demeure, le courrier du 2 septembre 2003 ne valant pas mise en demeure ;
Sur les comptes à faire entre la société FEUGAS et la société SOPREMA :
Attendu que la société SOPREMA réclame paiement du solde du marché soit 45.912,92 € ;
Attendu que la société FEUGAS refuse de payer ce solde du fait du retard pris par le chantier et des dégradations commises par son sous traitant ;
Sur les pénalités de retard :
Attendu que la décision déférée doit être confirmée par adoption de ses motifs qui répondent aux conclusions d'appel, étant observé que les courriers échangés entre les parties établissent la responsabilité de la société FEUGAS dans le retard initial apporté à la livraison de la charpente ;
Que, par ailleurs, le courrier du 2 décembre 2002 établit que le planning contractuel n'a pas été suivi et qu'aucun autre planning soumis à la signature de la société SOPREMA n'a été dressé ;
Qu'enfin, la société FEUGAS ne rapporte pas la preuve que la société SOPREMA n'aurait pas respecté le cahier des charges de la pose des produits, notamment le dapalon et aurait été source de retard ;
Sur les dégradations :
Attendu que la société SOPREMA conclut, à juste titre, qu'aucune constatation contradictoire n'a été faite et que la décision sera confirmée par adoption de ces motifs ;
Attendu que le fait d'interjeter appel ne caractérise pas à lui seul un abus susceptible d'ouvrir droit à dommages et intérêts de ce chef ;
Que la société SOPREMA sera déboutée de sa demande en dommages et intérêts pour procédure abusive ;
Attendu qu'il n'est pas inéquitable de laisser à la charge des parties les frais irrépétibles engagés en cause d'appel ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Après en avoir délibéré, statuant publiquement, par décision contradictoire et en dernier ressort ;
Réforme la décision en ce qu'elle a condamné l'EURL BASCO LANDAISE D'ARCHITECTURE à garantir la société GSM EUROPE et aux dépens ;
Et statuant à nouveau,
Dit irrecevable l'action en garantie de la société GSM EUROPE faute de saisine préalable du conseil de l'ordre des architectes ;
La confirme pour le surplus sauf à fixer le point de départ des intérêts sur la somme de 31.075,36 € au 10 octobre 2003, les dits intérêts étant capitalisés dans les conditions de l'article 1154 du Code Civil à compter du 10 novembre 2005 date de la première demande ;
Déboute la société SOPREMA de sa demande en dommages et intérêts pour procédure abusive ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile au profit d'aucune des parties en cause d'appel ;
Condamne la société GSM EUROPE et la société FEUGAS aux dépens de la procédure de première instance et d'appel et autorise la SCP LONGIN et Maître VERGEZ, avoués, à les recouvrer conformément à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.
LE GREFFIER EN CHEF, LE PRESIDENT,
Claudie PUJAU Roger NEGRE