PPS / NG
No 2864 / 07
COUR D' APPEL DE PAU
Chambre sociale
ARRET DU 28 / 06 / 2007
Dossier : 05 / 01820
Nature affaire :
Demande d' indemnités liées à la rupture du contrat de travail pour motif économique
Affaire :
Pierrette X...
C /
E. U. R. L. LE TRINQUET
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R E T
prononcé par Monsieur PUJO- SAUSSET, Président,
en vertu de l' article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile,
assisté de Madame BLANCHE, Greffier,
à l' audience publique du 28 JUIN 2007
date indiquée à l' issue des débats.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l' audience publique tenue le 03 mai 2007, devant :
Monsieur PUJO- SAUSSET, Président
Madame ROBERT, Conseiller
Monsieur GAUTHIER, Conseiller
assistés de Madame BLANCHE, Greffier, présent à l' appel des causes.
Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.
dans l' affaire opposant :
APPELANTE :
Madame Pierrette X...
...
65140 RABASTENS DE BIGORRE
Rep / assistant : Maître BONNEMASON- CARRERE, avocat au barreau de PAU
(bénéficie d' une aide juridictionnelle Totale numéro 2005 / 3309 du 01 / 07 / 2005 accordée par le bureau d' aide juridictionnelle de PAU)
INTIMEE :
E. U. R. L. LE TRINQUET
66 avenue Didier Daurat
64000 PAU
Rep / assistant : Maître PITICO, avocat au barreau de PAU
sur appel de la décision
en date du 27 AVRIL 2005
rendue par le CONSEIL DE PRUD' HOMMES DE PAU
FAITS ET PROCÉDURE
Mme Pierrette X... a été embauchée par la société LE NEW TRINQUET propriétaire de l' hôtel, bar, restaurant LE TRINQUET à PAU, selon contrat à durée indéterminée du 19 janvier 2001, en qualité de serveuse.
Un avenant à son contrat de travail a été signé le 29 juillet 2001.
Suivant acte sous seing privé du 15 octobre 2003, la société LE NEW TRINQUET a cédé l' hôtel bar restaurant à l' EURL LE TRINQUET, constituée par Mme Martine Y..., gérante et associée unique.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 24 novembre 2003 l' EURL LE TRINQUET a convoqué Mme Pierrette X... à un entretien préalable à un licenciement pour motif économique fixé au 3 décembre 2003.
La salariée a effectué son préavis jusqu' au 13 février 2004 et a reçu son certificat de travail ainsi que l' attestation ASSEDIC.
Par requête du 13 avril 2004, Mme Pierrette X... a fait citer l' EURL LE TRINQUET à comparaître devant le bureau de conciliation du conseil des prud' hommes de PAU. Contestant son licenciement pour motif économique, elle a demandé paiement de la somme de 8 940 € au titre de la violation de la priorité de réembauchage, de la somme de 2 980 € au titre de la violation des dispositions relatives à l' assistance du salarié lors de l' entretien préalable de 8 940 € pour rupture abusive du contrat de travail, 10 000 € pour dommages- intérêts pour préjudice moral et financier, ainsi qu' une indemnité de 1 500 € au titre de l' article 700 du nouveau code de procédure civile.
À défaut de conciliation l' affaire a été renvoyée devant le bureau de jugement.
Par jugement du 27 avril 2005 auquel il y a lieu de renvoyer pour plus ample exposé des faits et des prétentions initiales des parties, le conseil des prud' hommes de PAU a :
- débouté Mme Pierrette X... de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
- rejeté la demande reconventionnelle de défendeur ;
- laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens.
Par lettre recommandée avec avis de réception en date du le 20 mai 2005, Mme Pierrette X... représentée par son conseil, a interjeté appel de cette décision.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par conclusions écrites, reprises oralement, auxquelles il convient de se référer, Mme Pierrette X... demande à la Cour de :
- réformer en toutes ses dispositions le jugement entrepris en date du 27 avril 2005,
- dire et juger que le licenciement pour motif économique est sans cause réelle et sérieuse,
- dire et juger que la rupture du contrat de travail est abusive,
- en conséquence, condamner l' EURL LE TRINQUET à lui verser les sommes de :
* 8 940 € bruts au titre de la violation de la priorité de réembauchage,
* 8 940 € bruts à titre d' indemnité pour rupture abusive du contrat de travail,
* 10 000 € à titre de dommages- intérêts en réparation de son préjudice moral,
- de condamner l' EURL LE TRINQUET au paiement de la somme de 2000 € sur le fondement de l' article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu' aux entiers dépens.
L' appelante soutient :
- qu' il est particulièrement malvenu de justifier le licenciement pour motif économique par une restructuration nécessitée par des pertes financières ;
- qu' aucune proposition de modification de son contrat de travail ne lui a été faite,
- que l' employeur a violé la clause de priorité de réembauche prévue dans la notification de la lettre de licenciement ; que les modalités la mise en oeuvre de cette priorité n' ont pas été précisées.
Par conclusions écrites reprises oralement, auxquelles il convient de se référer, l' EURL LE TRINQUET demande au contraire de :
- confirmer dans toutes ses dispositions le jugement du conseil des prud' hommes de PAU du 27 avril 2005,
- de débouter Mme Pierrette X... de l' ensemble de ses demandes,
- de condamner Mme Pierrette X... à lui payer la somme de 1000 € au titre les frais irrépétibles ;
- de la condamner aux dépens.
L' intimée fait valoir :
- que le licenciement économique de Mme Pierrette X... repose sur un motif réel et sérieux,
- que Mme Pierrette X... n' a jamais manifesté l' intention d' user de la priorité de réembauchage ; qu' en tout état de cause elle n' a pas engagé de serveuse après le départ de Mme Pierrette X... ;
- qu' aucun principe n' interdit à une gérante de société d' exercer, en plus de son mandat social, quelques fonctions que ce soit, serveuse ou autres.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Attendu que l' appel, interjeté dans les formes et délais prescrits par la loi, sera déclaré recevable.
Attendu que par lettre du 15 décembre 2003 fixant les termes du litige, l' EURL LE TRINQUET a notifié à Mme Pierrette X... son licenciement pour motif économique, en indiquant :
" lors de la reprise de l' établissement, nous avons dû restructurer certains postes. Afin de palier aux problèmes économiques rencontrés jusqu' alors, vos fonctions me seront désormais attribuées. En conséquence votre poste est supprimé. Je vous rappelle que vous bénéficiez d' une priorité de réembauchage pendant un an à compter de la date du rupture du contrat de travail ".
Sur le motif économique du licenciement
Attendu que Mme Pierrette X... soulève tout d' abord l' absence de motif économique du licenciement, soulignant :
- que le seul actif a été cédé lors de la cession du fonds de commerce, de sorte que le passif et les dettes annexes restaient à la charge du vendeur,
- que ce passif a dû faire l' objet d' un règlement ou d' un accord entre les parties lors de la fixation du prix de vente,
- qu' un délai de trois mois s' est écoulé entre la date de début d' activité et la notification de son licenciement,
- que l' employeur ne lui a pas proposé de modification de son contrat au regard de son ancienneté et de sa polyvalence.
Attendu qu' aux termes de l' article L. 321- 1 du code du travail, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne salariée, résultant d' une suppression ou transformation d' emploi ou d' une modification refusée par le salarié, d' un élément essentiel du contrat de travail, consécutive notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques.
Attendu qu' en l' espèce, la suppression d' emploi invoquée doit être la conséquence directe d' un des motifs économiques énoncés par l' article sus- énoncé
Attendu qu' il convient de rappeler que par acte sous seing privé enregistré le 27 octobre 2003, la société NEW TRINQUET a cédé à la S. A. R. L. LE TRINQUET un fonds de commerce de bar, hôtel restaurant, trinquet, squash, tennis ;
Qu' y sont indiqués les montants de chiffre d' affaires hors taxes :
- pour l' exercice du 1er juillet 2001 au 30 juin 2001 : 529 006 €,
- pour l' exercice du 1er juillet 2001 au 30 juin 2002 : 525 588 €,
- pour l' exercice du 1er juillet 2002 au 30 juin 2003 : 461 478 €,
- pour la période du 1er juillet 2003 au 30 septembre 2003 : 119 927 € ;
Que les résultats mentionnés sont les suivants :
- pour l' exercice du 1er juillet 2000 au 30 juin 2001 :- 7369 €,
- pour l' exercice du 1er juillet 2001 au 30 juin 2002 :- 21 370 €,
- pour l' exercice du 1er juillet 2002 au 30 juin 2003 :- 26 957 €,
- pour la période du 1er juillet 2003 au 30 septembre 2003 :- 6739 € (estimation)
Attendu que s' il apparaît vraisemblable que le prix de cession a été fixé en fonction de cette situation, il ressort des chiffres ci- dessus repris, que la santé économique de l' activité cédée était dégradée, puisque le chiffre d' affaires était en régression constante depuis 2001 et que les résultats étaient négatifs depuis cette même année ;
Que ces éléments permettent d' établir que des mesures de réorganisation de l' entreprise étaient nécessaires à la sauvegarde de sa compétitivité ;
Qu' il était en effet indispensable que la nouvelle gérante, Mme Y... prenne les mesures nécessaires propres à assurer la pérennité du fond et entreprenne de redresser l' activité hôtelière ;
Qu' elle a ainsi décidé de réaliser des économies en supprimant le poste occupé par Mme Pierrette X..., pour remplir elle- même les fonctions de serveuse.
Attendu que le licenciement notifié le 15 décembre 2003 n' apparaît pas tardif en considération de la date de prise de possession du fonds de commerce cédé par l' EURL LE TRINQUET (15 octobre 2003).
Attendu que c' est à bon droit que le conseil des prud' hommes a retenu que tous les éléments constitutifs d' un licenciement économique étaient réunis en l' espèce ;
Que le licenciement de Mme Pierrette X... repose donc sur une cause réelle et sérieuse ;
Sur la violation de la priorité de réembauchage
Attendu que les premiers juges ont relevé avec pertinence que la lettre de licenciement mentionnait que la salariée bénéficiait d' une priorité de réembauchage pendant un an à compter de la date de la rupture du contrat de travail.
Attendu qu' aux termes de l' article L. 321- 14 du Code du travail, la priorité de réembauchage ne s' impose à l' employeur qu' à partir du jour où le salarié a demandé à en bénéficier.
Qu' en l' espèce, Mme Pierrette X... ne justifie pas de ce qu' elle a informé l' EURL LE TRINQUET de ce qu' elle userait de cette faculté, en cas d' emploi devenu disponible et compatible avec sa qualification.
Attendu que le jugement entrepris sera en conséquence confirmé en toutes ses dispositions.
Attendu que l' équité et la situation économique respective des parties ne commandent pas de faire droit à la demande fondée sur l' article 700 du nouveau code procédure civile.
Attendu que Mme Pierrette X... supportera la charge des dépens d' appel.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud' homale, et en dernier ressort ;
Déclare l' appel recevable,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement du conseil des prud' hommes de PAU en date du 27 avril 2005,
Dit n' y avoir lieu application des dispositions de l' article 700 du nouveau code procédure civile,
Condamne Mme Pierrette X... aux dépens d' appel.
Dit qu' ils seront recouvrés en la forme prévue en matière d' Aide Juridictionnelle.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Andrée BLANCHE Philippe PUJO- SAUSSET