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04/09/2024 | FRANCE | N°21/09699

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 04 septembre 2024, 21/09699


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRET DU 04 SEPTEMBRE 2024



(n°2024/ 283 , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/09699 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEW3S



Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Novembre 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n° F20/01143



APPELANTE



Madame [S] [Y]

[Adresse 1]
>[Localité 3]

Représentée par Me Nathan IFERGAN, avocat au barreau de PARIS





INTIMEE



S.A.S. CENTRE MEDICO CHIRURGICAL [Adresse 5]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par M...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRET DU 04 SEPTEMBRE 2024

(n°2024/ 283 , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/09699 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEW3S

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Novembre 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n° F20/01143

APPELANTE

Madame [S] [Y]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Nathan IFERGAN, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

S.A.S. CENTRE MEDICO CHIRURGICAL [Adresse 5]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Makani KOUROUMA, avocat au barreau de PARIS, toque : E1767

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Mai 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre, Président de formation,

Monsieur Didier LE CORRE, Président de chambre

Monsieur Stéphane THERME, Conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Philippine QUIL

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre et par Madame Philippine QUIL, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES :

Mme [Y] a été embauchée par le centre médico chirurgical [Adresse 5] en qualité d'agent administratif, employée, catégorie A, coefficient 176, à compter du 12 décembre 2019, suivant un contrat à durée déterminée jusqu'au 29 janvier 2020.

Le centre médico chirurgical [Adresse 5] est un centre de santé privé.

Mme [Y] a été victime d'un accident le 30 janvier 2020.

Mme [Y] a saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny le 28 mai 2020. Elle l'a saisi à nouveau le 03 décembre 2020.

Par jugement du 10 novembre 2021, le conseil de prud'hommes a :

Ordonné la jonction des dossiers n° 20/1143 et 20/3750.

Requalifié 1e contrat de travail à durée déterminée de Mme [Y] en un contrat de travail à durée indéterminée

Condamné le centre médico chirurgical [Adresse 5] à verser à Mme [Y] les sommes suivantes :

- 912,73 euros au titre de l'indemnité de requalification du contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée,

- 912,73 euros au titre de l'irrégu1arité de la procédure de licenciement,

- 912,73 euros au titre de l'indemnité compensatrice dé préavis

- 91,27 euros au titre des congés payés afférents,

- 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Rappelé que les créances salariales portent intérêts au taux légal à compter de la date de

réception de la convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation, soit le 16 juin 2020 et que les créances à caractère indemnitaire portent intérêts de droit à compter du jugement.

Ordonné à le centre médico chirurgical [Adresse 5] de remettre à Mme [Y] les documents sociaux conformes au jugement.

Débouté Mme [Y] du surplus de ses demandes.

Débouté le centre médico chirurgical [Adresse 5] de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et l'a condamnée aux dépens.

Mme [Y] a formé appel par actes du 24 novembre 2021 à 20h45 puis à 21h11.

La jonction des deux procédures d'appel a été ordonnée le 15 décembre 2022 par le magistrat en charge de la mise en état.

Par ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées le 08 mars 2022, auxquelles la cour fait expressément référence pour l'exposé des moyens, Mme [Y] demande à la cour de :

'ORDONNER la jonction des instances enregistrées sous les numéros 21/09700 et 21/09699;

CONFIRMER le jugement du Conseil de prud'hommes de BOBIGNY du 10 novembre 2021 en ce qu'il a :

o constaté la requalification du contrat à durée déterminée et la poursuite de la relation de travail au-delà du terme contractuel ;

o condamné le centre médico chirurgical [Adresse 5] au titre de l'indemnité de requalification, de l'indemnité pour irrégularité de la procédure, de l'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents ;

o condamné le centre médico chirurgical [Adresse 5] au titre des frais de justice

REFORMER le jugement du Conseil de prud'hommes de BOBIGNY du 10 novembre 2021 s'agissant des quantums de condamnation et en ce qu'il a débouté Mme [Y] de ses demandes au titre du temps de travail, de l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé et des demandes indemnitaires au titre du manquement à l'obligation de bonne foi et à la transmission erronée des documents de fin de contrat.

EN CONSEQUENCE :

o CONSTATER que le centre médico chirurgical [Adresse 5] a dissimulé une partie de l'activité de Mme [Y] en décembre 2019 et en janvier 2020 en indiquant un nombre d'heures de travail très largement inférieur à la réalité et en ne réglant pas non plus ces heures ainsi que les majorations afférentes ;

CONSTATER que Mme [Y] a travaillé au-delà de la durée légale du travail au cours du mois de janvier 2020 et que cette simple circonstance entraine la requalification du

contrat à temps partiel en contrat à temps complet ;

o CONSTATER que le centre médico chirurgical [Adresse 5] ne justifie pas du motif de recours au CDD du 12 décembre 2019, et, en toute hypothèse, que la relation de travail entre Mme [Y] et le centre médico chirurgical [Adresse 5] s'est poursuivie au-delà du terme fixé contractuellement au 29 janvier 2020 ;

o DIRE ET JUGER que la rupture du contrat de travail, intervenue sans procédure, à l'issue de la journée de travail du 30 janvier 2020 et que cette rupture est motivée par un motif discriminatoire, à savoir la survenance d'un accident de trajet ;

o FIXER que son salaire à la somme de 1.539,65 € sur la base d'un temps plein ;

o CONDAMNER le centre médico chirurgical [Adresse 5] à verser à Mme [Y] les sommes suivantes :

- 375,12 € à titre de rappel de salaire pour le mois de décembre 2019 et 37,51 € au titre des

congés payés afférents ;

- 147,17 € à titre de rappel de salaire et majoration pour heures supplémentaires pour le

mois de janvier 2020, et 14,71 € au titre des congés payés afférents ;

- 9 237,90 € au titre de l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé ;

- 1 539,65 € au titre de l'indemnité de requalification du contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée ;

- 1 539,65 € (1 mois) au titre de l'irrégularité de la procédure de licenciement, conformément aux dispositions de l'article L. 1235-2 du Code du travail

- 9 237,90 € (6 mois de salaires) au titre de l'indemnité pour licenciement nul prévue à l'article L. 1235-3-1 du Code du travail ;

- 1 539,65 € (1 mois de salaires) au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 153,96

€ au titre des congés payés afférents ;

- 5 000 € à titre de dommages intérêts pour le manquement à l'obligation d'exécuter de

bonne foi le contrat de travail ;

- 25 000 € à titre de dommages-intérêts pour le retard dans la transmission de l'attestation Pôle Emploi, l'établissement volontairement erroné dudit document et enfin le refus de télé-télédéclarer l'attestation au Pôle Emploi ;

- 5 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

ORDONNER à le centre médico chirurgical [Adresse 5] de remettre à Mme [Y] des documents de fin de contrat (attestation Pôle Emploi et Certificat de travail) conformes à l'arrêt à intervenir sous astreinte de 1.000 € par jour et par document de retard à compter du 15ème jour suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

DIRE ET JUGER que les condamnations de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la convocation des parties devant le Bureau de jugement, avec capitalisation des intérêts échus conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code civil ;

CONDAMNER le centre médico chirurgical [Adresse 5] aux entiers dépens.'

Par ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées le 08 juin 2022, auxquelles la cour fait expressément référence pour l'exposé des moyens, le centre médico chirurgical [Adresse 5] demande à la cour de :

'CONFIRMER le jugement de première instance en ce qu'il a débouté Mme [Y] de ses demandes relatives au rappel de salaire, à une majoration pour heures supplémentaires, à l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, à l'indemnité pour licenciement nul, aux dommages et intérêts pour le manquement à l'obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de travail, aux dommages et intérêts pour retard dans la transmission de l'attestation Pôle Emploi.

DIRE RECEVABLE ET FONDÉ l'appel incident du centre médico chirurgical [Adresse 5] et:

INFIRMER le jugement de première instance en ce qu'il a retenu qu'il y avait une requalification du contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée et en ce qu'il a condamné le centre médico chirurgical [Adresse 5] à verser à Mme [Y], les sommes suivantes : 912,73 euros au titre de l'indemnité de requalification ; 912,73 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ; 91,27 euros au titre des congés payés afférents ; 912,73 euros au titre de l'irrégularité de la procédure de licenciement, 1 000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure civile,

FIXER le salaire de référence à 1 393,18 euros

DEBOUTER Mme [Y] de l'intégralité de ses demandes.

CONDAMNER Mme [Y] à payer au le centre médico chirurgical [Adresse 5] 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC, ainsi que la condamner aux entiers dépens.'

L'ordonnance de clôture a été rendue le 26 mars 2024.

MOTIFS

Sur le rappel de salaire

A l'appui de sa demande de rappel de salaire Mme [Y] explique qu'elle a été engagée dans le cadre d'un contrat de travail à durée déterminée à temps partiel qui indiquait les périodes travaillées, dont les périodes n'ont pas été respectées par l'employeur au cours de la relation contractuelle. Elle explique qu'en raison de l'évolution des plannings elle a travaillé moins d'heures que prévues au mois de décembre 2019, puis qu'elle a travaillé plus d'heures au mois de janvier 2020, le temps prévu dépassant ainsi celui d'un temps plein.

Le centre médico chirurgical [Adresse 5] expose que le contrat de travail prévoyait une amplitude horaire qui comprenait une heure de pause, que Mme [Y] a travaillé une durée légèrement supérieure à celle initialement prévue pour le mois de décembre 2019, et qu'elle a été arrêtée pour raisons de santé au cours du mois de janvier 2020, sans jamais atteindre la durée d'un temps plein. Elle conteste la sincérité des plannings produits par Mme [Y].

En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux articles L. 3171-2 à L. 3171-4 du code du travail. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence de rappels de salaire, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Dans ses conclusions Mme [Y] développe les dates de présence et les horaires travaillés, procédant à un calcul des salaires, en appliquant pour une partie des majorations d'heures supplémentaires, ce qui constitue des éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur d'y répondre en fournissant ses propres éléments.

Comme le soutient l'intimée, les plannings produits par l'appelante sont de simples tableaux qui ne contiennent pas d'élément d'identification qui permettrait de les rattacher à l'employeur.

Le centre médico chirurgical [Adresse 5] produit la fiche du temps de présence de Mme [Y] éditée à partir du logiciel d'exploitation des horaires de badgeage de la salariée. Il en résulte que Mme [Y] a réalisé 81 heures au mois de décembre et 108h au mois de janvier 2020. Le temps de travail d'un temps plein n'a pas été atteint.

Les bulletins de paie démontrent que toutes les heures ont été réglées à Mme [Y], avec un décalage. Seule une partie des heures qui ont été réalisées au cours du mois a ainsi été réglée en décembre 2019, 38,27 heures, et le surplus des heures a été régularisé les mois qui ont suivi, au mois de janvier, puis au mois de février 2020 avec le paiement de 47,90 heures ce dernier mois alors qu'aucune activité n'a été accomplie pendant celui-ci.

Mme [Y] doit être déboutée de sa demande en paiement d'un rappel de salaire pour le mois de décembre 2019 et des congés payés afférents. Le jugement sera confirmé de ce chef.

La durée du temps de travail s'examine par semaine civile. Il résulte des temps de travail résultant des fiches de badgeages que Mme [Y] a travaillé plus que 35 heures au cours de certaines semaines du mois de janvier 2020, sans qu'aucune majoration à ce titre ne lui ait été versée pour lesdites heures, le taux horaire contractuel ayant toujours été appliqué. En appliquant le taux de majoration de 25%, le centre médico chirurgical [Adresse 5] doit en conséquence être condamné au paiement à Mme [Y] de la somme de 12,68 euros au titre du rappel des heures supplémentaires et celle de 1,26 euros au titre des congés payés afférents.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur l'indemnité pour travail dissimulé

Pour caractériser le travail dissimulé prévu par l'article L.8221-5 du code du travail la preuve de l'élément intentionnel de l'employeur doit être rapportée.

Si une condamnation en paiement de rappel d'heures supplémentaires est prononcée, la preuve de l'élément intentionnel de l'employeur n'est pas rapportée.

La demande d'indemnité formée à ce titre par Mme [Y] doit être rejetée.

Le jugement sera confirmé de chef.

Sur la requalification en contrat à durée indéterminée

Un contrat à durée déterminée ne peut être conclu que pour un motif prévu à l'article L.1242-2 du code du travail. En cas de contestation sur le motif de recours, il incombe à l'employeur de justifier de la réalité ce celui-ci.

Le contrat à durée déterminée a été conclu avec Mme [Y] au motif du remplacement d'une salariée absente dont le nom est précisé : Mme [L] [G]. L'appelante conteste la réalité de ce motif.

Le centre médico chirurgical [Adresse 5] justifie par les bulletins de paie de cette salariée qu'elle était effectivement absente pour maladie au cours des mois de décembre 2019 et janvier 2020, ce qui justifiait le recours au contrat à durée déterminée.

Il n'y a pas lieu de requalifier le contrat de travail en contrat à durée indéterminée en raison du motif du recours à ce contrat. Mme [Y] doit être déboutée de sa demande d'indemnité de requalification formée pour ce motif.

Le jugement qui a alloué une indemnité sera infirmé de ce chef.

Sur la poursuite du contrat de travail

En application de l'article L. 1243-11 du code du travail, lorsque la relation contractuelle se poursuit après l'échéance du terme du contrat à durée déterminée, celui-ci devient un contrat à durée indéterminée.

Le contrat de travail à durée déterminée de Mme [Y] terminait le 29 janvier 2020. Il résulte tant de l'échange de messages que Mme [Y] a eu avec sa responsable au cours de la journée du 30 janvier, que du relevé de badgeage de ses horaires qu'elle a travaillé cette journée-là. Le centre médico chirurgical [Adresse 5] a par ailleurs rempli un formulaire de déclaration d'un accident du trajet survenu le 30 janvier 2020. Le directeur du centre médico chirurgical [Adresse 5] a ensuite établi une attestation qui indique que Mme [Y] a travaillé dans l'établissement du 12 décembre 2019 au 30 janvier 2020.

Mme [Y] a ainsi travaillé au-delà du terme du contrat à durée déterminée, qui est en conséquence devenu un contrat à durée indéterminée.

L'indemnité prévue par l'article L. 1245-2 du code du travail n'est pas due lorsque le contrat à durée déterminée devient un contrat à durée indéterminée au motif de la poursuite des relations contractuelles. Mme [Y] doit être déboutée de sa demande d'indemnité et le jugement qui l'a allouée pour ce motif sera infirmé de ce chef.

Sur le licenciement

Mme [Y] fait valoir qu'il a été mis fin à son contrat de travail en raison de l'accident du trajet dont elle a été victime et demande la nullité du licenciement en invoquant l'article L. 1132-1 du code du travail.

L'article L1132-1 du code du travail dispose que ' Aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié, ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L 3221-3 des mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation ou identité sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou en raison de son état de santé ou de son handicap.'

L'article L. 1134-1 du code du travail dispose que 'Lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le candidat à l'emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en tant que de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.'

L'article L. 1132-4 du code du travail dispose que 'Toute disposition ou tout acte pris à l'égard d'un salarié en méconnaissance des dispositions du présent chapitre est nul.'

Mme [Y] présente les éléments de fait suivants.

Mme [Y] a eu un accident le 30 janvier 2020, qui a été qualifié d'accident du trajet, et elle a ensuite bénéficié d'un arrêt de travail, ce qui est établi par les certificats médicaux et la déclaration d'accident du trajet remplie par le centre médico chirurgical [Adresse 5] le 31 janvier 2020. Elle a travaillé la journée du 30 janvier 2020 et lorsqu'elle a demandé par un SMS échangé avec sa responsable ce qu'il en était de sa situation, il lui a été répondu de contacter le service des ressources humaines.

Le 14 février 2020 le service des ressources humaines lui a indiqué par mail que son contrat s'était terminé fin janvier 2020 et qu'elle n'était plus salariée de la structure. Les documents de fin de contrat ont été adressé à Mme [Y] les 25 février et 09 mars 2020, ce qui est établi par les courriers que le centre médico chirurgical [Adresse 5] a adressés.

Pris dans leur ensemble, ces éléments laissent supposer qu'il a été mis fin au contrat de travail de Mme [Y] en raison de son arrêt de travail, ce qui laisse supposer l'existence d'une discrimination relative à son état de santé.

Le centre médico chirurgical [Adresse 5] explique que la relation de travail est demeurée un contrat de travail à durée déterminée, contestant la poursuite des relations de travail.

L'employeur avait connaissance des horaires accomplis le 30 janvier 2020 résultant du relevé de badgeage, et a rémunéré Mme [Y] pour l'intégralité des heures ainsi effectuées. Il n'a pas adressé de courrier à Mme [Y] contestant son activité ce jour-là mais a établi une déclaration d'accident du trajet pour un accident survenu le 30 janvier puis une attestation indiquant expressément qu'elle avait travaillé jusqu'à cette date.

Malgré ces éléments qui démontrent une conscience de la poursuite des relations de travail, le centre médico chirurgical [Adresse 5] ne démontre pas pour quel motif il a été mis fin au contrat de travail de Mme [Y]. Faute pour l'employeur de prouver que la rupture du contrat de travail est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, la discrimination à l'égard de Mme [Y] en raison de son état de santé est établie.

La rupture du contrat de travail, qui s'analyse en un licenciement, est ainsi atteinte de nullité.

Sur les conséquences financières

Mme [Y] est fondée à obtenir l'indemnité prévue par l'article L. 1235-3-1 du code du travail. Le salaire mensuel prévu étant de 1 393,18 euros, le centre médico chirurgical [Adresse 5] doit être condamnée au paiement de la somme de 8 400 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

La durée du préavis prévu par la convention collective pour une ancienneté inférieure à deux années est d'un mois. Le centre médico chirurgical [Adresse 5] sera condamnée à payer à Mme [Y] la somme de 1 398,18 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et celle de 139,81 euros au titre des congés payés afférents.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

L'indemnité prévue par l'article L. 1235-2 du code du travail n'est prévue que pour une irrégularité lors de la procédure de licenciement alors qu'il a été prononcé pour une cause réelle et sérieuse, ce qui n'est pas le cas. Mme [Y] sera déboutée de sa demande.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur le manquement de l'employeur à l'obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de travail

La charge de la preuve du manquement de l'employeur et de ses conséquences incombe à Mme [Y].

Mme [Y] expose que le centre médico chirurgical [Adresse 5] a essayé d'échapper aux conséquences de l'accident du travail et a menti lors de l'enquête de la CPAM.

Aucun élément ne démontre que le centre médico chirurgical [Adresse 5] a tenté d'échapper aux conséquences de l'accident survenu le 30 janvier 2020, qui a été qualifié d'accident du trajet et non d'accident du travail. L'employeur a établi une déclaration, a fait mention de versions différentes de la salariée auprès de ses collègues, sans qu'il ne soit établi que ce propos de l'employeur exposé dans la déclaration est inexact. L'échange de SMS qui a eu lieu le jour de l'accident à 6h58 confirme qu'il a bien eu lieu avant l'arrivée de la salariée sur son lieu de travail.

Mme [Y] ne produit pas d'élément justifiant de la décision prise par la CPAM concernant sa situation.

Mme [Y] indique enfin que le médecin salarié du centre médico chirurgical [Adresse 5] a refusé de prescrire un arrêt de travail pour assurer la présence de la salariée à son poste de travail. Ce comportement n'est pas établi par les éléments produits.

Mme [Y] doit être déboutée de sa demande de dommages-intérêts.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les documents de fin de contrat

Mme [Y] forme une demande de dommages-intérêts au motif que les documents de fin de contrat ont été remis tardivement par l'employeur et qu'ils étaient erronés.

Mme [Y] produit plusieurs échanges dont il résulte que l'employeur a indiqué une date d'embauche au 1er décembre 2019, et non au 12 décembre, qu'il a établi une attestation pour chaque mois d'activité, et non une seule attestation pour la totalité de la période. L'employeur a procédé à une régularisation au cours du mois de mars 2020, document adressé le 11 du mois après une demande formée par la salariée le 04 mars 2019.

Mme [Y] ne justifie cependant d'aucun préjudice consécutif. Par courrier du 04 mars 2020 Pôle emploi lui a notifié un trop-perçu pour le mois de décembre 2019, mais au motif que l'appelante n'avait pas signalé son activité du mois de décembre et non pour une quelconque difficulté avec les documents de la fin de la relation de travail avec le centre médico chirurgical [Adresse 5].

La demande de dommages-intérêts doit être rejetée.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur la remise des documents

La remise d'un bulletin de paie récapitulatif, d'un certificat de travail et d'une attestation destinée à Pôle Emploi conformes à la présente décision est ordonnée. La situation ne justifie pas le prononcé d'une astreinte.

Sur les intérêts

Conformément aux dispositions des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil, les créances salariales portent intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation à comparaître devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes et les dommages et intérêts alloués à compter de la présente décision.

La capitalisation des intérêts sera ordonnée selon les dispositions de l'article 1343-2 du code civil par année entière.

Sur les dépens et frais irrépétibles

Mme [Y] et le centre médico chirurgical [Adresse 5] succombant tous deux partiellement en leurs demandes, chaque partie supportera la charge des dépens qu'elle a exposés et sera déboutée de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Infirme le jugement du conseil de prud'hommes, sauf en ce qu'il a requalifié le contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée, a débouté Mme [Y] de ses demandes de rappel de salaire pour le mois de décembre 2019, d'indemnité pour travail dissimulé, de dommages-intérêts pour inexécution du contrat de travail de bonne foi et de dommages-intérêts pour la transmission des documents de fin de contrat,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

Déboute Mme [Y] de sa demande d'indemnité de requalification,

Déboute Mme [Y] de sa demande d'indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement,

Condamne le centre médico chirurgical [Adresse 5] à payer à Mme [Y] les sommes suivantes :

- 12,68 euros au titre du rappel des heures supplémentaires et 1,26 euros au titre des congés payés afférents,

- 8 400 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul,

- 1 398,18 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 139,81 euros au titre des congés payés afférents,

Dit que les créances salariales sont assorties d'intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation à comparaître devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes et les dommages-intérêts alloués à compter de la présente décision, avec capitalisation des intérêts selon les dispositions de l'article 1343-2 du code civil,

Ordonne la remise d'un bulletin de paie récapitulatif, d'un certificat de travail et d'une attestation destinée à Pôle Emploi conformes à la présente décision et dit n'y avoir lieu à astreinte,

Dit que chacune des parties supportera la charge des dépens qu'elle a exposés,

Déboute les parties de leur demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 21/09699
Date de la décision : 04/09/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-09-04;21.09699 ?
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