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03/09/2024 | FRANCE | N°23/17963

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 3, 03 septembre 2024, 23/17963


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 3



ARRÊT DU 03 SEPTEMBRE 2024



(n° 292 , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/17963 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CIPSQ



Décision déférée à la cour : ordonnance du 04 octobre 2023 - président du TJ de Paris - RG n° 23/55698





APPELANTE



S.A. LEROY MERLIN FRANCE, RCS de Lille Métropole n° 3845

60942, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 11]

[Localité 5]



Représentée par Me Francine HAVET, avocat au barreau de ...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 3

ARRÊT DU 03 SEPTEMBRE 2024

(n° 292 , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/17963 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CIPSQ

Décision déférée à la cour : ordonnance du 04 octobre 2023 - président du TJ de Paris - RG n° 23/55698

APPELANTE

S.A. LEROY MERLIN FRANCE, RCS de Lille Métropole n° 384560942, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 11]

[Localité 5]

Représentée par Me Francine HAVET, avocat au barreau de PARIS, toque : D1250

Ayant pour avocat plaidant Me Isabelle MEURIN du cabinet ADEKWA, avocat au barreau de LILLE

INTIMES

M. [I] [O]

[Adresse 12]

[Localité 9] EMIRATS ARABES UNIS

Mme [T] [P] épouse [O]

[Adresse 12]

[Localité 9] EMIRATS ARABES UNIS

Représentés par Me Philippe GEGLO, avocat au barreau de PARIS, toque : C0649

Société ALLIANZ IARD, RCS de Nanterre n° 542110291, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée par Me Bruno THORRIGNAC, avocat au barreau de PARIS, toque : D0125

S.A. AXA FRANCE IARD, en qualité d'assureur de la société MB BAT, RCS de Nanterre n° 722057460, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 7]

Représentée par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111

Ayant pour avocat plaidant Me Sandrine DRAGHI-ALONSO de la SELARL CABINET DRAGHI-ALONSO, avocat au barreau de de PARIS

S.A.R.L. MB BAT, RS de Bobigny n°525255857, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

[Adresse 2]

[Localité 8]

Défaillant, un procès-verbal de l'article 659 du code de procédure civile ayant été dressé le 1er décembre 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 29 avril 2024, en audience publique, rapport ayant été fait par Valérie GEORGET, conseillère, conformément aux articles 804, 805 et 905 du CPC, les avocats ne s'y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Jean-Christophe CHAZALETTE, président de chambre

Anne-Gaël BLANC, conseillère

Valérie GEORGET, conseillère

Greffier lors des débats : Jeanne PAMBO

ARRÊT :

- PAR DÉFAUT

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Anne-Gaël BLANC, conseillère, le président de chambre empêché, et par Jeanne PAMBO, greffier, présent lors de la mise à disposition.

********

M. et Mme [O] sont propriétaires d'un appartement de quatre pièces dans une copropriété située au [Adresse 4].

Ils ont entrepris la rénovation de cet appartement.

Le 22 mars 2022, ils ont accepté un devis pour un montant de 75 571,74 euros établi par la société Leroy Merlin France, assurée auprès de la société Allianz IARD. Des devis rectificatifs ont, ensuite, été acceptés par les maîtres de l'ouvrage.

La société Leroy Merlin France a confié l'exécution de ces travaux à la société MB Bat, assurée auprès de la société Axa France IARD.

La réception contradictoire des travaux est intervenue le 21 décembre 2022 avec réserves.

M. et Mme [O] se sont plaints de diverses malfaçons.

Par actes extrajudiciaires des 17, 18 et 19 juillet 2023, M. et Mme [O] ont fait assigner les sociétés Allianz IARD, Leroy Merlin France, Axa France IARD, MB Bat devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris aux fins de voir :

condamner la société Leroy Merlin à payer aux époux [O] par provision la somme de 7 616 euros correspondant aux écarts de devis entre les devis facturés et les prestations réellement exécutées ;

condamner les sociétés Leroy Merlin et Allianz in solidum à payer aux époux [O] par provision, la somme de 1 653,41 euros correspondant au prix de la réfection du mur séparatif chambre/salle de bain ;

condamner les sociétés Leroy Merlin et Allianz in solidum à payer aux époux [O] par provision, la somme de 13 521,20 euros correspondant au prix des travaux de reprise nécessaire pour la remise en état de l'installation électrique ;

condamner la société Leroy Merlin et la société Allianz in solidum à payer par provision la somme de 51 382,90 euros aux époux [O] sur le fondement du droit commun en réparation de son préjudice immatériel ;

ordonner une expertise des lieux dépendant de l'ensemble immobilier situé à [Adresse 4], au motif qu'ils ont fait procéder à la rénovation complète de leur appartement par la société Leroy Merlin France pour un montant initial de 75 571,74 euros porté ensuite et successivement jusqu'à 88 289,86 euros le 9 octobre 2022 au titre d'un contrat de louage d'ouvrage en date du 22 mars 2022, aux termes duquel la réception des travaux était initialement fixée le 16 septembre 2022 et reportée au 14 octobre 2022 puis au 10 octobre 2022 puis au 25 novembre 2022 et que de très nombreuses réserves subsistaient lors de la réception contradictoire des travaux le 21 décembre 2022.

Par ordonnance réputée contradictoire du 4 octobre 2023, le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris a :

renvoyé les parties à se pourvoir sur le fond du litige ;

ordonné une expertise et désigné en qualité d'expert :

M. [S], avec mission de :

se rendre sur les lieux dans l'immeuble situé à [Adresse 4] (lot n°6) ;

se faire communiquer tous documents et pièces nécessaires à l'accomplissement de sa mission ;

s'entourer, si besoin est, de tout sachant et technicien de son choix ;

examiner les travaux exécutés par la société défenderesse, dire s'ils sont conformes aux devis et factures, déterminer s'il existe des défauts, malfaçons, non finitions et en rechercher les causes ;

décrire les travaux de reprise et procéder à un chiffrage desdits travaux ;

fournir tous éléments techniques et de fait de nature à déterminer les responsabilités encourues et évaluer les préjudices subis ;

fournir toutes les indications sur la durée prévisible des réfections ainsi que sur les préjudices accessoires qu`ils pourraient entraîner tels que privation ou limitation de jouissance ;

évaluer les différents troubles de jouissance subis ;

donner son avis sur les comptes entre les parties ;

condamné in solidum les sociétés Leroy-Merlin France et Allianz IARD à verser à M. [O] et Mme [O] la somme provisionnelle de 30 000 euros, outre celle de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires ;

condamné in solidum les sociétés Leroy Merlin France et Allianz IARD aux dépens de l'instance ;

rappelé que la présence ordonnance est exécutoire à titre provisoire.

Par déclaration du 7 novembre 2023, la société Leroy Merlin France a relevé appel de cette décision en ce qu'elle a :

condamné in solidum les sociétés Leroy Merlin France et Allianz IARD à verser à M. [O] et Mme [O] la somme provisionnelle de 30 000 euros, outre celle de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné in solidum les sociétés Leroy Merlin France et Allianz IARD aux dépens de l'instance.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 3 avril 2024, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens développés, la société Leroy Merlin France demande à la cour de :

infirmer l'ordonnance de référé rendue le 4 octobre 2023 par le président du tribunal judiciaire de Paris en ce qu'elle a :

condamné in solidum les sociétés Leroy Merlin France et Allianz IARD à verser à M. [O] et Mme [O] la somme provisionnelle de 30 000 euros, outre celle de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné in solidum les sociétés Leroy Merlin France et Allianz IARD aux dépens de l'instance.

statuant à nouveau,

à titre principal :

déclarer que les demandes de provisions des époux [O] se heurtent à des contestations sérieuses ;

en conséquence,

déclarer n'y avoir lieu à référé ;

inviter les époux [O] à mieux se pourvoir ;

débouter les époux [O] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

débouter les époux [O] de leur appel incident ;

à titre subsidiaire et si la cour décidait d'entrer en voie de condamnation à son encontre :

condamner in solidum les sociétés MB Bat et Axa France IARD à la garantir et la relever indemne de toutes condamnations qui seraient prononcées à son encontre, tant en principal qu'en frais et accessoires ;

débouter la société Allianz IARD de sa demande subsidiaire de faire application des termes et limites de la police d'assurance souscrite par elle, et notamment de la franchise ;

en tout état de cause :

condamner tout succombant à lui payer une somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner tout succombant aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 31 janvier 2024, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens développés, la société Axa France IARD demande à la cour de :

à titre principal :

confirmer l'ordonnance du juge des référés du tribunal judiciaire de Paris du 4 octobre 2023 en ce qu'elle n'a pas prononcé de condamnation à son encontre en sa qualité d'assureur de la société MB Bat ;

débouter la société Leroy Merlin France et son assureur, la société Allianz IARD, de toutes leurs demandes dirigées à son encontre ;

à titre subsidiaire :

appliquer la franchise contractuelle d'un montant de 1 976,95 euros ;

en tout état :

condamner in solidum la société Leroy Merlin France, son assureur, la société Allianz IARD, et tout autre succombant à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner in solidum la société Leroy Merlin France, son assureur, la société Allianz IARD, et tout autre succombant aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Grappotte Benetreau, dans les termes de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 11 avril 2024 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens développés, la société Allianz IARD demande à la cour de :

infirmer l'ordonnance de référé rendue le 4 octobre 2023 par le président du tribunal judiciaire de Paris en ce qu'elle a :

condamné in solidum les sociétés Leroy Merlin France et Allianz IARD à verser à M. [O] et Mme [O] la somme provisionnelle de 30 000 euros, outre celle de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné in solidum les sociétés Leroy Merlin France et Allianz IARD aux dépens de l'instance ;

statuant à nouveau,

à titre principal :

juger que les demandes de provisions formulées par les époux [O] se heurtent à des contestations sérieuses ;

en conséquence,

débouter M. et Mme [O] ou tout autre partie de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions formulées à son encontre ;

à titre subsidiaire et si la cour décidait d'entrer en voie de condamnation à son encontre :

condamner in solidum les sociétés MB Bat et Axa France IARD à la garantir et la relever indemne de toutes condamnations qui seraient susceptibles d'être prononcées à son encontre, tant en principal qu'en frais et accessoires ;

appliquer les termes et limites de la police d'assurance souscrite par la société Leroy Merlin France auprès d'elle et notamment l'opposabilité de la franchise libellée comme suit :

garantie décennale : 15 000 euros

garanties complémentaires : 15 000 euros ;

en tout état de cause :

condamner M. et Mme [O] ou tout succombant à lui payer la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner tout succombant aux entiers dépens.

Dans leurs dernières conclusions déposées et notifiées le 2 avril 2024 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens développés, M. et Mme [O] demandent à la cour de :

juger que la société Leroy Merlin France, appelant principal ne sollicite par l'infirmation de l'ordonnance déféré en ce qu'elle ordonne une expertise ;

confirmer l'ordonnance du 4 octobre 2023 de M. le président du tribunal judiciaire de Paris en ce qu'elle a ordonné une expertise et désigné en qualité d'expert M. [S] et confirmer en tous points de la mission qu'il lui a fixée ;

confirmer l'ordonnance du 4 octobre 2023 de M. le président du tribunal judiciaire de Paris en ce qu'elle a condamné in solidum les sociétés Leroy Merlin France et Allianz IARD à leur verser une somme provisionnelle outre celle de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance ;

statuant à nouveau sur le quantum de la provision ;

infirmer le montant de la provision accordée fixée par M. le président du tribunal judiciaire de Paris à la somme de 30 000 euros ;

condamner la société Leroy Merlin France à leur payer par provision, à la somme de 7 616 euros correspondant aux écarts de devis entre les devis facturés et les prestations réellement exécutées ;

condamner in solidum la société Leroy Merlin France et Allianz IARD à leur payer par provision, la somme de 1 653,41 euros, correspondant au prix de la réfection du mur séparatif chambre / salle de bain ; alors que la responsabilité de cette dernière n'est pas sérieusement contestable sur le fondement de la responsabilité de droit commun (vices et défauts cachés) ;

condamner in solidum la société Leroy Merlin France et Allianz IARD à leur payer par provision la somme de 13 521,20 euros correspondant au prix des travaux de reprise nécessaire pour la remise en état de l'installation électrique ;

condamner in solidum la société Leroy Merlin France à leur payer par provision la somme de 78 391 euros sur le fondement du droit commun en réparation de leur préjudice immatériel, l'appartement étant toujours inhabitable 18 mois après la date de livraison promise compte tenu de l'installation électrique, sauf à parfaire ;

condamner toutes personnes succombantes in solidum à leur payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner toutes personnes succombantes in solidum aux entiers dépens d'appel.

La société Leroy Merlin France a fait signifier la déclaration d'appel le 1er décembre 2024 et ses conclusions à la société MB Bat le 18 janvier 2024 par acte de commissaire de justice.

La société MB Bat n'a pas constitué avocat.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 25 avril 2024.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties susvisées pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

Sur ce,

Il sera observé, à titre liminaire, que le chef de dispositif de l'ordonnance entreprise qui ordonne une expertise judiciaire n'est pas frappé d'appel.

Par ailleurs, la note et les pièces produites spontanément en cours de délibéré par M. et Mme [O], sans autorisation de la cour, seront écartées des débats.

Sur les demandes de provisions

Aux termes de l'article 835, alinéa 2, du code de procédure civile, dans les cas où l'existence d'une obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Le premier juge a condamné la société Leroy Merlin France in solidum avec son assureur, la société Allianz IARD, à payer à M. et Mme [O] la somme provisionnelle de 30 000 euros sans préciser la nature des préjudices ainsi indemnisés.

Faisant état de contestations sérieuses, les sociétés Leroy Merlin France et Allianz IARD poursuivent l'infirmation de l'ordonnance de ce chef et le rejet des demandes de M. et Mme [O].

De leur côté, M. et Mme [O] poursuivent l'infirmation de l'ordonnance entreprise quant au quantum de la provision accordée.

- Sur la demande de provision au titre des erreurs de facturation

M. et Mme [O] font valoir que la société Leroy Merlin France a perçu à tort la somme de 7 616 euros en raison des erreurs affectant ses devis.

Pour fonder leur demande de provision à ce titre, ils se bornent à produire un document intitulé 'analyse trop perçus 29122022" (pièce 30) rédigé par leurs soins.

Mais cette pièce n'apporte pas la démonstration du trop-perçu allégué.

La société Leroy Merlin France oppose à juste titre que cette demande se heurte à une contestation sérieuse.

Il n'y a pas lieu à référé sur cette demande.

- Sur la demande de provision au titre de la réfection du mur séparatif chambre/salle de bain

M. et Mme [O] demandent une provision de 1 653, 41 euros correspondant au prix de la réfection du mur séparatif chambre / salle de bain. Ils exposent que, postérieurement à la réception des travaux, des traces de jaunissement, d'humidité et de boursouflures sur le mur séparatif chambre / salle de bain sont apparues. Ils soutiennent que les dégradations observées ne peuvent être dues qu'à la mauvaise préparation du mur par la société MB Bat. Ils produisent les rapports des sociétés Antar Bâtiment, Repartim (leurs pièces 26 et 27), un rapport d'expertise dégât des eaux rédigé par la société Euroxo (leur pièce 37) ainsi qu'un devis au titre des réparations nécessaires établi par la société Antar Bâtiment (leur pièce 31).

La société Leroy Merlin France oppose à juste titre que les pièces produites par les maîtres de l'ouvrage n'établissent pas que les désordres dénoncés sont imputables aux travaux litigieux alors, de surcroît, que des opérations d'expertise sont en cours sur ce point ainsi que sur le coût des éventuels travaux de reprise.

L'obligation d'indemnisation de la société Leroy Merlin France se heurte donc à une contestation sérieuse.

Il n'y a pas lieu à référé sur la demande de provision.

- Sur la demande de provision au titre de la reprise de l'installation électrique

M. et Mme [O] demandent une provision de 13 521, 60 euros correspondant au prix des travaux de reprise de l'installation électrique.

Ils affirment qu'il résulte du devis de la société Leroy Merlin France, des échanges et du montant de la prestation facturée que la mission confiée à la société Leroy Merlin France consistait en la création et le câblage de nouveaux circuits électriques dans tout l'appartement, sauf dans la chambre 3. Ils exposent que l'expert judiciaire a sollicité l'avis d'un sapiteur qui a relevé que l'installation électrique ne présentait pas la conformité nécessaire. Ils ajoutent que, lors de l'achat de l'appartement, celui-ci était conforme alors qu'il est désormais inhabitable car dangereux. Ils font valoir qu'il appartenait en tout état de cause à la société Leroy Merlin France de les aviser du danger encouru.

La société Leroy Merlin France oppose qu'il résulte des devis signés par M. et Mme [O] que sa mission concernant le poste électricité était limitée. Elle affirme qu'il a été constaté que les maîtres de l'ouvrage avaient manipulé à son insu les ouvrages électriques à plusieurs reprises au cours du chantier.Elle ajoute que des entreprises tierces, notamment la société Antar bâtiment, ont été mandatées, avant et après son intervention, pour réaliser des travaux sur l'installation électrique. Elle fait valoir qu'après la réception des travaux, M. et Mme [O] ont fait intervenir au moins deux entreprises qui ont modifié l'installation électrique.

Il résulte des moyens développés par la société Leroy Merlin France et du rapprochement des pièces produites par les parties que l'obligation d'indemnisation de la société Leroy Merlin France se heurte à une contestation sérieuse. Les fautes qui lui sont reprochées ainsi que le préjudice en découlant font en outre l'objet d'une expertise. La complexité technique de la question relative à l'installation électrique a d'ailleurs conduit l'expert à recueillir l'avis d'un sapiteur.

Les questions des responsabilités encourues et de l'indemnisation du préjudice matériel éventuellement subi par les maîtres de l'ouvrage relèvent de la seule appréciation du juge du fond.

Il n'y a donc pas lieu à référé sur cette demande de provision.

- Sur la demande de provision au titre du préjudice de jouissance

M. et Mme [O] sollicitent une provision de 78 391 euros à valoir sur l'indemnisation du préjudice immatériel subi.

Ils exposent que l'appartement est inhabitable compte tenu des désordres affectant l'installation électrique, qu'ils ne peuvent vivre dans ce logement ou le mettre en location, que résidant à [Localité 9] ils ont été contraints de financer des déplacements à [Localité 10] pour le suivi du chantier et d'assumer des frais de séjour et de garde meubles importants. Ils ajoutent que la société Leroy Merlin France est seule responsable du retard significatif de livraison.

La société Leroy Merlin France conteste être responsable des non-conformités alléguées et du retard de livraison. Elle ajoute que le caractère inhabitable de l'appartement n'est pas démontré. Elle fait valoir que l'éloignement géographique des maîtres de l'ouvrage pendant la durée du chantier ne lui est pas imputable.

La demande de provision au titre du préjudice matériel relatif notamment à l'installation électrique se heurte à une contestation sérieuse ainsi que jugé précédemment. Par conséquent, la demande de provision formée contre la société Leroy Merlin France au titre du préjudice de jouissance subi en raison des désordres invoqués se heurte également à une contestation sérieuse qui devra, le cas échéant, être tranchée par le juge du fond.

De même, ni la faute de la société Leroy Merlin France pour le retard de livraison reproché par les maîtres de l'ouvrage ni le préjudice subi en lien avec une telle faute ne sont démontrés à ce stade par les pièces produites. En conséquence, l'obligation d'indemnisation de la société Leroy Merlin se heurte à une contestation sérieuse.

Il n'y a pas lieu à référé sur la demande de provision au titre du préjudice de jouissance.

Il sera donc dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes de provisions formées par M. et Mme [O].

L'ordonnance entreprise sera infirmée en ce qu'elle a condamné in solidum les sociétés Leroy Merlin France et Allianz IARD à payer la somme provisionnelle de 30 000 euros à M. et Mme [O].

Sur les demandes en garantie

Les demandes en garantie formées à titre subsidiaire sont sans objet dès lors qu'il n'y a pas lieu à référé sur les demandes principales de M. et Mme [O].

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Il sera rappelé que la partie défenderesse à une mesure ordonnée sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile ne peut être considérée comme une partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile. En effet, les mesures d'instruction sollicitées avant tout procès le sont au seul bénéfice de celui qui les sollicite, en vue d'un éventuel procès au fond, et sont donc en principe à la charge de ce dernier.

Eu égard au sens de l'arrêt, l'ordonnance sera infirmée en ce qu'elle a condamné in solidum les sociétés Leroy Merlin France et Allianz IARD aux dépens et à payer la somme de 2 000 euros à M. et Mme [O] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

M. et Mme [O] seront condamnés aux dépens de première instance et d'appel.

Les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

Statuant dans les limites de l'appel,

Ecarte des débats la note et les pièces produites en cours de délibéré par M. et Mme [O] ;

Infirme l'ordonnance entreprise en ce qu'elle condamne in solidum les sociétés Leroy Merlin France et Allianz IARD à payer la somme provisionnelle de 30 000 euros à M. et Mme [O] outre celle de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'elle condamne in solidum les sociétés Leroy Merlin France et Allianz IARD aux dépens ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant ;

Dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes de provisions formées par M. et Mme [O] ;

Dit sans objet les demandes en garantie ;

Condamne M. et Mme [O] aux dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Me Grappotte Benetreau ;

Rejette les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA CONSEILLÈRE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 23/17963
Date de la décision : 03/09/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-09-03;23.17963 ?
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