Copies exécutoires République française
délivrées aux parties le : Au nom du peuple français
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 5
ORDONNANCE DU 30 AOUT 2024
(n° , 3 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/13576 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CJ2TO
Décision déférée à la Cour : du 25 Mars 2024 - Tribunal de proximité de VILLEJUIF - RG n°12-23-000352
Nature de la décision : réputé contradictoire
NOUS, Françoise BARUTEL, Conseillère, agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assisté de Emilie POMPON, Greffière.
Vu l'assignation en référé :
DEMANDEUR
Madame [G] [T]
née le 18 août 1977 à [Localité 5]
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Abderamane DEMMANE, avocat au barreau de PARIS, toque : D0461,
ayant pour avocat plaidant Me Jean-Philippe IMMARIGEON, avocat au barreau de PARIS, toque : E1611
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro C75056-2024-010754 du 31/05/2024 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)
à
DEFENDEUR
SADEV 94, Société d'économie Mixte, immatriculée au RCS de Créteil sous le numéro B 341 214 971,
[Adresse 2]
[Localité 3]
non représentée, assignée à personne morale le 9 août 2024
Et après avoir appelé les parties lors des débats de l'audience publique du 26 Août 2024 :
Par ordonnance de référé du 25 mars 2024, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Villejuif a notamment :
- Constaté que Mme [G] [T] occupe sans droit ni titre les locaux à usage d'habitation situés [Adresse 1] à [Localité 4] ainsi que le cas échéant tous les lieux accessoires au logement ;
- Ordonné à Mme [G] [T] de libérer de sa personne, de ses biens ainsi que de tous occupants de son chef les lieux situés [Adresse 1] à [Localité 4] ainsi que le cas échéant tous les lieux accessoires au logement ;
- Octroyé à Mme [G] [T] un délai pour quitter les lieux jusqu'au 31 août 2024 ;
- Ordonné faute de libération volontaire le 1er septembre 2024 l'expulsion de Mme [G] [T] ainsi que tous occupants de son chef, si besoin est avec le concours d'un serrurier et de la force publique,
- Condamné Mme [G] [T] à payer à la Sadev 94 la somme de 200 euros à titre d'indemnité d'occupation jusqu'à libération des lieux ;
- Condamné Mme [G] [T] aux dépens ;
- Débouté Mme [G] [T] et la Sadev 94 de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Rappelé que la décision est assortie de plein droit de l'exécution provisoire.
Mme [G] [T] a interjeté appel de cette ordonnance.
Par acte du 9 août 2024, Mme [G] [T] a fait assigner devant le premier président de la cour d'appel de Paris la société Sadev 94 aux fins d'obtenir, au visa de l'article 514-3 du code de procédure civile, l'arrêt de l'exécution provisoire de l'ordonnance du 25 mars 2024 et de lui donner acte de ce qu'elle continuera à régler une indemnité d'occupation de 200 euros.
Se référant à ses écritures déposées et développées à l'audience, elle reprend ses demandes.
La société Sadev 94, qui a été régulièrement assignée par procès-verbal de remise à personne morale, n'est pas représentée.
SUR CE,
Il résulte de l'article 514-3 du code de procédure civile qu'en cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives. Ces deux conditions sont cumulatives.
La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d'observations sur l'exécution provisoire n'est recevable que si, outre l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation, l'exécution provisoire risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.
Le moyen sérieux de réformation est celui qui présente des chances raisonnables de succès, sans qu'il appartienne au premier président de se livrer à un examen approfondi de l'ensemble des moyens et arguments avancés par les parties et soumis à l'examen, au fond, de la cour d'appel.
Au soutien de l'existence de moyens sérieux de réformation, Mme [T] prétend qu'elle n'avait pas connaissance de sa situation d'occupante sans droit ni titre en ce qu'elle était couverte par le bail souscrit par M. [U] lequel avait mis à sa disposition le bien ; que l'échange de projets de convention d'occupation précaire avant l'introduction du contentieux ne saurait valoir reconnaissance de sa situation d'occupation ; qu'elle n'a pas refusé le principe d'une régularisation mais a demandé de revoir certaines clause exorbitantes ; que c'est avec l'assentiment de la Sadev 94 qu'elle est restée dans les lieux ; que la mesure d'expulsion n'était pas la seule mesure permettant au propriétaire de recouvrer la plénitude de ses droits alors que les parties étaient sur le point de régulariser une convention d'occupation précaire en attendant son relogement ; que ces contestations échappent à la compétence du juge des référés ; que seul le juge du fond est compétent pour opérer un contrôle de proportionnalité entre le droit de propriété et le droit au logement ; que le juge ne pouvait statuer en référé ; que la Sadev ne justifie pas d'un trouble manifestement illicite ni d'aucune urgence.
Il résulte du jugement et des pièces du dossier que Mme [T] ne justifie ni ne prétend avoir été titulaire d'un bail relatif au bien litigieux, dont elle reconnaît avoir pris possession du fait d'une mise à disposition de M. [U], et pour lequel elle a été destinataire de plusieurs projets de convention d'occupation précaire que la Sadev 94 lui a proposé de signer, les parties ayant échangé des mails en 2022 au sujet desdites conventions, un mail du 17 octobre 2022 du responsable d'opérations de la Sadev indiquant à Mme [T] « Je comprends vos inquiétudes mais sachez que votre situation actuelle (sans droit ni titre) est encore plus précaire puisque rien n'encadre légalement votre occupation du bien. Par ailleurs lorsque nous avons pris attache auprès de la ville pour faire avancer votre dossier, il nous a été précisé que la signature d'un contrat d'occupation précaire pourrait permettre de renforcer votre dossier de demande d'un logement social. »
Le moyen, selon lequel la contestation sérieuse de Mme [T] relative au fait qu'elle aurait été « couverte par le bail souscrit par M. [U] », ne relevait pas de la compétence du juge des référés, n'est pas un moyen sérieux de réformation ou d'annulation puisqu'aux termes de l'article 835 alinéa 1 du code de procédure civile, sur le fondement duquel l'action a été engagée, le juge du contentieux de la protection, statuant en référé, peut toujours, « même en présence d'une contestation sérieuse », prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, pour faire cesser un trouble manifestement illicite. En outre, la circonstance que la Sadev 94 a proposé à Mme [T] en 2022 de conclure une convention d'occupation précaire relativement au bien litigieux, qui n'a finalement pas été conclue entre les parties, ce qui n'est pas contesté, et que des échanges aient été prétendument en cours entre les parties au moment de l'assignation introductive en juin 2023, ce qui n'est pas avéré, ne suffit pas à caractériser un moyen sérieux de contestation du trouble manifestement illicite occasionné par l'occupation sans droit ni titre du bien litigieux par Mme [T].
Mme [T] ne justifiant pas de moyens sérieux de réformation ou d'annulation de la décision, sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire sera rejetée, sans qu'il y ait lieu d'examiner les conséquences manifestement excessives de l'exécution de la décision, les deux conditions étant cumulatives.
PAR CES MOTIFS
Rejetons la demande d'arrêt de l'exécution provisoire attachée à l'ordonnance de référé du 25 mars 2024 du juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Villejuif,
Condamnons Mme [G] [T] aux dépens de ce référé, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de la loi sur l'aide juridictionnelle.
ORDONNANCE rendue par Mme Françoise BARUTEL, Conseillère, assistée de Mme Emilie POMPON, greffière présente lors de la mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
La Greffière, La Conseillère