Copies exécutoires République française
délivrées aux parties le : Au nom du peuple français
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 5
ORDONNANCE DU 23 AOUT 2024
(n° , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/13083 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CJY5S
Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Juin 2024 Tribunal de Commerce de CRETEIL - RG n° 2024P00693
Nature de la décision : Contradictoire
NOUS, Florence PAPIN, Présidente de chambre, agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assistée de Sonia DAIRAIN, Greffière.
Vu l'assignation en référé délivrée à la requête de :
DEMANDERESSE
S.A.R.L. MATIRI
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Moussa Issa TRAORE de l'AARPI NOVEMBER AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : E0638, substitué par Me Mohamadou DIANCOUMBA, toque : D1426
Ã
DEFENDEUR
S.E.L.A.R.L. JSA, mandataire liquidateur
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Valerie DUTREUILH, avocat au barreau de PARIS, toque : C0479, substituée par Me CANTEGREIL, toque : B242
En présence du MINSTERE PUBLIC.
Et après avoir appelé les parties lors des débats de l'audience publique du 19 Août 2024 :
Par jugement revêtu de l'exécution provisoire en date du 19 juin 2024, le tribunal de commerce de Créteil, sur saisine du ministère public, a notamment :
-constaté l'état de cessation des paiements,
-ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la SARL Matiri,
-fixé provisoirement au 19 décembre 2022 la date de cessation des paiements, désigné Monsieur [F] [D], juge commissaire et la SELARL JSA, liquidateur.
Il s'est fondé sur le résultat de l'exercice 2022 net négatif, sur le passif exigible estimé à 60.988 euros et mentionne la carence du dirigeant qui ne s'est pas présenté aux convocations du juge de la prévention, ni de la chambre du conseil.
Par déclaration en date du 27 juin 2024, la SARL Matiri a interjeté appel de cette décision.
Par assignation en référé en date du 30 juillet 2024, la SARL Matiri demande à Monsieur le premier président de la cour d'appel de Paris bien vouloir surseoir à l'exécution du jugement sus visé sur le fondement des articles R.661-1 et 661-6 du code du commerce.
Aux termes de ses conclusions remises à l'audience du 19 août 2024, soutenues oralement, elle fait valoir notamment ne pas être en état de cessation des paiements, avoir émis 54 factures pour un chiffre d'affaires de 302.988 euros au mois de juin 2024, avoir depuis le mois de mars un solde de compte bancaire positif et s'acquitter des salaires de ses 5 chauffeurs poids lourds salariés à temps plein.
Elle précise que l'exercice 2022 est le seul exercice négatif de la société depuis sa création en 2012 et explique cette situation par la hausse des carburants, des impayés clients dans un contexte post-covid et une dette fiscale entièrement soldée en 2022.
Elle expose que sa créance à l'encontre du trésor public était en phase d'être purgée ayant bénéficié d'un accord de paiement avec remises gracieuses lors du prononcé de la liquidation judiciaire qui a eu pour conséquence de bloquer son compte bancaire. Elle ajoute avoir payé depuis sur ses fonds propres sa dette fiscale le 15 août 2024. Elle respectait aussi, selon elle, lors du prononcé de la liquidation son échéancier auprès de l'URSSAF.
Son gérant explique son absence aux convocations par le non retrait des lettres recommandées.
Le liquidateur, la SELARL JSA, par conclusions notifiées le 8 août 2024, remises à l'audience, et soutenues oralement, sollicite le rejet de la demande de sursis et de l'ensemble des demandes de la société Matiri dont il demande la condamnation à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Il s'appuie sur l'existence de capitaux propres négatifs au 31 décembre 2022, l'inexécution du moratoire accordé par le trésor public, et le non respect de l'échéancier de l'URSSAF.
Il ajoute que les créances salariales ont fait l'objet d'une demande de prise en charge par l'AGS et que son compte courant était débiteur à l'ouverture de la procédure pour un montant de 13.505,56 euros.
Le ministère public a eu communication de la procédure qu'il a visée en signant sur la côte du dossier.
Motifs :
Il résulte de l'article R.661-1 du code de commerce que :
Les jugements et ordonnances rendus en matière de mandat ad hoc, de conciliation, de sauvegarde, de redressement judiciaire, de rétablissement professionnel et de liquidation judiciaire sont exécutoires de plein droit à titre provisoire.
Toutefois, ne sont pas exécutoires de plein droit à titre provisoire les jugements et ordonnances rendus en application des articles L. 622-8, L. 626-22, du premier alinéa de l'article L. 642-20-1, de l'article L. 651-2, des articles L. 663-1 à L. 663-4 ainsi que les décisions prises sur le fondement de l'article L. 663-1-1 et les jugements qui prononcent la faillite personnelle ou l'interdiction prévue à l'article L. 653-8.
Les dispositions des articles 514-1 et 514-2 du code de procédure civile ne sont pas applicables.
Par dérogation aux dispositions de l'article 514-3 du code de procédure civile, le premier président de la cour d'appel, statuant en référé, ne peut arrêter l'exécution provisoire des décisions mentionnées aux deux premiers alinéas du présent article que lorsque les moyens à l'appui de l'appel paraissent sérieux.
L'exécution provisoire des décisions prises sur le fondement de l'article L. 663-1-1 peut être arrêtée, en outre, lorsque l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives. Dès le prononcé de la décision du premier président arrêtant l'exécution provisoire, le greffier de la cour d'appel en informe le greffier du tribunal.
Il convient donc d'examiner si les moyens au soutien de l'appel paraissent sérieux ( Les dispositions de l'article L. 663-1-1 relatives à l'autorisation de cession de biens dont la conservation ou la détention génère des frais ou qui sont susceptibles de dépérissement n'étant pas concernées en l'espèce).
Il résulte du rapport sur la liquidation judiciaire du mandataire JSA en date du 31 juillet 2024 que:
-des créances salariales ont fait l'objet d'une prise en charge par l'AGS à hauteur de 7.830,82 euros,
-le passif déclaré provisoire s'élève à 149.799,26 euros composé principalement de créances de l'URSSAF, de la BRED ( compte bancaire négatif au jour de l'ouverture), et de l'AGIRC ARCRCO,
-depuis lors la banque a enregistré des encaissements permettant un reversement d'un solde disponible de 28 K à la procédure,
-les capitaux propres sont négatifs en 2022 ; l'obligation prévue visée aux articles L223-42 et R 223-36 du code de commerce n'a pas été respectée,
-les comptes 2023 n'ont pas été encore déposés.
Il y a cessation des paiements si le débiteur est dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec l'actif disponible.
Si la société Matiri justifie que sa dette auprès du trésor public pour 2022 est apurée au vu de sa pièce 18 et si les amendes semblent avoir été réglées par un virement du 15 août 2024 à hauteur de 4.403 euros, sa dette auprès de l'URSSAF s'élève à 117.129,90 euros.
Un échéancier avait été accordé le 22 septembre 2023, et il résulte de la pièce 16 de la société Matiri qu'il n'a pas été respecté en mai 2024 le titre de paiement ayant été rejeté par la banque sans qu'il soit justifié comme il est allégué que ce rejet résulte de la clôture des comptes de la société suite à la liquidation judiciaire ouverte postérieurement par jugement en date du 19 juin 2024, affirmer n'étant pas prouvé.
Il résulte du rapport du mandataire judiciaire que les capitaux propres étaient négatifs en 2022 (-147 786 euros) notamment en raison de charges d'exploitation et il n'est pas justifié, à défaut de dépôt des comptes 2023, de leur reconstitution ni du respect des dispositions des articles L223-42 et R 223-36 du code de commerce.
Les comptes 2023 devaient être déposés avant le 30 juin 2024 au plus tard.
Aucun dépôt n'est intervenu à ce jour et le mandataire liquidateur déplore que les balances et grands livres 2023 et 2024 ne lui aient toujours pas été communiqués.
Cette absence de pièce comptable encore à hauteur de cour (la pièce 12/2 intitulée 'tableau du chiffre d'affaires au titre de 2023" non signée et ne faisant pas état des charges étant insuffisante, de même que les factures produites pour 2024 dont il n'est justifié de l'acquittement par les clients) ne permet pas d'apprécier si les comptes de la société se sont rétablis en 2023 et si la situation s'est maintenue en 2024.
A défaut d'éléments suffisants produits par elle, la société Matiri, qui mentionne avoir 5 salariés dont elle doit s'acquitter des salaires et des charges, ne rapporte pas la preuve qu'elle est en mesure de faire face avec son actif disponible au passif exigible.
Dès lors il n'apparaît pas que les moyens au soutien de l'appel soient suffisamment sérieux et de nature à conduire à surseoir à l'exécution du jugement du 19 juin 2024 du tribunal judiciaire de Créteil.
La société Matiri est déboutée de sa demande et condamnée aux dépens.
Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la SELARL JSA.
PAR CES MOTIFS,
DÉBOUTONS la société Matiri de sa demande de sursis à l'exécution du jugement en date du 19 juin 2024 du tribunal de commerce de Créteil,
CONDAMNONS la société Matiri aux dépens de l'instance,
DÉBOUTONS la SELARL JSA de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
ORDONNANCE rendue par Mme Florence PAPIN, Présidente de chambre, assistée de Mme Sonia DAIRAIN, greffière lors de la mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
La Greffière, La Présidente.